samedi 7 mars 2015 - par alberto

Pays discret en quête de héros national

La plupart des nations célèbrent leurs héros. Quoique certains pays en aient plus que d'autres , les peuples se plaisent à puiser dans leur histoire nationale des figures emblématiques dont ils conviennent de se reconnaître à travers leur propre image.

Les grecs ont leurs Léonidas, Karaïskakis, Tsypras….
Les étasuniens leurs Washington, Roosevelt et autre Davy Crocket…
Les anglais vénèrent Cromwell, la reine Victoria et l'amiral Nelson...
Nous, français, avons aussi l’embarras du choix avec Clovis, Richelieu, Jeanne d'Arc et De Gaulle…
Et ainsi de suite pour la plupart des pays européens, d'Asie, voire d'Afrique !

L'Amérique latine n'est pas en reste avec leurs héros précolombiens et ceux qui combattirent pour l'indépendance de leur nation principalement contre les espagnols (Rappel des héros espagnols : Cervantes, Charles Quint, Cortes, Franco).

Le héros dont il est question ici est pourtant né bien après l'indépendance de son pays, acquise dans la foulée des guerres de libérations qui ont secoué l'Amérique latine au cours de l'année 1821.

Le petit Costa Rica s'est ainsi retrouvé libre et indépendant pratiquement sans le vouloir, emporté lui aussi dans le flot d'événements qui a suivi la déclaration d'indépendance des Provinces Unies d'Amérique Centrale . En effet, suite à l'effondrement de l'empire colonial espagnol, les états d’Amérique centrale gardèrent le découpage géographique issu de « la Capitainerie Générale de Guatemala ».

Quelques guerres, péripéties et nombreux morts plus tard, se retrouvèrent libres et indépendants, Nicaragua, Honduras, Salvador, Guatemala et...Costa Rica !

Cependant, vu la fragilité de ces petits états encore ébranlés par des conflits internes, ils pouvaient constituer une proie pour certains prédateurs étrangers, pas uniquement étatique, mais aussi quelques individus travaillant pour leur propre compte !

C'est ainsi qu'un certain William Walker, aventurier sans scrupule animé d'une ambition démesurée et habile politicien, après avoir conquis le Nicaragua avec sa troupe de mercenaires, voulu étendre ses conquêtes aux pays voisins.

C'est au cours d'une tentative d'invasion vers le territoire du Costa Rica en 1856 que notre héros eut l'occasion de s'illustrer en s'opposant aux hommes de William Walker : ceux-ci ayant pris position dans une construction située sur une hauteur semblaient contrôler la situation face aux armées costariciennes.

On demanda un « volontaire » pour aller lancer une torche enflammée sur les défenses en bois derrière lesquelles étaient retranchés les envahisseurs.

Plusieurs s'y essayèrent, sans succès !

Volontaire ou pas, on ne sait, toujours est-il que ce fut finalement le jeune Juan Santamaria qui lança victorieusement la torche dont le feu se propagea au bâtiment et fit fuir les occupants.

Ce 11 avril 1856, touché mortellement, le jeune homme de 24 ans s'effondra sur le champ de bataille !

Cette action participa grandement, paraît-il, à la victoire des défenseurs costariciens et mit fin aux manœuvres d'invasion de la clique Walker qui lui-même finira par se faire pincer et fusiller.

Qui était ce jeune homme ? A vrai dire, on ne sait que peu de choses sur lui, même sa date de naissance est douteuse, qui était sa mère, nul ne le sait vraiment, quant à son père, à ce demander s'il en eut un…

La paix revenue, les Costa-Ricains retourneront au développement de leur pays et oublieront le jeune homme…

Ce n'est que trente-cinq ans plus tard, en 1891, que les autorités s’apercevant sans doute de l'absence de héros national dans leur décorum républicain, chargeront quelques historiens d'y remédier.

C'est ainsi que la légende santamarienne fut exhumée des tréfonds de la mémoire afin de forger l'Histoire militaire du pays.

Retenant comme symbole la date de sa mort, le 11 avril sera donc institué jour de fête nationale et on fera appel à un sculpteur français pour réaliser la statue de Juan Santamaria qui aujourd'hui trône sur la place principale d'Alajuela, sa ville natale près de la capitale San José, et où se situe depuis 1958 l'aéroport international qui porte aussi son nom.

Nanti de ce héros très discret, le Costa-Rica continue, tout aussi discrètement, à innover en matière de gouvernance et de développement, premier pays au monde à avoir officiellement supprimé son armée, donnant priorité à l'éducation, la santé et la protection de l'environnement.

Sympa, comme pays, non ?



3 réactions


  • Fergus Fergus 7 mars 2015 17:54

    Bonjour, Alberto.

    « Sympa, comme pays, non ? » En effet. Et sympa comme article.

    Mais en grattant bien ici et là dans nos propres pays européens, l’on trouverait sans doute également quelques héros dont les mérites pour leur nation gagneraient à ne pas être étudiés de trop près.


  • alberto alberto 7 mars 2015 21:16

    Salut Fergus,

    Toujours taquin, hein ?  smiley

    Cependant, je suis bien d’accord avec toi sur la justification de« l’héorisation » de certains personnages dont leur biographie cache quelques taches nauséabondes...

    J’ai dit Colbert , par exemple ?


  • alberto alberto 7 mars 2015 21:34

    Précision sur le terme de « volontaire » très usité dans la terminologie militaire :

    Est volontaire toute recrue prétendant savoir faire du vélo !


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