Nettoyage ethnique du passé
Dans un article bien documenté et clair, franceinfo[1] nous informe qu’après l'accord de cessez-le-feu, plusieurs monastères de l'église apostolique arménienne qui vont se retrouver dans une zone contrôlée par l'Azerbaïdjan, courent un grave danger de destruction.
Effectivement, quand on voit la véhémence, voire la haine avec laquelle le « président » azerbaidjanais parle des Arméniens qu’il traite de « chiens », on peut légitimement craindre le pire pour tout ce qui rappelle le caractère arménien millénaire de la région de l’Artsakh (Haut-Karabagh).
Et les bombardements des villes d’Artsakh et de la population civile avec des bombes à sous-munitions et au napalm, n’augurent rien de bon non plus. En réalité, cela équivaut à des crimes de guerre et une volonté génocidaire. Pareille pour la culture et les monuments, ils n’ont aucune chance de survie à la sauvagerie…
Plusieurs monastères de l'église apostolique arménienne, dont celui millénaire de Dadivank, sont situés dans des zones qui vont revenir sous contrôle azéri, suscitant de nombreuses interrogations sur le sort de ce patrimoine religieux, historique et culturel[2].
L'origine arménienne de ces sites est déjà réfutée par les Azéris, malgré l’évidence même de cette appartenance. Les Azéris tentent de justifier leur mainmise sur la région pour des « raisons d’appartenance historique ».
Pour preuve de la « bonne volonté » des Azéris : Dans un tweet publié mercredi 11 novembre, un responsable azerbaïdjanais a affirmé que le monastère de Dadivank, qu'il nomme du nom azéri de Khudavang, est « l'un des meilleurs témoignages de l'ancienne civilisation albano-caucasienne ». « Le complexe monacal de Khudavang a été ensuite occupé par les forces armées arméniennes en 1992, et victime d'altérations et de falsifications pour modifier ses origines et son caractère, en violation de la charte de 1954 de l'Unesco », assure Anar Karimov, vice-ministre et ministre de la Culture par intérim[3].
Effacer l’histoire de l’autre, voilà l’objectif azéri
Nous savons que les événements climatiques extrêmes, les révolutions, les émeutes et en général toutes les situations chaotiques exceptionnelles sont propices au pillage et la rapine.
La guerre stimule tous ces instincts, avec, en plus, le sentiment d’accomplir une œuvre « d’intérêt national ». Piller, saccager, détruire, voler tout ce qui représente la culture et les croyances des autres – des ennemis – est une activité, non seulement lucrative, car tout peut être monnayé, mais aussi salvatrice pour la nation.
Les récents événements produits en Afghanistan avec la destruction des Boudas géants, en Syrie avec, entre autres, la destruction de Palmyre, la destruction du patrimoine culturel et cultuel dans la partie de Chypre occupée illégalement par la Turquie, le pillage et la destruction des trésors des musées d’Irak ou encore au Mali avec la destruction des mausolées de Tombouctou, avant l’intervention française… la liste est longue et elle n’est pas près d’être fermée.
Le sort réservé à tout ce qui rappelle l’arménité et le christianisme dans les territoires de l’Artsakh occupés par les Azéris fait craindre le pire : une destruction pure et simple, un génocide culturel. Personnellement, je qualifierais ça de nettoyage culturel du passé.
D’ailleurs, selon plusieurs témoignages concordants, la destruction a déjà commencé (voir photo, Chouchi) ; y aurait-il une volonté de rendre cette occupation irréversible, que ça ne m’étonnerait pas.
Les azéro-turcs ont poursuivi le travail génocidaire de leurs grands-pères contre les Arméniens ; ils n’ont toujours pas réussi à les éliminer physiquement. Ils s’en prennent également à leur histoire et leur culture, tentant de l’effacer purement et simplement, à travers la destruction de leurs monuments. Bref, ils essaient d’effacer la mémoire de ces lieux, arméniens depuis des millénaires.
Vous pouvez détruire ou détourner les monuments d’autres cultures, vous ne pourrez jamais effacer des cœurs des Arméniens, et de l’histoire des Arméniens - qu’ils vivent en Arménie ou aux quatre coins du monde - leur amour pour cette terre, leurs souvenirs et leur volonté farouche de défendre et transmettre leur langue et leur culture.
Erdogan, l’acolyte d’Aliev (les deux grands démocrates devant l’éternel) a transformé Sainte-Sophie en mosquée ; personne, même pas les Turcs, ne pensent un seul instant qu’il s’agit d’une mosquée (sauf peut-être les Loups gris et Erdogan, mais pour d’autres raisons). Sainte-
Sophie serra toujours la basilique byzantine construite bien avant que les Turcs ne partent du fin fond de l’Asie…
Les monuments de l’Artsakh, même détruits, désacralisés, détournés, seront toujours des monuments et des symboles arméniens.
Je finis ce papier par un vieux proverbe chinois, qu’un vieux chinois m’a confié un jour à Paris, en ces termes ; j’en fais la transcription dans les termes exacts, qu’il a employés : « Un paysan cantonnais possédait une grande ferme avec des chevaux, des cochons, des poules et des lapins. Une jument, sur le point de mettre bas s’est montrée extrêmement imprudente : elle est sortie courir dans la prairie. Comme il fallait s’y attendre, elle a senti les premières contractions. Elle s’est alors précipitée vers l’étable où elle avait un endroit bien propre et douillet pour accoucher. Mais, car il y a toujours un mais, elle n’a pas réussi à atteindre l’étable et a mis bas dans la porcherie. Depuis, tout le monde se demande au village cantonnais, si l’être né dans la porcherie est un cochon, puisque né, justement, dans une porcherie… » A méditer !