samedi 26 novembre 2011 - par Emile Mourey

Mont Beuvray, fausse Bibracte ! Autopsie d’une affaire bien embarrassante

Affaire bien embarrassante pour notre actuel ministre de la Culture qui, avec le retour des Gaulois sur la scène médiatique, se trouve confronté à un dilemme cornélien. Frédéric va-t-il continuer à bouder le Centre archéologique européen du mont Beuvray dédié à la mémoire des Celtes, dernier grand chantier de son oncle François, ou va-t-il enfin s'y rendre, et pour dire quoi ?

Le monde politique est un univers fait de contrastes très étranges. Hier, le 17/09/85, ils avaient tous répondu présents, festoyant sur le mont Beuvray et buvant à la cuvée du père François (sic) mais aujourd'hui, il n'y en a plus qu'un qui gravit la pente, le lundi de la Pentecôte. Il s'agit d'Arnaud, le grand solitaire, mon député, président du Conseil général de Saône-et-Loire que j'ai pourtant prévenu.

Monsieur le Député,

Je vous remercie de l'intérêt que vous avez porté à mes courriers en date des 19/10/1997 et 24/11/1999 au sujet de l'erreur que je dénonce concernant la localisation de Bibracte, ce haut lieu de notre Histoire. Dans votre réponse n°RC/RC/99-2747 du 6/12/1999, vous m'écrivez : « Conformément à votre souhait, je suis intervenu auprès de Monsieur Olivier Girardin, Conseiller technique auprès de Madame la Ministre, afin d'obtenir des informations sur l'avancement de ce dossier ». N'ayant pas été informé de la suite réservée à votre intervention, j'ai l'honneur de vous demander de bien vouloir reposer, une nouvelle fois, la question à l'actuel ministre de la Culture, Monsieur Frédéric Mitterrand. Il me semble que, compte tenu de l'importance du sujet, la question devrait être posée oralement et clairement devant la Représentation nationale et non, discrètement, à l'insu de tous, sous forme de question écrite. Question simple : « Monsieur le Ministre, où est Bibracte ? »

M'inspirant, par analogie, de l'article 40 du Code de procédure pénale qui fait obligation à toute autorité constituée qui acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit d'en avertir sans délai le Procurateur de la République, vous comprendrez, Monsieur le Député, qu'en tant que simple citoyen, il était et il est encore de mon devoir d'alerter les autorités de l'Etat, et ce par la voie hiérarchique démocratique dans laquelle vous vous inscrivez puisque vous êtes mon député. Il s'agit tout de même d'une affaire de 35 millions d'euros sur laquelle les contribuables méritent d'être informés (cf article Agoravox du 24/11/2011 http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/bibracte-au-mont-beuvray-une-104874.)

En vous remerciant par avance, veuillez croire, Monsieur le Député, à mon entier dévouement en faveur du rayonnement culturel de notre pays et de la Bourgogne.

Post scriptum.

C'est par le fait du hasard et d'un concours de circonstances que je me suis rendu acquéreur, avec mon épouse, de la propriété dite du château de Taisey. C'est en faisant des recherches dans les archives pour retrouver l'histoire du site que je me suis rendu compte qu'il fallait placer ici l'antique Cabillo dont parlent les textes grecs et latins. C'est en retraduisant le texte de César que je me suis rendu compte qu'il fallait placer Bibracte à Mont-Saint-Vincent et non au mont Beuvray.

Le 30/10/81, étant invité avec des représentants de la Culture et d'autres officiers, à une réunion sur le site d'Alise-Saint-Reine, j'ai apporté mon soutien au professeur Le Gall, en tant que latiniste et militaire, mais tout en faisant des réserves sur son explication de la bataille ; je cite le journal Le Monde du 11/11/81 : ces propos ont été approuvés par au moins l'un des invités : le lieutenant-colonel Mourey. Au cours du déjeuner qui a suivi, j'ai mis en doute la localisation du site de Bibracte, malheureusement sans succès. De là date ma décision d'écrire et de me battre jusqu'au bout.

Le 23/12/1992, j'ai fait paraître un article à mes frais pour annoncer la parution de mon premier ouvrage dans lequel je dénonce, arguments à l'appui, l'erreur de localisation de Bibracte. A ma grande surprise, le journal de Saône-et-Loire m'a devancé en publiant un article le 22/12, soit un jour avant, tout en me présentant comme un original.

Même refus de la part de la Société éduenne d'Autun qui a refusé de m'entendre (JSL du 3/3/1994).

Même refus de la part de la Société d'Histoire et d'Archéologie de Chalon-sur-Saône dont j'étais membre qui s'est désolidarisé de ma démarche par lettre en date du 10/11/1995.

Autorité officiellement reconnue et Directeur du Centre archéologique européen, M. Vincent Guichard a clairement fait savoir dans une interview accordée à France culture le 11/02/95 qu'il ne fallait pas recommencer une polémique comme celle qui a eu lieu pour Alésia. Puis sur FR 3 Bourgogne, le 13 avril 1999, il a refusé de débattre avec moi sous prétexte que : « Dans la communauté scientifique, ça fait belle-lurette que plus personne ne doute. Ça fait au moins 130 ans que plus personne ne doute de la localisation de Bibracte, capitale des Eduens, mentionnée par César à multiples reprises, sur le mont Beuvray. C'est absolument clair. » http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/on-ne-va-pas-recommencer-une-103035

Auteur de multiples lettres écrites adressées notamment à des députés dont certains ont bien voulu intervenir, je n'ai obtenu jusqu'à ce jour de la part des ministres de la culture que des réponses "langues de bois", y compris au journal officiel http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/faut-il-supprimer-le-ministere-de-49382 ; et même des réponses insultantes http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/le-ministere-de-la-culture-m-a-tue-85734. Après le départ à la retraite de M. Christian de Monner de la Sous direction de l'archéologie, j'ose espérer un peu plus de sérieux. Que M. Christian de Monner n'ait pas réussi à faire accepter son projet de statut des archéologues, je n'y suis pour rien et ce n'est pas une raison pour avoir traité mon dossier dont il était chargé comme il l'a fait. 

Les témoignages en ma faveur que m'adressent des personnalités dont le sérieux ne peut être mis en doute m'encouragent à persévérer. http://www.bibracte.com/temoignages.html

En outre, après les 188 articles dans lesquels j'ai soumis, depuis 2006, mon argumentation au débat public du journal internet citoyen Agoravox, ainsi qu'au Web, j"estime aujourd'hui, au vu des avis favorables que je recueille, qu'il appartient maintenant aux autorités responsables, au plus haut niveau, de répondre publiquement à la question qui leur est posée : « OÙ EST BIBRACTE ? »

Monsieur le Député, je remets mon sort entre vos mains et entre leurs mains.



9 réactions


  • Emile Mourey Emile Mourey 26 novembre 2011 10:09

    Lire également procureur au lieu de procurateur


  • Antenor Antenor 26 novembre 2011 14:22

    Tout cette affaire montre que dans l’étude de l’histoire des Celtes les archéologues dépassent leurs prérogatives.

    Beaucoup d’archéologues sont aussi historiens et c’est bien normal. Mais cette double casquette d’archéologue/historien ne peut en aucun cas constituer un argument d’autorité par rapport aux historiens non archéologues en ce qui concerne l’identification des sites gaulois.

    Toute personne informée des résultats des fouilles a autant de légitimité qu’eux pour s’atteler à cette tâche. Ce n’est pas le rôle des archéologues d’écrire l’histoire. Si ils souhaitent le faire, ils doivent le faire en tant qu’historiens. L’archéologie est au service de la rédaction du récit historique et pas l’inverse. Les fouilles archéologiques ne doivent pas devenir un but en soit.

     


    • Antenor Antenor 26 novembre 2011 14:35

      On lit souvent la formule journalistique « les vestiges parlent ». Pour être tout à fait exact, on les fait parler. On leur pose des questions qui ne sont pas neutres et on obtient en retour des réponses qui ne le sont pas non plus. Elles sont orientées par les questions.

      Le cas de l’anneau en sapropélite évoqué par Emile dans un article précédent l’illustre à merveille :

      http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/bibracte-la-decouverte-qui-tue-101713

      La technique aussi pointue soit-elle ne peut en aucun nous dispenser d’un raisonnement global. Les techniciens ne peuvent prétendre s’élever au-dessus des autres dans ce domaine.


    • Emile Mourey Emile Mourey 26 novembre 2011 15:14

      @ Antenor

      Oui, c’est le problème des technostructures que Chirac évoquait et qui imposent leurs points de vue, leurs idées ou leurs fantasmes, et pas seulement en archéologie mais aussi dans d’autres domaines. C’est le règne des experts, ou des soi disant experts, que les responsables politiques sont bien contents de trouver pour ouvrir le parapluie.

      Les générations qui nous ont précédés avaient leurs sociétés savantes. Cela coûtait beaucoup moins cher à la nation et elles étaient ouvertes à tous les citoyens sans distinction de grade ou de fortune. Aujourd’hui, l’archéologie est devenue une chasse gardée où tout étranger qui oserait s’y introduire est très mal vu. Cette technostructure a ses penseurs, ses découvreurs et ses guides reconnus. Pas toujours d’accord entre eux mais qui font bloc quand il le faut pour faire face au danger commun qui vient de l’extérieur.

      Comme vous le dites, il faut faire une différence entre la pratique des fouilles et l’interprétation de ce qui est mis au jour. La pratique des fouilles est une technique, une technique qui s’apprend et qui se pratique suivant des règles et des principes. On ne s’invente pas, comme cela, technicien de fouilles. L’interprétation, c’est autre chose. Il est bien entendu que l’archéologue est le premier intéréssé mais il n’est pas le seul. Il a donc le devoir d’expliquer, de justifier son interprétation et d’accepter le débat. C’est ce que nous demandons. Force est de constater que nous sommes devant un mur.

      Cet exemple est très grave. Cela signifie que le citoyen, autrement dit le peuple, aura perdu une liberté qu’il avait jusqu’à maintenant. Cela signifie que, dans d’autres domaines, il perdra d’autres libertés et que notre société risquera d’évoluer dans un sens de type mafieux où les représentants de la nation n’ayant plus aucun pouvoir ou autorité sur des oligarchies partisanes, le citoyen électeur n’aura, lui aussi, plus aucun pouvoir par son vote.

    • Emile Mourey Emile Mourey 26 novembre 2011 17:51

      @ Ti Pol

      Oui, c’est une bonne idée. Mais la télévision, je m’en méfie. Déjà que sur FR3 Bourgogne, on a essayé de me piéger comme je l’explique... http://www.agoravox.fr/ecrire/?exec=articles&id_article=103035,
      prudence.

  • Emile Mourey Emile Mourey 26 novembre 2011 18:06

    @ Antenor

    Je viens d’envoyer l’article à la responsable du projet Sirius, Jamila BOUTEBEL. Le projet Sirius est un projet mis en place par M. Montebourg. C’est « une vaste démarche conduisant à concevoir un projet de développement partagé à horizon de 20 ans pour la Saône-et-Loire » en demandant à chaque citoyen d’y participer activement « pour orienter la décision publique ».

    Je fais confiance à Jamila Bouterel pour qu’elle propose notre article au « grand jury des sages » qui l’examinera. Je ne doute pas qu’il soit pris en considération (M. Vincent Guichard, archéologue, est membre de ce jury et connait la question).

    • Antenor Antenor 26 novembre 2011 18:32

      En fait, on peut se demander si la question de la localisation de Bibracte, Gergovie, Lutèce etc... les intéresse vraiment.

      Ils utilisent ces noms accrocheurs pour attirer l’attention sur leur travail, c’est compréhensible, surtout en période de vache maigre. Mais le fait qu’ils se présentent aux médias avant tout comme des archéologues plutôt que comme des historiens me fait douter de leurs motivations réelles. J’ai l’impression que les fouilles sont leur unique préoccupation. Leur but principal ne semble pas être de localiser Bibracte et Gergovie mais de fouiller le plateau de Corent et le Mont-Beuvray. Si c’est le cas, ils ne faut pas qu’ils se plaignent que d’autres fassent leurs propres recherches et critiquent leur façon de procéder.


    • Emile Mourey Emile Mourey 26 novembre 2011 19:28

      @ Antenor

      Et cela débouche sur une situation complètement absurde. Ayant décidé une bonne fois pour toutes que ce qui est en pierre est romain et que ce qui est gaulois n’était qu’en bois, ils en font, comme ils le disent, un marqueur. Cela signifie que tout ce qui est construit en pierre sur les points forts du terrain, et même ailleurs, ne peut être que du Moyen âge ou du gallo-romain. Il s’ensuit qu’ils en sont réduit à ne trouver principalement du gaulois que dans la plaine, en dehors des points forts du terrain. Et comme, en plus, ils ne retiennent comme gaulois que la trace des maisons en bois, on peut dire que c’est le serpent qui se mord la queue. C’est une véritable histoire de fous. En fait, ils ne trouvent que ce qu’ils ont envie de trouver. La conséquence, c’est qu’ils arrivent à l’interprétation d’une Gaule composée de bourgs - qu’ils prennent pour des villes - et de fermes retranchées - qu’ils prennent pour les demeures de l’aristocratie dont parle César - alors qu’en réalité, cette aristocratie est à replacer sur les sites fortifiés où nous situons Bibracte et Gergovie.

      J’avoue que durant toute ma carrière militaire et ma vie, je n’ai jamais vu quelque chose de plus insensé que cette interprétation.

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