Le quatrième pouvoir
La concentration du pouvoir médiatique en main du grand capital n’est pas une particularité française.
Nos voisins les gaulois vivent un été chaud et croustillant, découvrant les dessous insoupçonnés de leur monarchie présidentielle, grâce aux médias. Après avoir contribué grandement à l’élection du dernier des Bourbons, après l’avoir encensé depuis son sacre, soudainement un 18 juillet de l’an 2018, ils le laissèrent tomber comme une patate chaude. Honi soit qui mal y pense.
Jadis soigneusement camouflé derrière l’équilibre journalistique, plus connu sous le nom de “pensée unique”, le capital affiche dorénavant sa puissance sans fausse pudeur, un peu comme le font les politiques qui utilisent la porte tambour entre la fonction publique et le monde des affaires, au vu de tous, le modèle étant encore et toujours celui des Etats-Unis.
En effet, le 29 février 2016, Leslie Moonves, président directeur général du géant des médias américain, CBS, déclara devant un parterre de la “Morgan Stanley Technology, Media and Telecom Conference” à San Francisco, au sujet de la candidature aux présidentielles de l’outsider Donald Trump :”Cette campagne présidentielle est un cirque dont l’ampleur dépasse l’entendement. La candidature de Donald Trump a beau être une catastrophe pour l’Amérique, mais pour CBS c’est du pain béni.”
Deux semaines plus tard, le 15 mars 2016, le New York Times publie une statistique au sujet du temps d’antenne offert par les chaînes câblées aux trois candidats finalistes. A cette date, la campagne du candidat Bernie Sanders avait déboursé la somme de 28 mio USD en frais publicitaires et obtenu du temps d’antenne gratuit d’une valeur de 321 mio USD. La candidate Hillary Clinton se retrouvait avec 28 mio USD de frais publicitaires et 746 mio USD de temps d’antenne offert, tandis que le candidat Trump avait déboursé à peine 10 mio USD pour obtenir 1’898 mio USD de temps d’antenne gratuit. Lors de l’élection du dernier, ce chiffre avait atteint la somme de 5 mia USD (The Street).
Le moment clé de cette grande farce, du goût de Leslie Moonves et ses semblables, fut sans doute le fameux épisode du “podium vide”. Le 3 mars 2016, les trois grandes chaînes câblées, CNN ; MSNBC et Fox News avaient transmis, pendant 30 minutes, un podium vide, attendant une conférence de presse, annoncée par le candidat Trump, annulée ensuite, par le candidat Trump. Pendant ce temps se tenait à Lincoln, la capitale du Nebraska, un meeting du candidat indépendant Bernie Sanders avec des milliers de supporteurs.
Actuellement, deux ans plus tard, le président américain, à l’instar de son pendant français, est tombé en disgrâce. La guerre médiatique est ouverte. Outre Atlantique c’est la présumée interférence des services secrets russes dans les élections présidentielles de 2016 qui servent d’épouvantail. Les services secrets américains disposent pourtant d’une longue expérience en matière d’interférence, notamment en Amérique Latine.
La chasse aux sorcières est ouverte et l‘establishment du DNC (Democratic National Committee) espère regagner au moins une des deux chambres lors des élections de mi-mandat au mois de novembre. L’objectif n’étant pas le changement de politique mais le maintien du statu quo, ce qui va dans le sens des médias et les puissants contributeurs du parti. Malheur aux journalistes qui oseraient mettre en doute la doxa. Ils seront bannis des écrans et des rédactions. C’est le Maccarthysme revisité
Lors d’un forum du think-tank “Council on Foreign Relations” (CFR), sur le thème “Comment combattre désinformation et fake news dans les médias” le 20 avril dernier, l’ancien éditeur du magazine TIME (2006-2013), également ancien sous-secrétaire d’état du gouvernement Obama entre 2014 et 2016 (porte tambour), Richard Stengel, avait défendu la thèse selon laquelle les médias devaient servir d’outil de propagande “pour la préservation de l’intérêt supérieur de la nation.” Tout est dit.
Dans ce contexte on apprécie les récentes et soudaines découvertes au sujet de l’interprétation un peu particulière de la fonction présidentielle par Louis XVI bis et on ne peut s’empêcher de penser que celui-ci, à l’instar du président américain, ne joue finalement qu’un rôle mineur dans cette pièce. Un communiqué de presse, diffusé par l’organisation non gouvernementale britannique Oxfam du 16 janvier dernier sur son site internet, selon lequel une poignée de 8 individus détiendraient autant de fortune que les 3,6 mia d’habitants les plus pauvres de la planète, la moitié de l’humanité, soutiendrait cette thèse.