mercredi 25 mars 2020 - par Hamed

Les défis du monde après le Covid-19. Les groupes des « Cinq », des « Six »… qui auront à penser l’avenir de l’humanité et de son bien-être

 La dette publique des États-Unis est la dette de l’Etat américain, soit l’ensemble des engagements financiers pris sous forme d’emprunts par l’Etat ainsi que des collectivités publiques des États-Unis. La dette augmente à chaque fois qu’une dépense publique (investissement ou fonctionnement) est financée par l’emprunt plutôt que par l’impôt, lorsque l’équilibre des comptes publics est en déficit.
 

  1. L’envolée incoercible trajectoire de la dette publique des États-Unis depuis 2001

  Entre 2001 et fin 2008, la dette publique est passée de 5 628 à 10 025 milliards de dollars (de 57,3% à environ 72 % du PIB), soit une progression de près de 4 400 milliards de dollars en huit ans. Evidemment motivée par une consommation intérieure effrénée et une lutte sans merci contre le terrorisme, ponctuée de deux guerres en Irak et en Afghanistan. Fin décembre 2012, la dette publique a atteint 16 394 milliards de dollars, soit plus de 100% du PIB. La progression de la dette publique, entre 2009 et 2012, pour seulement quatre années du premier mandat d’Obama, s’est envolée. Elle a été environ de 6370 milliards de dollars, et compte pour un mandat d’Obama presque une fois et demi le déficit total des deux mandats de Bush. Evidemment, cela a trait au legs qu’a laissé l’ancienne administration à la nouvelle, celle-ci doit gérer les conséquences de la crise immobilière en 2007 et son pendant, la formidable crise financière de 2008. Et aussi la gestion des deux guerres en Irak et en Afghanistan, ont été un lourd fardeau dans l’endettement américain.
 

Ainsi se comprend pourquoi l’économie américaine est plongée dans un véritable abîme financier, et les États-Unis ne tiennent la tête hors de l’eau que grâce aux formidables injections monétaires opérées par la Réserve fédérale, et les relèvements successifs du plafond de la dette par le Congrès. Précisément, grâce à ces gigantesques déficits que l’économie américaine a pu s’éviter une grave récession et évité au monde une crise économique majeure.
 

En 2019, la dette nationale américaine n’a cessé de s'alourdir. Plus massive que l'économie des Etats-Unis elle-même, elle a atteint 22.000 milliards de dollars, un record historique qui, sous Donald Trump. Somme des déficits chroniques et des intérêts de la dette, ce montant s'élevait déjà à l'arrivée de M. Trump à la Maison Blanche à 19.950 milliards de dollars, soit l'équivalent du PIB américain pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale. Par comparaison, la dette de la France, qui elle aussi est en passe d'égaler le montant de son PIB, s'élevait à un peu plus de 2.300 milliards d'euros fin septembre (2.600 milliards de dollars environ).
 

La revue Capital.fr écrit le 17 février 2019 : « Les allègements fiscaux du gouvernement Trump, notamment pour les entreprises, et le gonflement des dépenses, surtout dans l'armement, ont alourdi ce fardeau. « Je devais d'abord remettre l'armée en ordre avant de me préoccuper des 22.000 milliards de dette », a récemment lancé le président. Son administration continue d'assurer que ses réductions d'impôts, qui doivent creuser le déficit de 1.500 milliards de dollars sur dix ans, vont se financer d'elles-mêmes en dopant la croissance, donc les recettes. Or le déficit budgétaire a grimpé de 17% à 779 milliards de dollars l'année dernière, signant son plus mauvais solde depuis 2012. Et selon le Bureau du budget du Congrès (CBO), il devrait encore se creuser cette année, à 900 milliards de dollars.

Après quatre ans d'excédent budgétaire sous Bill Clinton, la guerre en Irak sous George W. Bush a refait plonger les finances fédérales dans le rouge. Sous Barack Obama, la crise financière de 2008 a exigé un fort soutien de l'Etat. Les comptes se sont durement détériorés, provoquant la naissance du Tea Party, un courant politique qui a aidé à porter Donald Trump au pouvoir. Avec la reprise économique et le bras de fer au Congrès sur la réduction des dépenses publiques, les dernières années du président Obama ont vu une baisse du déficit. Puis quand celui-ci est reparti à la hausse avec Donald Trump, personne n'a bronché, pas même les républicains, naguère si à cheval sur l'usage des deniers publics.

Trajectoire intenable !

Mais ce sont avant tout le vieillissement de la population et le gonflement des dépenses de santé et de retraite qui, structurellement, plongent le budget fédéral dans un déficit chronique. Sans vouloir s'immiscer dans la politique budgétaire, le président de la banque centrale américaine (Fed), Jérôme Powell, signale de temps en temps qu'il « est bien connu que le budget du gouvernement américain est sur une trajectoire intenable et qu'il faudra s'atteler à y remédier ». Donner des leçons est délicat, quand le service de la dette lui-même a fortement gonflé à cause des hausses de taux d'intérêt de la Fed. Donald Trump n'a pas manqué de le lui faire savoir, traitant la Fed de « folle » et de « problème pour l'économie » quand elle augmentait les taux. »
 

Aujourd’hui encore, pour contrer l'impact économique du nouveau coronavirus aux Etats-Unis, les sénateurs et la Maison Blanche ne sont pas parvenus à s’entendre sur un gigantesque plan d'aide qui pourrait dépasser les 1000 milliards de dollars. Et les émissaires de la Maison-Blanche ont laissé entendre que le coût final des mesures pourrait aller jusqu'à 1400 milliards de dollars. Son conseiller économique Larry Kudlow avait même évoqué 2000 milliards de dollars à son arrivée au Congrès, selon des médias américains, mais a ensuite expliqué que ce montant comprenait aussi d'autres mesures.
 

  1. Représentation schématique suggestive pour la compréhension du système économique mondial actuel

  Pour comprendre, imaginons un système économique constitué de trois entités A, B, C. Une grande nation A, la plus puissante, c’est-à-dire les États-Unis et un groupe de nations industrialisées les plus en vue B du système, i.e. l’Europe, le Japon et le Canada. Ces deux entités disposent de monnaies internationales (monnaies de réserve), la nation A dispose en plus de l’unité de compte internationale. Le reste du système, i.e. l’Asie, l’Afrique et l’Amérique du Sud, dénommons-le C. Les monnaies de ce groupe de pays convertibles ou non sont ancrées sur un panier de monnaies des pays A et B.
 

Imaginons pour une raison de délocalisations d’entreprises, de rattrapage technologique, etc., certains pays du groupe C rattrapent les pays A et B et les dépassent dans le commerce mondial. Suite aux pertes de marchés, en se rabattant sur leurs marchés domestiques, les pays A et B subissent, suite à une spéculation effrénée, une grave crise immobilière et financière. C’est ce qui s’est passé en 2007 et 2008 pour les États-Unis et l’Europe. Il s’en est suivi un étranglement du système bancaire occidental. Pour parer à cette situation, ces Etats ont procédé d’urgence à la recapitalisation par achat de titres voire même une nationalisation par une prise de parts dans le capital des banques. Après le sauvetage des banques, et pour relancer leurs économies, ils ont encore injecté des liquidités considérables opérées sur fond d’endettement.
 

Malgré les taux d’intérêt proche de zéro et les politiques monétaires fortement expansives, la situation des pays A et B reste stagnante, les taux de croissance faibles, le taux de chômage moyen est de 12%, pour certains pays, il est de 25% voire plus. En revanche, la croissance économique des pays C, bien qu’elle ait diminuée, reste toujours élevée. Le taux de croissance de la Chine est supérieur à 7%.
 

Imaginons maintenant que les Banques centrales des pays A et B, pour soutenir leurs économies, recapitalisent les banques par de la création monétaire contre les titres de Trésor, les créances immobilières (subprimes) et le rachat partiel de dettes publiques. Le système bancaire recapitalisé procède au financement de l’économie (octroi de crédits aux entreprises et aux ménages, achat de bons de Trésor pour financer les budgets des Etats, etc.). Mais les déficits budgétaires et commerciaux de ces pays sont tels que le système bancaire doit à chaque fois se tourner vers leurs prêteurs en dernier ressort. C’est ainsi que les Banques centrales des pays A et B, i.e. la Réserve fédérale américaine (FED), la Banque centrale européenne (BCE), la Banque d’Angleterre et du Japon, se retrouvent à pratiquer à intervalles réguliers des politiques monétaires non conventionnelles.


 

 Les « politiques monétaires non conventionnelles » ou « Quantitative easing » (QE) consistent à échanger des bons de Trésor et des créances éligibles et même non éligibles (créances douteuses) contre de la monnaie Banque centrale. En injectant des liquidités dans le système financier, les Banques centrales permettent, comme pour les plans de sauvetage et de relance, à leurs systèmes bancaires respectifs de répondre aux besoins de leurs économies. Ce financement vient évidemment grossir les bilans des Banques centrales. Mais la réduction des créances douteuses (immobilières), l’achat de la dette des Etats, etc., permet d’éviter à ces pays la récession. L’achat, par exemple, des subprimes aux États-Unis permet de doper le secteur de la construction, gros pourvoyeur d’emplois.
 

Imaginons que dans ces injections de liquidités entre les pays A et les B, il se produit un processus de balancier. Quand le pays A émet un surplus de liquidités, sa monnaie se déprécie sur les marchés, ce qui affecte négativement les monnaies des pays B. Par l’appréciation de leurs monnaies, les pays B enregistrent une baisse des exportations (plus chères). Pour baisser le taux de change, les pays B ont le choix, soit d’acheter la monnaie du pays A, i.e. le dollar, ce qu’ils ne peuvent faire puisque cela revient à acheter de la dette de A, et ils sont déjà endettés, soit de procéder à des politiques monétaires non conventionnelles comme le pays A. Et c’est ce qu’ils font. Nous avons ainsi un processus de balancier : « Tantôt c’est A qui émet des liquidités et B s’ajuste, tantôt c’est B qui émet des liquidités et A s’ajuste ».
 

Ainsi, par les achats de bons de Trésor et des obligations s éligibles et non éligibles, des dettes publiques, la FED, la BCE, la Banque d’Angleterre et du Japon Banques centrale européenne ajustent, grâce aux liquidités fournies à leur système bancaire, leurs taux de change sur les marchés dans une fourchette concertée entre les deux parties. De plus, ces pays soutiennent, grâce aux liquidités injectées, les prix des produits à la consommation (subventions), ce qui explique la faible inflation que peuvent susciter ces émissions. Evidemment, ces injections monétaires se traduisent par une hausse de l’endettement des pays A et B. 
 

 Pour les pays du groupe C, la situation est différente. Les excès des liquidités qui ne sont pas « absorbés  » dans les transactions internationales, se « logent » dans les prix du pétrole et des matières premières. Sans la hausse des prix du pétrole, l’excès de création monétaire ne permettra pas aux États-Unis de répercuter leurs déficits commerciaux sur le reste du monde. De même, les autres pays occidentaux, détenteurs de monnaies internationales. Le dollar étant la monnaie de facturation des ventes de pétrole des pays OPEP.
 

Si les matières premières et particulièrement le pétrole ne servaient pas de contreparties productives aux émissions monétaires américaines pour financer leurs déficits extérieurs américains, qui sont récurrents, la valeur du taux de change du dollar par rapport aux autres monnaies internationales ne fera que baisser. Ce qui engendrera une fuite des capitaux des États-Unis au profit des actifs en euro, en yen, en livre sterling, en yuan.
 

Ce qui aura des conséquences désastreuses pour les États-Unis qui devront arrêter d’émettre des liquidités ex nihilo (basée sur rien), mais aussi sur l’économie mondiale puisque les grands pays émetteurs de monnaies internationales procèderont de même. Et c’est d’ailleurs à ce cas que l’auteur veut en arriver dans l’analyse, puisque cette situation n’est que conjoncturelle et même si elle a cours encore aujourd’hui. Nous sommes en 2020.
 

Aussi, en revenant à la représentation schématique du système monétaire actuel, le prix du baril de pétrole a dépassé les 100 dollars, lors de la mise en œuvre des quantitative easing lors de la crise financière de 2008. Une hausse qui s’est étendue aux autres produits de base. Ce qui a suscité une spirale inflationniste dans les pays C. L’Afrique, l’Asie et l’Amérique du Sud sont confrontées à une « spirale inflationniste de hausses des prix des matières premières et alimentaire-hausses des salaires ». Ce qui explique d’ailleurs la prudence des banques centrales européennes et américaines dans l’assouplissement quantitatif. S’ils tirent trop sur la corde monétaire, les « quantitative easing » se traduisent par une crise pétrolière et alimentaire dans le monde.

A l’été 2008, le baril de pétrole a atteint 147 dollars, et tous les prix des matières premières et alimentaires ont connu une hausse similaire. D’ailleurs une grave crise politique est survenue dans le monde musulman, le « Printemps arabe ». Le mal-vivre, le chômage… et la brusque hausse des prix des produits de base de consommation a terminé le reste. Ces craintes poussent les autorités monétaires à imposer aux Etats européens, américains… des cures d’austérité dans le but évident de diminuer la pression sur les quantitative easing que les gouverneurs centraux ne cessent d’avertir qu’ils ne sont qu’un soutien. Que la réduction des déficits budgétaires et commerciaux doit s’opérer et, bien sûr, passer surtout par un gain de compétitivité face aux pays émergents. Ce qui est difficile à regagner, vu l’écart, et ne peut que passer par un processus lent et douloureux. Pour les pays A et B, il y a peu d’alternatives. Les grands travaux publics (politiques keynésiennes) sont difficiles à mettre en œuvre pour la simple raison qu’une grande partie des capitaux injectés vont d’abord soutenir la protection sociale, financer les déficits commerciaux, acheter la dette des Etats défaillants, etc. 
 

Imaginons maintenant que cette spirale d’assouplissement monétaire quantitatif commence à susciter des interrogations dans les pays C. « Combien de temps les Banques centrales des pays A et B doivent recourir à l’assouplissement monétaire quantitatif  » ? Certes ces liquidités injectées, en soutenant les économies des pays A et B, i.e. les États-Unis, l’Europe et le Japon, favorisent aussi le commerce mondial. Les pays C, i.e. la Chine, la Russie, les pays arabes exportateurs de pétrole, etc., continuent d’accumuler des réserves de changes issues précisément de ces liquidités. Et ces réserves de changes sont converties en bons de Trésor américain, européen, etc., parce qu’ils offrent plus de sécurité mais aussi pour les pousser à importer des produits chinois, du pétrole, etc. Cependant le problème de « soutenabilité des dettes publiques pour ces pays va se poser un jour », et une hausse continue des dettes publiques ne peut que nourrir de la défiance. Les risques sur les investissements souverains opérés par la Chine, la Russie et les pays arabes sont réels d’autant plus qu’ils sont libellés en dollars et en euros qu’il ne tient qu’à la FED et la BCE d’en émettre. Le risque est qu’ils se feront à terme « rembourser par l’inflation ».
 

Imaginons qu’un noyau dur des pays C émerge. Très compétitif, ce noyau représente les pays du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). Appelons-le D. Comme on l’a déjà dit, il surpasse les pays A et B dans le commerce international.
 

Imaginons encore un autre pays, le plus puissant du groupe D, i.e. la Chine. Appelons-le E. Non seulement ce pays est l’atelier du monde, mais il cherche à se parer des aléas des monnaies des pays A et B. Par le troc, l’usage des monnaies nationales, l’achat de l’or, l’acquisition des parts d’entreprises et partenariats avec des sociétés étrangères (gazières, pétrolières, etc.), des investissements dans des concessions minières, de terres agricoles pour de longue durée, une diversification des réserves de changes, il s’emploie à diminuer la part du dollar et de l’euro dans ses réserves de changes et ses transactions commerciales. Ce pays E, i.e. la Chine, est conscient que, malgré son statut de deuxième puissance économique dans le monde, sa dépendance sur le plan monétaire à l’égard de l’Occident n’en fait de lui qu’une puissance économique « dominée  » et ses réserves de change accumulées resteront toujours dépendantes de la valeur que la FED et la BCE leur auront attribuée. C’est la raison pour laquelle la Chine a accéléré l’internationalisation de sa monnaie. Plus encore, elle cherche même à facturer ses importations de pétrole et de matières premières en yuans – elle le fait déjà avec certains pays – dans le but évident, lorsque le yuan devient une monnaie internationale, de partager le privilège du dollar, en tant qu’unité de compte internationale. Dès lors, la Chine aura à pratiquer les politiques monétaires d’assouplissement quantitatif, comme les quatre grandes puissances monétaires. Ce qu’elle ne peut faire aujourd’hui, avec son yuan «  dirigé  » et « sous-évalué ». 
 

Si la Chine arrivera à mener à son terme l’internationalisation du yuan, la configuration économique, financière et monétaire du monde changera fondamentalement. Aucune puissance monétaire ne pourrait alors pratiquer une « politique monétaire non conventionnelle ». La raison est simple, les assouplissements quantitatifs menés par les quatre puissances (États-Unis, zone euro, Banque d’Angleterre et du Japon) et la Chine seraient pratiquement « à somme nulle  ». Aucune puissance n’y gagnerait ni ne pourrait répercuter ses déficits sur les « autres pays du monde ». Si ce processus serait prolongé tacitement entre les cinq, la Chine répercuterait à son tour, grâce à son yuan (qui deviendrait monnaie de réserve dans les Banques centrales du monde et de compte internationale sur les marchés), ses déficits sur le « reste du monde ». Ni l’Inde, ni la Russie, ni le Brésil, ni le « reste des pays du monde » n’accepteraient longtemps le monopole monétaire des « Cinq  » (Occident-Chine). Ils vont s’efforcer à contrer ce monopole. Bien sûr dans le temps. Ce qui amènera tôt ou tard au monopole des Cinq et aura pour conséquence la fin des politiques non conventionnelles.

Grâce au contrepoids que sera la Chine sur le plan monétaire international, et de l’avènement d’autres puissances monétaires, l’interdiction des politiques monétaires non conventionnelles susciteront des mesures pendantes : la fin de la hausse artificielle du pétrole et des matières premières et alimentaires qui auront été – on pourra alors parler au passé – des « valeurs refuges du surplus de liquidités émis par l’Occident ». Une fin d’un processus qui sera extrêmement mal vécu pour une grande partie du monde, en particulier ceux qui ont usé de cette donne, i.e. l’Occident et les pays arabes exportateurs de pétrole.
 

  1. La fin des « pétrodollars ». Pronostics sur les événements à venir dans le monde

 On comprend alors pourquoi la fin des « pétrodollars  » et celle de la hausse des prix des matières premières, même si elle a été salutaire à plus d’un titre, aura néanmoins des effets déstabilisants dans nombre de pays. Evidemment, les interférences américaines dans la hausse des prix du pétrole et des produits de base cesseront. Les ajustements des banques centrales occidentales et les émissions monétaires ex nihilo (QE, LTRO, MES, etc.) sur la seule faculté fictive de s’endetter sur soi-même ne pourront plus faire recette. Désormais toute émission de liquidités internationales doit le plus souvent être adossée à des contreparties monétaires productives réelles, et tout excès est sanctionné par les marchés. Un pays dont la monnaie se déprécie voit son gain dans les exportations fortement rogné par la hausse du coût de ses importations. Ces nouvelles donnes amèneront progressivement un consensus, et qui poussera, par conséquent, à une refonte du système monétaire international.

Les États-Unis auront cessé de mener une politique « au bord du gouffre  ». N’échappant pas à la « falaise fiscale » et donc à une limitation de l’endettement, ils auront à opérer, comme l’Europe monétaire, la Grande-Bretagne et le Japon, à des ajustements douloureux de leurs économies. Ces ajustements ont d’ailleurs commencé, des deux côtés de l’Atlantique, depuis 2008. Mais, avec les crises à venir, elles risquent d’être encore plus éprouvantes. Les États-Unis proposent déjà un « OTAN économique », i.e. une zone de libre-échange, compte tenu des nouveaux enjeux dans le monde. Un nouveau type d’« OTAN » deviendra certainement nécessaire.
 

Bien sûr, Donald Trump veut taxer l’Europe et les pays de l’ALENA. Et il a réussi, mais ce n’est que conjoncturel. Les relations entre pays occidentaux se renforceront inévitablement.
 

Si un « fédéralisme fiscal » est mis en œuvre en Europe, il ne sera pas de trop, il atténuera certes le « choc » en limitant la disparité des politiques budgétaires entre les Etats européens, mais n’apportera pas la compétitivité de l’Occident face aux pays du BRICS. Celle-ci doit être regagnée par la « relocalisation », une politique de subvention aux entreprises, un « dégraissage  » des secteurs budgétivores qui ne concourent pas à la croissance, une politique protectionniste ciblée, et surtout « tisser un réseau d’alliance économique avec les aires géopolitiques immédiates ».

L’Occident ne doit plus faire la fine bouche, doit chercher à s’en sortir et il ne pourra pas le faire seul. Cependant, contrairement aux pays arabes exportateurs de pétrole qui resteront dépendants d’un pétrole en chute libre, l’Occident aura assez de ressources en lui pour dépasser les crises et reprendre le cap de la croissance. N’ayant plus le privilège exorbitant de l’« arme monétaire », une « malédiction  » qui trouve son origine dans le « pétrole » par le libellé monétaire et a fait délocaliser une grande partie de son industrie vers l’Asie, il pourra alors compter sur ses propres forces et porter sa « propre locomotive » au lieu d’être une « locomotive pour les autres ».

Quant aux pays arabes exportateurs de pétrole, leurs économies fortement dépendantes des hydrocarbures, la fin des « pétrodollars » sera très mal vécue. Des économies gravement déstabilisées bouleverseront les régimes politiques en place. Le système politique, économique, monétaire et social de ces pays sera remis en cause. Une crise bien plus grave que le « printemps arabe » affectera ces pays. Mais cette « nécessité de l’Histoire » amènera les peuples musulmans, après de nombreux avatars, à sortir des sentiers battus pour reprendre leur destinée en main, et pourquoi pas, de « tisser de nouvelles relations avec leur grand voisin du Nord  », déjà en crise.

Pour la Chine et les pays émergents, les avancées technologiques et leur compétitivité les mettra dans un premier temps relativement à l’abri des retombées mondiales de la crise. Mais il sera certain que la plupart de ces pays auront ensuite à connaître de graves difficultés. L’atelier du monde devra soutenir son économie et augmenter sa consommation intérieure. Le « découplage » des pays émergents des pays occidentaux ne pourrait être ni une solution ni n’apportera la croissance à leurs économies dépendantes des exportations vers les pays du reste du monde (qui leur assurent des importations en pétrole et en matières premières pour leurs économies). Une crise monétaire à l’échelle mondiale retentira certainement sur l’« absorption mondiale », i.e. une baisse de la demande mondiale qui aura des effets négatifs sur leurs exportations. Ce qui se traduira forcément par du chômage de masse et une forte baisse de leur croissance.

Devant cette situation, des accords internationaux seront nécessaires au sein du G20 et dans l’intérêt de tous. Toutes les puissances doivent s’accorder pour « relancer la demande mondiale et diminuer le chômage de masse dans le monde ». Le problème n’est pas que le « yuan détrône le dollar » comme le laissent entendre de nombreux analystes, mais qu’il s’opère une meilleure régulation dans les échanges économiques internationaux, ce qui ne pourrait s’opérer qu’en promouvant une neutralité des monnaies dans les échanges.
 

Certes, avec les nouvelles mesures prises sur le plan d’aides par les grandes économies du monde, par les dépenses publiques, pour contrer la récession qu’a provoqué la pandémie Covid-19, il faut s’attendre à ce que le prix de pétrole remonte très fortement dès que la situation, sur le plan sanitaire, s’améliore, le nombre de cas de contaminés et de décès presque à zéro. Dès lors, le prix du pétrole en hausse jouant de pondérateur dans les émissions monétaires massives occidentales et chinoises principalement – détenteurs des cinq monnaies internationales utilisées par le FMI – pour relancer l’économie mondiale, il faut souligner que cela ne durera qu’un temps, à l’instar de la période 2009-2014. Et donc un QE4 suivi d’un QE5 aux États-Unis et les mêmes QE4 et 5 en Europe, au Japon, et en Chine, selon la taille de leurs économies, dans le cadre de la reprise économique de l’après-Covid-19, seront temporaires.

Et selon l’évolution de l’économie mondiale et des mesures prises par les pays occidentaux et la Chine, après une période de croissance, qui certainement atteindra des limites, puisque le rapport des forces aura à changer inévitablement. Surtout si d’autres grands pays viendront se joindre dans le groupe des « Cinq », l’amenant au groupe des « Six » avec adjonction de la roupie indienne, ou au groupe des « Sept  » avec le rouble russe ou le réal brésilien…Le monde va changer et l’Occident perdra inévitablement le pouvoir financier et monétaire sur le reste du monde. Et ce seront aux tractations à égalité entre ces groupes des « Cinq  », des « Six »… qui auront à penser de l’avenir de l’humanité et de son bien-être.

D’ailleurs, la pandémie Covid-19 peut et probablement va favoriser ce sursaut aux puissances montrant que l’humanité entière est logée à la même enseigne. Et toute situation fâcheuse pour un peuple peut se répercuter sur les autres peuples. Et seule la solidarité peut leur éviter des épreuves graves qui ne feront qu’augmenter les souffrances aux peuples. A voir les situations en Syrie, en Libye… et ailleurs. Alors qu’elles ne relèvent que de stratégies déstabilisatrices et conflictuelles entre grandes puissances pour la mainmise sur le pétrole du Moyen-Orient.

Tels sont les défis qui attendent le monde, après le Covid-19. Une nouvelle page de l’histoire aura à s’écrire pour l’humanité. Et qui changera l’équilibre économique du monde

 

Medjdoub Hamed
Auteur et chercheur spécialisé en Economie mondiale,
Relations internationales et Prospective.

 



2 réactions


  • caillou14 rita 25 mars 2020 10:25

    Avec une telle dette ils sont la première économie du monde ?

    Nous par contre juste une république bananière avec des grandes gueules au pouvoir qui font croire au peuple que nous sommes un grande pays ?

    Notre dette de plus de 4.000 milliards d’euros ne nous sert pas, faut dire que nous avons en gouvernance une bande de « glands » pas piquée des hannetons !

    Des exhibitionnistes du fondements, des branleurs sur smartphone !

     smiley


  • Julot_Fr 25 mars 2020 20:15

    Un pisse crotte globaliste qui s’y voit deja.. Les USA vont tres bien se sortir de la crise car Trump n’est pas vendu aux pouvoirs d’argent contrairement au fascistes qui implementent le confinement et vont detruire leurs economies (donc nos « aquis ») en accordance avec les plans globalistes (= oligarques de la finance).

    Sinon pour elargir, cette crise permet au moins a ces globalistes de passer l’eclatement du systeme financier en cours au second plan, tandis que la Fed deploie une contrefacon infinie d’argent allant directement dans leurs poches : https://www.zerohedge.com/economics/fed-unleashes-unlimited-qe-will-buy-corporates-munis-cmbs


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