Où en est le « projet Zhou » ?
Le 26 mai 2011, une décision historique devrait être prise à Deauville lors du sommet du G-8, avec la création d’une nouvelle monnaie de réserve qui devait remplacer le dollar US en tant qu’étalon monétaire international. Ce projet incarné à l’époque par Strauss-Kahn et soutenu par la Chine devra attendre, car son principal défenseur s’est retrouvé brutalement hors-circuit et il en va des intérêts des Etats-Unis.
Ce projet de création d’une nouvelle monnaie de réserve avait été initié par la Chine en 2009 par le gouverneur de la Banque centrale chinoise Zhou Xiaochuan. Déplorant que le projet de l’économiste américain Keynes de créer une monnaie internationale (le Bancor) n’ait pas été concrétisé à l’issue de la Seconde Guerre mondiale ( https://fr.wikipedia.org/wiki/Bancor ) , il avait proposé d’utiliser les droits de tirage spéciaux du FMI pour réparer cette erreur. Les Etats-Unis avaient alors accepté un triplement des ressources du FMI et l’émission par celui-ci de droits de tirages spéciaux (DTS) d’une valeur de 250 milliards de dollars, lors du sommet du G-20 à Londres, en avril 2009. Ils avaient également admis le principe d’un Conseil de stabilité financière auquel auraient été associés les grands Etats émergents. Cette idée a été discutée au sommet du G-8 à L’Aquila (Italie), en juillet 2009.
La Russie avait alors proposé de ne pas se contenter d’une monnaie virtuelle, allant jusqu’à faire frapper symboliquement des prototypes de cette monnaie. Ce projet n’avait rien d’une plaisanterie puisqu’il a été soumis aux experts de la division des affaires économiques et sociales de l’ONU dont le rapport a été étudié en avril 2010 lors d’une réunion conjointe du FMI et de la Banque mondiale. Le processus devait aboutir au sommet du G-8 à Deauville. Le dollar aurait cessé d’être la monnaie de référence et Washington aurait renoncé au financement de son hyper puissance militaire par la dette pour se consacrer à sa restructuration interne, ce qui représentait en fait un véritable séisme politique pour le parti Républicain américain. Le Président Obama semblait favorable à l’aboutissement du projet, mais des initiatives militaires et politiques semblent avoir bouleversé ce plan, à moins que Washington ne fût de mauvaise foi et n'ait fait des concessions que pour gagner du temps, ce que la brutale mésaventure d’un DSK libidineux piégé par un scenario machiavélique semble étayer.
C’est qu’entre temps, Kadhafi avait vite fait sien le projet de création d’une nouvelle monnaie de réserve. Le dinar libyen était même devenu la première monnaie au monde garantie en or et en droits de tirages spéciaux du FMI. En 2000, le colonel Kadhafi avait imaginé de créer une monnaie panafricaine basée sur l’or, mais il n’était pas parvenu à faire avancer son idée. Aussi, en 2009, s’était-il spontanément emparé du projet Zhou et l’avait carrément adopté pour son pays. De ce fait, la Libye jouait un rôle capital pour l’aboutissement du projet "Zhou Xiaochuan" en disposant en outre d’un fonds souverain parmi les mieux dotés du monde. Au moment de son arrestation, DSK partait à Berlin pour rencontrer la chancelière Angela Merkel. Il devait ensuite partir avec un émissaire de Mme Merkel négocier avec le colonel Kadhafi pour peaufiner le montage.
Depuis cet épisode resté en suspens pour les raisons que l’on connaît, la France et le Royaume-Uni ont commencé par provoquer un gel des avoirs de la famille Kadhafi et de l’Etat libyenen entrant en guerre contre la Libye. L’édifice élaboré par Dominique Strauss-Kahn s’est alors effondré. On sait maintenant jusqu’où est allée cette guerre financière qui n’est d’ailleurs pas terminée : l’éclatement d’une nation et la disparition d’un état avec tous les contrecoups régionaux dans la déstabilisation du nord de l’Afrique. On sait maintenant jusqu’où peuvent aller les Etats-Unis pour maintenir leur monnaie dans une position hégémonique et en tirer le maximum de profit possible. Mais la Chine a-t-elle renoncé pour autant au projet « Zhou » ?.