mardi 27 novembre 2012 - par Marcus Clams

Le « sécu-capitalisme » nouveau système économique mondial

 Les réussites et les faillites économiques sont intrinsèques au système capitaliste. Ce flux et ce reflux rythment la vie du système. Or, ces dernières années, cet équilibre a été bouleversé par une asymétrie entre la capital et le travail qui a abouti à l'apparition d'un nouveau système, que l'on pourrait qualifier de « système capitaliste au capital sécurisé », où les faillites se retrouvent bloquées.

 Le système capitaliste tend naturellement vers une concentration du capital. Ce processus prend plus ou moins de temps, en fonction de l'environnement économique et de la pression fiscale exercée par la puissance publique. Cette concentration du capital engendre des bulles spéculatives, déconnectées de l'économie réelle, qui assèchent l'économie et finissent par exploser. L’explosion de ces bulles et les faillites qui en découlent redistribue le capital et le système repart ensuite dans un nouveau cycle. Ces transitions, souvent nommées « crises », sont systémiques, elles font parties de la vie du système capitaliste. Parmi les crises récentes, on peut citer la crise argentine, la crise asiatique, l'explosion de la bulle Internet ou encore la crise des subprimes.

 Le coût social de ces explosions est souvent très important, ce qui fait privilégier à l'Homme sage et rationnel d'autres systèmes de redistribution du capital, comme l'inflation – mais qui a le défaut de ne pas taxer les patrimoines immobiliers et de créer d'importants déséquilibres à forte dose – ou encore la taxation du capital.

 Néanmoins, la mondialisation de l'économie initiée dans les années 80 a donné un énorme avantage au capital, qui peut désormais aller et venir instantanément, s'offrir aux plus offrants ou encore se cacher dans des paradis fiscaux. Il en découle un assèchement des politiques de taxation du capital, car la concurrence entre les pays poussent les politiques à baisser les taux de prélèvement. Le processus de concentration du capital n'est donc plus contrebalancé et il peut ainsi se poursuivre jusqu'à l’étouffement de l'économie. Ce point a été atteint au milieux des années 90. Pour éviter une nouvelle crise une parade a été trouvée à cet époque : l'endettement. Qu'il soit privé (comme pour les États-Unis) ou public (comme pour la France), cet artifice a permis de tenir une quinzaine d'années supplémentaires. Le système a quand même fini par exploser avec la crise des subprimes. Néanmoins, le capital a pu exiger des États d'éviter les faillites bancaires en sauvant des établissements privés avec l'argent public. Le processus de déconcentration du capital n'a donc pas eu lieu et, suite à ces différentes politiques, la dette publique des pays de l'OCDE représente en 2012 plus de 100 % de leurs PIB, soit la somme colossale de 46 000 milliards de dollars. Cette collectivisation des pertes, qui permettra peut-être à Marx de se rassurer en constatant qu'il reste encore de fervents partisans de l'économie collectiviste dans certains secteurs, non seulement avorte la redistribution de capital normalement engendrée par les faillites, mais, en plus, asphyxie l'économie réelle via l'application de politiques d'austérité qui demeurent extrêmement coûteuses pour les peuples. Certes, la faillite est loin d'être la meilleure solution – même si les garanties de l’État permettraient à la plus grande partie de la population de ne rien perdre. Mais si on renonce à taxer le capital, le blocage des faillites, sans aucune demande de contrepartie, est une solution encore moins acceptable.

 Nous voici donc entrés dans un nouveau stade du capitalisme, le « sécu-capitalisme », où les mécanismes de déconcentration du capital, soit naturels, soit politiques, ne sont plus fonctionnels. Il devient urgent d'essayer de mettre en place de nouveaux mécanismes de taxation, au moins à l'échelle européenne, comme par exemples, un impôt sur le patrimoine, la taxation des transactions financières, la lutte contre les paradis fiscaux, le rééchelonnement de certaines dettes ou encore l'interdiction de versement de dividende pour les entreprises qui licencient. Si rien ne change la situation devrait devenir de plus en plus explosive et l’avenir plutôt sombre.



10 réactions


  • devphil30 devphil30 27 novembre 2012 14:55

    Vous parlez de taxer le patrimoine ....l’ISF c’est quoi ? 


    La taxe sur les transaction financières est entrée en vigueur le 2 AOut 2012 pour 0,2 % du montant de la transaction 

    La lutte contre les paradis fiscaux est totalement utopique car sans aller chercher bien loin dans des iles perdues , que sont le Luxembourg , la Belgique , la Suisse , Monaco ??

    La Belgique fait partie de l’Europe pourtant elle semble attirer beaucoup de Français

    Comment définir concrètement une entreprise qui licencie , sur quelles bases , quelles proportions ? 
    La médiatisation des licenciement incite à réfléchir à ce type de mesure mais pour 300 ou 400 personnes licencié médiatiquement d’une entreprise combien de licenciement d’une ou 2 personnes dans une multitude d’entreprises. 
    Votre cas ne reprend que des entreprises cotés en bourse et versant des dividendes à des actionnaires boursiers.

    Je comprend le sens de votre article mais je ne suis pas totalement d’accord avec vos arguments 

    Philippe 

    • Marcus Clams Marcus Clams 28 novembre 2012 10:01

      >>Vous parlez de taxer le patrimoine ....l’ISF c’est quoi ?

      Je parlais de mettre une taxe sur le patrimoine au niveau Européen.

      L’Italie l’a supprimé en 1992, l’Espagne en 2008, la Grèce en 2009.

      Il n’y a pas de chiffre officiel des avoirs grecs en suisse, mais on parle de 200 milliards d’Euro. Pour mémoire la dette Grecque est de 350 milliards d’€.

      Pour la France, l’ISF a été dénaturé par le bouclier fiscal (pertes à cumuler sur 5 ans). Les décisions prises par le nouveau gouvernement vont dans le bon sens, mais l’ISF reste trop faible. La dette française va atteindre les 94 % du PIB en 2013. A partir de 80 % la souveraineté du pays est fortement affectée. Pour mémoire la dette française est de lors de 1750 milliards et le patrimoine des français de 10 000 milliards d’€ dont 3300 d’actifs financiers. Il faudrait mettre un taux progressif, par exemple de 0.25 % jusqu’à 10 % pour les patrimoines de 500 000 à 1 milliard d’€.

      Il faut bien voir que si les banques avaient fait faillites, comme la garantie de l’Etat est de 100 000 €, les personnes soumises à l’ISF auraient perdu entre 50 et 90 % de leurs patrimoine.

      Ensuite, il y a un effet sur l’économie. Si on donne 1000 € à 1000 personnes « normales », ce million d’euro sera réinjecté dans l’économie sous forme de consommation. Si on donne 1 million d’Euro à 1 personne, il dépensera 200 000, peut-être 500 000 euros, mais une grande partie ne sera pas réinjectée dans l’économie (le pire étant l’investissement dans l’immobilier => alimentation de la bulle).

      >>La taxe sur les transaction financières est entrée en vigueur le 2 Aout 2012 pour 0,2 % du montant de la transaction

      C’est une avancée, mais cela ne concerne que 140 sociétés, 1.6 Md’€. 

      La taxe de niveau européen était prévue en 2013, on parle maintenant de 2016...

      >>La lutte contre les paradis fiscaux est totalement utopique car sans aller chercher bien loin dans >>des iles perdues , que sont le Luxembourg , la Belgique , la Suisse , Monaco ??

      Je ne comprend pas très bien la phrase, la Suisse et Monaco sont des paradis fiscaux. Utopique ? et en 40 c’était utopique de dire qu’on finirait par gagner ? On fait quoi ? On attend que l’on nous baisse les salaires de 20 %, que l’on nous augmente la TVA de 4 points, que l’on nous allonge l’age de la retraite à 70 ans et la durée du travail à 50 h par semaine pendant que les yachts se bousculent à Monaco ? Techniquement, ce n’est pas un problème, les services secrets anti-terroristes sont capables de retrouver les traces des transactions des terroristes, il faudrait faire une cellule similaire contre les évadés fiscaux. On peut aussi fermer les frontières. Il y a toujours des solutions. Par contre le combat est inégal. Mais ce n’est pas une raison pour renoncer (cf le discours de la servitude volontaire, La Boétie)

      >>Comment définir concrètement une entreprise qui licencie, sur quelles bases , quelles proportions ? 

      Licenciement économique. Une entreprise va mal, ça peut arriver, c’est normal. Elle doit licencier, si elle parvient malgré tout à dégager des bénéfices, ils devront être intégralement affectés en investissement.



  • Stof Stof 27 novembre 2012 18:44

    La France est un des pays comptant le plus de millionaires, dont la plupart ont fait (et font encore) fortune dans l’immobilier. Ca doit être possible de taxer tout ça sans évasion fiscale excessive je pense.


  • spartacus spartacus 27 novembre 2012 22:54

    La taxite aiguë. Maladie qui se transmet d’irresponsable en irresponsable. Ces gens ne peuvent s’acheter le vaccin de la courbe de Laffer.


    Au delà d’un certain seuil d’imposition, les recettes commencent à décroître, car une fiscalité trop forte dissuade les agents économiques de travailler.

    A 57% du PIB d’imposition y’en a un peu marre d’entendre les taxophiles. Un impôt nouveau chaque mois depuis 10 ans. OVERDOSE.

    • Romain Desbois 27 novembre 2012 23:30

      La prochaine fois vous voterez pour moi smiley

      Ma révolution fiscale : l’Impôt Unique Progressif


    • Marcus Clams Marcus Clams 28 novembre 2012 11:36

      Vous semblez ne pas aimer l’état et ses intrusions dans l’économie.

      Depuis 2007 :
      L’état intervient pour sauver les banques de la faillite
      l’état irlandais nationalise des banques
      L’état espagnol nationalise des banques
      L’état français (avec d’autres) sauve la Grèce de la faillite
      Le FMI (composé d’argent public) sauve certains états de la faillite
      Les états européens créent un fond de soutient aux états en difficultés
      Les états créent des plans de relance en s’endettant
      La banque centrale européenne prête aux banques de l’argent à 1%
      La banque centrale européenne est prête à racheter de la dette espagnole et italienne sans limitation
      Les états se mettent d’accord pour renflouer les banques espagnoles
      La banque centrale américaine réalise des plans d’assouplissement quantitatif colossaux
      ...

      Que d’interventions des états dans l’économie ! Est-ce la raison de votre overdose ? Ne se pourrait-t-il pas que certains manuels d’économie ressemblent plus à de jolies contes féeriques plutôt qu’à une véritable description de la réalité ?


  • rhea 1481971 28 novembre 2012 07:04

    Le système capitaliste actuel est constitué de pyramides de Ponzi imbriquées les unes dans les autres, quand une pyramide menace de s’effondrer l’homo sapiens en crée autre pour retarder l’effondrement. Un bon mathématicien peut anticiper l’effondrement d’une pyramide il suffit de résoudre une équation différentielle du premier ordre et il peut même prévoir approximativement quand tout cet échafaudage va s’écrouler. Dans un passé lointain j’avais appris à résoudre les équations différentielles, aujourd’hui par manque de pratique je ne sais plus, ce n’est pas à la portée de la majorité des citoyens et l’ordinateur n’est pas fait pour ça.


    • Romain Desbois 28 novembre 2012 07:33

      Le pire c’est que notre système social est conçu ainsi (sauf les fonctionnaires).

      Pour les retraites, le chômage et l’assurance maladie, nos cotisations nous donnent des droits qui ne sont garanties que virtuellement vu que ces cotisations servent à financer les retraites , le chômage et les soins actuels.

      C’est un système qui est piègeux car on est toujours dans le devoir du toujours plus que la génration précédente. Au bout d’un moment ca coince.

      (par exemple pour financer les retraites , on dit qu’il faut au moins deux actifs pour un retraité. Cela revient à dire que pour que ca marche il faut deux fois plus de travailleurs tous les 60 ans. On voit tout de suite que ce n’est pas gérable).


  • Stof Stof 28 novembre 2012 09:00

    Marre des taxes ? Si l’élite de l’élite financière n’avait pas absorbée les finances publiques on n’en serait peut être pas là.

    Les libéraux font tout pour couler l’Etat et ce qu’il représente. Ce faisant ils l’endettent quand ils sont au pouvoir pour mieux justifier la suppression du bien (et des services) public.
    Seulement, parfois, la gauche revient et cherche à réparer les dégâts en taxant. L’ENA les forme très bien pour ça.
    Ou alors on laisse plonger tout le système. C’est bien ça aussi.

  • ddacoudre ddacoudre 28 novembre 2012 11:00

    bonjour marcus

    intéressante analyse qui résume assez bien l’impasse de notre société.
     Il y a naturellement le regard du technicien qui peut parfaitement décrypter les « crises » systémiques et puis il y l’analyse idéologique qui semble que tout le monde est abandonné pour accepter le capitalisme comme une fonction humaine inaliénable. Pourtant il n’en est rien le capitalisme n’est qu’une forme du rapport dominant/dominé « culturalisé » ce qui signifie que ce rapport peut revêtir d’autres types de relation humaine et économique.
    notre organisation repose sur des « dominants systémiques » de type Bêta donc perpétuellement réformable en fonction des comportement que nous pouvons adopter.
    L’économie capitaliste en soit conduirait à l’extinction de l’espèce ( tous les pays riches ne renouvellent pas leur population et la population croit dans les autres pays qui sont un apport par l’immigration, un peu long à expliquer).

    La technologie disponible et les progrès de la science nous permettent d’envisager que le travail de tous n’est pas nécessaire et que la population croitra plus vite que les transformations essentielles à une évolution éco-économique dans laquelle le capital n’investit que contre retour ce qui ne permet pas de faire face à nos difficultés environnementales. Le gel de la capacité d’investissement des états par l’endettement suivant les critères capitalistes accroissent les impossibilités dans l’usage de techniques ou de décroissances sélective qui peuvent être parfaitement efficiente, mais ne peuvent s’ajuster à l’économie capitalistes sans augmenter le cout de production.
    il semble donc que ce soit moins un problème de moyens qu’un problème idéologique d’esprit gelés,bloqués, dogmatiques qui n’arrivent ou ne veulent pas renoncer à ce qui organise et leur offre leur puissance, indépendamment des prouesses technologiques et des capacités de production que génère « l’outil entreprise ».

    La comptabilisation de l’existence n’est pas la vie, il semble que nous l’ayons oublié.
    http://ddacoudre.over-blog.com/article-ce-plan-comptable-qui-nous-fait-l-europe-111330768.html cordialement.


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