Le monde arabe, les guerres au Moyen-Orient et leur contribution au progrès du monde ? Le prix du pétrole à 200 dollars à un proche avenir ?
Dans une revue française « Politique étrangère », la « Stratégie américaine et Stratégie soviétique en Extrême-Orient », en 1951, le général français Jean Marchand donne une analyse très édifiante sur la situation d’après-guerre. « L'Extrême-Orient est, actuellement, la zone la plus « névralgique » de l'univers. Les États-Unis d'Amérique et l'Union des Républiques soviétiques s'y trouvent en contact. Dans l’Extrême Nord, ils s'accrochent au pont aéronaval du détroit de Bering et semblent se mesurer dans un tête-à-tête menaçant ; au Centre et au Sud, ils sont séparés par l'immensité de l'océan, mais la frontière du littoral, reportée par les Américains de Californie à la rive opposée du Pacifique, court d'îles en îles, le long du continent asiatique – de la façade russe.
Les deux blocs y sont aux prises dans une guerre froide, comme en Europe ; mais, de plus, engagés dans une lutte péninsulaire dont l'enjeu pour les Occidentaux est représenté par la conservation des têtes de pont établies au flanc de la Chine ; et, pour les Soviétiques, par la prise de bases de départ vers le Japon ou le Sud-Est asiatique, nouvelles étapes vers l'hégémonie mondiale.
Dans le camp occidental, près d'un million d'hommes participent à cette lutte ou occupent, pour faire face éventuellement à un conflit généralisé, des positions de repli ou de départ échelonnées dans le Pacifique. De leur côté, les Russes, les Chinois et leurs satellites mettent en jeu une masse considérable, supérieure à deux millions de combattants, répartis sur les théâtres d'opérations actifs et les aires de défense.
Les Anglo-Saxons restent, en outre, menacés par la volonté d'expansion d'une humanité jaune très prolifique qui, depuis un demi-siècle, préoccupe les peuples de race blanche établis en bordure de l'océan Pacifique. Mais les Anglo-Saxons demeurent, à des degrés divers, intéressés à l'important marché économique de cette humanité. »
- L’Union soviétique et la Chine, contrepoids à l’Occident dominateur et principaux soutiens à la libération des peuples colonisés
Ce que développe le général français Jean Marchand, des stratégies du bloc occidental et du bloc communiste, la situation montre que la situation, à l’époque, n’était pas seulement tendue, ou extrêmement dangereuse, c’était plus une question de survie pour chaque système politique, et donc l’ossature de chaque bloc. Ce n’est pas seulement une méfiance qui s’est s’instaurée à la fin de la guerre, en 1945, entre les deux grandes puissances, les États-Unis et l’URSS sorties victorieuses de la guerre, mais la situation conflictuelle générée par l’essence inconciliable même du capitalisme avec le communisme. Ce qui fait que chaque puissance cherche par tous les moyens à détruire l’autre. Il était clair que les deux systèmes ne pouvaient coexister, puisque chacun constituait un danger latent pour l’autre.
Cependant, dans cet affrontement avec les États-Unis, les Soviétiques étaient assurés qu’ils se trouvaient dans la bonne cause. Pour eux, le communisme était la bonne réponse pour les peuples, pour libérer les peuples de la domination occidentale. Alors que le système capitaliste visait, le capital financier mondial aidant, à dominer le monde. En clair, l’impérialisme financier devenait un substitut à la colonisation, et le phénomène de la finance mondiale dominée par l’Occident est une réalité aujourd’hui.
Les ex-pays colonisés sont certes indépendants, mais tous sont assujettis aux grands pays occidentaux, par le capital. Ils sont tous dépendants du dollar, de l’euro, de la livre sterling, du yen japonais. Pour peu que leurs réserves de change fondent en ces monnaies, et c’est la crise, les émeutes du pain, ces pays sont asphyxiés et viennent ensuite les institutions internationales, le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale (BM), dépêchées par les grandes puissances occidentales. L’essentiel des fonds de ces institutions financières internationales sont constituées de fonds, de capitaux que les Banques centrales des États-Unis, de l’Europe monétaire (zone euro), du Royaume-Uni et du Japon qui ne tient qu’à eux de créer. Ces grandes Banques centrales constituent un consortium financier mondial.
L’avènement de la Banque de Chine dans ce consortium n’est pas de bon augure pour les pays occidentaux. Le yuan chinois en tant que monnaie de réserve dans le DTS (droits de tirage spéciaux), une monnaie internationale qu’utilise le FMI, vient partager avec l’Occident le « droit de seigneuriage » sur le reste des pays du monde. Et l’aide qu’octroie l’Occident aux pays du reste du monde en difficultés financières et économiques n’était en fait que pour les ferrer plus dans le système financier occidental, les rendant encore plus fragilisés, plus dépendants de l’Occident.
Donc, au sortir de la guerre en 1945, la complexité de la situation était telle que l’affrontement Est-Ouest avait tout son sens. Et l’Union soviétique et la Chine constituait un contrepoids naturel à l’impérialisme occidental. Cependant cette guerre froide n’augurait rien de bon pour l’humanité si cette guerre venait à durer. Le général français Jean Marchand donne des précisions de grande importance sur la situation qui prévalait à l’époque.
« Les États-Unis ont, en dépit de leur libéralisme et du concours apporté aux peuples « dépendants » lors de leur tentative de libération, encouru de la part des Asiatiques les mêmes réprobations que les Européens. Les haines provoquées par le régime colonial ou par le système d'exploitation économique trouvent, maintenant, d'autres raisons de s'exprimer. La rémanence de l'activité des Américains en Chine, leur entreprise en Corée, l'aide qu'ils consentent aux nationalistes de Formose et le droit qu'ils se sont arrogé de prendre en tutelle les îles Ryou-Kyou et Bonin soulèvent de nouveaux ressentiments. Et cette animosité est exploitée par une propagande passionnelle, frénétique, qui dénonce les éternels « fauteurs de guerre » et les « impérialistes colonialistes ». [...]
La possession de la bombe atomique par les Russes, confirmée récemment par Staline, a modifié les données du problème. La menace a pris un caractère de réciprocité, mais joue en faveur des Américains, qui disposent d'une double supériorité quant au nombre de bombes en réserve et à la puissance des moyens aériens prévus pour leur transport (le bombardier B-36 américain transporte 15 tonnes de bombes à 8 000 kilomètres, tandis que le bombardier TU-4, analogue au B-29, en service dans l'aviation soviétique, transporte seulement 9 tonnes à 2 100 kilomètres). Cette supériorité est temporaire, la marge entre les réserves détenues par les deux
opposants peut diminuer progressivement ; d'autre part, il n'est pas impossible que les Russes parviennent à combler dans le domaine de l'aviation de bombardement leur retard, si ce n'est chose faite, « s'il est prouvé », comme l'affirme le général Vandenberg, chef d'état-major des forces aériennes des États-Unis, « que les Russes possèdent une industrie en plein essor et en pleine activité et qu'ils soient, au point de vue technique, au même niveau que nous ». Il est donc prudent de ne pas sous-estimer les possibilités de l'aviation stratégique. D'autre part, le territoire des États-Unis, avec ses centres vitaux très resserrés et ses populations peu préparées à subir les effets atomiques (elles n'ont jamais vécu dans la crainte d'une menace directe) » est plus sensible que celui de l'U.'R. S. S.
Dans ces conditions, la menace réciproque peut s'équilibrer et imposer la neutralisation de l'arme atomique. De toute façon, elle n'est plus considérée comme un moyen suffisant pour faire échec à la stratégie soviétique. [...]
L'atout chinois. La Chine est le facteur essentiel de la stratégie soviétique. Elle a apporté au communisme des gains territoriaux et humains considérables. Sa puissance intérieure s'est consolidée si l'on en juge par la disparition sur son sol des résistances nationalistes, exception faite pour quelques îlots en bordure de ses frontières Sud, et par la rigueur scrupuleuse de son administration. Elle bénéficie à l'extérieur des sympathies agissantes que lui valent la nature de pays asiatique et le succès de sa révolution, et c'est vers elle que se tournent les espoirs des jeunes États de l'Asie. Ayant par conscience de son rayonnement historique, elle est en mesure de reprendre la politique agressive et de débordement qu'elle a toujours mise en pratique dans les périodes de puissance. Elle se trouve d'ailleurs engagée, sur une large échelle, dans une intervention indirecte, sous la forme d'une aide matérielle et morale aux mouvements de résistance de Birmanie, de Malaisie et d'Indochine. Elle peut donc à tous moments passer à l'intervention directe et d'autant plus facilement qu'elle dispose, face au Sud-Est asiatique, de forces importantes (environ 250 000 hommes), dont l'entrée en jeu modifierait l'équilibre établi ; de plus, elle recevrait l'appui de ses colonies, fortes de douze millions d'âmes, qui, à l'annonce d'un succès hors des frontières, se fondraient dans les mouvements de dissidence et de guérilla. [...]
Les deux stratégies, américaine et soviétique, se sont engagées sur une même voie détournée et semblent, du moins pour le moment, écarter le recours à un conflit généralisé. Elles entretiennent sur le front de l'Asie une guerre limitée, profitable aux Russes, qui ménage leurs forces en retenant loin de leurs bases une partie de celles des Américains, mais qui impose à leurs satellites de lourds sacrifices hors de proportions avec les résultats attendus.
Dans ces conditions, il n'est pas exclu que les Soviets ne tentent, en faisant état d'une situation militaire encore favorable, d'établir une pause qui leur permettrait d'exploiter les possibilités offertes par la guerre froide, par les crises sociales pouvant résulter du réarmement du monde libre, par les fissures qui viennent de se produire dans le bloc occidental à propos du Moyen-Orient et du nationalisme arabe. »
Que peut-on dire de la situation de guerre froide qui prévalait dans les années 1950 et 1960 ? Il y avait une situation de blocage entre les deux Grands, le monde bipolaire faisait que l’humanité était prise en otage par ces deux grandes puissances. Il est clair que cette situation appelait son dépassement, donc une issue à cet affrontement qui, au fond, n’avait qu’un seul sens, servir de contrepoids à l’Occident dominateur et permettre aux autres peuples de se libérer de la tutelle occidentale. Dès lors, historiquement parlant, le partage du monde était un passage obligé pour l’humanité. La fin des empires coloniaux, à la sortie de la deuxième guerre mondiale, et la bipolarisation du monde ont constitué une sorte de parapluie protecteur contre une hégémonie unilatérale occidentale. Précisément, l’URSS, et à sa suite, l’avènement de la république populaire de Chine ont été les principaux soutiens à la libération des peuples colonisés.
- Dans l’affrontement Est-Ouest, le monde arabe se transforme, par ses gisements de pétrole, en région la plus instable du monde
La problématique qui va se poser entres les puissances occidentales et les puissances adverses, c’est lorsque tous les peuples colonisés accèdent à leur indépendance. À la fin des années 1970, la plupart des ex-pays colonisés ont accédé à leur indépendance. En 1979, le monde est passé de 51 pays-membres fondateurs de l’Organisation des Nations-Unies, en 1945, à 152 membres en 1979. Il était évident que l’affrontement Est-Ouest devenait stérile du fait que la décolonisation s’est opéré selon un processus historique logique très parlant puisqu’il a commencé selon la chronologie historique :
- Première Guerre mondiale 19141918
- Crise économique de 1929. Cette crise a permis l’accession d’un homme qui va changer le cours de l’histoire. Grâce aux séquelles de la crise économique de 1929, le chômage ayant passé en Allemagne de 6 % en 1928 à 43,9 % en 1933, soit de 810 000 chômeurs en 1928 à 6 millions de chômeurs en Allemagne (2), Hitler a accédé au pouvoir. Il provoquera le deuxième conflit mondial.
- Deuxième Guerre mondiale 19391945
- Dans les années post1945, un monde bipolaire se met en place et accession à l’indépendance des peuples colonisés
Cette chronologie historique montre bien que toute l’histoire, en réalité, a été mue en vue d’un but, une finalité. Et celle-ci a trait au quatre-cinquièmes de l’humanité que représentent les peuples colonisés ou dominés, pratiquement tout le continent africain, le monde arabe, la plupart des pays d’Asie, dont l’Inde colonisée par le Royaume-Uni et la Chine dont la Mandchourie est sous protectorat du Japon, et les peuples d’Amérique latine non colonisés mais dominés.
Il est clair qu’il faut un autre acteur pour mettre fin au monde bipolaire. D’où viendra cet acteur ? Des grandes puissances ? Cela ne pourrait s’opérer puisqu’ils sont tous paralysés par les arsenaux nucléaires qu’ils détiennent. Et donc la guerre froide ne peut que se prolonger, et même si détente il y a, et celle-ci ne s’est imposée qu’à cause de la grave crise des missiles à Cuba, et une Troisième Guerre mondiale qui a été évitée de justesse. On peut penser ce qui aurait advenu du monde si les deux grandes puissances s’étaient affrontées avec des armes nucléaires. Pour cause, une autre crise a éclaté au début des années 1980 avec la crise des euromissiles.
Donc le monde bipolaire constituait un danger pour l’humanité. Et si cet acteur ne vient pas des puissances nucléaires, il viendra forcément du reste du monde. C’est-à-dire des ex-pays colonisés ou ex-pays dominés par la puissance occidentale. Précisément, le général Jean Marchand fait état de fissures dans son analyse. Il écrit : « Dans ces conditions, il n'est pas exclu que les Soviets ne tentent, en faisant état d'une situation militaire encore favorable, d'établir une pause qui leur permettrait d'exploiter les possibilités offertes par la guerre froide, par les crises sociales pouvant résulter du réarmement du monde libre, par les fissures qui viennent de se produire dans le bloc occidental à propos du Moyen-Orient et du nationalisme arabe. »
Effectivement, les Soviets, ayant préparé le terrain dans leur affrontement avec le bloc occidental, en aidant les pays sous tutelle occidentale à sortir de la décolonisation, ont provoqué ces fissures. C’est ainsi que deux poids et deux mesures ont joué dans le Moyen-Orient. Les positions des Occidentaux étaient partagées sur la politique israélienne menée dans le monde arabe, depuis la guerre israélo-arabe en 1948. 700 000 Palestiniens furent chassés de Palestine, et la spoliation de leurs terres par la force militaire israélienne avait le soutien total des États-Unis.
Quant à l’Union soviétique, dans son souci d’élargir le camp du bloc Est, elle a au contraire fortement contribué au soutien des pays dans leur lutte de libération de la colonisation. Après les indépendances de ces pays, elle s’est chargée de l’édification de leurs forces armées. C’est ainsi que les armements à destination de ces pays ont dopé l’industrie militaire soviétique, donc favorisé son commerce extérieur et, en même temps, les pays progressistes arabes qui édifient leurs forces armées viennent renforcer le camp du bloc Est.
Ni les États-Unis ni l’Union soviétique ne sauront ce qui va ressortir du monde arabe, et des conséquences politiques et géostratégiques liées à l’implantation de l’État d’Israël en Palestine. En effet, le monde arabe va devenir l’aire géopolitique la plus instable du monde. Pourquoi ? La raison est simple, c’est le plus grand réservoir énergétique du monde. Une grande part de la production pétrolière mondiale vient du monde arabe. D’autre part, depuis l’avènement des pétrodollars avec l’accord entre les États-Unis et l’Arabie saoudite, étendu par ce pays arabe allié au reste des pays arabes et aux pays du cartel pétrolier (OPEP), le dollar américain qui s’est libéré, en 1971, de l’étalon-or qu’impose le système de Bretton Woods (change fixe), et par ce libellé monétaire judicieux des transactions pétrolières arabes, est devenu de facto la « monnaie-centre » du système monétaire international.
On comprend dès lors que « toute puissance qui domine au triple plan économique, financier et monétaire cette région du monde domine le monde ». Sauf que cette région ne se domine pas facilement, elle a sa propre spécificité, sa propre culture, sa propre religion.
Et tout commence en 1945 avec le pacte du Quincy, du nom du croiseur USS Quincy (CA-71) et de la rencontre à bord de ce bâtiment, le 14 février 1945, du roi ibn Saoud, fondateur du royaume d'Arabie saoudite, et du président des États-Unis Franklin Roosevelt, de retour de la conférence de Yalta. Les États-Unis posaient déjà le nouvel ordre mondial. En juillet 1944, ils firent parapher par 44 nations alliées le système monétaire à Bretton Woods (États-Unis) qui va régir le système financier international. Le dollar devient après 1944 la seule monnaie convertible, au change fixe sur la base de 35 dollars l’once d’or. À Yalta, les États-Unis avec les pays alliés cherchaient à présenter un front uni face à l’Union soviétique, la défaite de l’Allemagne nazie étant très proche, ils voulaient conforter les bases d’un nouvel ordre mondial, au mieux avec leurs intérêts stratégiques.
- Le Chancelier d’Autriche, Bruno Kreisky, qui corrobore un fait historique métaphysique vrai
Le deuxième élément qui va changer le cours de l’histoire en devenant le premier facteur dans l’ébranlement des assises de l’Union soviétique puis son effacement de la scène de l’histoire, portera sur les guerres entre les pays arabes et Israël. En réalité, ce ne sera pas tant l’implantation de l’État d’Israël en Palestine, en 1948, qui sera le facteur déstabilisateur de la marche de l’histoire puisque la création d’Israël entrait comme une donnée historique intangible, attendue. Donc la création de l’État d’Israël devait survenir, et elle est survenue, et fait partie d’un processus naturel et nécessaire dans la dynamique de l’histoire.
Israël aurait pu ne pas exister si les conjonctures de l’histoire n’avaient pas été réunies pour la création d’un État Juif. Par exemple, si Hitler n’avait pas existé ou s’il n’avait pas pris le pouvoir en Allemagne, ou qu’il n’eut pas de crise économique de 1929 et donc pas d’explosion du chômage en Allemagne avec ses 6 millions de chômeurs, en 1933, en trois années. Et qu’il n’y eut pas de Deuxième Guerre mondiale. Il est évident que les Empires coloniaux européens seraient restés intacts, avec toute leur puissance militaire comme une épée de Damoclès sur les peuples colonisés. Non seulement « les Juifs seraient restés dans l’errance à travers monde qui a commencé il y a deux mille ans mais les pays arabes seraient restés sous tutelle coloniale. » En clair, la Première Guerre mondiale n’aurait été qu’un avatar, un accident de l’histoire qui n’aurait pas duré.
Sauf que l’histoire de l’humanité ne l’a pas entendue ainsi, elle était pour ainsi dire programmée pour avancer. Et « programmée » par qui ? Une question très intéressante, tout en étant humaine, cette question est métaphysique. Pourquoi « métaphysique » ? La réponse est celle-ci : « Ironie de l’histoire, la création de l’État d’Israël le doit à Hitler. L’homme qui fut le bourreau du peuple juif, qui a organisé la « solution finale de la question juive, ne savait pas qu’au fond, il n’était que l’instrument d’une histoire qui était déjà en marche, et par laquelle les humains n’ont fait que suivre ce qui devait s’accomplir. »
Évidemment, de telles affirmations peuvent être réfutées par ceux qui ne seront pas d’accord avec cette lecture de l’histoire, mais en quoi elles seraient réfutées si l’auteur en fait un rapprochement métaphysique. Et ce terme métaphysique relève de la sémantique humaine. À moins que l’auteur ne soit aliéné de par sa propre conscience. Écoutons une autre conscience ce qu’elle a à dire et qui dit pratiquement la même chose. Une interview du Chancelier d’Autriche, Bruno Kreisky, par Le Nouvel Observateur, publiée en 1981. À moins que le Chancelier d’Autriche soit lui aussi aliéné.
« N.O. – Mais dîtes donc, vous êtes un peu juif, vous aussi...
B. Ktreisky – Mes parents sont juifs, je ne suis pas religieux. Je suis marxiste.
N.O. – Ah, oui ! Il paraît qu’il est très pauvre
B. Kreisky –. Complètement faux. Il est plus âgé que moi, un peu fatigué. [...] Il reçoit trois pensions : une de l’État autrichien, l’autre d’Israël, la troisième de moi-même.
N.O. A part lui, vous avez d’autres proches en Israël ?
B. Kreisky – Oui, bien sûr. Un cousin, commandant dans l’armée. Dans le civil, il est responsable d’un grand port. D’autres sont dans l’agriculture. Un autre dans l’enseignement.
N. O. – Vous êtes juif comme eux.
B. Kreisky – Non, je suis autrichien ; ils sont israéliens. Cette blague du peuple est un des grands mensonges de la vie. Prenez les juifs russes, ils ne ressemblent pas aux autres. Ils ont mis dans le sionisme cette formidable énergie qu’ils ont aussi employée à faire naître le communisme. Ben Gourion aurait pu être un chef communiste.
N.O. – Et Kreisky un chef sioniste...
B. Kreisky – Non, puisque je vous dis que parler de peuple juif n’a pas de sens. Sans Hitler, Israël, comme pays, n’aurait jamais existé. Ç’aurait été une petite colonie en Palestine. Je ne veux pas qu’on m’oblige à être parent de tous les juifs du monde. Un capitaliste, c’est d’abord un capitaliste, je le combats. Un impérialiste juif qui opprime les Palestiniens est un impérialiste, je le combats aussi. Je n’ai rien de commun avec lui.
N.O. – Peut-être, mais, pour tout le monde, Kreisky est un juif.
B. Kreisky – Voilà encore une victoire posthume de Hitler, un effet de l’étoile jaune. On ne dit pas que les catholiques ou les protestants sont un peuple unique. Pourquoi les juifs ? [...]
B. Kreisky – Disraeli était anglais avant d’être juif. Moi, je suis autrichien et socialiste. [...]
N. O. – Des gens de votre famille sont morts dans les camps ?
B. Kreisky – Vingt-cinq personnes ou plus.
N.O. – Vous savez que, dans le monde, il y a deux chefs de gouvernement juifs : vous et Begin.
B. Kreisky – Le fondateur de notre parti, Otto Bauer, l’était aussi.
N.O. – Moi, j’ai l’impression que si vous n’étiez pas juif, l’Autriche n’aurait pas cette politique au Proche-Orient. Begin représente une tendance du monde juive, le nationalisme, et vous l’autre extrême : l’assimilation. Vous poursuivez avec lui un débat aussi ancien que le judaïsme.
B. Kreisky – Nous autres, socialistes, nous allons toujours au-delà de nos frontières. Olof Palme s’est intéressé au Viêtnam ; Willy Brandt, au dialogue Nord-Sud. Moi, c’est le monde arabe.
N.O. – Décidément, c’est vrai, Monsieur le Chancelier, vous n’avez pas l’esprit talmudique. » (3)
Il est clair que ce que dit le Chancelier d’Autriche, Bruno Kreisky, est tout à fait sensé. Sauf que ce sensé ne fait pas bon ménage avec la pensée de l’homme qui trouvera toujours à redire. Cependant comme ce qui n’est pas accepté sert aussi la vérité, la guerre sert aussi la paix. Par conséquent l’avènement d’Israël en Palestine comme les guerres israélo-arabes ont été une nécessité dans l’histoire. Ce sont ces guerres qui ont réveillé les peuples arabes de leur léthargie historique. La guerre israélo-arabe, en 1948, se solda par les défaites des armées arabes, et une forte population arabe palestinienne a fui ou chassée de ses territoires qui sont devenus l’État d’Israël.
- Des événements en cascade dans le monde arabe jusqu’au retournement géostratégique pour la première puissance du monde
La création de l’État d’Israël en Palestine marque un tournant majeur dans l’histoire du monde arabe. Des événements en cascade vont se produire dans le monde arabe. En Égypte, le Mouvement des officiers libres abolit la monarchie en juin 1953 et proclame la République. En Algérie, l’insurrection contre la France coloniale est déclenchée 1er novembre 1954.
En 1956, l’Égypte nationalise le canal de Suez. En riposte, la France, la Grande-Bretagne et Israël attaquent l’Égypte pour reconquérir le canal de Suez. L’expédition franco-anglo-israélienne tourne au désastre. L’URSS menace la France, le Royaume-Uni et Israël d’une riposte nucléaire. Si l’OTAN rappelle à l’URSS qu’il ripostera, les États-Unis ont compris qu’il était temps de désamorcer la crise et exigent le retrait des forces de leurs alliés. Sans le blanc-seing américain, la France comme l’Angleterre et Israël savaient que dans un monde bipolaire, ils ne constituaient plus une force militaire qui compte à l’échelle mondiale.
Et certainement l’expédition tripartite occidentale en 1956 avait le feu vert des États-Unis, ne serait-ce que pour tester la réaction du deuxième Grand, l’URSS. La réponse ne s’est pas fait attendre. La guerre de 1956 montre que les puissances européennes sont désormais arrimées militairement à la puissance américaine. Et que l’URSS, par ses arsenaux nucléaires, constituait une épée de Damoclès sur l’Europe, et sur l’Occident tout entier, et réciproquement.
En 1956, le Maroc et la Tunisie sortent du protectorat français et deviennent indépendants. En juillet 1958, la monarchie en Irak est abolie et la République est proclamée. Le 5 juillet 1962, l’Algérie devient indépendante après 8 ans de guerre, et 132 ans de présence coloniale française.
En 1967, la troisième guerre israélo-arabe s’est terminée par une défaite pour les armées arabes. Évidemment une défaite militaire est toujours une défaite, cependant ce qu’une défaite a de positif, c’est qu’elle éclaire que ce n’est pas qu’un petit pays comme Israël ait pu vaincre des armées de plusieurs pays arabes, mais simplement que, dans les guerres modernes, ce n’est pas le nombre des forces armées qui compte mais la tactique et les armements qui sont utilisés dans la guerre.
Pour ne donner que l’exemple de l’URSS qui a menacé la France, l’Angleterre et Israël, le fait simplement de dire qu’il va recourir à des missiles nucléaires sans besoin de déployer les unités de combats de l’armée rouge qui restent sages dans leurs casernes, et l’insistance résolue de l’URSS d’y recourir, les effets apocalyptiques qui résulteront des bombardements nucléaires dans leurs territoires sont suffisants pour « ordonner » aux puissances belligérantes de mettre fin à leur agression, et de procéder au retrait immédiat de leurs forces du territoire envahi.
Et, dans ce même ordre d’idées, qui aurait cru qu’un jour l’homme maîtrisera les forces du soleil comme l’a déclaré le président américain, Harry Truman, à la radio : « Sa force relève de la force élémentaire de l’univers, de celle qui alimente le soleil dans sa puissance. Cette force vient d’être lancée contre ceux qui ont déchaîné la guerre en Extrême-Orient. » (4) Et que cette arme sans guerre, et que par son évocation comme l’a faite l’URSS en 1956, a imposé le retrait des puissances occidentales de l’Égypte. L’homme est désormais dépendant d’une arme plus forte que lui, que lui ont permis les desseins de la métaphysique-monde, c’est-à-dire les plans de la Providence divine.
Fermons la parenthèse sur le pouvoir absolu de la bombe A et la bombe H encore plus redoutable pour l’humanité et dont la puissance est plus de 1000 fois plus grande que la bombe A. Par conséquent, là encore le monde arabe, avec la guerre de 1956, s’est encore réveillé. Et il s’y préparera, et cette fois c’est l’Égypte qui prend, en 1973, par surprise Israël contrairement à la guerre de 1967 où c’est Israël qui a pris par surprise l’Égypte, en attaquant ses forces aériennes de combat (400 avions détruits au sol). Une semi-victoire pour l’Égypte qui a mis fin au mythe de l’invincibilité militaire d’Israël.
Il est certain que, sans la présence des grands gisements de pétrole du monde dans le monde arabe, ni les États-Unis ni l’Europe n’auraient eu d’intérêt stratégique pour cette région et donc le soutien des monarchies arabes du Golfe et la défense de l’État d’Israël seraient certainement très limités voire nuls. Et probablement l’État d’Israël n’aurait pas vu le jour, puisque les Juifs eux-mêmes n’auraient pu ou n’auraient pas eu d’intérêt à créer un État juif au sein d’un monde arabe pauvre qui ne produit rien et dont les ressources ne sont que l’agriculture, l’artisanat ou le tourisme, et qui leur serait hostile.
En 1973, la semi-défaite pour Israël contre l’Égypte est aussi à mettre au compte des États-Unis. Pour la première puissance du monde, elle n’est pas la seule, il y a aussi le désastre dans la guerre qu’elle a menée depuis une décennie au Viêtnam. Ce retournement géostratégique américain, avec le syndrome vietnamien et moyen-oriental, certes pour le second il n’est pas très franc, mais néanmoins un recul au Moyen-Orient, va mettre les États-Unis dans une situation difficile. Si on ajoute l’échec de l’endiguement du communisme en Asie et l’Union soviétique qui cherche à s’implanter au Moyen-Orient eu égard au recul des États-Unis dans l’affrontement Est-Ouest, la situation continue de se détériorer pour la superpuissance. Enfin un autre recul, c’est le clash entre les États-Unis avec l’Europe sur le plan économique, financier et monétaire.
- Le monde arabe, au secours de l’économie mondiale ? Évitant une soviétisation à l’humanité ?
À la fin des Trente Glorieuses, les grands pays d’Europe étaient de plus en plus réticents à accepter des dollars américains. Les États-Unis qui avaient perdu beaucoup d’or, essentiellement au profit des pays d’Europe et le Japon, devenus très compétitifs dans le commerce international, furent obligés de recourir à la création monétaire ex nihilo (planche à billet) pour financer leurs déficits extérieurs. Ce qui a créé des tensions commerciales avec l’Europe, se retrouvant à exporter des richesses vers les États-Unis gratuitement. Puisque les dollars américains que les États-Unis leur remettent n’étaient pas convertibles en or.
Une situation qui amena les pays européens, au début des années 1970, à refuser d’absorber les dollars émis de la monétisation des déficits extérieurs américains et réclamer de l’or en échange des liquidités en dollars US que les pays d’Europe détenaient. La méfiance s’installant de part et d’autre de l’Atlantique et les faibles stocks d’or aux États-Unis ont entraîné le président Nixon à mettre fin à la convertibilité du dollar en or (15 août 1971). La fin du change fixe dans le système de Bretton Woods fait passer le système monétaire au change flottant des monnaies sur les marchés monétaires. Une situation qui vient encore compliquer la position des États-Unis déjà affaiblie sur l’échiquier géostratégique mondial.
On peut même dire que si la crise monétaire intra-occidentale ne trouvait pas de solution, elle serait extrêmement préjudiciable non seulement pour les États-Unis mais aussi pour l’Europe et le Japon. Bien entendu, le reste du monde en pâtirait aussi, puisque le commerce international aurait tendance à se contracter du fait que les États-Unis ne seraient plus la locomotive de l’économie mondiale. Les pays d’Europe refusant de financer les déficits commerciaux américains, et donc n’absorberaient pas des dollars américains non adossés à l’or.
Si le moteur de l’économie mondiale n’était pas remplacé par une autre puissance, le monde allait inévitablement s’acheminer vers une crise financière comparable à celle d’octobre 1929, puisque, pour masquer la décélération économique aux États-Unis, les investisseurs et les banques se lanceraient dans une spirale financière spéculative qui ferait monter le marché des actions dans la Bourse de Wall Street, à New York. Fictive, déconnectée de l’économie réelle, la spéculation, à la fin, comme en 1929, provoquerait un krach qui entraînerait des pertes financières considérables à l’ensemble des investisseurs américains et étrangers du monde. Forcément s’ensuivra une dépression économique mondiale comparable à celle des années 1930 et qui a amené la deuxième guerre mondiale.
Par conséquent, une telle situation si elle venait à se réaliser, ferait tomber tout l’édifice économique libéral occidental, libérant inévitablement la voie au communisme. Celui-ci prendra le pas sur le capitalisme qui serait incapable de sortir de la crise économique occidentale, devenue ensuite mondiale. Et ainsi commencera la soviétisation voire une marxisation du monde.
Alors d’où viendra le facteur qui sauvera l’économie mondiale ? Les forces herméneutiques dans le monde ne laissent pas apparaître le vrai facteur et pourtant le vrai facteur existe, et celui-ci n’en est conscient parce qu’il ne sait pas le processus qui se joue, et tout divisé qu’il est parce que la plupart des guerres dans le monde se jouent en son sein. Et ce facteur est le monde arabe.
En pleine guerre israélo-arabe, en octobre 1973, les pays arabes à leur tête l’Arabie saoudite décrètent l’embargo pétrolier contre les États-Unis et le quadruplement du prix du baril de pétrole. Et, à ce quadruplement du prix du pétrole, est ajoutée une clause centrale qui est de facturer toutes les ventes de pétrole des pays arabes en dollar US. Cette clause de facturer le pétrole arabe en dollar US devient une arme imparable pour les États-Unis puisqu’elle oblige les pays d’Europe de nouveau à acheter des dollars US pour régler leurs importations en provenance des pays arabes exportateurs de pétrole.
Bien sûr, les pays arabes ne savaient pas qu’en augmentant fortement le prix du pétrole et en libellant leurs exportations pétrolières en dollars US, ils sauvaient en fait le monde d’une grave crise économique qui perdurera par une dépression mondiale. Provoquant une reconfiguration du monde à l’avantage des pays socialistes, puisque le socialisme apparaîtra le meilleur système de gouvernance pour les peuples.
Ce qu’il faut souligner, c’est que les maîtres à penser dans l’utilisation de l’arme pétrolière ne sont pas les pays arabes mais le pouvoir financier américain qui a une mainmise sur la finance mondiale, et que c’est lui qui pousse à la hausse ou à la baisse les prix du pétrole. D’autant plus que la monarchie saoudienne est protégée par le parapluie nucléaire américain. Il demeure cependant, au-delà des tractations saoudo-américaines, que, sans l’existence du monde arabe et des gisements de pétrole dans ses sous-sols, le monde aurait certainement pris une autre trajectoire qui aurait été très négative à la fois pour le camp occidental et pour le reste du monde.
D’autre part, l’augmentation du prix du pétrole n’a été au fond qu’un réajustement au vrai prix du pétrole puisque celui-ci était pratiquement bradé à 2 ou 3 dollars le baril et ce, par la politique pétrolière intéressée de l’Occident. Ce réajustement, il faut le dire, a sauvé des millions d’emplois en Occident et dans le monde. Le monde a encore en mémoire les dizaines millions de chômeurs aux États-Unis et en Europe dans les années 1930 qui ont ensuite amené la guerre.
Certes, les chocs pétroliers qui ont survenu en Europe ont provoqué des crises énergétiques mais ont vite été résorbées par un rééquilibrage monétaire avec les nouveaux prix. De nouveau la croissance économique mondiale est repartie avec, cette fois-ci, deux moteurs pour doper la demande mondiale. Au moteur américain s’est joint un deuxième moteur, les pays producteurs de pétrole dont les pays arabes et les pays d’OPEP.
- La paix mondiale menacée par les deux Grands. L’islamisme radical, parade de l’Occident pour endiguer l’Union soviétique
Mais le concours des pays arabes à l’Occident ne s’arrêtera pas au seul domaine économique. De nouveau les maîtres à penser américains élaborent la stratégie qui a pour nom la « ceinture verte » dont l’objectif était de rendre étanche le Proche et Moyen-Orient des menées subversives de l’Union soviétique, qui cherchait à s’implanter et donc partager le Moyen-Orient avec les États-Unis. Conjuguée à la poussée de construction de mosquées dans le monde, et l’Arabie saoudite y jouera un rôle central dans cette ceinture verte puisque, grâce aux pétrodollars ou « islamo-dollars » et à la bienveillance américaine et européenne dans la politique de construction de mosquées en Occident et dans le monde, s’élaborera progressivement l’idéologie de l’« islamise radical » qui prônera la lutte contre l’idéologie communiste.
Là encore, l’islam radical deviendra le « bras armé » de l’Occident contre l’Union soviétique. Et on comprend que les États-Unis ont trouvé la parade à leur affaiblissement depuis le désastre au Viêtnam et la semi-défaite d’Israël en octobre 1973.
Certes, la stratégie américaine avec Israël était de provoquer, avec la guerre israélo-arabe de 1973, le relèvement drastique des cours du pétrole, et donc de justifier que ce sont les Arabes et non eux qui ont unilatéralement décrété l’embargo sur eux et quadruplé le prix du pétrole. Une stratégie américaine qui se défend par ses buts. Mais, avec l’affaiblissement suite au désastre au Viêtnam et à la semi-défaite d’Israël, les États-Unis ne s’arrêtent pas là. Ils poussent le monde arabe à un remous indescriptible, pour affaiblir les pays arabes progressistes, et leur mentor, l’Union soviétique. C’est ainsi que des guerres et conflits armés éclatent un peu partout, à partir de 1975. Guerre civile au Liban, au Sahara occidental, en Somalie, au Yémen du Sud...
Mais, parallèlement, après la semi-victoire de l’Égypte face à Israël, une urgence s’est posée pour les États-Unis de sortir à tout prix Israël du conflit avec l’Égypte. Ce pays devenait une puissance susceptible de mettre en péril l’État hébreu. C’est ainsi qu’une paix a été négociée entre l’Égypte et Israël sous la houlette des États-Unis. Le rapprochement entre l’Égypte et les États-Unis se concrétisant par la création d’un conseil égypto-américain en 1975 et le remplacement du matériel soviétique par des armes américaines vont mener aux accords de Camp David en 1978. Le traité de paix israélo-égyptien sera signé le 26 mars 1979 à Washington. L’Égypte sera le premier pays arabe à signer un traité de paix et à reconnaître Israël. La Jordanie ne le fera qu’en 1994, avec le traité israélo-jordanien.
Ironie de l’histoire, les États-Unis n’en sont pas pour autant sortis gagnants de leur politique de contenir tout péril qui remettrait en cause leur stratégie dominatrice sur le Moyen-Orient, et de protéger Israël. Puisque, la même année de la signature du traité de paix israélo-égyptien va éclater une révolution islamiste, en Iran. Une révolution islamiste paradoxalement sponsorisée par les États-Unis. Le référendum organisé le 1er avril 1979, soit cinq jours après le traité de paix israélo-égyptien de mars 1979, fait instaurer une république islamique, avec à la tête l’imam Rouhollah Khomeini qui devient le guide suprême. Dès son instauration, la république d’Iran soutient l’OLP. La perte de l’Égypte du front arabe est, en fin de compte, compensée par l’Iran, et va progressivement bouleverser les plans israélo-américains.
Évidemment, comme on l’a dit, il y a l’homme qui fait l’histoire, mais une force transcendante, herméneutique « qui est là, qui veille et rééquilibre » les forces comme on le voit dans le remplacement de l’Égypte par l’Iran dans le front du refus arabe contre le front israélo-américain. Ce qui donne sens à la marche du monde, surtout en ce XXe siècle, siècle pour ainsi dire de transition pour l’ensemble des peuples du monde.
Ce que l’on remarque, dans cette marche de l’histoire, c’est que, au moment où les tractations entre les États-Unis et l’Égypte s’opéraient, une guerre civile faisait rage au Liban depuis 1975, avec une invasion israélienne en 1982 pour écraser les Palestiniens qui combattaient les forces israéliennes occupantes. Des génocides inhumains que rappelle le massacre de Sabra et Chatila, des camps palestiniens, une horreur digne des crimes contre l’humanité de l’Allemagne nazie. Une guerre libanaise qui dura 15 ans. Deux autres guerres Iran-Irak et URSS-Afghanistan extrêmement destructrices. L’islamisme dopé par les pétrodollars saoudiens conjugué à la stratégie américaine fera de la ceinture verte un des maillons destructeurs du monde bipolaire.
Est-elle positive cette ceinture verte au regard de l’histoire, si elle vient participer à la destruction du monde bipolaire quand on sait que cette bipolarisation du monde, dans l’appétit insatiable de puissance des deux Grands, peut provoquer une Troisième guerre mondiale ? Et donc une hécatombe pour l’humanité. La réponse est oui, cela va de soi. Et surtout que tout qui vient à exister dans l’histoire a un sens dans l’histoire. L’histoire de l’humanité n’es pas chaotique, elle semble chaotique, elle est en réalité logique et rationnelle. Sauf que l’homme ne peut pas tout appréhender dans l’histoire.
Les années 1980 seront déterminantes dans le changement des rapports des forces. Les pays arabo-musulmans devenaient surpuissants, compte tenu d’une guerre entre l’Iran et l’Irak extrêmement destructrice et meurtrière. Tous les types d’armements ont été utilisés, des armements lourds aux guerres des villes par l’usage de missiles balistiques et à l’usage des gaz de combat. De même, en Afghanistan, où la guerre faisait rage entre l’armée soviétique et les moudjahidines afghan et arabes, crs derniers venus en soutien à la cause afghane. Et puis, il y a les Occidentaux derrière cette guerre contre le communisme et, entre autre, les voyages de Bernard-Henri Lévy en Afghanistan prêcher la bonne parole des Européens en soutien aux combattants Afghans et arabes qui combattaient pour la liberté mais aussi pour la liberté occidentale. Bien qu’elle soit un grain de sable cette bonne parole, elle compte pour les combattants afghans.
Dans ces années déterminantes, « l’affaire des euromissiles », en 1983, où la « gérontocratie soviétique au pouvoir », avec un régime socialiste finissant, voulait entraîner avec sa mort le monde n’était en fait que le pendant de la « crise des missiles de Cuba, en 1962 » qui a tenu en haleine le monde. En Europe, des missiles soviétiques SS-20 et missiles nucléaires américains Pershing-2 s’affrontaient sans égard pour les peuples d’Europe qui seront les premiers à payer en millions de morts si les deux superpuissances en venaient à l’irréparable. L’Europe et le monde, de nouveau pris en otage, retenaient leur souffle, craignant une seconde fois un « dernier round… apocalyptique ».
Les autorités britanniques ont rendu public le 1er août 2013, un discours solennel écrit en mars 1983 (en anglais) et destiné à être prononcé par la reine Elizabeth II en cas de troisième guerre mondiale. « Les dangers qui nous font face aujourd'hui sont plus importants, et de loin, qu'à n'importe quel autre moment de notre longue histoire », indique le discours de deux pages, déclassifié au terme du délai légal de trente ans. « La folie de la guerre se propage une fois de plus dans le monde et notre brave patrie doit de nouveau se préparer à survivre face à l'adversité ». Londres estimait « 33 millions de victimes » en Grande-Bretagne en cas d’attaque nucléaire de l'Union soviétique.
Qu’est-il de la situation des peuples du reste du monde dans l’affrontement Est-Ouest ? Une guerre froide qui a généré une situation catastrophique pour les peuples d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Sud à tel point que la situation issue de la décolonisation, et donc des indépendances, a noyé les peuples dans des crises et guerres meurtrières à répétition. Les combats, les guerres et les génocides se déroulaient avec une banalité effarante. Partout s’installent des dictatures militaires en Afrique, en Amérique du Sud, en Asie, sous l’œil bienveillant des deux superpuissances. Chaque camp veillant à soutenir les pays qui leur sont inféodés.
- Pétrodollars et excédents commerciaux colossaux des pays arabes mis à la disposition des pays occidentaux pour financer leurs déficits extérieurs
Cependant, parallèlement aux guerres qui faisait rage dans le monde arabo-musulman, un facteur essentiel va terminer cette stratégie de la « ceinture verte » et mettre fin au monde bipolaire.
Il faut se rappeler que l’avènement des « pétrodollars » n’a pas permis à la seule puissance économique américaine de répercuter ses déficits extérieurs de sa balance commerciale sur le reste du monde. Dans le sens que monétiser ses déficits, c’est-à-dire régler les pays qui exportaient des richesses vers les États-Unis par de l’argent créé ex nihilo (planche à billet) quitte à dévaluer sa monnaie sur les marchés monétaires, n’était pas l’apanage de la seule Amérique.
Les pays d’Europe faisaient autant. En effet, émetteurs de monnaies internationales, et bien qu’ils aient accepté de nouveau les dollars américains pour cause les « chocs pétroliers », les pays d’Europe monétisaient aussi leurs déficits extérieurs, en les finançant par de l’argent créé ex nihilo (planche à billet), quitte aussi à dévaluer leurs monnaies sur les marchés monétaires.
Mais comme les monnaies américaine, européennes et japonaise se dévaluaient les unes les autres sur les marchés, c’est-à-dire tour à tour au gré des émissions monétaires de chaque puissance monétaire, ce jeu monétaire en fin de compte était « à somme nulle ». Tantôt c’est le dollar qui se dépréciait tantôt c’était les monnaies européennes qui se dépréciaient, mais le plus souvent c’est le dollar qui se dépréciait au regard de ses dépenses militaires stratégiques dans le monde, et donc les monnaies européennes qui s’appréciaient. Et ce processus jouait aussi au sein même des monnaies européennes, malgré le garde-fou qu’a été le Serpent monétaire européen puisque lorsque les écarts augmentaient fortement entre les monnaies européennes, des accords entérinaient cette augmentation qui était néanmoins négociée entre les parties européennes.
Cette création monétaire ex nihilo par les pays occidentaux pour régler leurs déficits entre eux et vis-à-vis des pays du reste du monde était en fait légitime et naturelle d’autant plus qu’elle permettait de financiariser l’économie mondiale. Les pays hors-Occident (Afrique, monde arabe, Asie Amérique latine...) ne sont pas émetteurs de monnaies internationales et ont donc besoin de liquidités accrues en monnaies internationales (dollars, deutschemark, franc français, livre sterling, etc.) pour leurs commerces extérieurs respectifs, leurs économies et leurs États.
D’autre part, le formidable transfert d’achat aux pays exportateurs de pétrole va mettre à la disposition des pays occidentaux des moyens financiers colossaux issus des excédents commerciaux pour les aider à financer leurs déficits. Il faut encore rappeler que, sans les pétrodollars, sans ces énormes excédents courants des pays arabes, l’activité mondiale aurait fortement chuté et plonger le monde dans la déflation, avec toutes les conséquences géopolitiques négatives qui pouvaient surgir.
Le Chancelier d’Autriche, Bruno Kreisky, interviewé par le Nouvel Observateur, en témoigne. (2)
N.O. – Vous, Autrichiens, citoyens d’un petit pays neutre, quel intérêt avez-vous à vous mettre en flèche ? Vous recevez des coups de partout sans aucun profit. Les Autrichiens et les Français ne sont-ils pas en train de s’engager dans une querelle qui n’est pas la leur, entre Arabes partisans d’une Palestine palestinienne et les tenants d’une Palestine syrienne ?
B. Kreisky – Je ne m’immisce pas dans les affaires de personne. Mais, moralement, je trouve naturel de soutenir les Palestiniens et leur lutte pour l’évacuation des territoires occupés. De plus, je suis socialiste et dans un sens marxiste. Notre dépendance énergétique à l’égard du monde arabe est aveuglante. Je l’ai toujours dit. Les gens ne s’en sont aperçus qu’en 1973. Pour moi, c’est une leçon de marxisme primaire. Aujourd’hui, tous les Européens sont en déficit. Tous les déficits sont comblés par les pétrodollars, c’est-à-dire par les pays arabes. Croyez-vous qu’il se trouvera des gens pour soutenir Begin alors que leurs intérêts sont de l’autre côté ? Mitterrand, qui a toujours eu beaucoup de compréhension pour la cause juive, est en train de s’en rendre compte. Même Reagan y viendra un jour. Quatrième raison, la plus grave. Il n’y a pas de danger de guerre en Europe : par les accords d’Helsinki, le statu quo a été admis. Pas de danger parce que pas de cause de guerre. Des petits conflits par-ci par-là, mais une seule grande cause de guerre : le Proche-Orient.
Si demain Israël et la Syrie en arrivent au conflit armé, l’URSS interviendra aux côtés de Damas. Les États-Unis suivront de l’autre côté. Nous serions entraînés au désastre sans que personne ne l’ait voulu. Pour faire disparaître ce risque, il faut résoudre le problème palestinien... »
- La fin de l’URSS et de la guerre froide, en décembre 1991. Un processus naturel, attendu et provoqué par les forces de l’histoire
Le seul inconvénient est que les émissions monétaires des pays occidentaux avec les chocs pétroliers liés aux déficits extérieurs récurrents de la première puissance du monde qui refusait de diminuer la voilure de son économie et les guerres qu’elle fomentait dans le monde, nécessitant un soutien financier considérable, conjugués aux émissions monétaires ex nihilo des autres puissances occidentales, ont fait que l’inflation n’a pas cessé d’augmenter. À la fin des années 1970, l’inflation désormais à deux chiffres, et qui a nécessité un deuxième choc pétrolier en 1979, puisque la hausse du prix de pétrole était censée absorber les masses de dollars en surplus sur les marchés monétaires, afin de diminuer la dépréciation de la monnaie US. Quant à l’inflation, elle n’était qu’un mécanisme conséquent à ses émissions monétaires occidentales ex nihilo, elles-mêmes conséquentes à la hausse des prix du pétrole répétée, provoquant un processus monétaire s’autonourrissant, ne pouvant que faire croître une spirale inflationniste en Occident, se répercutant sur le monde.
Ce qui ne peut que mettre en danger le système monétaire international et, bien sûr, mettre aussi en péril le « droit de seigneuriage » qu’ont les pays occidentaux sur le reste du monde. La réponse à l’inflation va venir de Paul Volcker, le président de la Banque centrale américaine ou Federal Reserve (Fed). Il relève brusquement le taux directeur à court terme de la Fed à plus de 18 %, à partir de 1979. Au prix d’une récession aux États-Unis en 1982, il casse la spirale inflationniste et ramène l’inflation de 13,29 % en décembre 1979 à 3,83 % en décembre 1982. (5)
Cette hausse sans précédent du taux d’intérêt américain qui a fait affluer tous les capitaux flottants des pays étrangers à la recherche de profit, et pour ainsi dire éponger le monde des dollars américains, a eu un résultat très négatif sur les monnaies européennes. Le renchérissement du cours du pétrole (2e choc pétrolier en 1979) et l’explosion du taux de change du dollar par la rareté du dollar sur les marchés a plombé les monnaies européennes dans un cours baissier continu. Le taux de change dollar/franc français (moyenne mensuelle) est passé de 4,037885 Fr, à 10,11169 Fr, en mars 1985. La valeur du franc a été divisée par deux fois et demie passant de 0,25 dollar à 0,1 dollar, de 1980 à 1985.
Même évolution pour le deutschemark, la livre sterling... Le taux de change dollar/deutschemark passe de 1,723970 DEM, en janvier 1980, à 3,308957 DEM, en mars 1985. Le taux de change dollar/£ passe de 0,436602 GBP, en février 1980, à 0,911996 GBP, en février 1985. L’économie européenne est fortement touchée par les dévaluations ininterrompues durant la première moitié de la décennie 1980 jusqu’aux accords de Plaza, en 1985, à New York pour réajuster les parités de change des monnaies à leur retour initial de 1979. Si l’économie européenne s’en est sortie de cette lutte contre l’inflation, il faut dire qu’elle le devait surtout au reste du monde qui a payé le plus grand prix de ce processus déflationniste.
En effet, le formidable endettement des pays d’Amérique latine, d’Afrique, du bloc socialiste de l’Est et une partie de l’Asie a fait qu’une bonne partie des ressources, des richesses de ces pays est allé vers l’Europe et aussi vers les États-Unis via leur endettement. Là encore, force de dire que c’est un processus économique, financier et monétaire naturel combien même on pourrait dire que c’est un processus immoral de la part de l’Occident puisqu’il s’est basé, en réalité, sur une spoliation ni plus ni moins de richesses de pays pauvres vers des pays riches. La même question peut se poser pour les pays occidentaux, l’ont-ils voulu cet endettement puisque ce sont les pays du reste du monde qui l’ont contracté ? D’autre part, Paul Volcker, le président de la Federal Reserve était-il responsable de cet endettement inattendu et massif des pays du reste du monde ? Là encore, il n’a fait que lutter contre le danger de la spirale inflationniste qui menaçait le système monétaire international et, par conséquent, aussi l’ensemble des pays du monde.
Aussi peut-on dire que cela relève d’une évolution métaphysico-transcendante du monde puisque, dès le départ, avec l’avènement des pétrodollars ou islamo-dollars, il y a eu jonction de la puissance américaine et du monde arabe dans ce processus. Dès lors l’endettement mondial était en puissance, naturel, et donc attendu, il devait servir à être le deuxième facteur avec l’islamisme radical pour détruire le monde bipolaire. Dans le sens de mettre fin à la superpuissance la moins viable dans la bipolarisation du monde.
Et c’est ce qui a résulté à la fin des années 1980. Malgré les réformes engagées par M. S. Gorbatchev, un des plus hauts responsables de l’URSS, devenu ensuite président de l’Union soviétique, la libéralisation économique, politique et culturelle par la pérestroïka (restructuration) et la glasnost (transparence) n’a pas produit ses effets et n’a pu sauver le régime soviétique. D’autant plus que les pays du bloc Est se sont trouvés tous endettés vis-à-vis de l’Occident.
Leur commerce extérieur en chute libre, les pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, endettés, ne sont plus leurs clients potentiels d’une industrie d’armements de l’URSS et des autres pays de l’Est naguère florissante. Ce qui nous amène à dire que le processus était enclenché pour la transformation du monde. D’abord la chute du Mur de Berlin en novembre 1989 qui libère le peuple est-allemand de la satellisation dans laquelle il se trouvait vis-à-vis de la superpuissance soviétique. Il en alla de même pour tous les pays d’Europe centrale et orientale, que l’on appelle les PECO.
Il faut aussi indiquer que la crise d’endettement mondial a fortement ébranlé les dictatures militaires d’Amérique du Sud qui, à l’instar du bloc Est, ont aussi procédé à leur mue et transmis pour la plupart le pouvoir à des responsables civils. Mais le point d’orgue, c’est surtout l’éclatement de l’URSS. Le 26 décembre 1991, l’URSS s’effondre et cesse d’exister. Par l’effondrement de l’URSS, on doit comprendre l’effondrement du monde bipolaire, et donc la fin de la guerre froide.
Mais alors deux questions se posent : « Qui ont été les maîtres de l’œuvre dans la fin de la guerre froide ? Et qui a été le maître de l’ouvrage dans cette transformation du monde ? » La réponse à la première question ce sont les États-Unis et le monde arabe dans l’effondrement du bloc Est. À la deuxième question, la réponse vient de la « métaphysique-monde » qui régit la marche de l’humanité. Peut-on réfuter ces réponses ? On le peut, mais si on le peut c’est simplement que la pensée veut aller contre elle-même, parce que la pensée est libre de penser ce qu’elle veut penser. En fait, pour simplifier, c’est un processus naturel provoqué par les forces de l’histoire. Pour ne citer que le gouverneur de la Réserve fédérale américaine, Paul Volcker, en relevant brusquement le taux d’intérêt directeur de la FED à une valeur pour ainsi dire unique dans l’histoire économique du monde, 20 %, savait-il que, par ce « coup de plume sur les taux », il allait provoquer 11 années plus tard la formidable révolution, via l’endettement mondial, qui changera la face du monde. La fin du bloc Est et de la guerre froide, et les pays sud-américains en cessation de paiement qui obligeront les dictatures militaires qui n’auront plus rien à offrir à leurs peuples que l’austérité et la misère, à céder le pouvoir aux civils ont permis ont permis d’ouvrir pour les peuples une nouvelle page de l’histoire avec la démocratie naissante et le début d’un état de droit.
Aussi peut-on dire, l’URSS devait disparaître, elle n’était plus viable, la Guerre froide devait aussi être dépassée. Les puissances régionales montantes du monde arabo-musulman étaient suffisamment fortes pour faire face à l’impérialisme américain, comme l’a montré la guerre Irak-États-Unis, en 2003-2011. Au point que cette guerre a été comparée à celle du Viêtnam. Pourtant l’Irak, un pays de 20 millions d’habitants, n’a bénéficié ni de l’aide massive de l’Union soviétique à l’époque, ni de l’aide massive en hommes et en armes de la Chine avec qui le Viêtnam avait une longue frontière (1300 km).
- Conclusion
L’histoire de l’humanité est un processus évolutif certes long mais rationnel. Le progrès y est inscrit, et c’est ce qui donne espoir aux peuples. Et, on comprend aussi l’impact caché du monde arabe dans les formidables progrès et avancées qu’a connus l’humanité. Mais le prix du progrès endossé par le monde arabe pour faire avancer l’humanité était lourd, très lourd. Mais si on regarde les deux guerres mondiales en Europe et dans le reste du monde, il était aussi très lourd, très lourd pour les peuples du monde, en particulier les peuples d’Europe et d’Asie.
Mais les guerres et les crises sont ce qu’elles sont, et l’homme comme le monde arabe ne commande pas son destin. Les guerres et les crises ne vont pas s’arrêter en son sein, elles continuent à le ravager et, à la fin de l’année 1991, de nouveau, il doit payer un autre prix pour faire avancer une nouvelle fois l’humanité. Pourquoi ? Parce que c’est dans le monde arabe que se trouve la puissance monétaire occidentale. Le pétrole n’est que la face cachée du dollar. Et on le remarque, lorsque les États-Unis sont en guerre ou financent des guerres depuis l’irruption du pétrodollar dans les années 1970, le prix du baril de pétrole explose, et lorsque les États-Unis font profil bas, le pétrole baisse et reste durablement bas comme aujourd’hui.
Et c’est là que le bât blesse pour le monde arabe, toute la stratégie financière et monétaire de l’Occident est fondée sur lui. Et cela paraît incompréhensible. Mais si on enlève le pétrole, ou si demain une autre ressource énergétique est trouvée et qui déclasse le pétrole, qui deviendra une simple énergie d’appoint, alors il faut dire à l’Occident « Adieu, la puissance financière et monétaire ». « Adieu le pouvoir de Seigneuriage que l’Occident a sur le monde ». « Adieu les guerres que l’Occident finance par le biais des richesses du reste du monde qu’il soutire grâce aux formidables émissions monétaires qu’il créé à partir de rien. »
L’humanité aujourd’hui est comparable à une monarchie monétaire à l’échelle planétaire. Et cette monarchie est dirigée par quatre puissances monétaires qui sont les États-Unis, l’Europe monétaire des 19 (zone euro), le Japon et la Grande-Bretagne. Leurs monnaies (dollar US, euro, yen et livre sterling) règnent en maîtres sur le monde. Ils ont deux bras armés les plus visibles, le FMI et la Banque mondiale. Même le yuan, la monnaie de la Chine, et sa puissance dans le monde, n’est pas encore une monnaie comparable à ces quatre monnaies seigneuriales. Le yuan reste dirigé par la Banque de Chine et ne flotte pas librement sur les marchés monétaires. La Chine a une crainte viscérale des attaques financières spéculatives venant de l’Occident. Face aux quatre requins monétaires, la République de Chine a perdu entre 2015 et 2016 un montant astronomique de 1000 milliards de dollars en l’espace de moins de deux ans. Ses réserves de change ont fondu, de 4000 milliards de dollars environ en 2014, « Fin 2016, elles totalisaient 3.011 milliards de dollars ». (7)
L’Agence Presse Service (APS) Algérie écrit : « Les réserves de changes de la Chine, les plus importantes du monde, ont augmenté de 10,1 milliards de dollars le mois dernier pour se hisser à 3.119 milliards de dollars, a indiqué jeudi la banque centrale chinoise (PBOC).
L'euro, le yen et la livre sterling se sont renchéris le mois passé par rapport au billet vert, gonflant la valeur en dollars des réserves chinoises composées de ces devises.
Mais la hausse s'explique également par le fait que « les fuites de capitaux (hors de Chine) semblent être parfaitement contenues », relève Claire Huang, économiste de Société Générale, citée par Bloomberg.
Après une dégringolade spectaculaire à l'automne 2016, les réserves de devises chinoises étaient tombées en janvier sous le seuil de 3.000 milliards de dollars pour la première fois en six ans, avivant l'inquiétude sur la politique financière de Pékin.
En 2015 et 2016, l'hémorragie de capitaux hors du pays - fuyant l'essoufflement de l'économie chinoise et attirés par des placements plus rémunérateurs - avait fait pression sur la valeur du yuan, obligeant la PBOC à puiser dans ses réserves pour racheter des yuans et soutenir le cours de la devise.
Mais Pékin a drastiquement renforcé ses contrôles de mouvements financiers, et surtout, l'économie du géant asiatique s'est stabilisée depuis le début 2017, confortant la confiance des investisseurs et permettant aux réserves de changes de rebondir au fil de l'année. [...]
La convertibilité du yuan reste encadrée, son taux face au dollar ne pouvant fluctuer que dans une fourchette de 2 % de part et d'autre d'un taux-pivot fixé quotidiennement par la banque centrale. Mais celle-ci assure farouchement tenir compte des mouvements du marché. » (8)
On comprend pourquoi les autorités monétaires chinoises pointent farouchement leur viseur sur les marchés financiers dans le monde, en clair face aux requins de la finance mondiale essentiellement occidentale. Il y va de la santé économique de 1,35 milliard de chinois. D’un autre côté, peut-on en vouloir aux requins de la finance mondiale ? La seule réponse est que le monde ne peut leur en vouloir, dire tout au plus « Ainsi va le monde ». Et aucune puissance humaine n’est pérenne, qu’en dernier ressort, « tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, donc dans sens du progrès du monde. »
Donc, les enjeux auxquels il fait face montre que le monde arabe est assis sur une poudrière « pétro-monétaire » qui risque d’exploser, c’est-à-dire qui peut mener à une guerre qui reconfigurera tous les régimes politiques arabes et non arabes, y compris la mainmise des grandes puissances sur cette région centrale du monde.
La guerre que mène le président américain contre les excédents commerciaux chinois et surtout la déflation mondiale que les Banquiers centraux occidentaux ont provoquée avec les Quantitative easing (QE) qui consistent à « injecter des liquidités internationales pour sortir l’Occident de la crise immobilière et financière de 2007-2008, alors qu’en fait ils retirent des liquidités et non qu’ils injectent » sont en train de bouleverser l’équilibre économique mondial.
Pour les QE, et pour être plus précis, les Banques centrales occidentales injectent des liquidités en monnaie centrale que les banques commerciales occidentales « stockent » dans leurs comptes qu’elles ont auprès de leurs banques centrales pour racheter plus tard, au fur et à mesure que les pays du reste du monde s’appauvrissent et présentent à leurs guichets leurs obligations et bons de Trésor US et européens, donc de la dette occidentale, que le reste du monde a accumulés alors qu’ils avaient des excédents commerciaux durant la période d’avant, la période de faste entre 2002 et 2014, date à laquelle ont pris fin les QE américains. Et ce faisant, les pays du monde se délestent progressivement de leurs réserves de change, et dans le langage classique, cela s’appelle « puiser dans ses réserves ». Alors que, dans la réalité, il y a une stratégie occidentale mise en œuvre pour faire fondre les réserves de change des pays du reste du monde.
Les réserves de change de l’Algérie ont fondu entre 2014 et 2019, passant d’environ 190 milliards de dollars US à environ 70 milliards de dollars US, aujourd’hui, soit une chute de 120 milliards de dollars US en cinq ans. Et ce n’est pas fini. Selon les informations officielles, elles chuteront encore en 2020 pour atteindre environ 51 milliards de dollars.
Les plans concoctés par l’Occident pour inverser l’endettement ou du moins diminuer son endettement vis-à-vis du reste du monde réussira-t-il ? Certes, on constate bien que le plan occidental réussit puisque partout dans les pays du reste du monde qui ont accumulé, les réserves de change ont fondu. Pour certains pays, ils ont diminué de moitié, pour d’autres plus de la moitié, la Chine d’un quart. Mais l’Occident doit prendre en compte qu’il n’est pas le seul acteur dans la donne monétaire mondiale. Il y a la métaphysique-monde à l’œuvre dans le devenir du monde.
On peut même pronostiquer, eu égard au blocage de la situation au Moyen-Orient qui est devenue une « véritable poudrière », rappelant les « Balkans avant la Première Guerre mondiale », que rien n’exclut que, de nouveau, le prix du baril de pétrole explose, et atteindra des sommets comme jamais auparavant. Un cours du pétrole à 200 dollars dans les années à venir, ce qui faussera les plans occidentaux de vouloir appauvrir les pays du reste du monde déjà pauvres. Et qu’eux restent riches.
Alors que l’humanité est un tout solidaire. Et un prix du baril de pétrole à 200 dollars dopera l’économie mondiale et permettra au monde de rebondir et de sortir de la déflation qui étouffe l’économie mondiale. Nous y reviendrons.
Medjdoub Hamed
Auteur et chercheur spécialisé en Economie mondiale,
Relations internationales et Prospective.
Notes :
1. « Stratégie américaine et stratégie soviétique en Extrême-Orient », par Jean Marchand. Article dans Revue Politique étrangère Année 1951 pp.351-364
https://www.persee.fr/doc/polit_0032-342x_1951
2. « La tentation nazie des chômeurs dans l'Allemagne de Weimar. Une évidence historique infondée ? Un bilan des recherches récentes », par Emmanuel Pierru. Politix. Revue des sciences sociales du politique. Année 2002. Pp 193-223
https://www.persee.fr/doc/polix_0295-2319_2002_num_15_60_1247
3. « Les vraies origines du terrorisme selon Bruno Kreisky », par Le Nouvel Observateur N° 879. Du 12 au 18 septembre 1981
4. « Le 6 août 1945, la première bombe atomique pulvérise Hiroshima », par le journal La Croix. Le 06 juillet 2015
https://www.la-croix.com/Archives/Ce-Jour-la/Le-6-aout-1945-la-premiere-bombe-atomique-pulverise-Hiroshima-2015-07-06-1331819
5 Inflation Etats-Unis 1979 et 1982
6. Historique Taux de change
http://fxtop.com/fr/historique-taux-change.php?