lundi 7 mars 2011 - par Ben Ouar y Villón

Le mythe du Départ

Il faut de temps en temps savoir écouter les Français qui souffrent ; et visiblement la souffrance sociale est bien partagée en France. Le débat sur la suppression de l'ISF a ses adeptes, y compris parmi ceux qui n'ont pas à s'en acquitter.

Deux micro-troittoirs réalisés à Neuilly-sur-Seine (Commune la plus riche de France par habitant, située à la frontière ouest de Paris) ont recueilli mon étonnement.

Installons-nous et rions un peu, à défaut d'en pleurer, écoutons les ravages que provoque la propagande ultra-libérale qui est à l'oeuvre en occident depuis plus de trente ans sur le cerveau humain :

Exemple 1 :

La classe opulente jalouse les placements et les profits réalisés par la caste des hyper-riches qui eux, ont accès à l'information nécessaire, et tout cela est regardé par la classe aisée, moyenne sup-sup, qui fait son marché à Neuilly et interrogée sur cette vidéo, se fait un plaisir de répondre à la quetion de l'ISF, se donnant des airs d'en être !

Dans ce parc étrange où ces exemplaires d'extra-terrestres bien nourris, où l'égoïsme anté-primal le plus parfait se manifeste de la façon la plus simpliste qui soit, on répète en chœur et en rimes que Si le fisc prend trop de sous, les gens riches vont partir et l'emploi va en pâtir

Il faut dire à la décharge de ces pauvres gens qu'on entend ça une dizaine de fois par jour, des bouches des Mmes Parisot à tous les Jean-Michel apathiques de toutes les radios. Eh bien, c'est faux... 

Il faudrait le dire en quoi, en Anglais pour être compris ? It's fucking wrong.

D'abord, les riches partent déjà, sous forme liquide si je puis dire, puisqu'une part considérable de leur épargne (98%) ne va pas à la production réelle*. Et puis, pour ceux qui s'expatrient, un jour ils reviennent en France dès qu'il faut se faire soigner parceque la sécu, c'est quand même bien !

Et c'est aux USA justement que les plus riches étaient taxés à quelque 85% avant Reagan, et l'Amérique n'était pas un désert.

Cette idée -si c'en est une- disons cette obsession... ce mythe a la peau dure. Il court les rues de Neuilly comme celles de Nice, Monte-Carlo ou encore Andorre (qui sont bien en France, oui, oui, il faudra même commencer à s'attaquer à ces villes-là, selon moi anti-constitutionnelles, art. 1).

Sont-ce les riches qui produisent de l'activité ? C'est surtout ceux qui en tire les fruits. 

Ceux qui produisent sont ceux qui vivent de leur travail. Or, on sait bien que les gens qui touchent + de 10 000 euros/mois (mis à part quelques chirurgiens et autres perles précieuses d'ingénieurs) ne gagnent pas ce qu'ils gagnent selon leur mérite, leur compétence, leur qualité ou leur travail. On les leur octroie.

Quelquefois, dans les très hautes sphères économico-industrielles, des conseils d'administration fantaisistes accordent des rémunérations fantaisistes (M. Carlos Goshn président de Renault touche 700 000 euros/mois). Quelquefois, c'est selon leur provenance socio-économique, selon leur entregent, selon leur naissance, leur origine géographique, le cercle où ils ont évolué, entre Neuilly et Puteaux par exemple, il suffit de vivre dans quelques kilomètres carrés, et enfin quelquefois, ils s'enrichissent selon leur façon de placer leur capital et de manœuvrer au milieu de monde de requins fous qu'est la finance. 

Sont-ce les riches qui apportent de l'argent frais en investissement ? Oui, et quand ils le font c'est pour exercer un pouvoir démesuré sur tous les acteurs sociaux de l'entreprise, dont les réductions d'impôts ne sont qu'une facette. Et non, car leurs actifs, leur patrimoine, leur épargne sont investis où ?... dans la finance ! Même pas sous la responsabilité de chacun, puisque le banquier les placera bien où il voudra. 

En ce moment le grand terrain-de-jeu des investisseurs de cet argent-là, ce sont les Matières Premières et les Denrées Alimentaires, qui atteignent de tels sommets que 44 millions de personnes en plus cette année encore n'ont plus à manger ; ce qui porte leur nombre à 963 millions (source FAO).

C'est grâce à cette mentalité-là. C'est M. Robert B. Zoellick, qui est Président de la Banque mondiale qui le dit : « Pour la première fois de l’histoire, plus d’un milliard de personnes se coucheront tous les soirs le ventre vide. » Pendant qu'à Neuilly on voudrait payer moins d'impôt sur le revenu, à Bamako, on crève de faim.

Et ces braves gens de Neuilly-en-France voudraient en plus que la collectivité les épargne pour que leur Epargne serve à alimenter la spéculation meurtrière pour ces pays et le nôtre ?

Est-il possible d'être à ce point prisonnier de ses représentations familiales, culturelles, voire paranoïaques parce qu'on vient d'un milieu aisé ? Ou serait-ce que le Figaro a soigneusement monté son sujet ?

Dans cette cour supérieure où la science est infuse, on va de mythe en syllogismes : "Jean Réno s'installe en suisse, c'est l'appauvrissement de la France". Mais qu'il s'installe où il veut ! Faudrait-il fermer les frontières ? Etonnant ces libéraux ... mais en sont-ils seulement ? Jetons un œil plein de compassion sur cette réserve animalière située si près de nous et où le sport local consiste à soit frauder le fisc, soit utiliser les niches fiscales sous forme d'investissement dans les Dom-Tom et autres, voire utiliser des comptes bancaires invisibles en paradis off-shore. Et pour les moins sportifs, le jeu consiste seulement à racheter un bel appartement parisien Hausmannien et le découper en trois pour les louer super-cher à trois familles dans chacune 27 m2, ça rapporte infiniment plus que d'ouvrir un Livret A, n'est-ce pas ? 

Exemple 2 :

En faut-il encore à tous ceux qui, comme sur cette vidéo -risible à tous points de vue- "comptent bien" devenir riches demain ? Auraient-ils besoin d'un camp de rééducation intellectuelle ? On siphonne de l'intelligence à l'ouest de Paris ? La leur a-t-on pompée et depuis quand ?

Sérieusement, dans ma grande naïveté je me demande encore comment ceux qui ont tant de facilité à gagner leur vie sont-ils aussi ceux qui ont autant de mal à en redonner une partie ? Admettez avec moi que s'ils se plaignent, eux, que devrions-nous dire, nous, qui gagnons notre vie si chichement, soit en s'usant la santé, soit en gagnant si peu, comme moi, qui ait touché 435 Euros le mois dernier, qui ne nous sentons ni valorisés, ni en capacité de transmettre un jour quoique ce soit à nos enfants ? 

Que devrions-nous dire ? Nos 4 % d'imposition devraient nous sembler plus difficiles à consentir que leur 48%. Et pourtant nous, on ne se plaint pas, car on a bien conscience que l'argent quand on en a, on peut aussi et surtout en faire mauvais usage et que tout le monde dans une société évoluée et développée doit contribuer à proportion de ses capacités au bien public... Même les riches et leurs gosses portent leur croix dans cette vie, l'épaisseur de leur compte en banque ne les empêche pas d'avoir de problèmes de coke et de se suicider, ni d'avoir les mêmes maladies que les autres humains. 

S'ils veulent vivre dans un enfer individualiste, ils en reviendront vite. Car en effet, pour finir, je rappellerai cette belle maxime de M. Albert Cohen : "L'or recouvre le cœur d'une couche métallique".

*Pour ceux qui en douteraient, se reporter à un tableau synthétique des statistiques sur les transactions financières dans le monde, par l'un des meilleurs experts français sur les structures financières, Francois Morin, professeur émérite de l'Université de Toulouse, dans son livre à paraître : Un Monde sans Wall Street, Seuil, 2011.



6 réactions


  • daniel paulmohaddhib 7 mars 2011 09:36

    l’illusion grotesque que l’intérêt dit « prive » qui en clair est l’ intérêt de un par rapport a un groupe est la seule façon de créer un monde en paix est en passe de montrer toute son horreur.

    lorsque l’intérêt dit prive donc de un par rapport a beaucoup coïncide avec les besoins vitaux de l’ensemble des humains , c’est pur hasard , car c n’est pas du tout le but.
    Le seul but de l’intérêt prive est le même que tous voleurs ( mafia ) sur cette terre , prendre , voler ce que le groupe fait..en en faisant LE MOINS POSSIBLE...SAUF D’UTILISER LE CERVEAU ASSIS A UNE TABLE DE RESTAURANT TRÈS CHER...ÇA CE N’EST PAS TRAVAILLER....

    depuis 10 000 ans domine cette barbarie responsable des guerres ,violences disettes , famines organisées, chômage organisée , une vie sans aucun sens etc etc...

    il est faux de tout mettre sur le dos des gens de pouvoir , sans l’acceptation , la soumission de la majorité il n’y a pas de capitalisme possible, mais une société de partage...

    Puis je devenir riche sur mon seul travail ? impossible...alors je dois trouver un « truc » pour voler le groupe....
    voila en une phrase résumée notre vie....
    quand a parler de l’absolu non sens d’une telle vie passe dans la terreur de sa propre fin...je commence a croire qu’il est inutile d’en parler et que cette humain la , va aller au bout de sa démence.....
    cependant en un instant tout peu basculer.....le chemin est celui de nos peurs , il va falloir aller ou on ne veut jamais aller......le tournant qu’on ne prends jamais entre 10 et 20 ans ou le cerveau enfant en grandissant peut projeter sa vie entière qui a une fin...
    ce cerveau enfant/animal est suffisant pour l’enfance, mais ne peut regarder l’incertitude de la vie lorsqu’il augmente en capacite...
    tout se passe en une seconde, le cerveau enfant refuse la vie et son impermanence , il lui substitue son propre désir ou la mort n’existe plus....
    ce cerveau est superficiel et n’a pas la capacité de vivre totalement..
    il est LE PROBLÈME.....la est le chemin.....le seul
    nous ne sommes jamais parvenu au stade adulte en fait, sauf rares exceptions.....

    et la souffrance psychologique qui signale le mauvais chemin devrait nous alerter, mais le fait de fuir ce que l’on doit comprendre donne cette vie démente, ou certains voient leur fuite dans le pouvoir et les autres dans la soumission a un chef en espérant être peinards...
    les deux sont mus par la même motivation , la fuite du réel, trop immense pour le cerveau enfant..cette fuite s’appelle de la schizophrénie, et c’est cela qui est le créateur de la violence , de la haine, de la capacité a tuer les masses.....de la volonté de faire mal....etc etc...
    tout le problème des humains vient de la , de la distance mentale crée entre le monde réel et celui que l’on désire.....c’est le monde de la souffrance , car l’ideal projete est vide de sens , de plus ca n’arrive jamais que le bonheur ideal projete arrive , ca n’arrive jamais...des lors le besoin de projeter toujours plus devient incessant alors a la schizophrénie vient s’ajouter la névrose, la paranoïa, la mythomanie, le mensonge constant a soi même et aux autres..
    je suis en train de dire que l’humain est tout simplement dément , ce n’est certes pas une découverte...
    je dis que c’est ca que chaque humain doit comprendre..vous ne pensez tout de même pas que l’univers , si au delà de notre compréhension intellectuelle , avait pour finalité d’aboutir a un tel être si vil ?
    ca s’appelle vivre une illusion , ca ne marche pas , dans cette direction se trouve le malheur des humains, il est du a notre volonté de ne pas regarder le réel..
    regarder le réel va finir par aboutir a une ouverture d’une partie endormie du cerveau....
    tous les phénomènes « étranges » viennent de l’autre cerveau et seront a jamais non quantifiables...ce sera a jamais impossible de les mettre en cage...le sens de notre vie est par la.....
    alors vous pensez encore qu’il vous faut un chef ?


  • Robert GIL ROBERT GIL 7 mars 2011 13:40

    Nous ne pouvons pas continuer à transférer la richesse de la nation à ceux qui sont au sommet de la pyramide économique - ce que nous avons fait depuis environ trente ans - tout en espérant qu’un jour, peut-être, les avantages de ce transfert se manifesteront sous la forme d’emplois stables et d’une amélioration des conditions de vie de millions de familles qui luttent pour y arriver chaque jour, lire la suite...
    http://2ccr.unblog.fr/2010/10/20/les-riches-nous-coutent-trop-cher/


  • easy easy 7 mars 2011 14:51

    Alors qu’on pourrait s’attendre à ce que chaque individu ait une pensée propre, très peu de gens ont les capacités à formuler un concept singulier.
    Les très rares qui font l’effort de produire une pensée singulière doivent se concentrer et doivent tout reprendre à zéro pour s’expliquer.

    Chaque fois qu’on tend un micro à une personne par surprise et dans des circonstances où l’on interrompt ce qu’elle était en train de faire, on ne peut recueillir d’elle que des lieux communs, des expressions réflexes (plus souvent soutenues par un réflexe de défense que par un réflexe d’attaque). « Un micro se pointe vers moi, merde ! Que vais-je pouvoir dire pour m’en sortir sans trop avoir l’air ridicule ? Au secours donnez-moi vite un truisme à plagier »

    Comme ensuite, chacun regarde ou écoute ces enregistrements, on a tous l’impression que chacun est limité aux poncifs et que ces banalités passent bien, qu’il suffit de les répéter pour se donner une contenance et une autorité d’appartenance au groupe qui les dit.

    On tourne en boucle la réduction d’individu que nous sommes. Nous sommes notre propre chambre d’écho de nos simplismes et on réentend donc toujours les mêmes banalités.


  • fredleborgne fredleborgne 7 mars 2011 17:57

    Je voudrais rétablir la vérité.
    Jean Reno part en Suisse parce qu’il sait que je ne l’aime pas. Et comme je n’ai rien à faire en Suisse...


  • fredleborgne fredleborgne 7 mars 2011 17:58

    Plus sérieux, distributions de baffes le jour J


  • samuel * 8 mars 2011 00:16


     En entendant tous ces chantages au départ, de tous ces bons riches qui sont une telle source indispensable de bonheur pour leurs concitoyens, il m’est venu du fin fond de l’Amérique Latine, passé à travers la bouche de Mélenchon :

     « que se vayan todos ! »


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