lundi 30 mars 2020 - par Mohamed Belaali

La bourgeoisie en temps de Coronavirus

La pandémie du Coronavirus nous offre paradoxalement des moments privilégiés pour réfléchir et tirer des leçons de cette situation inédite. Elle nous permet de voir, avec peut-être plus de lucidité, comment se comporte la classe dirigeante et de quelle manière elle tente de masquer sa propre responsabilité et duper les autres classes sociales. Chaque semaine qui passe, on apprend davantage non seulement sur les fins poursuivies par le pouvoir, mais aussi sur ses manœuvres, son cynisme et son hypocrisie qui risquent d'exposer la vie des milliers d'hommes et de femmes au danger de la mort. Car la crise économique qui se profile, c'est-à-dire les intérêts d'une minorité d'exploiteurs, le préoccupe davantage que la pandémie qui a déjà emporté des centaines et des centaines de vies humaines. Cette crise révèle ainsi au grand jour, plus encore qu'en temps ordinaire, les agissements criminels d'une classe sociale dont le profit de quelques uns passe avant la santé et la vie de l'immense majorité de la population. Il ne fait aucun doute que cette minorité d'exploiteurs capitalistes va utiliser tous les procédés, dont cette propagande chauvine qu'est « l'union sacrée », pour mystifier les classes populaires et étouffer toute critique et toute velléité de résistance et de révolte.

 

Que constatons-nous ?

En apparence et en apparence seulement, Macron et son gouvernement sont en guerre contre cette pandémie : « Nous sommes en guerre, en guerre sanitaire, certes : nous ne luttons ni contre une armée, ni contre une autre Nation. Mais l'ennemi est là, invisible, insaisissable, qui progresse. Et cela requiert notre mobilisation générale. » (1)

Or non seulement cette « guerre » a été enclenchée trop tard, mais surtout le pouvoir n'a fourni aucune arme à l'hôpital public, abandonné à son triste sort par des années d'austérité, pour faire face à cette pandémie (2). Une drôle de guerre où les soldats (personnels soignants) ne possèdent ni le nombre de lits, ni respirateurs, ni masques, ni tests de dépistage, ni gel désinfectant... en quantité suffisante. Et maintenant ce sont les médicaments, indispensables pour lutter contre le Covid-19, qui manquent aux hôpitaux notamment en Île-de-France : « les hôpitaux civils n’ont qu’une semaine d’approvisionnement, tandis que les hôpitaux militaires n’ont plus que 2,5 jours de stock, contre quinze jours en temps normal » selon le ministère de l'intérieur. Et pour les responsables de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) comme Martin Hirsch « les stocks sont très courts sur certains médicaments » (3).

Macron et son gouvernement, jusqu'à présent, se sont murés dans un silence criminel face aux pathétiques appels à l'aide lancés par le personnel hospitalier (4).

En fait cette rhétorique guerrière avait davantage pour but de gérer les conséquences économiques de la pandémie que de sauver des vies humaines. Dit autrement, la ritournelle « nous sommes en guerre » est convoquée ici plutôt à des fins économiques et politiques que sanitaires. Car l'hôpital public, seul capable de sauver des vies humaines, attend toujours les moyens pour faire face à ce terrible virus, alors que les entreprises, elles, bénéficient déjà du soutien et de l'aide de l’État (5).

Ainsi pour sauver les entreprises et les patrons, le gouvernement n'hésite devant aucun moyen et va jusqu'à parler de nationalisations (6). Nationaliser ici, signifie donner de l'argent public, celui des contribuables notamment des plus démunis d'entre eux, aux entreprises et aux banques privées comme en 2008 pour leur éviter de tomber en faillite. Mais dès que la situation de ces sociétés s'améliore, L’État les livre à nouveau aux actionnaires. On socialise les pertes et on privatise les profits ! (7).

 

Si guerre il y a, elle n'est en tout cas pas menée réellement contre le Coronavirus, mais plutôt contre, indirectement tout du moins, tout le personnel soignant et tous les prolétaires (les éboueurs, les femmes de ménage, les caissières, les routiers, les cheminots, les conducteurs de bus, les employés des pompes funèbres, les livreurs etc.etc.) qui sont sur tous les fronts au détriment de leur propre vie car ils n'ont pas le choix. Certaines grandes entreprises comme Amazone poursuivent leur business en pleine période de confinement sans tenir compte de la santé de leurs salariés. En ces temps de Coronavirus, les affaires doivent, vaille que vaille, se poursuivre (8).

 

Incapable de faire face à cette terrible pandémie, la bourgeoisie instrumentalise, comme à chaque crise, l'arme de « l'union sacrée » : « Le temps est à cette union sacrée (…) La France unie, c’est notre meilleur atout dans la période troublée que nous traversons. Nous tiendrons tous ensemble. » disait Macron (9). Belle manière pour faire oublier la guerre sans trêve qu'il menait hier encore contre toutes les avancées sociales, petites et grandes arrachées de hautes luttes par des générations successives (10).

 

Autant la bourgeoisie, en ces temps de Coronavirus, est prompte à sauver ses entreprises afin qu'elles puissent continuer à réaliser des bénéfices qui seront partagés entre une minorité de possédants, autant elle est hésitante et lente à réagir pour sauver des vies humaines. Car son système, le capitalisme, ne connaît que la course effrénée au profit détruisant et écrasant ainsi sur son passage toutes les valeurs humaines transformées en simple valeur d'échange.

Contre l'égoïsme, l'individualisme et le chauvinisme de la bourgeoisie, brandissons la solidarité, la coopération et le combat planétaire des peuples, non seulement contre le Coronavirus qui détruit chaque jour des vies humaines, mais aussi et surtout contre le véritable virus, celui qui menace l'existence même des hommes et de la nature, le capitalisme.

 

Mohamed Belaali

 

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(1)https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2020/03/16/adresse-aux-francais-covid19

(2)Le pouvoir savait pertinemment que le virus faisait ravage en Chine dès fin décembre 1919, début janvier 2020 et un peu plus tard en Italie.Voir également les déclarations de l'ex-ministre de la santé d'Agnès Buzyn :

https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/03/17/entre-campagne-municipale-et-crise-du-coronavirus-le-chemin-de-croix-d-agnes-buzyn_6033395_823448.html

(3)https://www.mediapart.fr/journal/france/270320/medicaments-pour-soigner-le-covid-19-des-hopitaux-au-bord-de-la-penurie

(4) voir entre autres :

https://www.ouest-france.fr/sante/hopital/video-emmanuel-macron-interpelle-par-un-neurologue-est-au-bout-vous-n-etes-pas-la-6755646 .

(5)https://www.frenchtechbordeaux.com/covid-19-toutes-les-mesures-daides-aux-entreprises-en-un-article/

(6)https://www.franceculture.fr/economie/covid-19-le-gouvernement-pret-a-nationaliser-des-entreprises-en-difficulte-un-changement-de-doctrine

http://www.belaali.com/2020/03/l-etat-au-chevet-du-liberalisme.html

(7)Sur la crise financière de 2008 et le rôle de l'Etat, voir,entre autres, le travail André G. Delion https://www.cairn.info/revue-francaise-d-administration-publique-2008-4-page-799.htm )

(8)https://www.huffingtonpost.fr/entry/coronavirus-amazon-poursuit-son-activite-malgre-linquietude-des-salaries_fr_5e7b7707c5b6b7d809598323

(9)https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2020/03/12/adresse-aux-francais

(10)http://www.belaali.com/2020/01/macron-ou-le-mepris-du-peuple.html

 



6 réactions


  • Clark Kent Séraphin Lampion 30 mars 2020 11:02

    « ... les agissements criminels d’une classe sociale dont le profit de quelques uns passe avant la santé et la vie de l’immense majorité de la population.  »

    et même la santé et la vie de leurs proches !

    tout se passe comme dans la fourmilière où l’individu ne compte pas (même quand son ego s’hypertrophie). Dans la fourmilière, on est ouvrière, soldat ou « reine » (mot qui désigne l’esclave chargée de la reproduction), dans l’espèce humaine, on fait partie d’une classe sociale (dont il est difficile mais pas impossible de sortir en fonction des événements). De toutes façons, l’individu est soumis à sa catégorie dont la stratégie peut passer pas le sacrifice des uns ou des autres.


  • Spartacus Lequidam Spartacus 30 mars 2020 14:12

    Cette farce de larmoyante permanente des gauchistes du secteur public a réclamerv des moyens alors que c’est une gabegie sans nom.

    200 milliards et les zozos Viennent pleurnicher ? 

    La vérité est que les gauchistes en surnombre ont engendré une bureaucratie à l’hôpital public qui tue les gens.

    La vérité est que le service public est merdique...

    Il faut privatiser tous les hôpitaux public pour ne plus voir une telle chienlit et virer les gauchistes qui phagocytent la santé.

    Le constat est là ! Une incapacité sans nom a se prendre en charge, incapacité a assumer son échec immonde.


  • eddofr eddofr 30 mars 2020 16:23

    Bonjour,

    Si le gouvernement était aussi cynique que vous le déclarez, ils n’auraient certainement pas instauré ce confinement qui paralyse et ruine notre économie.

    Si le gouvernement était aussi cynique, ils auraient simplement minimisé l’impact de l"épidémie et relativisé le nombre de victimes.

    Ce gouvernement est bête et méchant ... et certainement bien plus bête que méchant.


    • zygzornifle zygzornifle 31 mars 2020 10:18

      @eddofr

       pas instauré ce confinement qui paralyse et ruine notre économie.

      il est vrai que le confinement est un plus rapide que Macron pour ruiner l’économie


  • zygzornifle zygzornifle 31 mars 2020 10:17

    De Rugy élève ses homards dans sa baignoire pour éviter toute contamination ....


  • Franchounet 31 mars 2020 12:58

    Marine Le Pen n’aurait pas écrit un article aussi minable


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