samedi 21 juillet 2018 - par Luniterre

Pour ne pas mourir au travail ? Finalement le vent se lève à l’Est… !

Не хотим умирать на работе  !!

« Nous ne voulons pas mourir au travail  !! »

Finalement,une fois de plus, le vent se lève à l’Est…  !

Avec la Coupe du Monde de foot, c’est la mondialisation qui frappe à nouveau à la porte de la Russie.

Vouloir y prendre sa place, investir pour donner une belle image de la Russie, c’était sans aucun doute le but de l’opération, et en termes de communication, il est largement atteint, et même au delà de ce qui était attendu par la plupart des observateurs.

Combiner résistance militaire, diplomatique et attractivité, cela « paye » donc, sur bien des plans, mais a aussi un coût. Coincée entre le marteau chinois et l’enclume US, l’économie russe n’a en réalité toujours pas accumulé un capital financier suffisant pour échapper à son statut de proie potentielle de l’impérialisme, qu’il vienne d’outre-atlantique ou de ses marches chinoises. Pour la bourgeoisie nationale, en Russie comme ailleurs, le stade de la résistance nationale n’est toujours qu’un pis aller faute de mieux en matière de puissance financière.

Pour prendre une place conséquente sur les marchés financiers il lui faut augmenter sa capacité d’accumulation du capital, et pour cela, restaurer et élargir ses marges de profit.

Là se trouve une limite à l’unité nationale qui faisait jusque là sa force, car ces marges ne peuvent se restaurer qu’au détriment du prolétariat et des classes populaires.

Avec la Coupe du Monde il y avait donc un Grand Chelem a tenter et Poutine a donc voulu en profiter pour mettre en œuvre une réforme des retraites qui constitue un recul social historique considérable, et le premier, sur ce thème, depuis les droits sociaux acquis sous Staline, en 1932.

La justification officielle en serait l’amélioration de l’espérance de vie, qui avait en quelque sorte légèrement« repris vie  » elle-même après la sombre période Eltsine. Or il se trouve qu’avec la présente crise cette amélioration apparaît de plus en plus illusoire et semble même devoir faire place à un nouveau recul, surtout dans les classes populaires. Il est important de souligner ici que ce phénomène n’est pas spécifique à la Russie, mais qu’on le retrouve également concernant les classes populaires en Occident, comme on venait justement de le voir sur TML  :

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2018/07/09/retraites-en-peau-de-chagrin-le-capital-comprime-et-tue-pour-sauver-ses-benefices/

Avec, de plus, de nouvelles tentatives de la bourgeoisie occidentale pour également faire payer sa crise sur le dos de ces classes, et du prolétariat en premier lieu.

Si, par exemple, la Coupe du Monde de foot a définitivement enterré, en France, les faibles braises d’un « Mai 2018 » resté des plus symboliques, le même prétexte, en Russie, pour confiner les protestations loin des grands centres urbains, a donc finalement fait long feu, et la mèche de la contestation s’est rallumée aussitôt que les stades se sont vidés…

Finalement, alors que la « gauche » occidentale s’avère toujours aussi impuissante à rependre l’offensive dans les luttes sociales, il semble bien que le vent, à nouveau, se lève à l’Est  !

Luniterre

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Le graphique ci-dessous, arrêté en 2015, s’il ne montre pas encore de fléchissement récent de la courbe, montre néanmoins le caractère inhumain et réactionnaire de la « réforme » proposée, qui aboutit pratiquement à faire correspondre l’âge de la retraite et l’espérance de vie, et aboutit donc à dépouiller quasiment le prolétariat russe de l’épargne de toute une vie de labeur, constatation qui se retrouve donc, très logiquement, dans les slogans des manifestants :

>>>A noter également que l’évolution de la courbe, au fil des décennies, est l’illustration parfaite d’une analyse ML de l’histoire de l’URSS et de la Russie, avec, notamment, l’effet de la contre-révolution khrouchtchevienne, qui fait sentir son effet radicalement à partir de 1961, soit cinq ans après le XXe congrès, et trois ans après la mise en oeuvre réelle, sur le terrain, de la politique de « réformes  » khrouchtcheviennes  !

« A l’appel des syndicats et partis d’opposition, les Russes ont manifesté en masse contre le projet de relèvement de l’âge de départ à la retraite. La côte de popularité du président a pâti de l’annonce de ce projet.

Des milliers de Russes ont manifesté, le 1er juillet, dans des dizaines de villes contre le projet de relèvement progressif de l’âge de départ à la retraite de 60 à 65 ans pour les hommes et de 55 à 63 ans pour les femmes. Des seuils inchangés depuis 1932, fixés à cette époque à 55 ans pour les femmes et 60 ans pour les hommes, sous l’autorité de Joseph Staline.

Les manifestants répondaient aux appels de la Confédération du travail de Russie, de la Fédération des syndicats indépendants, des différentes organisations se réclamant du communisme, des partis Russie juste, Iabloko et LDPR (nationaliste) ainsi que de l’opposant Alexeï Navalny. Les rassemblements et marches de protestation se sont déroulés sans incident notable et n’ont pas donné lieu à des arrestations.

Des photos parues dans les médias russes montrent les manifestants brandir des pancartes sur lesquelles on peut lire, par exemple, « Le relèvement de l’âge de la retraite c’est le génocide du peuple » ou encore « Tu as vécu, souffert, tu es mort, puis tu pars à la retraite ».

A Moscou, où se déroulait le même jour la rencontre entre la Russie et l’Espagne, en huitièmes de finale de la Coupe du monde de football, les quatre rassemblements prévus ont été interdits. Résignés à ne pas obtenir d’autorisation avant la fin de la compétition, le 15 juillet, les syndicats ont déposé un préavis pour le 18 juillet, veille de l’examen en première lecture du texte de la réforme.

Ce projet de loi a déjà été présenté en conseil des ministres le 14 juin, premier jour de la Coupe du monde de football, puis transmis le 16 à la Douma, chambre basse du Parlement. Le Premier ministre Dmitri Medvedev l’a justifié par la croissance attendue du nombre de retraités et la réduction de celui des actifs. Il a ajouté que cette situation pourrait « conduire à un déséquilibre du système de retraite jusqu’au point où le gouvernement ne pourrait plus faire face à ses obligations sociales ».

Plusieurs catégories de travailleurs, en particulier ceux du rail et de la métallurgie, mais aussi les forces armées et la police, ne sont pas concernées par cette réforme. Le gouvernement estime que le projet de loi permettra d’augmenter les pensions de 1 000 roubles (14 euros) par an et de sauver le régime actuel de retraite par répartition. Départ à la retraite à 65 ans, espérance de vie  : 66 ans

En Russie, l’espérance de vie des hommes est de 66 ans et celle des femmes de près de 76 ans. Après une chute spectaculaire en 1991, année du démantèlement de l’Union soviétique, elle s’est peu à peu redressée. L’allongement de l’espérance de vie est l’une des priorités de l’action du gouvernement, selon les engagements pris par le président Vladimir Poutine, peu avant sa réélection le 18 mars 2018.

Lors des consultations tripartites (gouvernement, employeurs, syndicats) qui ont précédé la présentation du projet de loi, plusieurs options auraient été envisagées. Selon Tatiana Stanovaïa, présidente du Centre des technologies politiques, une des plus importantes organisations indépendantes d’analyse politique russes, citée par le quotidien Vedomosti, le gouvernement a sciemment proposé la variante la plus dure pour laisser de la marge à une négociation et permettre au président d’apparaître en modérateur, en dernier recours.

En attendant, selon le dernier sondage de l’Institut Fom, publié le 29 juin, sa cote de popularité est tombée de 62% à 48% depuis l’annonce de ce projet auquel, selon le même institut, 86% des personnes âgées de 31 a 60 ans sont opposées. En ce qui concerne l’approbation de l’action du gouvernement ou la confiance dans le président et le premier ministre, un autre institut, VTsIOM, avance des chiffres différents, mais les deux sociétés de sondages estiment que les dirigeants du pays ont atteint le niveau de confiance le plus bas depuis cinq ans.

https://francais.rt.com/internation…

POUR UNE REVUE DE PRESSE ILLUSTRÉE SUR TML  :

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2018/07/19/ne-khotim-umirat-na-rabote-pour-ne-pas-mourir-au-travail-finalement-le-vent-se-leve-a-lest/



9 réactions


  • zygzornifle zygzornifle 21 juillet 2018 14:12

    « Nous ne voulons pas mourir au travail !! »


    Comme en France avec l’éloignement de l’age de départ a la retraite et la diminution des retraites que le gouvernement va appliquer en 2019...
    En Russie apparemment il y a plus de manifestants sur le sujet alors qu’en France on est a chaque fois 4 pelés ....

  • zygzornifle zygzornifle 21 juillet 2018 14:12

    « Nous ne voulons pas mourir au travail !! »


    Comme en France avec l’éloignement de l’age de départ a la retraite et la diminution des retraites que le gouvernement va appliquer en 2019...
    En Russie apparemment il y a plus de manifestants sur le sujet alors qu’en France on est a chaque fois 4 pelés ....

  • Claude Courty Claudec 21 juillet 2018 17:16

    Questions et suggestions anodines :


    - Puisque vous évoquez Staline, quel était l’âge du départ à la retraite dans le Goulag de la belle époque ?
    - Voyagez un un peu et nul besoin d’aller bien loin ! La côte d’Azur ou Monaco vous donneront une idée des allures heureuses que peut prendre le visage actuel du travail à la Russe (quelle que soit la part qu’y ait pris ou y prenne le communisme)
    - Quelle est l’opinion russe concernant l’instauration d’un Revenu Universel ?
    ...

  • Claude Courty Claudec 21 juillet 2018 19:23

     J. Fourastié - Pourquoi nous travaillons - P.U.F. - 1959

    Extraits :

    « Une certaine conception du monde place dans le passé l’âge d’or de l’humanité. Tout aurait été donné gratuitement à l’homme dans le paradis terrestre, et tout serait au contraire pénible et vicié de nos jours. Jean-Jacques Rousseau a donné une couleur populaire et révolutionnaire à cette croyance, qui est restée vive au cœur de l’homme moyen [pour gagner celui du Bobo] : ainsi l’on entend parler de la vertu des produits « naturels » [devenus « bio »] et bien des français [ils ne sont pas les seuls] croient que la vie d’autrefois était plus saine qu’aujourd’hui.

    En réalité, tous les progrès actuels de l’histoire et de la préhistoire confirment que la nature naturelle est une dure marâtre pour l’humanité. Le lait « naturel » des vaches « naturelles » donne la tuberculose, et la vie « saine » d’autrefois faisait mourir un enfant sur trois avant son premier anniversaire. Et des deux qui restaient, dans les classes pauvres, un seul dépassait, en France encore et vers 1800, l’âge de 25 ans. (...)

    Toutes les choses que nous consommons sont en effet des créations du travail humain, et même celles que nous jugeons en général les plus « naturelles », comme le blé, les pommes de terre ou les fruits. Le blé a été créé par une lente sélection de certaines graminées ; il est si peu « naturel » que si nous le livrons à la concurrence des vraies plantes naturelles il est immédiatement battu et chassé. Si l’humanité disparaissait de la surface du sol [Ce qui ne saurait tarder au train où vont les choses dans bien des domaines], le blé disparaîtrait moins d’un quart de siècle après elle ; et il en serait de même de toutes nos plantes « cultivées », de nos arbres fruitiers et de nos bêtes de boucherie ; toutes ces créations de l’homme ne subsistent que parce que nous les défendons contre la nature ; elles valent pour l’homme ; mais elles ne valent que par l’homme.

    À plus forte raison les objets manufacturés, des textiles au papier et des montres aux postes de radio, sont des produits artificiels, créés par le seul travail de l’homme. Qu’en conclure sinon que l’homme est un être vivant étrange, dont les besoins sont en total désaccord avec la planète où il vit ? Pour le bien comprendre, il faut d’abord comparer l’homme aux animaux, et même aux plus évolués dans la hiérarchie biologique : un mammifère, cheval, chien ou chat, peut se satisfaire des seuls produits naturels : un chat qui a faim ne met rien au-dessus d’une souris, un chien, rien au-dessus d’un lièvre, un cheval, rien au-dessus de l’herbe. Et dès qu’ils sont rassasiés de nourriture, aucun d’eux ne cherchera à se procurer un vêtement, une montre, une pipe ou un poste de radio,. L’homme seul à des besoins non naturels.

    Et ces besoins sont immenses [et vont croissant, inéluctablement] ...

    ... la planète sur laquelle nous sommes, sans trop savoir pourquoi ni même s’il y en a d’autres moins inhumaines, est assez peu adaptée à nos aspirations, à nos facultés d’agir, à nos besoins. Elle satisfait libéralement et sans travail à un seul de nos besoins essentiels : la respiration. L’oxygène est le seul produit naturel qui satisfasse entièrement et parfaitement l’un des besoins de l’homme [Pour combien de temps encore ?]. Pour que l’humanité puisse subsister sans travail, il faudrait donc que la nature donne à l’homme tout ce dont il éprouve le besoin comme elle lui donne l’oxygène. L’eau, il faut déjà la puiser, la pomper et souvent la filtrer.

    Cela étant... nous travaillons pour transformer la nature naturelle qui satisfait mal ou pas du tout les besoins humains, en éléments artificiels qui satisfassent ces besoins : nous travaillons pour transformer l’herbe folle en blé, les merises en cerises et les cailloux en acier puis en automobiles. »


    • Luniterre Luniterre 21 juillet 2018 19:52

      @Claudec


      Excellent texte, excellent constat...

      La question qui parait logiquement s’en dégager est celle de la recherche d’un équilibre entre développement économique, satisfaction des besoins sociaux et nature.

      C’est un équilibre dans lequel la notion de profit financier et d’accumulation capitaliste n’ont pas leur place...

      Encore introuvable, aujourd’hui, mais on n’a pas non plus le sentiment que la volonté des politiques soit tendue vers ce but... !

      Luniterre



    • Claude Courty Claudec 21 juillet 2018 21:13

      @Luniterre

      Le rôle des politiques n’est ils pas d’organiser au mieux l’existence de citoyens qui sont avant toute opinion et toutes autres considérations, des consommateurs [comme tout ce qui vit]. (Gaston Bouthoul) ?
      Il s’agit donc de gestion économique. Or qui dit économie, dit nécessairement travail, capital, échanges et profits, sachant que ces derniers sont la source d’un enrichissement (qu’il soit collectif, voire collectiviste ou individuel, voire libéral) qui n’a pas d’autres limites que l’ambition de ceux qui le convoitent et les ressources dont ils les tirent ; d’où limitations démographiques pour ce qui est des besoins et environnementales pour ce qui est de ressources et des déchets). 

    • Claude Courty Claudec 21 juillet 2018 21:45

      @Claudec
      Correction : Avant-dernière ligne : lire “... dont ils LE tirent.” (l’enrichissement).


    • spearit 23 juillet 2018 14:59

      @Claudec

      « Des citoyens qui sont avant tout des consommateurs »

      En voilà une belle vision des choses qui explique beaucoup...

      Et pour ne rien dire au final, fermer ton clapet me paraît une option plus efficace, mais ce silence entre le vide de tes deux oreilles ça fout le vertige, nan ???



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