vendredi 9 mars 2018 - par Home of nomad spirit

Réminiscence d’un vieux

 

Quatre-vingt-sept ans. C’est l’âge que je viens d’atteindre. Aussi, mon avenir, statistiquement parlant, est-il irrémédiablement compromis dans sa durée et les quelques années qui me sont encore allouées ne m’inspirent guère d’intérêt, quand on voit le chaos qui nous entoure à tous niveaux. L’existence, depuis que j’ai appris à m’exprimer ne s’est accomplie qu’à travers des crises économiques, des révolutions, des guerres civiles et des conflits internationaux. Chaque décennie empilait ses victimes comme des plots de ciment en érigeant son mur de morts pour rien. 
 
Si ce n’est pour défendre les privilèges de quelques groupuscules assoiffés de pouvoir. Des chapelles au service d’eux-mêmes, utilisant la matière humaine pour arriver à leurs fins. Peu importaient les dégâts. Le cynisme était proportionnel aux résultats à atteindre. L’église fut souvent appelée à la rescousse pour bénir les canons afin d’augmenter les chances de réussite sur les champs de bataille. Tel pape, goupillon à la main, servait avec bienveillance l’industrie de la mort. Le peuple, quant à lui, se contentait de paroles et de slogans vertueux en faveur d’un patriotisme de pacotille. Malheureux vivants en sursis servant d’engrais au grand capital, utiles jusqu’au cimetière. 
 
La crise de mille neuf cents vingt-neuf avec comme corollaire le premier conflit mondial et ses millions de victimes, n’ont pas servi d’exemple. A peine séchées les larmes, les cadavres encore chauds glissés en terre et les injustices transformées en étendards de la révolte, que la culture de la vengeance refit surface et s’édifia en dogme sous les auspices des aigris de service. Naïveté de ceux qui crurent le monde définitivement acquis à la paix. Les politiciens, comme il fallait s’y attendre, ont œuvré par méconnaissance. Vainqueurs du premier conflit mondial mais tout sauf visionnaires, ils ont favorisé l’avènement du nazisme. A force de trop exiger de dommages de guerre, de saigner le peuple allemand en le poussant au désespoir, ils ont fait la courte échelle à un populiste d’envergure. 
 
Ils ont réussi à faire, dans les années trente, ce que nous nous apprêtons à mettre sur pied aujourd’hui. Le populisme du vingt et unième siècle n’est pas différent de celui des années trente. Ce sont les mêmes harangues, le même rejet de l’autre, le même racisme et les mêmes casseurs. La brutalité se fait la part belle, le fanatisme renaît de ses cendres et la pudibonderie tient le haut du pavé, A quand l’autodafé du bouquin comme en trente-trois. Déjà une poignée d’intégriste voudrait interdire la publication des livres de Céline. C’est le copié collé d’une situation que je n’ai plus envie de connaître. Trop de morts, de blessés et d’invalides sacrifiés au nom du dollar.
 
Les quelques voix aux paroles de bon sens qui s’élèvent pour nous mettre en garde ne sont pas écoutées. Les ministres, têtes pleines de leur propre importance, ne voient que la distance qui les sépare des prochaines élections. Les milliardaires ne pensent qu’à rajouter des milliards à leurs milliards et les généraux, ces grands stratèges, réclament leur dû en matériel pour faire la guerre. Pendant ce temps le peuple se bat pour vivre, pour mettre des enfants au monde, de les éduquer pour en faire de la chair à canon. 
 
La Seconde Guerre mondiale avec sa traînée de malheureux et ses slogans à l’emporte-pièce tel que : « Jamais plus » ou les images putrides de l’holocauste devenu un business pour faire pleurer dans les chaumières, n’ont rien changé aux infamies du temps. 
 
La Société des Nations de l’entre-deux guerres ou l’actuelle Organisation des Nations Unies, ne sont que des éclats de rire. Ce sont des institutions à créer des jobs surpayés au pouvoir inexistant. Et le monde va...dans une indifférence quasi totale. Il suffit d’annoncer une limitation de vitesse ou de signaler les déboires de la famille Hallyday quant à l’héritage de Johnny, pour faire les gros titres de journaux durant des semaines. Mais la marche de notre planète dont nous dépendons étroitement ne semble intéresser que peu de citoyens. Si impacté par le besoin d’avoir toujours plus, l’individu addict aux dispensables se pense à l’abri. Il méconnaît la plupart du temps ce qui l’enracine dans son existence et édifie souvent sa personnalité dans le virtuel pour être tendance et en accord avec son entourage. Je peine à vivre de souhaits, d’envies, de regrets ou d’utopies issues de standards virtuels. 
 
 
Quant à l’espoir d’une vie plus gratifiante, ce ne sera pas cette planète qui facilitera les choses. L’homme n’a toujours pas compris qu’elle était unique et qu’il fallait la ménager. 
 
Pour finir, peu importe ! Comme tout monde, je ne fais que passer.

 



30 réactions


  • Diogène Diogène 9 mars 2018 13:10

    Le monde est un spectacle, la vie un passage.

    Tu es venu, tu as vu, puis tu t’en en iras, comme nous tous.


    • GHEDIA Aziz GHEDIA Aziz 9 mars 2018 13:57

      @Diogène

      En si peu de mots, vous avez résumé la situation du monde actuel. Votre surnom de Diogène est largement mérité.


    • Diogène Diogène 9 mars 2018 15:26

      @sloop

      « All the world’s a stage,
      And all the men and women merely players ;
      They have their exits and their entrances,
      And one man in his time plays many parts,
      His acts being seven ages. »

      William Shakespeare - As You Like It (Comme il vous plaira)


  • Claude Courty Claudec 9 mars 2018 16:37

    « L’homme n’a toujours pas compris que [la planète qui l’abrite] était unique et qu’il fallait la ménager. »

    Quel souci de sa maison pourrait-il avoir, quand la tête dans le guidon ou dans le sable, il n’a pas celui, ni même la curiosité, de sa propre condition ?

    Merci pour cette mise au point, bien qu’elle me laisse dubitatif quant à ses effets.

  • monsegu monsegu 9 mars 2018 18:23

    Moi aussi, « Je peine à vivre de ... » et, par-delà ton panorama critique du XXème siècle jusqu’à ce jour, je t’invite à réfléchir au meilleur de Nos Espoirs sur la page « Mémolang » :
    http://www.survie.fr.memolang.eu/Memo/Memo.php?outsearched=yes&set=parthuma&item=3
    intitulée «  Le Manifeste Utopiste Partageons l’Humain  ! », pour un Meilleur à penser et à proposer, tout en relevant les difficultés et obstacles à affronter et surmonter.
    Et :
    Dans cette ’Mémolang’ « Survie » qui est Dialectique, vois, en opposition :
    http://www.survie.fr.memolang.eu/Memo/Memo.php?outsearched=yes&set=guerpauv&item=1
    intitulée «  Le Manifeste Hiérarchiste Guerre aux Pauvres  ! », pour y voir l’autre face d’une Confrontation devant aboutir à quelque meilleure « Composition » « qui facilitera les choses » (?)

    Qu’en penses-tu ?


  • rhea 1481971 9 mars 2018 19:23
    • Parlez nous de l’autodafé de 1945 à la soit dis ante libération.

  • Jean Roque Jean Roque 9 mars 2018 19:30

    Bah... Quand l’oligarchie mondialiste aura fait son homme nouveau, que vous attendiez avec impatience, un veau ogm bisounours, tout ira bien.
    C’est rigolo de voir que les gauchistes ne savent même pas ce qu’est le matérialisme : « rien à changer... sniff ! »
     
    Le père d’Eylan voulait se refaire les dents aux frais de la sécu, pendant que les femmes kurdes se battaient dans sa ville natale Kobané, qui fut libérée avant qu’il tue sa famille d’ailleurs.
     
    Bref vos valeurs de soumission de collabo mondialiste c’est juste de la merde en boite de Manzoni. 87 ans est toujours aussi niais, gauchiste donc.


  • Montdragon Montdragon 9 mars 2018 19:58

    Ce là qu’on se rend comte que 87 ans est l’âge moyen sur Ago...
    ça sent le sapin.


    • Claude Courty Claudec 10 mars 2018 20:09

      @Montdragon
      ... Au point qu’il soit curieux que la censure ait laissé publier un aussi bon article.

      La solutions aux problèmes de modération d’Agvx est peut-être là : les vieux d’un côté, ou un jour sur deux, et les jeunes de l’autre.
      Nous verrions ainsi qui raconte le moins d’âneries, et l’enrichissement mutuel serait garanti.

  •  C BARRATIER C BARRATIER 9 mars 2018 20:29

    Je pense que cette vue pessimiste sur notre passé n’est pas objective. Il y a la conquête de l’espace, les progrès de la santé, les 30 glorieuses après la dernière grande guerre....Le progres de l’égalité des femmes est l’événement le plus sûr et ce n’est qu’un début....

    Femmes combattantes vers leur victoire pour l’égalité

    http://chessy2008.free.fr/news/news.php?id=252

    J’espère qu’elles manageront mieux la planète que les hommes au pouvoir ne l’ont fait. Et si elles émergent enfin c’est grâce à nos volontés de justice citoyenne


    • CORH CORH 9 mars 2018 23:17

      @C BARRATIER
      les progrès de la santé ?
      vous confondez augmentation de l’espérance de vie et santé qui s’améliore, rien a voir, on peut vivre relativement longtemps avec les « progrès » de la médecine en très mauvaise santé. Il suffit de regarder, d’observer ce qui se passe autour de soi


  • jesaispas jesaispas 9 mars 2018 23:01

    chaque homme est unique et vous le prouvez bien
    comme vous je n ai jamais compris ni ce monde ni cette humanite, que je refute, et en meme tps me fascine, et probablement aime
    le seul destin et combat raisonnable est de se battre contre ce cosmos et donc dieu, et pour donner vie a ce qu il ne peut creer, la beaute, la grace, la compassion et l amour qui a preuve du contraire sont l’oeuvre de l’humain, et son combat contre cette nature et cosmos froid comme notre tombe
    Si demain a l heure de mon glas, je suis confronte a dieu, ca vie eternelle ne m interesse pas, car celui qui a cree ce monde ne peut creer ce a quoi j aspire
    La liberte sans destin est une heresie, les promesses un fruit bien amers a defaut d etre defendus,
    reste une seconde, ultime de Mozart, la grace a l etat pur
    signe un heretique condamne a la naissance


    • jesaispas jesaispas 9 mars 2018 23:30

      @jesaispas
      Une seconde de silence, car c’est notre seule damnation, le bruit du cosmos a sublimer,
      la pelote si infinie, on en dessinera nous même les méandres, quitte a se perdre dans les convulsions de notre âme


    • Claude Courty Claudec 10 mars 2018 11:19

      @jesaispas

      C’est l’évidence même qu’il n’y a pas d’autres condamnations qui vaillent que la condamnation à mort. C’est le sens même de la vie ; cette vie dont le sens va aussi précisément qu’irrémédiablement de la naissance vers la mort.
      Et en cela, aucun homme n’est différent d’un autre. Seul son parcours est unique, parce que déterminé avant tout par le hasard qui l’a fait naître à un endroit plutôt qu’aileurs et et dans une condition parmi d’innombrables autres. 

    • jesaispas jesaispas 10 mars 2018 13:30


      @Claudec
      Bonjour
      déterminé avant tout par le hasard
      La formule est intéressante, et révèle beaucoup sur nos contradictions et paradoxe,
      Peut-on blâmer la mort, si le tps d’une vie ne suffisait a lui donner sens, alors l’éternité vous pensez bien.


    • Claude Courty Claudec 10 mars 2018 16:09

      @jesaispas
      Bonjour

      Qui parle de blâmer qui ou quoi que ce soit ? Les choses sont ce qu’elles sont, ici et maintenant.
      Pour ce qui a précédé, la science s’en charge, laissons la à ses travaux.
      Quant à ce qui est de l’après, le sage attend aussi sagement que possible que sa curiosité soit éventuellement satisfaite le moment venu, en se gardant entre temps des sornettes des uns et des autres.

    • jesaispas jesaispas 10 mars 2018 20:09

      @Claudec
      bonsoir
      votre approche fait très pochette surprise qd j étais gosse je pensais que les adultes nous prenaient pour des cons, car le papier, même chiffonne, ne se bouffe pas, on peut éventuellement le manchonner
      C’est bien après que j’ai compris qu-il n’y avait d’alternatives, et que nos canines avaient bien d’autres but que de mâchonner du papier comme le gamin que j étais, et suis toujours a plus de 50 ans


    • Claude Courty Claudec 10 mars 2018 21:26

      @jesaispas
      Bonsoir,

      Curieux de nature, les pochettes surprises comme tout autre secret m’ont toujours intéressé, mais sans plus ; j’ai l’impression de perdre mon temps face aux énigmes. C’est pourquoi j’ai pragmatiquement opté pour l’attente concernant ce qui nous attend – éventuellement – après la mort. Au point que je vois celle-ci venir avec un certain intérêt, sinon avec plaisir, ayant comme beaucoup, moins peur d’elle que de la souffrance dont il arrive souvent qu’elle soit assortie.

  • nono le simplet 10 mars 2018 06:52

    Sourire aux larmes, 
    Trouver du charme 
    Au fond du soir pourri qui mène à la mort. 
    Viens ma dormeuse 
    Dans la berceuse 
    Que je te chanterai et que je cherche encore. 

    Je veux quitter ce monde en regrettant un peu. 
    Je veux quitter ce monde, heureux.

    maxime le forestier

  • zygzornifle zygzornifle 10 mars 2018 10:10

    La terre serait t’elle l’enfer d’un autre monde ?

    Les démons auraient t’ils quittés l’enfer pour y habiter ?

    • joelim joelim 10 mars 2018 13:13

      C’est plus simple : le cosmos est un méga-jeu vidéo où les pixels sont les atomes, la programmation les lois physiques, et les joueurs les « âmes » ayant décidé de participer à des défis précis dans un corps physiquement parfait mais psychologiquement imparfait. L’intérêt du défi (et des jeux vidéos) est de pouvoir rater et donc beaucoup de choses sont ratées mais c’est pas grave, le peu de réussites est suffisamment grisant pour qu’il y ait toujours des « clients ».


      Après, il est possible que la Terre soit un environnement particulièrement bordélique parmi les autres mondes (un peu « la maison des horreurs » de la Grande foire). Mais qui a ressenti un jour de l’excitation face aux défis terrestres (essentiellement psychologiques, ce sont les plus délicats) comprend l’intérêt de ce parc d’attraction plutôt « grunge » appelé Terre. Ces idées s’inspirent des écrits de Neale Donald Walsch écoutables tous les dimanches de 17h30 à 19h sur Radio Ici et Maintenant.


    • Claude Courty Claudec 10 mars 2018 13:23

      @covadonga*722

      Le sommeil, la terre, des corps, le désert.
      Où est le néant dans tout çà ?
      Le néant est un pur produit de notre imagination – comme tant d’autres choses –, mythe par excellence, dès lors qu’il est concevable et porte ne serait-ce qu’un nom.

    • Claude Courty Claudec 10 mars 2018 19:07

      @covadonga*722

      Bonjour.
      Je ne suis pas croyant, ou plus précisément pas déiste et encore moins religieux, ne trouvant pas plus à mon espèce qu’à une autre, une quelconque raison d’être autre chose que l’infinitésimale partie d’un ensemble – la planète Terre – où le hasard m’a fait naître et me fera mourir. Je sais seulement que cela aura lieu à l’issue d’un temps sur lequel nul n’a la moindre prise. Et mes semblables ainsi que tout ce qui peuple cette Terre, et la Terre elle-même disparaîtront un jour, dans la même insignifiance.


  • L'enfoiré L’enfoiré 10 mars 2018 13:28

    Bonjour,

     « Les démons de l’âge » Article écrit en 2013 et donc quelques personnages qui y sont cités ne sont plus de ce monde.
     Mais l’idée fondamentale ne change pas ...
     On est toujours le jeune de quelqu’un et le vieux de quelqu’un d’autre.
     Notre doyen vient de nous quitter à 108 ANS ;
     Cela vous laisse encore de la marge  smiley


    • Claude Courty Claudec 10 mars 2018 20:25

      @L’enfoiré


      Bonjour et merci pour lui, de cette attention, à laquelle je me permets de m’associer par une modeste oraison.

      Les quatre saisons


      Bleu fut mon rêve aux matins du printemps

      Quand les fleurs et les fruits chatoyant de couleurs

      Enivraient tous mes sens de suaves odeurs,

      De visions de l’Eden et de riches saveurs.


      D’or fut mon rêve au soleil de l’été

      Aux midis rayonnants, aux instants alanguis,

      Quand l’amour foisonnant savait peupler mes lits

      De repos enlacés, suivant de folles nuits


      Gris fut mon rêve, ainsi qu’un ciel d’automne,

      Quand les feuilles des ans pâlissant une à une

      Distillaient en mon cœur les larmes d’amertume

      D’un passé s’enfuyant, indicible infortune.


      Noir est mon rêve en cette nuit d’hiver.

      Enfoui sous la neige il gît en un linceul,

      Tissé de souvenirs dont je porte le deuil,

      Ainsi que sont les morts couchés en leur cercueil.


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