jeudi 6 avril 2023 - par Desmaretz Gérard

Paléontologie : l’ère des dinosaures

Pour la première fois en Europe, le squelette d'un Tyrannosaurus Rex espèce parmi les plus grands prédateurs ayant vécu sur Terre sera mis en vente aux enchères le 18 avril 2023 par la maison Koller à Zurich. Le squelette de 11,6 mètres de long et 3,9 mètres de haut, vieux de 67 millions d'années est visible sur rendez-vous dans la Tonhalle (Zurich) Le squelette a été reconstitué à partir de trois spécimens différents mis au jour entre 2008 et 2013 dans les formations de Hell Creek ( Montana) et Lance Creek (Wyoming). La mise à prix de départ est estimée 6 et 8 millions de francs suisses (6,11 et 8,15 millions d'euros). Seulement 32 squelettes de T-rex adultes ont été retrouvés à ce jour, et un Tyrannosaurus rex a été adjugé en 2020 pour 31,8 millions de dollars

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L'histoire de la Terre est écrite par les fossiles et leur classification dans le temps entraîne celle des terrains. Les terrains et les époques qui leur correspondent se groupent en cinq grandes ères : archéozoïque - paléozoïque - mésozoïque - néozoïque - quaternaire. Chaque époque a été divisée en systèmes : Permien, Carbonifère, etc., puis subdivisée en un grand nombre de séries : Supra-crétacé, Infra-crétacé, etc., et en étages qui tirent le plus souvent leur nom de celui d'une région où le terrain présente un aspect caractéristique : Portlandien, Oxfordien, etc.

Très populaires auprès du public, les dinosaures (terme proposé en 1842 par Richard Owen et signifiant très grand lézard en grec) ont dominé l'ère Mésozoïque pendant 160 m.a. Le Mésozoïque ou secondaire est divisé en trois périodes : Trias (250 millions d'années) - Jurassique - Crétacé la plus récente (100 m.a). Au début la Terre ne forme qu'un seul continent, la Pangée entourée de la Panthalassa, avant de se séparer au Trias/Jurasique en deux continents, le Gondwana au sud et le Laurasie au nord.

Au Jurassique le climat favorise le développement de vastes forêts et voit l'apparition des sauropodes (dinosaures herbivores à quatre pattes pourvus d'un long cou et d'une grande queue) et des théropodes (dinosaures carnivores qui marchent sur leurs pattes arrières). Les sauropodes (Diplodocus, Melanosaurus, Giraffatitant) et les théropodes (Tyrannosaurus, Velociraptor, Spinosaurus) sont des saurischiens, leur bassin évoque celui des lézards (l'os pubien pointe vers l'avant), les ornithischiens (Stegosaurus, Triceratops, Ankylosaurus) ont un bassin semblable à celui des oiseaux (os pubien orienté vers l'arrière).

Au XVI° siècle, Pierre Belon remarque des similitudes entre le squelette humain et celui de l'oiseau (humérus, radius, cubitus et carpes). Buffon développe, vers 1760 l'idée, « qu'il y a des espèces perdues, c'est à dire des animaux qui ont autrefois existé et qui n'existent plus ». L'abbé Giraud-Soulavie dans histoire naturelle de la France méridionale (1783) établit le principe de la stratigraphie et souligne que les fossiles sont distribués par couches de divers âges. Georges Cuvier démontre : « que les espèces d'éléphants fossiles différent des éléphants actuels et constituent une espèce éteinte ». En 1809 Lamarck affirme que « les vivants descendent les uns des autres par voie de transformation et qu'il faut retrouver leurs généalogies ».

La paléontologie, terme créé par H. de Blainville en 1834, a pour objet d'étude les êtres qui ont vécu à la surface du globe terrestre avant les temps actuels. Il y a 250 millions d’années, les Archosaures se sont scindés en deux groupes, l’un a donné des animaux ressemblant à des oiseaux qui ont évolué en dinosaures, en ptérosaure et en oiseaux ; le deuxième a donné les alligators, les crocodiles et quelques autres espèces disparues. La découvert en 2015 dans le sud de la Tanzanie d'un squelette de Teleocrater rhadinus, un carnivore ressemblant à un crocodile de 2 à 3 mètres de long avec un long cou a confirmé qu'il s'agissait du « chaînon manquant entre les dinosaures et l'ancêtre commun qu'ils partagent avec les crocodiles ». Quant aux oiseaux, ils ont évolué à partir d’un groupe de dinosaures théropodes, les Maniraptoriens, il y a 160 m.a. « Au fil du temps, les Maniraptoriens ont développé des caractéristiques de plus en plus aviaires, comme des plumes, des os pneumatiques et des poignets flexibles qui ont permis un battement d’ailes plus efficace. Ces caractéristiques ont aidé cette espèce à devenir des animaux volants primitifs, comme l’Archéoptéryx, qui ont finalement évolué en oiseaux modernes ».

Dès 1862 Albert Gaudry entreprend d'établir les relations généalogiques de mammifères fossiles et actuels. Le postulat de l'évolution présuppose que les mammifères et les oiseaux (Aves) dérivent des reptiles - les reptiles des amphibiens - les amphibiens des poissons. « En fait, tous les amphibiens, reptiles, oiseaux et mammifères possèdent quatre membres similaires, similitudes anatomiques utilisées comme preuve d'une ascendance commune. En d'autres termes, ces similitudes suggèrent que les ptérodactyles, les chauves-souris, les faucons, les baleines et les humains partagent tous un ancêtre commun quelque part dans leur passé lointain  ».

Le premier squelette de dinosaure découvert en 1822 fut nommé Iguanodon en raison de sa denture. L'étude des dinosaures repose sur l'examen de leurs os, attaches musculaires, articulations, mâchoires, organes internes, les coprolithes (selles) informent sur le régime alimentaire, les empreintes au sol précisent la taille et le poids, s'ils vivaient en groupe, la distance entre les pas s'ils se déplaçaient rapidement, et les fossiles végétaux de reconstituer leur environnement. D'après les fossiles retrouvés, 65 % des dinosaures (Ornithichiens et Sauropodes ) se nourrissaient de plantes, et 35 % étaient carnivores (Saurischiens et Théropodes). Les meilleurs chasseurs et charognards auraient été les dinosaures pesant entre 500 kg et une tonne.

Une quarantaine de nouvelles espèces de dinosaures est découverte chaque année. Les scientifiques ont identifié à ce jour près de 800 espèces de dinosaures allant du Microraptore de la taille d'un poulet qui se nourrissait d'insectes, aux plus massifs comme l’Argentinosaurus ou le Brachiosaurus qui pesaient près de 80 tonnes. Les dinosaures de type Tyrannosaure devaient vivre 25 ou 30 ans alors que les dinosaures de type Apatosaurus, herbivore de 30 tonnes pouvaient atteindre l’âge de 80 ans, et seulement quelques années pour les dinosaures d’une taille inférieure à 1 m de haut. « chez les dinosaures, la taille adulte, grande ou petite suivant les espèces, était liée soit à la vitesse de croissance, soit à la durée de celle-ci, les deux facteurs pouvant être impliqués à parts égales ». Eric Buffetaut, directeur de recherche émérite au CNRS.

Les variétés de mammifères et de reptiles actuelles ne sont pas toutes comparables aux formes anciennes et ne partagent qu'un nombre restreint d'ancêtres communs. Des espèces différentes mais proches selon les critères communs retenus sont regroupées en : espèce, genre, famille, ordre, classe, embranchement et règne. « La difficulté de la classification réside dans le choix des critères pour regrouper les êtres vivants : l’anatomie, la physiologie, le mode de vie, vitesse et durée de leur croissance ». La phylogénétique groupe les êtres vivants proches entre eux génétiquement. «  Les progrès en génétique permettent d’affiner ou de modifier les classements en mettant en évidence des liens de parenté parfois insoupçonnés, jusqu'à remettre en question l’existence de groupes traditionnels de la classification scientifique Les ressemblances apparentes peuvent être de simples effets de convergence liés à des adaptations similaires au même milieu. Les ailes des oiseaux et des chauves-souris sont des caractères analogues en tant qu'ailes, car ces deux ailes ne sont pas héritées d'un ancêtre commun ailé ».

Les scientifiques calculent l'indice de similitude globale défini selon des caractéristiques : morphologiques, anatomiques et moléculaires afin de reconstituer un arbre phylogénétique. La méthode cladistique postule : « un caractère ancestral ou plésiomorphie est un caractère qui n'a pas subi de modification au cours de l'évolution. (...) Inversement, un caractère dérivé ou apomorphie est un caractère nouveau qui est le résultat d'une modification d'un caractère ancestral au cours de l'évolution. (...) Les poissons ont depuis longtemps quatre nageoires (caractère ancestral plésiomorphie). Cet état de caractère s'est transformé en un nouvel état : quatre membres marcheurs des Tétrapodes qui constituent un caractère dérivé (apomorphie) par rapport au caractère ancestral. Dans l'exemple, tous les poissons actuels ont toujours le caractère ancestral «  nageoires  ». Un caractère ancestral n'est donc pas synonyme de caractère disparu puisque il peut s'être maintenu dans de nombreuses lignées ».

La fin du Crétacé est marqué par la disparition des dinosaures, plus de 80 hypothèses sont avancées pour expliquer leur extinction il y a environ 65 m.a. Reptiles qui en mangeaient les œufs, dinosaures dévorés par des carnassiers, le refroidissement, le manque d’oxygène, absence de nourriture, éruptions volcaniques du Deccan (Inde), pluie de comètes, etc. La plupart des scientifiques retient l'impact d'une météorite de 1.000 milliards de tonnes, vitesse de 40.000 km/h, dans la péninsule du Yucatán (Mexique). Le cratère de Chicxulub, 180 km de diamètre et 20 km de profondeur pour une superficie de 25.000 kilomètres carrés figure parmi les cinq plus grands cratères d'impact découverts sur Terre à ce jour. Si cette explication fut suggérée en 1980, il a fallu attendre les années 1990 pour en avoir confirmation. Les chercheurs estiment que l'astéroïde mesurait une dizaine de kilomètres de diamètre et que l'impact aurait libéré une énergie estimée à 100.000 gigatonnes de TNT, soit plusieurs milliards de fois la bombe atomique d'Hiroshima. L'impact aurait déclenché des raz de marée, des incendies et la roche terrestre fondue de remplir l’atmosphère de poussières engendrant un « hiver d’impact » et perturbant la chaîne alimentaire pendant plusieurs années.

La crise du Crétacé-Paléogène (K-Pg), la cinquième que la Terre ait connu, a entraîné l’extinction sélective de 75 % des espèces vivantes. Si les Plésiosaures, Mosasaures ont disparu, 72 % des raies et 59 % des requins y ont survécu. Faut-il y voir les prémices du gradient latitudinaire ? Les chances de survie des vertébrés marins sont corrélées à leur répartition géographique : « 10 % pour les espèces aux basses latitudes contre plus de 70 % pour celles restreintes aux hautes latitudes » (G.Guinot). Il reste toutefois à résoudre l'écart entre la datation de l’âge du cratère et celui de la disparition des dinosaures, « fourchette » estimée à 32.000 ans. Selon une étude britannique conduite par les universités de Reading et de Bristol (Royaume-Uni), les dinosaures étaient déjà sur le déclin lorsqu’une météorite a frappé le Yucatán. Les dinosaures ont erré sur Terre pendant 165 millions d’années : durant les 120 premiers millions d’années, leur nombre augmentait, mais quelques dizaines de millions d’années avant la chute du météorite, quelque chose a commencé à les tuer à petit feu. Une remarque, une correction, une précision ?

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8 réactions


  • Étirév 6 avril 2023 14:51

    « L’histoire de la Terre est écrite par les fossiles… »
    L’histoire de la Terre est, d’abord, écrite par les hommes.
    À ce propos, ne pourrait-on pas donner au soi-disant « âge de pierre » un tout autre sens que celui que lui attribuent les préhistoriens ?
    NB : Après la période azoïque (sans vie), la Terre s’était couverte d’une subite végétation. Mais les espèces apparues dans la primitive période de vie (époque de transition) ne ressemblaient pas à celles que nous connaissons actuellement. C’était une végétation bizarre, des Lycopodes, des Fougères arborescentes et bien d’autres perdues aujourd’hui, qui devait être suivie d’une animalité ayant aussi des caractères extraordinaires, des grands sauriens, des chauves-souris gigantesques.
    Puis, changement à vue, pourrait-on dire, une seconde Epoque surgit pendant laquelle une nouvelle végétation apparaît, des conifères, des cycadées, et une nouvelle animalité s’en dégage : les Didelphes. En même temps, des Graminées apparaissent et sont suivies de l’apparition des insectes. Alors aussi apparaît la grande famille des Monocotylédones (genre palmiers) et, dans la sous-période jurassique, elle prend les caractères d’une vie animale, celle des oiseaux.
    Arrive l’époque tertiaire et toutes les conditions de la vie organique changent encore, Une végétation nouvelle surgit : les Dicotylédones, et, après eux, issus d’eux, les grands mammifères.
    Dans l’Eocène, sous-période de l’époque tertiaire, apparaît l’arbre mystérieux, embryon du genre humain, dont toutes les Ecritures sacrées ont parlé, parce que son passage à la vie animale avait été vu des premiers hommes.
    Comment, dans cette vie végétale, s’introduisit le principe de la vie animale, là est le mystère ! Mystère si grand, que chacun y a regardé et n’a rien vu ; la science des orgueilleux, fatiguée de rechercher des ressemblances qui n’existent pas, a conclu à la négation.
    C’est qu’il fallait regarder autrement.


    • Montdragon Montdragon 6 avril 2023 20:01

      @Étirév
      "Après la période azoïque (sans vie), la Terre s’était couverte d’une subite végétation.

      "
      Vous allez très très vite en besogne, il a fallu que qu’une bactérie sociale , les stromatolithes, s’agrègent et produisent de l’oxygène, puis que l’oxygène réduise le fer marin, etc...tout ceci en joyeusement quelques centaines de millions d’années.


    • Gollum Gollum 6 avril 2023 20:10

      @Étirév

      qui devait être suivie d’une animalité ayant aussi des caractères extraordinaires, des grands sauriens, des chauves-souris gigantesques.

      Quand etirev s’amuse à faire de la science c’est aussi fun que Mélusine avec sa psychologie de bazar à grande dose de Freud.. 

      Vos chauves-souris gigantesques ce sont des ptérosaures, reptiles volants qui ont des ailes en effet ressemblant à celles des chauve-souris, mais de grâce achetez vous un bon bouquin et bossez un peu ça vous fera pas de mal... smiley

      Au lieu de juste regarder les images.. smiley


  • Brutus paparazzo 6 avril 2023 17:14

    «  La mise à prix de départ est estimée 6 et 8 millions de francs suisses (6,11 et 8,15 millions d’euros). »

    La seule valeur de ces squelettes est scientifique, pas commerciale, et personne ne devrait en être « propriétaire », si ce n’est un état pour les protéger tant que les états existent, à moins que l’UNESCO soit détentrice du patrimoine de la terre ?

    Mais le but de ces ventes n’est-il pas de faire monter les enchères pour revendre très cher les acquisitions à des musées ? Comme c’est le cas pour les œuvres d’art ? De la spéculation de haut vol, un vol qui n’a pas besoin d’ailes. !


    • ZenZoe ZenZoe 7 avril 2023 15:22

      @paparazzo
      Je crois que l’arnaque n’est pas là.
      Les musées publics n’ont souvent pas les fonds nécessaires et sont rapidement largués lors des enchères si enchères il y a.
      Les acquéreurs sont des milliardaires qui entendent faire fructifier leur patrimoine avec des combines échappant à l’impôt, soit par la détention privée des oeuvres, soit, encore mieux, par l’exposition des oeuvres via la création de ’’fondations’’. Je ne vous fais pas un dessin, les fondations sont le meilleur plan commercial qu’aient trouvé les milliardaires pour flouer le fisc et les contribuables.


    • Pauline pas Bismutée 7 avril 2023 16:41

      @ZenZoe

      Vous avez totalement raison !


  • Montdragon Montdragon 6 avril 2023 19:45

    Voilà un article d’honnête homme, tel une visite virtuelle de la grande galerie de l’évolution.

    Le Balouchitère, le plus gros mammifère terrestre connu.

     


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