lundi 29 avril 2013 - par Denis Thomas

« Solfériniens » : Vous êtes des « hommes seuls » !

En qualifiant Jean-Luc Mélenchon d’ « homme seul », Jérôme Cahuzac - avant sa descente aux enfers, en janvier dernier - tentait d'ignorer que cette affirmation s’appliquait de fait à lui-même. Il était loin d’imaginer que cet anathème, terrible et prononcé avec mépris, allait frapper son propre parti politique. En tout cas sa branche la plus fournie : la « Solférinienne ».

Cette appellation va, sans nul doute, faire son chemin depuis qu’elle a été créée et utilisée par le même Mélenchon. Ceci s’est passé sur l’antenne publique France 2 alors que celle-ci le tenait une fois de plus, dans ses filets cathodiques. L'asticotant sur la forme avec une mesquinerie qui n'échappe plus guère à personne..

 Mais le patron du Front de Gauche, qu’il est nullement besoin de qualifier de « bouillant » ou de « tribun » car ce serait faire injure à ce qu’il représente au fond, a pointé à l’écran précisément l’état dans lequel se trouve aujourd’hui le parti majoritaire. Et ce, sans même évoquer le désamour populaire dont souffre par ailleurs ce dernier.

Car contrairement à ce que font semblant de méconnaitre les « commentateurs » politiques de la chaîne de télévision, le solide distinguo entre Socialistes et « Solfériniens » se constate quotidiennement et, fait nouveau, à deux niveaux.

 

ACCOINTANCES

Tout d’abord, il est évident que l’électeur issu de la Gauche, c’est-à-dire en excluant celui qui a simplement produit un vote anti-sarkozyste, s’est rendu compte incroyablement vite que son espoir de changement n’avait aucune place ni dans le présent ni dans un futur s’inscrivant dans ce quinquennat.

Ensuite, ce qu’il reste de femmes et d’hommes de gauche au sein du PS - et d’élus partageant cet idéal - déstabilisés par les choix de l’actuelle gouvernance, prennent, si ce n’est une sérieuse distance avec celle-ci, à tout le moins une distance qui se doit être prise au sérieux.

Passons sur les renoncements Hollandais sur le vote des étrangers aux élections municipales, signes avant coureurs s’il en est. Mais gardons à l’esprit les relations « bienveillantes » que le nouveau Président a tenu à entretenir dès les premiers instants avec les grands patrons français. Ces accointances ont, depuis, donné lieu à une écoute précise des désirs du Medef. Et vont bien au-delà des adaptations nécessaires du monde du Travail à la nouvelle donne économique.

L’Accord national interprofessionnel (ANI) dit de « flexi-sécurité » ou, encore plus paradoxalement, de « sécurisation de l’emploi », conclu entre le Medef et des syndicats de salariés dont la représentativité peut être soumise à débat selon les comptages qu’on veut bien en effectuer, avait fait déjà tiquer l’aile gauche du PS.

Mais la loi d’« amnistie sociale » (concernant des délits perpétrés lors de luttes pour l'emploi), pourtant approuvée par des députés de la « gauche du PS » (c’est drôle qu’on en soit arrivé à employer ce terme là…) et par la majorité du Sénat, se retrouve retoquée avant sa deuxième lecture au Palais Bourbon. Et leur reste en travers de la gorge.

Le gouvernement ne veut plus en entendre parler au fallacieux prétexte « mani pulite - post Cahuzac » qu’il n’y aurait d’ « amnistie pour personne ».

Il faudrait peut-être alors que, par souci d'équité, les ministres et/ou élus impécunieux soient un jour traduits devant une justice aveugle. C’est-à-dire autre que la Cour de Justice de la République, devant laquelle, soit dit en passant, Cahuzac n’aura même vraisemblablement jamais à comparaître.

 

DANS LE DECOR

Pourtant, François Hollande avait promis la promulgation de l’amnistie sociale non seulement à ses propres élus mais aussi à ses partenaires du Front de Gauche, du Parti communiste ou encore des Verts. Qui s’insurgent à qui mieux mieux devant le manque de parole du chef de l’Etat.

Ainsi, le calcul vite fait bien fait de Pépère sur le renoncement (encore un…) au non cumul des mandats - qui aurait comme effet de dépeupler les bancs PS de l’Assemblée et de contraindre ainsi le gouvernement à tendre la main trop fréquemment à ses « alliés » pour faire passer ses lois – a pris du poids. L’exécutif a plus que jamais besoin de tout son monde.

C’est pourquoi la semaine passée, Jean-Marc Ayrault a réuni « ses » parlementaires en séminaire pour leur rappeler, ou les exhorter, à la discipline de vote … Pas question de voir l’esprit d’équipe partir dans le décor avec un coup de volant à gauche sous l’impulsion du « nouveau pacte majoritaire » appelé des vœux de la sénatrice socialiste de Paris, Marie-Noëlle Lienneman et du vice président du Conseil régional et membre du bureau national du PS, Emmanuel Maurel.

Encore plus fort : le président de l’Assemblée nationale, le socialiste Claude Bartelone la ramène en plaidant « un nouveau temps du quinquennat » dans les colonnes du Monde. Coup de pied de l’âne ou dents de loup (rayant le parquet de Matignon) ? Les deux sans doute !

La corde à nœuds a de plus en plus de mou. C’est sans doute pourquoi, le député et vice-président du PS européen, s’était trouvé bien inspiré de pondre 21 pages de brûlot anti-austérité et pleines de reproches à l’encontre du « grand frère » allemand et de la politique ultra-libérale d’Angela Merkel. Elles étaient destinées à être lues à la Convention du PS sur l'Europe, le 16 juin prochain.

 

De plus, ce rétropédalage anti austérité présentait bien car légitimé par les propos du président allemand du parlement européen, le social-démocrate Martin Schultz. Il a en effet déclaré que les gouvernements de l’UE vont « beaucoup trop loin » dans ce domaine. Mais à rétropédalage, rétropédalage et demi. L’audace Cambadélienne a vite fait flop.

Devant l’inquiétude du PS mais aussi les attaques de l’UMP, estimant que le texte initial représentait un « péril mortel », Jean-Christophe Cambadélis a fissa « allégé » ce texte « des formules stigmatisantes vis-à-vis de Madame Angela Merkel ». Le parti majoritaire français de gauche est passé à deux doigts de l’incident diplomatique. Un grand merci à Juppé de lui avoir ouvert les yeux...

Voilà qui est assurément de nature à ressouder les rangs socialistes… de droite à gauche.

Donc, en résumé, les « Solfériniens » se retrouvent en moins d’un an coupés de leur électorat de base et de leurs alliés au Parlement tandis qu’ils ont réussi à dépiter une partie de leurs propres élus alors que l’affaire Cahuzac a jeté le discrédit sur ce que l’alternance proposait en campagne comme solution de retour à la « normale ».

Le résultat est qu’on est en train d’entrer dans l’ère si redoutée à l’Elysée : celle de l’anti-Hollandisme primaire. Un véritable exploit que les « Solfériniens » ont réalisé…tous "seuls".

Les socialistes auront-ils jamais été aussi divisés ?

Ce n’est pas rue de Solférino, à Paris, que devrait donc se situer leur siège, mais bel et bien sur les vestiges du champs de bataille de la défaite de Sedan.

 



13 réactions


  • Gabriel Gabriel 29 avril 2013 11:25

    Politique ultra libérale et Angela Merkel le bras droit tendu, est ce un signe prémonitoire comme quoi ces gens là nous emmènent tout droit à une dictature financière et à un esclavage de masse ???


    • Denis Thomas Denis Thomas 29 avril 2013 12:04

      Bonjour, !
      j’ai illustré ainsi pour marquer les esprits.Puéril, sans doute. Mea culpa. Mais la réaction de l’équipe Merkel, telle qu’on peut en avoir les echos, au papier initial de Cambadélis est significative. Le même Cambadélis veut clouer au pilori l’indélicat qui a fait fuiter son « brouillon » et l’exclure du PS.
      A tout le moins une preuve que le PS se fendille furieusement.
      Sinon, la dictature est présente (venant d’Allemagne) par l’instauration d’une zone « euro fort » qui n’est que la réplique de l’ancienne zone « mark ».
      Pour ce qui est de l’esclavage de masse : Madrid, Athene ...


  • undeuxtroisquatre 29 avril 2013 12:12

    Mais alors, si je lis bien ce passage de votre article , c’est promesse contre promesse.
    Parce que j’ai parfaitement entendu le candidat Hollande affirmer qu’il n’y aurait pas d’amnistie si il était élu.C’est une des raisons qui m’ont fait voter pour lui. Il tient ses promesses nous a-t-on dit , à propos de la loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe. Et c’est bien ainsi.


    • Denis Thomas Denis Thomas 29 avril 2013 13:03

      Les choses ne se passent pas exactement comme cela. D’une main Hollande tend une chose, de l’autre la retire au gré des accords passés avec les parlementaires, de la majorité (dans ce cas il ne s’agit pas d’accords à proprement parler mais de marchandages en sous main) et des députés « alliés ».
      Tous ceux qui le connaissent et l’ont pratiqué de puis des années savent que tenir ses promesses n’est pas son fort. C’était vrai au sein du PS et c’est encore plus vrai à l’Elysée.
      La loi d’amnistie sociale, vous avez raison, n’entrait pas dans le programme ni du candidat, ni du Président. Mais l’affaire a été beaucoup moins claire.
      Au passage au Sénat ,Najat Vallaud-Belkacem, les avait incités les élus à « trouver un équilibre nécessaire entre, d’une part, le droit syndical et, d’autre part, le respect de la légalité républicaine ». Entre chèvre et choux.
      Pour le Mariage pour tous, il a tenu sa « promesse ». Ce qui est très bien.
      Reconnaissons que cette loi est le seul point fort de la mandature jusqu’ici. Et qu’elle ne pouvait guère être laissée de côté tant elle est dans le sens de l’histoire.


  • babeuf babeuf 29 avril 2013 12:58

    ils sont tellement seuls qu ils risquent de faire alliance avec bayrou est une parti de la droite
    de purs petits colabo..............
    .


  • Detoxinfo.fr Detoxinfo.fr 29 avril 2013 13:09

    Notons que Hollande reçoit plus facilement les patrons autoproclamés « pigeons » que les ouvriers de Florange, malgré les « promesses » qui a pu faire après celles de Sarkozy à Gandrange ... Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres.


    • Detoxinfo.fr Detoxinfo.fr 29 avril 2013 17:52

      Qu’en termes haineux ces choses là sont dites....
      Il semblerait bien qu’au fur et à mesure, la crédibilité de JLM augmente et qu’elle suscite proportionnellement des réactions violentes. Visiblement !


    • Detoxinfo.fr Detoxinfo.fr 29 avril 2013 19:25

      En tout cas, ce qu’il est facile de « constater », car le savoir est hors de notre portée, est que vous avez une formidable opinion de vous-même ....
      A la lecture de Votre (unique) article, en l’espèce sur la Suisse (c’est drôle mais on pressentait que vous deviez avoir un attachement pour ce pays...), dont vous vantez l’époustouflante réussite économique, on peut néanmoins s’apercevoir que quelque chose qui vous a un tantinet échappé : la raison historique de cette réussite ! Pas jolie jolie, certes. Mais qui explique bien des choses.
      Mais vous le « saviez ». Assurément.


    • Detoxinfo.fr Detoxinfo.fr 29 avril 2013 20:25

      merci de nous donner raison !!!


    • epicure 2 mai 2013 00:10

      « Ce qu’il représente au fond, le leucophobe, ce sont les délires universalistes et fraternitaires du stupide XIXe siècle, »

      sauf que les idées universalistes et fraternitaires ont beaucoup plus apporté à l’humanité que les délires différentialistes et haineux digne du moyen âge, dont un moustachu ayant dirigé un pays au nord du tiens est le meilleur exemple bien que n’ayant pas vécu au moyen âge mais au XXème siècle.


  • Traroth Traroth 29 avril 2013 18:19

    Le problème de fond est très simple. Nous avons malheureusement une classe politique pour laquelle les idées ne sont qu’un moyen d’arriver au pouvoir, alors qu’il nous faudrait l’inverse, une classe politique qui voudrait arriver au pouvoir pour appliquer leurs idées.


    Résultat, ils sont prêts à promettre, littéralement, n’importe quoi pour être élus. Mais une fois élus, les promesses deviennent immédiatement encombrantes...

  • Franckledrapeaurouge Franckledrapeaurouge 29 avril 2013 23:00

    Bonsoir,


    Que les socialistes soient diviser c’est leur problème, le notre problème,

    c’est qu’on ne mord pas la main du financier qui nous a fait élire !!!!

    il faut absolument que nous reprenions les rennes, et changions les règles.

    Il faut une sortie de l’Europe rapide, et faire une nouvelle constitution, sinon

    comme le dit si bien notre ange Gabriel, c’est l’esclavage qui nous attend,

    à nous et à nos enfants..

    Une idée de changement interressante :


    Cordialement

    Franck





  • vesjem vesjem 30 avril 2013 10:21

    « le sens de l’histoire » ,à propos du mariage entre homosexuels , sont des mots creux qui cachent le non-sens de cette loi crée pour une « élite » ; donnons des raisons objectives aux arguments des « pour » et des « contre » au lieu d’idiotie comme « le sens de l’histoire »


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