lundi 26 octobre 2020 - par Jacques Pollini

Traitements à base d’hydroxychloroquine et azithromycine face à la pandémie COVID-19 : réflexions épistémologiques pour une sortie du déni

La polémique sur les traitements à base d’hydroxychloroquine et azithromycine face à la pandémie COVID-19 : Quelques réflexions épistémologiques pour une sortie du déni

Jacques Pollini, PhD

Département d’Anthropologie, Université McGill

 

Résumé

Un débat intense a lieu en France et dans le monde concernant l’efficacité des traitements à base d’hydroxychloroquine (HCQ) pour soigner les patients atteints de COVID-19. Cet article propose une analyse épistémologique de ce débat, plus particulièrement concernant l’efficacité de la combinaison hydroxychloroquine/azithromycine (HCQ/AZI) en médecine ambulatoire. Le point de départ est le constat qu’il n’existe pas véritablement de controverse scientifique sur l’efficacité de ce traitement, dans le sens que toutes les études disponibles montrent un effet positif. La controverse porte sur l’efficacité de l’HCQ seule dans divers contextes thérapeutiques, un débat qui a occultée celui, plus important, de l’efficacité de la combinaison HCQ/AZI en médecine ambulatoire. A ce niveau, il y a seulement incertitude sur les conclusions, comme pour toute théorie scientifique, controversée ou pas. Souligner cette incertitude et débattre sur comment la résoudre est tout à fait légitime mais cela n’est pas ce que nous observons. Le débat prend plutôt la forme d’un déni des conclusions, alimentant des polémiques qui se situent en dehors du cadre de la science. Après avoir brièvement envisagé les causes de ce déni, l’article en examine une en particulier : la dominance de l’idéologie scientiste. Selon cette idéologie, toute chose ou processus dont l’existence n’est pas prouvée définitivement n’existe pas, ce qui a un effet destructeur sur la science puisque ne permettant par la reconnaissance de preuves partielles, et sur la société puisque remplaçant la connaissance incertaine par l’ignorance ou les préjugés.

Apres un bref rappel de ce qu’est le scientisme, j’analyserai les mécanismes du déni en faisant appel à des épistémologues et penseurs des sciences sociales : Hayek (1953), pour montrer comment le scientisme conduit à l’ingénierie sociale et à la dérive totalitaire par l’imposition d’une pensée unique ; Popper (1963), qui permet la sortie du scientisme en rappelant que l’incertitude est le corollaire de toute connaissance scientifique ; Bourdieu (2017), qui montre que l’action humaine n’est pas guidée uniquement par des calculs rationnels et conscients, car interviennent également des dispositions ou habitus historiquement et socialement constitués ; Latour (1987), qui montre que la « science en action » est loin de procéder selon son idéal d’objectivité et mobilise des réseaux sociaux qui déterminent fortement ce qui est accepté comme vrai ; et enfin Bhaskar (1975), qui démontre que le monde réel ne peut être réduit à ce qui est observé ou imaginé, et que pour que la science soit possible, elle doit se doter d’outils permettant l’étude de systèmes ouverts dans lesquels aucune régularité ne peut être observée. Chacun de ces penseurs apporte un éclairage sur la polémique HCQ/AZI et mis ensembles, ils permettent d’entrevoir l’impasse épistémologique dans laquelle la société actuelle est engagée. Sans doute des forces autres que l’idéologie scientiste, non analysées dans cet article, expliquent l’irrationalité des prises de position contre le traitement HCQ/AZI. Mais l’idéologie scientiste a été l’instrument permettant à ces forces de triompher et d’imposer une vision de la réalité qui ne se base pas sur les faits scientifiques.

Introduction

En mars 2020, alors que l’épidémie COVID-19, maladie provoquée par le virus SARS-CoV-2, démarrait en France, l’Institut Hospitalo-Universitaire Méditerranée Infection (IHU), dirigé par le Professeur Didier Raoult, publiait un article (Gautret et al 2020a) suscitant espoir pour le traitement de cette maladie. Selon cet article, parmi 42 patients diagnostiqués COVID-19 et reconnus éligibles pour inclusion dans une étude clinique à l’IHU, 20 ont reçu de l’hydroxychloroquine (HCQ) à raison de 600 mg par jour en 3 prises pendant 10 jours, 6 ont reçu le même traitement additionné d’azithromycine (AZI) pendant 5 jours, 16 n’ont reçu aucun traitement car ils l’ont refusé ou n’étaient pas éligibles, et 6 ont finalement été exclus de l’analyse car ayant cessé le traitement 4 jours au plus après inclusion et pour les raisons suivantes : 3 ont été transférés en soins intensifs, 1 est décédé, et 2 ont choisi de se retirer. Parmi les 36 restant et après 6 jours, le taux de patients testant positif au COVID-19 était de 88,5% pour les patients non traités, 43% pour les patients traités à l’HCQ, et aucun pour les patients traités à l’HCQ/AZI. Les patients du groupe contrôle étaient pourtant plus jeunes (37 contre 51 ans en moyenne), plus fréquemment asymptomatiques (dans 25 contre 10% des cas), et moins fréquemment infectés dans les voies respiratoires inferieures (dans 12.5 contre 30% des cas)

Certes cet article présente des faiblesses méthodologiques qui ont suscité d’importants commentaires (Bik 2020, Hulme et al 2020, Ingraham et al. 2020, Lover 2020 Machiels et al. 2020, Rosendaal 2020). L’état des patients est évalué sur la base d’analyses PCR[1] qui ne sont pas toutes conduites selon la même approche standard, qui donnent des résultats variables avec des patients testant négatif un jour et positif le jour suivant, et qui ont été omises dans les derniers jours de suivi pour plusieurs patients du groupe contrôle. Le fait que l’étude ne soit pas randomisée et porte sur un effectif réduit diminue aussi la probabilité que les résultats obtenus s’expliquent par l’effet du traitement, risque accentué par le fait que plusieurs patients du groupe témoin ont été traités dans d’autres hôpitaux, et que le profil moyen du groupe témoin diffère significativement de celui du groupe traité. Le fait que 6 patients ont été finalement exclus de l’analyse a également été très commenté.

Ces critiques, toutefois, montrent que les données sont insuffisantes et les conclusions incertaines. Elles ne montrent pas que les conclusions sont fausses et ne font pas pencher la balance en défaveur du traitement HCQ/AZI. Pour s’en rendre compte, il suffit de se mettre dans la même situation pratique que les médecins qui ont traité ces malades.

Supposez donc que vous recevez 6 patients atteints d’une infection virale, que vous leur donnez le traitement HCQ/AZI, et que le 5ème et 6ème jour, vous ne détectez plus de virus chez ces patients, ce qui s’accorde avec les connaissances médicales générales qui vous ont conduit à choisir ce traitement. Pendant ce temps, dans la pièce d’à côté, la majorité parmi 30 patients qui n’ont pas reçu ce traitement sont toujours porteurs du virus, et ceux qui ne sont plus porteurs ont pour la plupart reçus une partie du traitement (l’HCQ). Certes, il est possible que ceux qui sont toujours porteurs guériront aussi mais plus tard. Mais réduire la durée de la maladie, et donc son impact économique, le cout de son traitement, les risques de séquelles et la durée de contagiosité sont déjà des avantages en soit. Supposez maintenant qu’un septième patient atteint de la même infection vienne vous voir. Allez-vous lui dire que vous ne pouvez pas lui donner le traitement HCQ/AZI, bien qu’il ne présente pas de risque si administré sous suivi médical, car vous n’avez pas de preuve qu’il marche, et parce que chez les 6 patients précédents, le virus a pu disparaitre tout seul, par chance ? Ou allez-vous proposer ce traitement pour voir s’il continue d’avoir les mêmes effets, avec l’accord du patient ?

Toute personne raisonnable choisirait la deuxième option. Car ce n’est pas la question de la validité des méthodes statistiques employées qui doit être posée face à cette décision. C’est la question du mode de construction de la connaissance et de l’expérience humaine. C’est pourquoi les « méthodologistes », comme le Professeur Didier Raoult et d’autres les appellent, font fausse route même si toutes leurs critiques méthodologiques sont justes. Ils ont perdu leur bon sens, oublient que l’incertitude est le corollaire de la connaissance, et que les essais randomisés ne sont pas la seule manière de faire de la science (Frieden 2017) et de faire avancer les connaissances médicales (Bégaud et al 2017). Malheureusement, l’OMS et de nombreux gouvernements ont choisi d’écouter les méthodologistes et continuent de rejeter le traitement HCQ/AZI en ambulatoire, malgré la multiplication d’études et témoignages débouchant toujours sur le même résultat favorable (voir annexe 1). Le monde est devenu fou, en partie pour des raisons qui restent à découvrir, en partie pour des raisons qui peuvent être révélées par une analyse épistémologique et en faisant appel à son bon sens, ce que je tente de faire dans cet article.

J’analyserai donc non pas une controverse scientifique, mais les causes du déni d’un consensus (Annexe 2). Le point de départ est le constat qu’il n’y a pas de controverse sur l’efficacité du traitement HCQ/AZI pour guérir des patients COVID-19 en début de maladie, dans le sens que toutes les études testant l’efficacité de cette approche donnent des résultats positifs (Annexe 1). La controverse ne concerne que le domaine d’efficacité de l’HCQ seule, et c’est cette deuxième question qui, en se mélangeant avec la première, crée une fausse controverse. Ainsi le débat prend la forme suivante : quelqu’un dit « les abricots sont orange (HCQ/AZI est efficace en ambulatoire) », et quelqu’un d’autre répond « non ce n’est pas vrai, car j’ai vu que les citrons sont jaunes (HCQ seule n’est pas efficace sur des patients sévères à l’hôpital) ». Un tel débat ne se situe pas dans le champ scientifique, ni même dans un espace rationnel ou raisonnable. Si, et seulement si, une nouvelle étude montrait des résultats négatifs concernant l’efficacité du traitement HCQ/AZI sur des patients COVID-19 en début de maladie, alors une véritable controverse serait ouverte. En attendant, il y a incertitude sur l’efficacité du traitement HCQ/AZI, comme pour tout résultat de recherche, mais il n’y a pas véritablement controverse. Il y a cependant polémique, du fait du déni des résultats obtenus, et ce sont les causes de ce déni et de la polémique qui s’ensuit que j’analyserai ici.

L’influence des lobbies pharmaceutique, qui espèrent mettre sur le marché des nouvelles molécules source de profits élevés car non protégées par des copyrights, est la première explication qui vient à l’esprit pour expliquer ce déni (Annexe 2). Mais je n’analyserai pas cet aspect du problème. Faire passer des intérêts financiers ou autres avant la santé des malades est un acte criminel et des enquêtes internationales permettant d’identifier et de poursuivre les auteurs de tels actes doivent être lancées. Mais de telles personnes ne peuvent être qu’un petit nombre. La question reste donc ouverte de savoir ce qu’il s’est passé pour les autres : pourquoi rejettent-ils donc le consensus ? Comment ont-ils pu se laisser convaincre de l’inefficacité du traitement HCQ/AZI alors que toutes les études disponibles montrent qu’il est efficace au moins en médecine ambulatoire ?

Je vois trois explications agissant de manière emboîtée[2] : (1) le scientisme, qui conduit à n’accepter comme vrais que les faits pour lesquels il existe une preuve irréfutable ; (2) la dissonance cognitive, qui conduit à suivre inconsciemment l’opinion dominante et à ignorer les faits en dissonance avec cette opinion, afin de rester en phase avec la société et éviter une marginalisation douloureuse ; et (3) l’ignorance, qui conduit à se ranger derrière toute opinion affirmée par une autorité légitime, lorsque l’on n’est pas qualifié pour se faire une opinion personnelle ou que l’on a pas le temps de se documenter.

Cet article étudie le premier de ces trois éléments explicatifs du déni : le scientisme. Je commencerai par rappeler ce qu’est le scientisme, puis montrerai comment cette idéologie conduit à l’ingénierie sociale, la planification centralisée et le totalitarisme, en me basant sur les travaux de Hayek (1953). Puis je ferai appel à l’épistémologie de Karl Popper (1963) pour offrir une alternative permettant la sortie du scientisme et expliquant comment la croissance de la connaissance se déroule en pratique, et quel est le rôle joué par la « preuve » dans toute activité scientifique. J’utiliserai ensuite le concept d’habitus de Bourdieu (2017) pour contraster l’humain calculateur, qui pourrait être l’idéal du chercheur scientiste, avec l’humain raisonnable, qui s’accorde mieux avec une pratique réaliste et ouverte de la science. Puis j’introduirai la notion de « science en action » (Latour 1987), montrant que la science est pratiquée par des « machines » qui mobilisent des réseaux sociaux qui influencent fortement ses résultats. Je ferai enfin appel à l’épistémologie de Bhaskar (1975) pour montrer que dans ces « machines », le désir des agents pourrait plus influencer les conclusions que les faits eux-mêmes. Bhaskar permet de franchir l’étape ultime pour la sortie du scientisme. Il montre que la conception dominante de la science réduit le monde réel aux régularités observées ou imaginées, ce qui fait disparaitre de la connaissance humaine tout ce qui ne peut être imaginé ou décrit sous forme de régularités facilement observables. En montrant que l’observation de régularités n’est pas une condition nécessaire à la pratique de la science, Bhaskar permet d’envisager une science réaliste portant sur des systèmes ouverts dans lesquels des régularités ne peuvent pas toujours être observées. Dans une telle science, la production de connaissances porte sur la vie réelle, donc sur des systèmes ouverts, et nécessite plus que des essais randomisés, car ceux si ne peuvent découvrir que ce qui est générateur de régularités.

Dans chacune de ces sections, j’illustrerai mon propos par une analyse de la crise COVID-19, principalement au niveau du débat sur les traitements à base d’HCQ et AZI. Je montrerai que le débat entre pro- et anti-HCQ/AZI/Zn est en fait un débat entre personnes ayant ces différentes conceptions de la science, mais aussi des désirs différents révélés par leur habitus.

Définition du scientisme

Le scientisme (Robinson et al 2015), c’est la croyance que la science peut résoudre tous les problèmes humains. Il a pour corollaire la croyance qu’il n’y a de connaissance que scientifique. Le reste ne serait qu’opinion, affirmation gratuite, ou non-sens. Le scientisme s’ancre dans une définition normative de ce qu’est la méthode scientifique, et dans la croyance que seule cette méthode permet de produire des connaissances objectives. Le scientisme est donc associé à une métaphysique particulière, ce qui en fait une philosophie dont l’objet est de justifier une certaine manière de produire de la connaissance objective. Au lieu de postuler une métaphysique et définir un mode de production des connaissances (une méthode scientifique) qui s’accorde avec cette métaphysique, le scientisme définit d’abord la méthode et adopte ensuite la métaphysique qui s’accorde avec cette méthode. Etant donné que celle-ci est née ou tout au moins a réalisé ses plus grands succès dans le domaine des sciences de la nature, de la physique à la chimie et la biologie, le scientisme postule que les sciences humaines et sociales devraient adopter les mêmes méthodes et les mêmes postulats métaphysiques. Cela conduit à un optimisme démesuré dans les vertus de la science pour la résolution des problèmes sociaux, une arrogance des scientifiques qui ont adopté les méthodes et la métaphysique des sciences naturelles, et une redéfinition de ce que signifie être humain. Ainsi notre humanité même est en jeux lorsque le scientisme devient la nouvelle orthodoxie[3] (Robinson et al 2015).

La métaphysique scientiste est matérialiste et mécaniste (Robinson et al 2015). Elle envisage le monde, et l’humain, comme des machines régies seulement par des lois qui causent des effets. L’esprit humain, en utilisant la science, doit comprendre rationnellement ces machines pour contrôler son univers et améliorer sa condition. L’homme agit en ingénieur sur son monde et sur lui-même, utilisant la technologie pour réparer et améliorer la machine monde et la machine humaine. L’humain et son environnement sont ainsi réduits à ce qui est intelligible, discernable par le cerveau humain, ne laissant aucune place à la transcendance. Le monde réel est réduit à ce qui peut être formulé par l’intelligence humaine et représenté sous forme de mécanismes causaux, en se basant sur ce qui peut être observé, analysé et décrit objectivement. Ainsi cette métaphysique ignore l’éthique, la morale, et la possibilité de choix humains qui ne soient pas motivés par des calculs rationnels. Le monde n’aurait pas de finalité autre que celle que la rationalité humaine construit et projette sur lui (Robinson et al 2015). L’homme n’aurait pas de dessein autre que celui que ses calculs et sa raison permettraient de mettre à jour. Ses choix seraient dénués de sens dès lors qu’ils ne pourraient être justifiés par des calculs rationnels et des intentions conscientes.

Du scientisme à la planification centralisée

L’idéal scientiste dans les sciences sociales a conduit à l’ingénierie sociale, notamment aux utopies fascistes et au socialisme scientifique. Hayek (1953) ancre sa critique du système politique soviétique dans une critique du scientisme, qui est selon lui une « mentalité polytechnicienne », une attitude « caractéristique de l'ingénieur » et un obstacle à la science. Cette attitude serait particulièrement inappropriée dans les sciences sociales car celles-ci étudient les représentations des objets plutôt que les objets eux-mêmes, et il existe autant de représentations ou images mentales d’un objet donné qu’il existe de sujets produisant ces images. Pour les sciences naturelles, ce qui compte est la nature réelle de l’objet représenté. Les écarts d’une image mentale à l’autre sont donc du bruit qu’il faut supprimer en établissant une vérité objective acceptée par tous. Pour les sciences sociales, cette diversité des images est une réalité incontournable qui peut avoir valeur en soit, qui peut avoir une signification profonde et qui pourrait définir la condition humaine. Il est donc légitime de se poser la question de l’utilité de cette diversité et d’associer la subjectivité à quelque chose de positif, plutôt que de la réduire à un bruit parasite. Cela ne conduit pas à remettre en cause de la valeur de la science, mais seulement à reconnaitre les limites de la science et les risques que feraient encourir toute prétention d’annihiler totalement le « bruit » subjectif. Le plus grand de ces risques est la dérive totalitaire, c’est-à-dire l’effacement progressifs des subjectivités au nom d’une vérité objective qui serait établie scientifiquement. C’est ce qui explique le caractère totalitaire du fascisme et du socialisme scientifiques, qui sont les deux principaux projets d’ingénierie sociale du 20eme siècle. Vu que le scientisme n’a pas disparu, nous avons toutes les raisons de penser que le 21eme siècle connaitra aussi des dérives totalitaires. Contrairement au socialisme scientifique et au fascisme, ces dérives pourraient conduire à l’ingénierie de l’humain plutôt que de la société, à la croisée entre transhumanisme, eugénisme et malthusianisme.

Le fait que la subjectivité, et donc la diversité des représentations, jouent un rôle positif pourrait être la conséquence de l’impossibilité, pour un esprit humain, de comprendre son univers naturel et social avec un niveau de complétude et de certitude élevé. Si aucune représentation du monde ne peut être complète et certaine, autant s’en remettre à une somme de représentations incomplètes et incertaines mais qui, à travers leur dialogue, finissent par former un tout qui reflète le monde réel de manière plus juste que tout projet d’ingénierie. Pour Hayek, ces agents qui produisent chacun leur représentation sont les individus libres d’agir et d’entreprendre, et leur communication se fait sur le marché, les prix constituant les signaux essentiels permettant à ces agents de coordonner leurs efforts et d’optimiser leur efficacité collective dans la conduite de leurs affaires. La critique du scientisme dans les sciences sociales est donc le socle permettant à Hayek de critiquer l’économie planifiée ou « planisme ». Adoptant une attitude d’ingénieur, l’agent en charge du « plan » ne s’intéresse qu’à un but et il « contrôlera tous les efforts dirigés vers ce but » (Hayek 1953 : 152). Il ignorera les « circonstances particulières, fugitives » de tel lieu et tel moment car la connaissance de ces circonstances ne peut exister que « dispersée parmi de nombreuses personnes » (Hayek 1953 : 160). Ces personnes, que Hayek appelle « négociants », sont les agents libres d’échanger sur le marché. Ils « entreront en conflit avec les idéaux de l'ingénieur », … « interféreront avec ses plans » et « encourront par là son mépris” (Hayek 1953 : 161). Ainsi se développent la dérive totalitaire d’un côté et la dissidence de l’autre. Notons au passage qu’Hayek n’a pas vu que les utopies sociales, en s’effaçant, n’ont fait que permettre au scientisme de développer d’autres idéologies tout aussi rigides, au sein d’une science économique à laquelle il s’est malheureusement associé. La lecture de Bourdieu nous permettra de mieux comprendre cette autre dérive scientiste.

La pertinence de l’analyse de Hayek pour comprendre la crise COVID-19 apparait clairement. Dans la crise COVID-19 en France et ailleurs, l’ingénieur, c’est le Comité Scientifique, et les négociants, ce sont les médecins qui reçoivent les patients. Le Comité Scientifique, adoptant l’idéologie scientiste, a orchestré la gestion de la crise tout comme l’état soviétique planifiait le fonctionnement de l’économie. Il a refusé la décentralisation en contestant les initiatives de planification locales qui ne s’accordaient pas avec ses directives, à Marseille notamment. Le Comité a fait le tri entre ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas en termes de traitements, s’opposant aux initiatives individuelles prises par les médecins, et à des expériences qui pour lui s’apparentaient à un bricolage illégitime ne produisant que du bruit. Ce bricolage était pourtant la source d’une diversité de solutions qui auraient par la suite été gardées ou éliminées selon leur efficacité, de la même manière que des initiatives économiques privées prospèrent ou font faillite selon leur rentabilité. La médecine n’est pas une science exacte et les décisions médicales, tout comme les décisions économiques, sont prises en fonction d’une analyse des couts et des bénéfices qui est spécifique de chaque malade et ne peut être faite que par le médecin qui traite ce malade. Ainsi les médecins auraient dû être autorisés à prescrire, pour réaliser ces analyses des couts et bénéfices. Certains argumenteront que les patients ne pouvaient pas être les cobayes d’une multitude de médecins bricoleurs. Mais la médecine a toujours inclus une part de bricolage et celui-ci peut être encadré et s’autorégule si le cadre légal est approprié. Les médecins qui joueraient trop aux apprentis sorciers s’exposeraient au risque que leurs malades portent plainte, et seuls des médicaments déjà testés et mis sur le marché, utilisés dans d’autres contextes cliniques, pourraient être utilisés.

En refusant cette logique et décidant ce qui est acceptable de manière normative et pour tous, et en restreignant le domaine de ce qui est acceptable au domaine de ce qui est prouvé par un essai randomisé, en vertu de leur idéal scientiste, une poignée de décideurs ont donc conduit les politiques COVID-19 à la faillite selon les mêmes logiques qui ont conduit les économies planifiées à la faillite dans les pays du bloc soviétique. Il n’est donc pas surprenant que les mouvements sociaux libertaires aient été parmi les plus vocaux pour contester les positions prises par les gouvernements, et que les prises de position de médecins « dissidents » aient été censurées par les algorithmes des sites hébergeant les réseaux sociaux, premiers signes d’une dérive totalitaire.

La croissance de la connaissance et le rôle de la preuve

Il existe donc un savoir collectif, diffus, fragmenté entre une multitude d’acteurs, qui pourrait dans certaines circonstances avoir autant ou plus de valeur que le savoir scientifique formalisé et réducteur porté par les experts ou « ingénieurs ». De quoi est constitué ce savoir collectif ? Comment est-il produit et comment le faire croitre ? La lecture des travaux de Popper (1963) permet de répondre. Cet épistémologue montre que le savoir humain comporte, tout au moins en partie, du mythe, et que le rejet de tout ce qui est mythique est sans doute une des plus grandes erreurs commises par la science positiviste. Cette erreur serait causée par l’importance donnée à la vérification, notion que Popper ne rejette pas mais contraste avec la falsification ou « négativisme », montrant que la science requiert les deux notions mais que le curseur s’est déplacé trop loin du côté de la vérification positive.

Selon Popper (1963), les plus grandes avancées des sciences sont obtenues par la falsification des connaissance établies. Bien entendu, la vérification joue aussi un rôle important. Toute connaissance doit être vérifiée afin d’augmenter son degré de certitude. Mais la vérification n’augmente pas la quantité de connaissance vraie. Elle ne fait qu’augmenter le degré de certitude de ce que l’on croit déjà être vrai, alors que la falsification a pour effet de supprimer un contenu faux et ouvre ainsi un espace qui pourra être rempli par un contenu qui a plus de chances d’être vrai. Le mythe, c’est le matériau que l’on soumet à la falsification. C’est un matériau non vérifié formellement, qui peut être associé à des dogmes ou des biais idéologiques et qu’il faut donc manier avec prudence. Mais le mythe vient néanmoins de quelque part. Il a été produit collectivement par les hommes à travers une expérience accumulée dans le temps. Il est donc porteur de sens. Une partie de ses contenus sont vrais, et c’est justement pour cela qu’on se donne la peine de les soumettre au test de la falsification, par la méthode scientifique.

Certes, les mythes fondateurs de toute société contiennent des fantaisies qui reflètent l’imagination et les désirs des hommes, mais on sait qu’ils font également écho à des faits historique. Et dans un sens plus large, peut être considéré comme mythe toute théorie incertaine résultant de l’expérience collective des hommes, sur un sujet quel qu’il soit. Le mythe, c’est donc le fond commun du savoir disponible pour l’humanité. C’est le substrat de la science, mais aussi son produit car la falsification n’est jamais complète et définitive.

En reconnaissant la valeur positive et la permanence du mythe, il devient donc possible de sortir du scientisme car on reconnait alors que toute connaissance est incertaine, et que toute théorie contient un mélange de contenus produits par la méthode scientifique et de contenus hérités des mythes, qui attendent encore de passer le test de la falsification, et qui peut être ne le passeront jamais. Concernant ces contenus qui ne pourront jamais être falsifiés, Popper les met en dehors du champ de la science. I propose de distinguer les faits scientifiques des faits non scientifiques par le fait que les premiers sont falsifiables alors que les seconds ne le sont pas. Mais il insiste sur le fait que ce qui n’est pas falsifiable n’est pas forcement faux et dénué de sens. Il cite la psychanalyse comme théorie non scientifique car non falsifiable, mais pouvant néanmoins être correcte. Le mythe n’est donc pas forcement une entité négative même s’il contient des faits non falsifiables. Tout système de connaissance, qu’il s’agisse d’une mythologie ou d’une théorie scientifique, est un mélange de croyances justes et de croyance fausses, indépendamment du fait que ces croyances sont falsifiables ou pas, ce qui rend difficile la distinction entre mythologie et théorie scientifique et encore plus difficile, voire impossible, leur séparation.

L’humanité dispose donc à tout moment d’un fond commun de savoir, que j’appelle mythe, et la science est la meilleure méthode qu’elle a élaborée à ce jour pour corriger ce fond commun en falsifiant les contenus faux et en les remplaçant par des contenus vrais. Aucun contenu ne peut échapper au test de la falsification, car on ne peut jamais prouver à 100% qu’un contenu ou énoncé dans une théorie est vrai, c’est à dire qu’il s’accorde avec les faits, même s’il a été produit en utilisant les méthodes les plus rigoureuses. C’est pourquoi, dans les analyses statistiques associées aux essais randomisés, qui sont l’instrument privilégié au service de la vérification scientifique, on évalue la probabilité que l’essai montre que l’hypothèse testée est vraie, et cette probabilité n’est jamais 100%. Il est toujours possible d’imaginer qu’une conjonction de facteurs hautement improbable a conduit au résultat observé et que la cause des résultats n’est pas ce que l’on croit.

D’autre part, le remplacement des contenus faux ne sera jamais complet, et si l’on supprimait de ce fond commun tout ce qui n’a pas encore été prouvé par la science, on supprimerait aussi des contenus vrais, ainsi que des contenus qui font sens pour ceux qui y croient et qui ne pourront jamais être falsifiés, comme la croyance que dieu existe ou que l’amour, plutôt que le calcul ou l’intérêt, est le déterminant essentiel des relations humaines. Et on finirait par croire que la certitude absolue peut être acquise en science, puisque dans le paradigme scientiste, la connaissance incertaine est rejetée, ou tout au moins regardée avec une extrême méfiance. On oublierait ainsi que même les contenus considérés vrais doivent continuer d’être soumis à la falsification et pourraient finalement s’avérer être faux.

Enfin, face aux difficultés relatives à la falsification de théories complexes et à grand contenu, on se concentrerait à l’excès sur la vérification de théories secondaires et à contenus restreints, ce qui conduirait à l’ignorance de tout le reste, de tout ce qui est difficile à falsifier ou trop incertain. La démarcation qui compte n’est donc pas celle qui consiste à distinguer ou séparer ce qui est scientifiquement établi de ce qui ne l’est pas, ou ce qui est définitivement prouve de ce qui ne l’est pas. C’est, plutôt, la distinction entre le savoir qui joue un rôle social positif et celui qui ne joue pas ce rôle. C’est à travers l’expérience, plutôt que la discussion scientifique ou philosophique, que cette démarcation peut être faite, ce que l’on pourra comprendre en étudiant la notion de « sens pratique » développée par Bourdieu.

Le curseur dans la pratique de la science doit donc se déplacer du côté de la falsification, afin de produire des théories à plus grand contenu, quitte à ce qu’elles soient moins certaines. Les meilleures théories ne sont pas forcément celles qui sont les plus certaines. Ce sont celle qui sont le plus utiles socialement, qui « marchent », ce qui requiert qu’elles aient beaucoup de contenu, même si celui-ci n’est pas certain. Mais la vérification ne doit pas être abandonnée pour autant, car on a vu qu’elle permet d’augmenter le niveau de certitude des connaissances. Il faut donc opérer à la fois des falsifications et des vérifications si on veut avancer. Si on privilégie la falsification, on aboutit à des théorie à grand contenu mais peu certaines. Si on favorise la vérification, on aboutit à des théories à faible contenu mais ces contenus ont un niveau de certitude plus élevé. Popper (1963) a clairement identifié ce dilemme. Il propose la notion de verisimilitude comme moyen de mesurer la croissance de la connaissance et la valeur relative de théories concurrentes et fonction de ces deux critères. Une théorie à haute verisimilitude est une théorie disposant à la fois de plus de contenus et d’un niveau de certitude plus élevé que des théories concurrentes.

Pour illustrer ces idées Poppériennes avec la crise COVID-19, le mythe, ou, plutôt, le fond commun de savoir disponible pour traiter cette maladie, mélange de contenus vrais et de contenus faux, existait dès le début, car la médecine n’est pas née hier. Le SARS-CoV-2 appartient à une famille de virus auxquels les médecins et chercheurs ont déjà été confrontés. Dès que ce nouveau virus et les premiers malades COVID-19 ont pu être identifiés, la connaissance relative à cette famille de virus a pu être mobilisée. La science médicale dispose également d’immenses bases de savoir concernant des milliers de médicaments et leurs modes d’action. Les mécanismes physiologiques et divers symptômes de la maladie ont pu chacun être mis en rapport avec cette base de connaissance, et des idées ont forcément germé dans la tête des scientifiques et médecins à la recherche de solutions. On disposait donc dès le départ d’une théorie à grand contenu concernant les approches thérapeutiques disponibles pour soigner les malades COVID-19, mais à faible niveau de certitude car établie en soignant des pathologies voisines ou à partir de l’étude de mécanismes physiologiques in vitro. Il fallait donc passer à l’action pour faire le tri entre hypothèses justes et fausses et améliorer jour après jour cette théorie. C’est ce qu’on fait des scientifiques et médecins chinois, efforts qui ont été prolongés par des initiatives à l’IHU de Marseille et l’hôpital de Garches en France, par le Docteur Zelenko aux USA, une équipe brésilienne à Sao-Paulo, et des collectifs de médecins en France puis aux USA et partout dans le monde. Ensembles, il ont augmenté la verisimilitude de la théorie à grand contenu initiale concernant les moyens de traiter la maladie COVID-19, débouchant sur une théorie améliorée résumée par les synthèses déjà citées (Anonymous 2020, McCullough et al. 2020, Risch 2020). Si un plus grand nombre de personnes avait pu être mobilisé, et si une meilleure communication entre ces personnes avait été possible, on aurait débouché sur une théorie présentant une verisimilitude encore plus grande, c’est-à-dire ayant à la fois plus de contenu et plus de certitude sur les contenus. Malheureusement, les pouvoirs publics et des entités privées ont tenté d’entraver (Annexe 2), plutôt que de l’appuyer, le processus scientifique parfaitement légitime (Annexe 1) qui a permis la production et l’amélioration de cette théorie.

En effet, les autorités médicales ont choisi le vérificationnisme, afin de favoriser la certitude au détriment du contenu. Ignorant une grande part du savoir établi car le jugeant trop incertain, elle a produit sa propre théorie qu’elle a opposée, plutôt qu’intégrée, au savoir existant. L’essai randomisé, instrument privilégié du vérificationnisme, a sans cesse été invoqué comme s’il était le seul moyen de produire un savoir valide, conduisant à faire table rase de tout le savoir acquis. Toute connaissance n’étant pas certaines à 95% ou plus a été discréditée, parce qu’elle serait « non prouvée » ou « anecdotique »[4]. Les acteurs produisant de la connaissance par d’autre moyens, notamment les médecins, détenteurs du savoir médical accumulé pendant des générations et producteurs de nouveaux savoirs par leur expérience quotidienne avec les malades, ont été mis au banc. Leur droit de prescrire a été contesté ou des mesures ont été prises pour l’entraver. Des résultats scientifiques ont été étiquetées « fausses nouvelles »[5] tout simplement parce que le niveau de preuve n’atteignait pas le seuil critique de 95%. Une ignorance généralisée a ainsi été construite en opposition au savoir en train de se construire. Des moyens politiques, médiatiques, et technologiques ont été mobilisés pour effacer le savoir en formation ou tout au moins le rendre invisible au public, des lors qu’il était jugé « non prouvé ». Les collectifs engagés dans la production de ce savoir ont été entravés dans leur communication par les algorithmes des réseaux sociaux. Facebook, Google et Twitter se sont donnés le droit de décider quelle information a le droit de circuler en mobilisant des algorithmes de censure. Ces algorithmes n’ont validé que les contenus étroits acceptés par des experts occupant des positions institutionnelles élevées (à l’OMS ou dans des commissions scientifiques), et rejeté le vaste savoir établi par les chercheurs et médecins mobilisés dans la recherche et le traitement des malades. Ils ont donc entravée la conduite normale de la science et la production d’une théorie à haute verisimilitude sur la manière de traiter les patients COVID-19 (Annexe 2).

Les promoteurs de cette ignorance socialement construite ont alors pu prendre une feuille blanche et commencer à inscrire les signes d’un nouveau savoir présentant seulement les contenues « vrais » selon leurs critères. Ainsi nous avons pu « apprendre » que les traitements à base d’HCQ ne marchaient pas, que le remdesivir réduisait de 3 jours la durée d’hospitalisation des patients COVID-19, et que les corticoïdes sont utiles pour faire face à l’orage de cytokine aux stades graves de la maladie, chose que l’on savait déjà mais qui n’avait pas encore été prouvée par un essai randomisé.[6] Remettre ainsi les pendules de la connaissance à zéro pose des questions éthiques[7] pour lesquelles il faudra rendre des comptes, car cela a conduit à placer les malades dans une vide thérapeutique.

Autre problème révélant l’absence de sens pratique de l’approche vérificationnisme et le mépris de tout ce qui n’entre pas dans con cadre : il n’y a eu aucune tentative de falsifier le savoir acquis. La théorie à large contenu établie par les collectifs de médecins ne demandait qu’à être soumise au test de la falsification et mobilisant un collectif plus large de chercheurs. Sa principale conclusion, que la combinaison HCQ/AZI/Zn appliquée dès les premiers stades de la maladie réduit de manière très significative la durée de portage viral, les risques d’aggravation, et les taux de décès et d’hospitalisation, aurait pu être soumise à des tests supplémentaires. Des essais randomisés auraient été non éthique du point de vue des chercheurs qui ont mis au point ces traitements, car ils disposent déjà d’un niveau de preuve élevé que ce traitement est bénéfique et ils ne peuvent donc pas le refuser à leurs patients. Un observateur extérieur peut être sceptique à la lecture de leurs publications, mais leur expérience au contact de centaines ou milliers de patients COVID-19 va bien au-delà de ce qu’ils peuvent exprimer dans un article. Il est donc légitime que le niveau de certitude des auteurs des études soit plus grand que celui de ceux qui les lisent. Si des médecins et décideurs sont sceptiques à la lecture de ces articles, il leur revient donc de mettre en œuvre des essais cliniques. C’est en tout cas une approche préférable au déni des faits observés. Pourtant ils ne l’ont pas fait. Un seul essai randomisé testant ce traitement a été lancé et il a été arrêté après avoir recruté 20 patients.[8]

On peut s’étonner de cet acharnement à dénigrer toute conclusion qui aurait été produite sans utiliser les outils considérés comme permettant le niveau de preuve le plus élevé, c’est-à-dire sans conduire d’essais randomisés. Cette situation pourrait s’expliquer par le rôle joué par la preuve dans un autre domaine : le droit. En effet, si la preuve n’est pas une nécessité pour faire une affirmation dans le domaine scientifique, elle l’est lorsqu’il s’agit d’affirmer quelque chose qui a des conséquences juridiques. Une théorie scientifique est acceptée dès lors qu’elle s’accorde mieux avec les faits que toute autre, même si elle n’est pas prouvée. Sa fonction est de formuler l’état présent des connaissances afin de soumettre cette connaissance à la falsification pour l’améliorer. Mais dans un tribunal, la même théorie devra être prouvée si elle est utilisée pour justifier une accusation, car une accusation potentiellement fausse n’est pas moralement acceptable. Il semble que l’on ait fait glisser la logique de la pratique juridique vers la pratique de la science, ce qui pourrait s’expliquer par le fait que celle-ci est utilisée dans les procès, notamment quand les accusés sont des firmes dont les procédés industriels sont suspectés de conséquences écologiques ou sur la santé humaine. Si la science des firmes pétrochimiques, agro-alimentaires, ou pharmaceutiques les conduit à fabriquer des produits aux effets néfastes, elles exigent, lorsqu’elles sont accusées, que ces effets soient prouvés. Pourtant, dans une optique de réduction des risques et dans un contexte d’incertitude scientifique, et considérant que les firmes ne peuvent être mises en prison et qu’aucune question morale n’est donc directement posée par l’arrêt de leurs agissements, on devrait pouvoir règlementer leurs actions en se basant sur les théories qui s’accordent mieux avec les faits que toutes autres, sans attendre des preuves définitives qui ne pourraient jamais survenir. On entrevoit facilement que ces firmes feront tous pour éviter l’application d’un tel principe de précaution car de telles règlementations réduiraient leur liberté d’action et leurs profits. Les règles qui en découleraient les empêcheraient de faire ce qu’elles veulent dans l’espace des faits non définitivement prouvés, qui constitue l’essentiel du domaine du savoir pour des sujets comme les impacts environnementaux ou sur la santé de leur produits et procédés de production. Ainsi l’exigence de preuves définitives devient le nouveau standard de la science, justifié non pas par l’épistémologie, mais par l’utilisation de la science dans la pratique du droit.

Sens du jeu et raison pratique

Un des grands apports de la pensée de Bourdieu, pertinent pour notre discussion, est sa démonstration que l’être humain ne produit pas de la connaissance en inscrivant un à un les termes d’une équation sur une feuille blanche, comme le ferait un chercheur scientiste vérificationniste qui considèrerait que l’on ne sait rien tant que l’on n’a rien vérifié par un essai randomisé, ou comme le font les économistes lorsqu’ils développent des équation appelées fonction d’utilité pour exprimer les préférence des individus. Les êtres humains dans leur vie pratique, y compris les scientifiques les plus radicalement scientistes, ne limitent pas leur connaissance à ce qui a été prouvé. Il ne prennent pas leurs décisions en se basant exclusivement sur des calculs explicites ou conscients des couts et bénéfices, ou du niveau de satisfaction de leurs préférences selon les termes posés dans des équations. Dans son cours au Collège de France en 1992-1993, Bourdieu (2017) remet en cause la pensée économique qui fait ces postulats, et j’utiliserai ici ses conclusions pour renforcer cette critique du scientisme.

Certes les économistes sont de plus en plus d’accord pour dire que les êtres humains ne considèrent pas seulement les couts et bénéfices matériels ou monétaires lorsqu’ils prennent des décisions, et que leurs « calculs » n’impliquent pas seulement des chiffres. Les modèles individualistes des économistes permettent de représenter certaines formes d’altruisme, en postulant que bénéficier à l’autre peut contribuer à faire qu’on se sente bien et augmenter les options que l’on aura dans le futur, grâce à un accroissement du capital social. Il n’en demeure pas moins que les économistes orthodoxes ramènent toujours les décisions individuelles à des choix conscients et rationnels motivés par l’intérêt ou les préférences individuelles, et que tous leurs modèles sont basés sur ce postulat. Les économistes ont cette vision du monde car c’est la seule qu’ils ont été en mesure de produire dans un langage mathématique et qu’ils peuvent tester dans le monde réel en utilisant les méthodes dites « empiriques » de l’économétrie, ou par l’approche expérimentale, qui est de plus en plus en vogue. Ils n’ont inclus dans leur modèle que des variables qui peuvent être facilement mesurées et dont on peut faire varier la valeur afin de mesurer l’effet de ces variations. Ils limitent donc leur vision du monde à ce qui est mesurable. Il s’ensuit qu’ils postulent que le monde réel est à l’image de leurs modèles, que le comportement humain peut être prédit par ces modèles, et que la gestion des affaires humaines se réduit à jouer avec les variables présentes dans leurs modèles. Ainsi, tout ce qui est extérieur à leurs modèles, c’est-à-dire tout ce qui est extérieur à ce qui est objectivement connu, demeure invisible, voire n’existe pas. On reconnait bien là les traits du scientisme et on peut entrevoir le risque de dérive totalitaire comme dans le cas du socialisme scientifique. Si les choix individuels pénalisant l’individu ou la société s’expliquaient par des erreurs de calculs ou de logique, ou par un manque d’information, alors des observateurs externes mieux informés et se considérant meilleurs calculateurs pourraient se donner le droit de décider pour les autres, ou tout au moins d’orienter les choix des autres vers ce qu’ils jugent optimal.

Pour remettre en question cette vision, Bourdieu (2017) analyse les échanges de dons et contre-dons. Il montre que pour que le don joue son rôle social, qui est de cimenter des relations entre individus afin de constituer un tissu social sans lequel les humains ne pourraient survivre et s’épanouir, il doit être la négation de ce qu’il est, c’est-à-dire qu’il doit être authentiquement généreux car c’est cette générosité qui est la cause du lien social et de l’amour qui conduisent à la réciprocation. L’acte du don sert donc l’intérêt de celui qui donne mais si cet intérêt était calculé et conscient, alors le don ne pourrait plus jouer ce rôle. Si l’acte fondamental de la vie sociale est non pas le calcul mais la négation du calcul, on voit mal comment le calcul conscient de l’intérêt pourrait guider la société. Il pourrait, au contraire, la détruire.

Si, donc, l’être humain ne calcule pas ses actes de manière consciente, par quoi est-il guidé ? Bourdieu propose la notion d’habitus, qu’il définit comme une série de « dispositions » que chaque individu acquiert au cours de sa vie et dans le groupe social auquel il appartient. Contrairement au calcul qui est plus ou moins instantané, et dont le résultat ne dépend que de l’état d’un nombre fini de variables au moment où il est fait, l’habitus est donc historiquement constitué. Une décision motivée par l’habitus dépend de l’histoire de l’individu, pas seulement de la situation dans laquelle il se trouve. Elle est dépendante du passé, y compris de mythes vrais ou faux et qui pourraient en partie avoir été oubliés ou relégués dans le subconscient. L’habitus confère également à l’individu une identité sociale puisqu’il s’est constitué au sein d’un groupe particulier. Il permet une « distinction », autre concept bourdieusien majeur, entre groupes et entre individus. Cette distinction est cultivée car dans le cas contraire, l’individu se trouverait en dissonance au sein de son groupe, ce qui serait source d’anxiété car l’être humain est un être social qui ne peut s’épanouir dans l’isolement. Certes il est possible de changer de groupe, mais cela ne conduirait qu’à adopter un autre habitus, principe dont l’humain ne peut donc pas s’affranchir. Si cette élimination avait lieu, les humains deviendraient tels des atomes calculateurs, se trompant sans doute très souvent dans leurs calculs, et la société et l’amour disparaitraient. L’habitus peut donc être vu à la fois comme porteur d’imperfections, si on l’envisage dans un monde théorique ou tout pourrait être calculé afin de falsifier tout ce qui est faux, et comme une dimension nécessaire et inéluctable de la condition humaine, si l’on reconnait que tout ne peut être calculé et que remplacer l’incalculable par du vide viderait l’existence humaine de son sens.

L’habitus est donc ce qui permet à l’individu d’évoluer avec succès dans la société, dans un groupe social particulier et historiquement constitué, sans avoir à faire à chaque instant des calculs sophistiqués. C’est une sorte d’instinct propre à l’humain, un « sens du jeu » social qui permet à chaque individu d’être un agent autonome, contraint par les structures sociales mais libre néanmoins car pouvant développer des stratégies à condition qu’elles s’accordent avec les règles du jeu. Ainsi doté de son habitus ou de ses dispositions, l’être humain peut évoluer dans ce que Bourdieu appelle le champ social, ou tout simplement « champ ». Si l’on continue la comparaison avec les concepts clef de l’économie, le champ est le substitut du marché, tout comme l’habitus est le substitut du calcul. La différence principale entre champ et marché est que le premier n’est pas un espace neutre. Il est structuré par une distribution de pouvoir inégale entre individus et groupes sociaux, pouvoirs qui reflètent la distribution inégales de différentes formes de capital : humain, social, économique, naturel, et symbolique. Le capital symbolique, que l’on peut tout simplement appeler prestige, joue un rôle central dans la pensée de Bourdieu car toute forme de capital peut être convertie en capital symbolique et vice-versa. Chaque individu cherchera donc à accroitre son capital symbolique, en utilisant son habitus ou « sens du jeu » pour évoluer dans le champ. Chaque individu agira non pas en tant qu’agent rationnel, c’est-à-dire pas en tant que personne faisant des choix optimaux sur la base de calculs conscients réalisé dans l’instant en considérants seulement les variables du système au moment de la prise de décisions. Il agira plutôt en tant qu’agent « raisonnable », guidé par son habitus, qui est le « principe non choisi de tous ses choix », s’est constitué collectivement et historiquement, et a pour fonction principale de servir de guide pour l’accroissement du capital symbolique.

Bien entendu, tout ceci ne signifie pas que le calcul ne joue aucun rôle dans la prise de décision humaine. L’habitus n’est pas infaillible et le calcul est sans doute un des éléments qui permet de l’ajuster dans le temps, lorsqu’il devient inadapté car ne changeant pas aussi vite que la société ou l’environnement naturel, un décalage que Bourdieu appelle « effet Don Quichotte ». Le calcul est possible dans un grand nombre de situations et lorsque cette possibilité existe, il doit être utilisé. Mais le monde réel se prolonge au-delà de cet espace où le calcul est possible, et l’habitus nous permet de prendre en compte cet espace étendu, grâce au savoir constitué historiquement et collectivement qu’il véhicule. L’habitus est une sorte de routine inconsciente qui nous permet de prendre des raccourcis sur le calcul ; qui nous permet de ne pas répéter les calculs lorsque d’autres avant nous les ont déjà réalisés face à des situations similaires. Il permet ainsi de faire face à des situation complexes, quand on ne dispose pas du temps et des ressources nécessaires pour tout calculer, ou quand tout n’est pas calculable. Il est le meilleur substitut à l’ignorance lorsque celle-ci ne peut être remplacée par le résultat d’un calcul. L’habitus, c’est donc ce qui nous permet d’avoir raison dans l’action, par extrapolation de situations antérieures. C’est un principe qui dote les humains d’une raison pratique, malgré l’impossibilité d’une rationalité calculée, dans la majorité des situations auxquelles ils font face au quotidien. Seul Dieu pourrait s’en passer. Mais c’est aussi un principe porté par l’individu et s’inscrivant dans un champ social spécifique. Il n’a donc pas la portée universelle et l’idéal d’objectivité du calcul.

Pour en revenir au sujet de cet article, reconnaitre la valeur du calcul, c’est reconnaitre la valeur de la science et de ses méthodes les plus performantes. Et reconnaitre la valeur de l’habitus, c’est reconnaitre les limites de la science et ne pas tomber dans le piège du scientisme. Lorsqu’il s’agit de progresser dans la connaissance, l’habitus et le calcul sont donc des ressources indissociables et indispensables. Pour faire le lien avec les concepts de Popper, l’habitus s’inscrit dans le mythe tandis que le calcul est un outil au service de la falsification. Malheureusement, lorsqu’il s’agit de progresser socialement, les deux notions peuvent être antagonistes. La fonction principale de l’habitus est de guider les mouvements dans le champ pour accroitre le capital symbolique. Ceci peut se faire contre les résultats du calcul, si ceux-ci débouchent sur des conclusions qui ne sont pas celles permettant de se positionner favorablement dans le champ. L’habitus sera alors une force biaisant le calcul ou conduisant à ignorer ses résultats. Si la société était monolithique, constituée d’un seul groupe humain où tous avaient le même habitus, sans doute celui-ci pourrait-il mieux servir le bien collectif et être plus facilement révisé sur la base de l’expérience collective. Mais lorsque la société est divisée en groupes, chacun développe l’habitus qui lui convient pour gagner face aux autres dans le champ social. Ainsi l’habitus cesse de servir le bien public et entre en contradiction avec la connaissance objective. Il ne se contente plus de combler les vides dans les situations ou tout ne peut être calculé.

En ce qui concerne le débat sur le traitement du COVID-19, on voit en fait s’affronter deux groupes sociaux distinct constitués d’individus qui n’ont pas le même habitus, qui évoluent dans des champs différents, et qui instrumentalisent le calcul pour avancer dans leur champ au lieu de le mettre au service du savoir. C’est ce qui explique les déclarations contradictoires que l’on entend, mais aussi certaines déclarations irrationnelles ou illogiques sur le plan scientifique car reflétant une stratégie employée pour avancer dans le champ selon des critères sociaux, y compris politiques, plutôt que pour faire avancer la connaissance objective.

Je prendrai comme exemple deux articles qui ont eu une forte influence sur le débat. Le premier est l’article de Mehra et al (2020) publié par la revue The Lancet. Cet article a été retiré suite à des critiques (Watson 2020) restées sans réponses et associées à de très fortes présomptions de fraude.[9] Mais même s’il n’était pas une fraude, même si ses données étaient réelles et les analyses des auteurs correctes, cet article ne remettrait pas du tout en cause l’efficacités des traitements à base d’HCQ développés à l’IHU de Marseille comme certains le prétendaient. En effet, bien que les auteurs concluent que ces traitements ne devraient pas être utilisés en dehors d’essais cliniques,[10] ils écrivent également, quelques lignes avant cette affirmation, que leurs données ne portent pas sur l’utilisation de ces traitements en médecine ambulatoire.[11] Comment expliquer ces deux affirmations contradictoires ? Car si les conclusions de l’article ne s’appliquent pas au contexte ambulatoire, alors l’article ne dispose pas de l’autorité lui permettant d’affirmer que l’HCQ ne devrait pas être utilisée hors essais cliniques, puisque ceux qui proposent cette utilisation indiquent que c’est surtout en début de maladie, avant hospitalisation, que l’HCQ est efficace. Pourtant, c’est cette autorité qui a été donnée à l’article par les politiciens et les experts qui les conseillent, qui reprennent la phrase de conclusion en omettant de préciser qu’elle ne s’applique pas à la médecine ambulatoire. Cette attitude irrationnelle peut s’expliquer par leur habitus : ils ont tout simplement prélevé dans l’article la phrase qui leur permet d’avancer dans leur champ, et ignoré celle qui pourrait porter atteinte à leur capital symbolique en remettant en cause une rhétorique qu’ils ont déjà acquise (la rhétorique du déni de l’efficacité de HCQ/AZI).

Cet exemple de l’article de Mehra et al. (2020) n’est pas un cas isolé. On retrouve une logique similaire dans une méta-analyse publiée par des chercheurs affiliés à l’INSERM et portant sur les études relatives aux traitements à base d’HCQ (Fiolet et al 2020). Dans cette étude, les auteurs affirment que l’HCQ utilisée seule n’est pas effective pour le traitement des patients COVID-19, que la combinaison HCQ/AZI augmente le risque de mortalité, et qu’il n’est nul besoin de conduire des études supplémentaires pour évaluer ces molécules.[12] Là encore, on trouve une conclusion qui va au-delà de ce que les données peuvent dire. A nouveau, les auteurs agissent comme s’ils ignoraient que les traitements à base d’HCQ sont préconisés essentiellement pour le traitement de la maladie COVID-19 dans ses premiers stades, le plus vite possible dès la déclaration des premiers symptômes, en médecine ambulatoire et pour réduire les risques d’aggravation et d’hospitalisation. Ils affirment que sur les 29 études qu’ils ont analysées, toutes sauf une (Skipper et al 2020), qui en outre porte sur l’HCQ non associée à l’AZI, concernent des patients COVID-19 hospitalisés. Ils indiquent également que leur méta-analyse n’établit pas de sous-groupes selon le stade ou le niveau de gravité de la maladie. Comme pour l’étude Mehra et al (2020), l’étude de Fiolet et al (2020) n’a donc aucune autorité pour affirmer quoi que ce soit sur l’efficacité du traitement HCQ/AZI en médecine ambulatoire. Malheureusement, leur habitus les conduit à se donner cette légitimité car fidèles à la logique scientiste, ils considèrent que le savoir qui n’est pas supporté par le niveau de preuve le plus haut n’existe pas. Ils comblent ensuite le vide ainsi créé avec des contenus qui leur permettent d’avancer dans leur champ, et gonflant une théorie étroite et juste (l’HCQ et l’AZI ne fonctionnent pas en milieu hospitalier, en moyenne, dans le contexte des 29 études passées en revue) pour en faire une théorie plus large mais fausse (l’HCQ/AZI ne fonctionne pas quel que soit le contexte).

La conclusion que Fiolet et al (2020) devraient formuler n’est donc pas qu’il n’est pas utile de conduire des nouvelles recherches sur l’HCQ et l’AZI. C’est, plutôt, qu’il faudrait enfin se décider à conduire de telles recherches pour tester les traitements à base d’HCQ/AZI ou HCQ/AZI/Zn sur des patients COVID-19 non hospitalisés, puisque leur étude confirme, justement, qu’aucun essai testant cette approche n’a été conduit. Fiolet et al (2020) sont donc allés plus loin que Mehra et al, qui avaient au moins le mérite d’appeler à la conduite d’études complémentaires. En déclarant que de telles études sont inutiles, Fiolet et al. (2020) jouent un jeu qui ne se situe pas dans le cadre de la science mais qui s’inscrit pleinement dans le champ politique. Ce jeu a pour effet de faire taire une dissonance, et donc de clore un débat qui est une nécessité scientifique pour tout le monde mais une nuisance politique pour certains. Sans doute les auteurs n’ont-ils pas fait ce calcul politique, et sans doute n’ont-ils pas l’intention d’obscurcir le débat en prétendant qu’une controverse est close. Mais leur sens du jeu ou habitus les a conduits à agir selon cette logique, afin de s’accorder aux attentes du champ social auxquel ils appartiennent, champ qui est plus préoccupé par la nécessité de gagner une bataille qui mêle politique, egos, et idéologies, que par la nécessité de révéler une vérité scientifique.

Qu’en est-il maintenant du camp adverse, qui a en son centre le Professeur Raoult et l’IHU de Marseille en France, et le Docteur Zelenko aux USA ? Bien sûr Didier Raoult et ceux qui le soutiennent cherchent aussi à augmenter leur capital symbolique et d’avancer dans le champ social. Mais Raoult dispose d’outils pour cela : des vidéos qu’il poste sur internet et qui lui permettent de conquérir son espace social. A côté de cela, l’univers social dans lequel il construit son habitus de chercheur est celui des malades. Cet univers le met face à ses responsabilités ; il le met à l’épreuve de faits qui dépendent directement des résultats de sa recherche. Il n’a pas le droit de se tromper médicalement car alors ses patients mourraient et son capital social à Marseille serait perdu. On ne peut en dire de même des chercheurs qui se contentent de manipuler des données sans voir de malades, et qui ne seront évalués que sur la cohérence interne de leur rhétorique ou de leurs modèles, c’est-à-dire selon des critères méthodologiques.

Raoult dispose aussi d’une vision de la pratique de la science qui a échappée aux pièges scientistes. Il reconnait certes la valeur de l’expérimentation mais ne considère pas que les essais randomisés sont le seul moyen d’obtenir des preuves scientifiques sur l’efficacité d’un médicament. Il ne peut être scientiste car s’il n’utilisait que la connaissance prouvée par des essais randomisés pour traiter ses malades, il ne lui resterait que très peu d’options. Et s’il donnait des placebos à la moitié des malades dans le cas de traitements non validés par de tels essais, il les exposerait à des risques accrus de ne pas guérir. C’est donc la pratique, dans son cas, qui trace la ligne de démarcation entre savoirs valides et non valides. Il sait aussi que l’inférence ne se fait pas que par l’analyse statistique. Tout être humain infère au quotidien en observant des régularités et cette inférence dans l’action est source de l’essentiel des connaissances que nous utilisons dans notre vie quotidienne et professionnelle. Elle fait de chacun de nous un expert dans des domaines spécifiques, y compris dans des disciplines scientifiques. Une expérience célèbre (Dreyfus et Dreyfus 1986) a montré que les experts les plus performants, dans la réanimation cardiaque par exemple, agissent à l’instinct et pas seulement selon des procédures scientifiquement calculées et optimisées. C’est en brisant les règles pour parer à l’imprévisible dans l’urgence qu’ils augmentent le taux de ressuscitation de leurs patients. C’est dans un tel univers pratique, où les décisions doivent être prises rapidement, que Raoult mobilise sa connaissance. Dans cet univers, il fait l’expérience, comme des milliers d’autres médecins, que comparer l’état des malades avant et après traitement permet d’avancer plus vite et donc de sauver plus de gens que comparer des malades traités et non traités en suivant des protocoles rigides. Son approche est en outre plus éthique dès lors que l’on a de fortes présomptions sur l’efficacité d’un traitement que l’on ne pourrait donc pas refuser aux patients. Ainsi, l’habitus de Raoult et des médecins qui, comme lui, prescrivent des traitements sans preuve définitive de leur efficacité, aux yeux de ceux qui n’ont pas fait l’expérience directe de leur pratique médicale, cet habitus donc, mobilise l’intelligence humaine dans ce qu’elle a de plus large, au-delà du calcul, parce qu’il est resté ancré dans la pratique. Il est la raison pratique de la médecine et permet de développer une expertise au-delà de la connaissance scientifique calculée.

Enfin, au-delà de l’IHU et des scientifiques et médecins qui suivent ses recommandations, le camp adverse face au scientisme, c’est aussi l’opinion publique. On entend souvent dire que trop de gens qui n’ont pas de compétences médicales et scientifiques ne devraient pas prendre position dans le débat. Pourtant, ces gens traitent aussi de l’information, se documentent, font confiance aux scientifiques sur les questions auxquelles ils ne peuvent pas répondre eux-mêmes, et surtout, font directement ou indirectement l’expérience de la maladie, en tombant malades ou à travers leurs proches qui tombent malades, et par le changement de leurs modes de travail, de leurs relations familiales, de leur revenu, de leur état psychologique. Ils font l’expérience complète de la crise COVID-19 et s’ils pouvaient calculer les couts et bénéfices de telle ou telle manière de gérer l’épidémie, ils se baseraient sur tous ces aspects de leur expérience. Ils ne se limiteraient pas à compter le nombre de morts selon que l’on adopte tel ou tel traitement, tel ou tel règle de distanciation sociale, et tel ou tel mode de réorganisation du travail. Ils savent très bien que même si une politique A réduit de x% le taux de décès par rapport à une politique B, cela ne signifie pas que la politique A est meilleure que B, tout simplement parce que la réduction du taux de décès COVID-19 n’est pas son seul effet.

Les décideurs semblent avoir oublié cette évidence. Personne n’est en mesure de calculer le bénéfice d’une politique COVID-19. Car pour y arriver, il faudrait calculer les suicides additionnels, les dépression et pertes de bien être causés par l’isolement, le chômage, et les pertes de revenus causées par le ralentissement ou l’arrêt temporaire de l’économie. Il faudrait aussi mesurer les décès additionnels causés par la peur de se rendre à l’hôpital pour se faire soigner au plus haut de la crise, ou par les retards pris dans le suivi de malades graves. Et il faudrait mesurer tout cela dans le long terme. Ni les décideurs ni les citoyens ne sont en mesure de faire ces calculs, mais tous ont leur idée sur la question, idée qui se manifeste dans leur habitus. Cet habitus est également le reflet de leur agenda, de leurs objectifs, de leur stratégie pour avancer dans le champ, stratégie qui est politique pour le décideur, et qui reflète les soucis et espérances de l’existence quotidienne pour les citoyens. L’habitus du décideur le conduira donc à prendre des décisions qui maximisent son capital politique. Vu que le seul élément calculable de la crise est le nombre de personnes décédées directement du COVID, et que ce nombre est médiatisé à outrance, le politicien prendra donc les mesures qui selon lui minimisent ce chiffre, ignorant tous les autres critères. Le citoyen, de son côté, regardera ce chiffre mais évaluera aussi les autres impacts, même s’il ne peut les calculer. Son habitus se substituera au calcul pour l’orienter vers un mode de vie qui maximise son bien-être selon cet ensemble de critères, et lui fera préférer des politiques qui s’accordent avec ce mode de vie. C’est pourquoi il exprimera son scepticisme face aux mesures de confinement.

Pour revenir à la question des traitements, le citoyen, faisant l’expérience des multiples impacts de la crise COVID-19, percevra que quelque chose ne va pas dans cet acharnement à rejeter tout traitement dont l’efficacité n’est pas prouvée par un essai randomisé. Il sera réceptif aux traitements qui donnent espoir car il fait l’expérience au quotidien des conséquences de ne pas avoir de traitement. Cela pourrait le biaiser en faveur de traitements qui ne marchent pas. Mais cela abaissera également, à juste titre, le niveau de preuve minimal qui peut le convaincre d’accepter un traitement, par rapport au décideur. Dans le champ du politicien, le cout de l’utilisation d’un traitement qui ne marche pas est plus élevé que celui de la non-utilisation d’un traitement qui marche, si personne ne sait qu’il marche. Mais pour le citoyen, c’est le cout de la non-utilisation d’un traitement qui marche qui est le plus élevé. Il est donc légitime de se demander quel est l’habitus porteur de plus de sens même lorsqu’il s’agit de prendre des décisions médicales : celui du citoyen, du médecin praticien, du politicien, ou du scientifique ? Une chose est sure en tout cas : tous révèlent une dimension de la réalité qui compte.

Pour éviter tout risque de malentendu, j’insiste sur le fait que je ne dis pas ici que le citoyen a toujours raison. L’habitus peut se tromper, d’un côté comme de l’autre. Mais lorsque le calcul ne peut pas apporter une réponse claire sur les questions qui comptent (sur les cout et bénéfices de telle ou telle politique), il ne faut pas le remplacer par le seul calcul que l’on sait faire (la mesure du nombre de cas et décès COVID-19 selon la politique adoptée). On peut faire ce calcul mais il n’est qu’un élément dans un débat qui doit être élargi par la prise en compte des désirs des uns et des autres exprimés dans leur habitus.

La science médicale en action

La science est donc une activité sociale, comme toute activité humaine, et elle n’est pas objective, car elle implique des choix qui sont fait par des sujets. L’objectivité est son idéal mais cet idéal ne peut être réalisé, imparfaitement, qu’à certaines étapes. Quand un chercheur dit « cette molécule réduit de x% le risque de mourir sur ce groupe de malade dans le cadre de cet essai et on peut être sûr à 95% que cette conclusion est juste », il ne fait qu’exprimer le résultat d’un calcul. Le chercheur est objectif et on peut le croire, s’il est compétent et honnête. Mais le choix de la molécule testée (nouvelle et à haute valeur marchande plutôt que repositionnée et source de profits quasi-nuls), du contexte thérapeutique (hospitalier plutôt qu’ambulatoire) et social (un hôpital disposant de toutes les ressources nécessaires ou moins bien doté), ainsi que de la méthode (comparaison avec placebo ou comparaison avant/après traitement) sont des choix subjectifs, déterminés par le sens du jeu ou habitus du chercheur et qui ne peuvent être guidés simplement par des calculs. Or ces choix ont autant et même plus d’influence sur la capacité à trouver une solution thérapeutique que la rigueur employée dans la mise en œuvre de l’étape ultime de ce processus que peut être l’essai randomisé.

Si l’on veut avoir un avis critique sur une théorie scientifique, il faut donc regarder l’ensemble des processus qui ont conduit à son élaboration, et non pas se limiter à lire les conclusions de l’essai. Il faut s’intéresser à la « science en action » (Latour 1987), c’est-à-dire chercher à comprendre le contexte social dans lequel cette théorie est construite. C’est ce qu’a fait Bruno Latour (Latour et Woolgar 1979), en s’installant dans un laboratoire de recherche biomédicale et en observant une « société » de chercheurs avec le même regard distancié que s’il s’agissait d’une tribu exotique. Ce qu’il a vu à l’œuvre, c’est une « machine » qui fait des « inscriptions », qui « produit » des « faits scientifiques » et les théories qui en découlent. Plus cette machine est puissante, plus elle est capable de produire des faits et de les faire accepter comme vrais, ainsi que les théories qui en découlent, par le reste de la communauté scientifique, contre des théories concurrentes. Cette puissance, la machine la tire de ses réseaux sociaux, de son influence sur des institutions clef comme les comités éditoriaux des journaux, de son ancrage politique et financier, qui lui permettent d’acheter des équipements, de recruter des scientifiques toujours plus nombreux et plus performants et de les mettre à son service. Cela conduit, mais je formule ici une interprétation personnelle inspirée de la lecture de Latour, à ce que malgré son idéal d’objectivité qui est bien réel, la science n’échappe pas aux forces sociales régies par des intérêts particuliers et subjectifs. Elle devient redevable envers ses clients politiques et ses financiers plutôt qu’envers la « réalité » ou la « nature », puisque celle-ci crée les inscriptions que lisent les chercheurs, mais seulement celles qu’ils veulent bien lire, et n’a ensuite rien à « dire » puisqu’elle n’a pas d’existence sociale au sein de la machine, ou n’a que l’existence sociale que les humains veulent bien lui donner.

La « vie de laboratoire » a été publié en 1979 et Bruno Latour est devenu depuis l’un des sociologues les plus écoutés dans le monde. Pourquoi donc les sociologues des sciences ne disent rien ou pratiquement rien sur les « machines » qui actuellement produisent des résultats scientifiques sur le COVID-19 ? Je pense que c’est parce qu’il y a eu une étrange inversion dans la pensée critique, par rapport à ce que l’on aurait pu attendre ou espérer suite à la publication de la « science en action ». Ce travail a montré que la science ne suit pas le canon ou idéal qu’elle s’est donnée. Des processus sociaux très puissant l’en écartent et ils sont incontournables puisque l’homme vit forcement en société. Ceci aurait dû conduire à tenter tout ce qu’on peut pour sauver l’idéal de la science, non pas pour le garder pur, ce qui est une mission impossible, mais pour s’en écarter le moins possible. Mais au lieu d’inspirer des travaux qui auraient permis de redresser la situation en identifiant les causes sociales de biais scientifique et en imaginant des moyens de les réduire, l’œuvre de Latour a en fait conduit à ériger la « science en action » en nouveau canon de la science. On a remplacé l’idéal de la pratique scientifique par la pratique elle-même alors que celle-ci est corrompue. Ce n’était sans doute pas ce que Latour souhaitait, mais c’est ce qui s’est produit. Une des conséquences est que le relativisme ontologique, c’est-à-dire l’idée qu’il existe autant de vérités qu’il existe de points de vue, est devenu omniprésent dans de nombreuses branches des sciences sociales. Toutes les théories sont mises à égalité en vertu du fait qu’elles sont le produit de processus sociaux légitimes. Le critère permettant de discerner le vrai du faux s’est déplacé du champ objectif vers le champ subjectif. La chose existant objectivement est confondue avec l’idée subjective que l’on a de cette chose, comme si les deux étaient égales.

L’explication de cette inversion pourrait être une règle méthodologique posée par Latour (1987) dans « La Science en Action » et acceptée depuis comme norme méthodologique en sociologie des sciences : la règle selon laquelle dans une controverse scientifique, les points de vue opposés doivent être analysés de manière symétrique, sans prise de position en faveur d’une position ou de l’autre. Cette règle étant posée, l’analyse d’un certain nombre de processus clefs dans la pratique de la science ne peut plus avoir lieu. En effet, le principe de symétrie conduit à postuler, consciemment ou inconsciemment, que tout débat scientifique est une controverse au sens d’un affrontement entre explications différentes d’un phénomène dont l’explication définitive n’est pas encore connue. Comment alors analyser sociologiquement le déni, puisque pour postuler qu’il y a déni, il faut établir au préalable qu’il y a une position correcte et une position incorrecte ? Et comment analyser le négationnisme ou révisionnisme ? Ainsi on ne peut plus faire la sociologie de la biologie de Lyssenko, du climato-scepticisme, du créationnisme, ou du négationnisme sur la shoah, à moins d’attribuer le même sérieux et la même légitimité à toutes les formes de révisionnisme ou négationnisme que les théories qu’ils remettent en cause, au nom du principe de symétrie. Si on fait le choix de la symétrie, il ne faudra pas s’étonner que révisionnistes et négationnismes s’empareront des analyses de la sociologie des sciences pour justifier un relativisme ontologique et donc leur position. Pour s’opposer à cela, il est urgent de développer une sociologie du déni, du révisionnisme et du négationnisme en science. Si cette sociologie est une sous-branche de la sociologie des sciences, cela remettrait en question la validité des postulat méthodologiques de cette dernière. A noter que cette sociologie du déni ne conduira pas à ériger en certitude définitive la théorie qui fait l’objet du déni. Car le déni en science, ce n’est pas le rejet d’une vérité absolue, puisque celle-ci ne peut jamais être connue avec 100% de certitude. C’est, plutôt, le rejet d’une théorie qui s’accorde avec les faits, en faveur d’une théorie contredite par les faits.

L’erreur très commune qui consiste à confondre la chose et l’idée de la chose, conduisant au relativisme ontologique, et qui permet à chaque « machine » d’imposer sa représentation des faits sans avoir à se confronter au monde réel, peut être comprise par la lecture de l’épistémologue Roy Bhaskar. Selon Bhaskar (1975), trois domaines ontologiques distincts existent qui tous jouent un rôle dans la démarche scientifique. Nous avons le domaine empirique, qui est le domaine des observations. Puis vient le domaine de l’ « actual », qui est constitué de régularités ou formes pures que le chercheur conceptualise à partir de ses observations. Puis vient le domaine du réel, qui est celui des mécanismes génératifs de ces régularités, c’est-à-dire des lois naturelles. La plupart des chercheurs progressent en réalisant des observations et en identifiant ou imaginant des régularités à partir de ces observations, mettant ensuite en œuvre de nouvelles expérimentations pour tenter d’observer celles qu’ils ont imaginées. Il font donc des vas et viens entre seulement les deux premiers niveaux, l’empirique et l’ « actual ». Les chercheurs des sciences naturelles découvrent les régularités grâce aux procédures de contrôle qu’ils appliquent aux objets étudiés, et grâce aux méthodes statistiques d’analyse des données. Ils ferment le système étudié par le contrôle des conditions de l’expérience, afin d’éliminer les bruits qui feraient disparaitre toute régularité et rendraient l’analyse statistique trop complexe ou impossible. Les chercheurs des sciences sociales découvrent les régularités en utilisant un cadre analytique qui concentre leur regard sur une dimension ou aspect de la réalité sociale. Ce cadre analytique joue le même rôle que la procédure de contrôle. Il ferme également le système, permettant de s’éloigner des questionnements qui remettraient en cause la rhétorique en train de se former. Simplement, la fermeture se fait dans la tête du chercheur au lieu de se faire dans le monde matériel. La régularité n’est pas produite en supprimant le bruit dans le monde réel. Elle est imaginée en supprimant le bruit dans l’image mentale produite à partir des observations, grâce au cadre théorique dans lequel cette image mentale est construite. Dans les deux cas, la fermeture du système empêche d’accéder au troisième niveau ontologique qui est celui du réel en tant que système ouvert. La conséquence est que tout aspect du réel qui n’est pas observable et ne produit pas de régularités, dans l’expérience ou dans la tête du chercheur, disparait de son champ de vision.

Ainsi, le chercheur des sciences naturelles confond la réalité avec ses observations, puisqu’il élimine de son savoir tout ce qui ne prend pas la forme de régularités observables, tandis que le chercheur des sciences sociales confond la réalité avec son imagination ou ses désirs, puisqu’il choisit son cadre théorique en fonction de ses désirs concernant ce que le monde devrait être. L’influence croissante du relativisme ontologique observé dans les sciences sociales est donc le miroir du scientisme qui prévaut dans les sciences naturelles, le produit de la même fallacie épistémique. D’un côté, il y a ceux qui ne croient que ce qui est prouvé par une occurrence régulière, prédictible et observable. De l’autre, il y a ceux qui disent que comme rien n’est prouvé et rien n’est régulier, il est non seulement légitime d’imaginer et de croire ce que l’on veut, mais toute chose crue ou imaginée est aussi vraie que toute autre. Dans les deux cas, on n’envisage pas la possibilité qu’il puisse exister des choses au-delà de ce qui est régulier et observé, imaginé, ou désiré. On ignore le bruit parce qu’il est indéchiffrable ou inimaginable. Pourtant ce bruit est bien réel et il pourrait influencer les décisions prises par les humains et l’effet de ces décisions. Des actions guidées seulement par la connaissance qu’ont les hommes des régularités observable ou par leur imaginaire et leurs désirs pourraient être vouées à l’échec du fait de l’ignorance de ce bruit. C’est pourquoi l’habitus, véhicule d’une expérience collective et historique faite dans le bruit et qui pourrait donc dépendre de plus que ce qui est observable, imaginable, ou désirable, est essentiel au sens du jeu et à la raison pratique dans toute activité sociale, y compris dans la pratique de la science.

Ou cela nous mène-t-il concernant notre analyse de la crise COVID-19 ? Clairement, la confrontation de deux habitus que nous avons décrite est soutenue par la confrontation de deux machines, qui chacune cherchent à accroitre leur puissance afin d’imposer leur version des faits. La première se situe dans le paradigme scientiste. Elle tente d’identifier des traitements en réalisant des essais randomisés, en conduisant des méta-analyses des données existantes sans être au contact des malades, en en excluant toute conclusion scientifique qui ne serait pas issue d’essais randomisés ou qui serait produite selon des méthodes qui ne sont pas conformes à ses standards. Elle privilégie la nouveauté scientifique et la spécialisation, et donc les médicaments nouveaux et spécifiques, qui permettent de générer des profits élevés et justifient donc des investissements pour renforcer la machine. La deuxième machine agit directement auprès des malades en se basant sur une connaissance médicale historiquement constituée, et augmente pas à pas ses connaissances en se basant sur l’expérience acquise dans ses agissements. Elle privilégie les médicaments génériques et le fond commun de connaissance et d’expérience déjà accumulé par la médecine, car ceci lui permet de trouver des solutions plus rapidement et à moindre frais.

Clairement, la puissance de ces deux machines n’est pas égale. L’une dispose des ressources financières virtuellement illimitées des laboratoires pharmaceutiques, puisque ceux-ci ont intérêt à ce que de nouvelles molécules sources de profits soient promues. Mais ces ressources financières ne viendront que si les solutions concurrentes non profitables que pourraient être les médicaments génériques sont discrédités, car cette concurrence pourrait annihiler les profits des laboratoires. La focalisation sur l’essai randomisé et les arguments méthodologiques sont l’instrument de cette exclusion, puisque la machine adverse ne dispose pas des ressources pour mettre en œuvre les plus hauts standards méthodologiques, ou considère que les essais randomisés ne sont pas éthiques. La première machine bénéficie également du soutien des gouvernements, des institutions internationales comme l’OMS, et des médias, car elle a réussi à imposer son idéologie scientiste auprès de ces institutions. La deuxième machine gagne son influence sociale par les réseaux sociaux. C’est là pratiquement sa seule sphère d’influence mais la censure par les algorithmes de Facebook, Google ou Twitter réduit fortement cette influence. Mais elle bénéficie de la reconnaissance de ses résultats par les pairs, à travers des publications scientifiques. Lorsqu’un dialogue est établi en confrontant et synthétisant les publications produites par les deux machines, un consensus émerge et faveur du traitement HCQ/AZI/Zn défendu par la deuxième machine, mais la puissance médiatique de la première est mobilisée à plein régime pour rendre ce consensus inaudible en dehors des membres de la communauté scientifique.

En ce qui concerne la fallacie épistémique, il apparait clairement que la machine scientiste est peu disposée à voir au-delà des régularités observables dans les données. Un malade est beaucoup plus qu’une série de donnée mais cette machine non seulement n’est pas au contact des malades, mais elle balaie d’un revers de main tout connaissance produite par ceux qui sont à leur contact, dès lors que cette connaissance ne prend pas la forme de régularités visibles et prouvées par un jeu de données. La possibilité de produire des connaissances par l’expérience dans le bruit de la vie réelle est niée, alors que même les politiques publiques soulignent cette importance (Bégaud et al 2017). La machine scientiste comble ensuite le vide créé, l’espace entre ce qu’elle observe et ce qui existe réellement, avec ce qu’elle a observé, dès lors que cela s’accorde avec son désir. Elle étend ce qu’elle observe dans le cadre précis de ses essais à ce qui existe dans un cadre plus large. Elle confond la notion de validité interne avec celle de validité externe des résultats de l’expérience. L’exemple le plus frappant est l’étude de Fiolet et al (2020) déjà citée. En déclarant qu’aucune recherche supplémentaire sur HCQ et AZI n’est nécessaire, les auteurs attribuent une validité externe (donc valable dans tout contexte) à une conclusion dont la validité n’est qu’interne, c’est-à-dire située dans le cadre des 29 essais qu’ils analysent (qui sont tous conduits en contexte hospitalier, sauf un).

La deuxième machine, par le fait qu’elle apporte des soins aux malades, ancre forcement son analyse dans la vie réelle. Elle accède donc au troisième niveau ontologique et produit un capital de connaissance qui ne se réduit pas à la description de régularités observées. Elle véhicule et produit une raison pratique qui ne peut se résumer à un calcul statistique. Pour un observateur extérieur adoptant le scientisme, le seul moyen d’évaluer les protocoles thérapeutiques utilisés à l’IHU de Marseille est d’étudier les publications et les données disponibles, de se documenter sur les régularités observées, et de mesurer le niveau de certitude acquis concernant les mécanismes causaux de ces régularités, en faisant appel au calcul statistique. Pour cet observateur extérieur, il faut donc fermer le système pour le rendre intelligible. Cet observateur ne peut écouter le bruit qui entoure les données, ou s’il entend ce bruit, il n’y verra que des sources de confusion et d’incertitude. Ce bruit ne produira pour lui que de l’ignorance et à cause de cette ignorance, il ne prescrira pas l’HCQ/AZI au 7ème malade, malgré le succès obtenu sur les 6 premiers (voir introduction). Mais pour les médecins et les patients dont l’interaction a produit les données, le bruit constitue une grande part de l’expérience quotidienne à partir de laquelle des décisions sont prises. Le bruit est donc connaissance, incertaine certes, mais connaissance néanmoins. Le bruit contribue à l’interprétation des résultats car il fait partie de ce qui a conduit aux résultats. Le système ne peut être fermé, car la vie réelle dans laquelle l’action se fait est un système ouvert. Ainsi le médecin, avec l’accord du patient, traitera le 7ème malade à l’HCQ/AZI, suite au succès qu’il a obtenu sur les 6 premiers et en considérant le contexte dans lequel ces résultats ont été obtenus.

Conclusion

La crise COVID-19 et la manière dont elle est gérée sont donc en train de démontrer que le scientisme détruit la science. Et quand il est adopté comme idéologie dominante, il détruit la société. On sait cela depuis longtemps. Les écrits de Hayek, Popper, Bhaskar, Bourdieu, ne datent pas d’hier. On aurait pu également faire référence au travail de Joel De Rosnay (1977), qui souligne la nécessite de disposer de « macroscopes » pour comprendre le monde, idée à rapprocher de la nécessité de produire des théories à grand contenu. Ou Edgar Morin (1977), qui propose une « méthode » nous préparant mieux à l’étude des objets complexes, en regardant les principes prétendus contraires comme étant unifiés dans les objets et phénomènes du monde, à travers des relations « dialogiques ». Il nous rappelle ainsi la nécessité de favoriser les débats dialectiques entre parties adverses et d’être animé par un idéal de fusion plutôt que d’opposition. Ou encore Jacques Ellul (1977), qui décrit comment l’état s’est transformé en un système technicien qui prive les individus de leur autonomie en définissant selon ses termes les problèmes qu’il est nécessaire à résoudre, et en se donnant le droit de définir ce qui serait la seule manière de les résoudre. Ces intellectuels semblent oubliés, de même que les nombreux acquis de de la sociologie et l’anthropologie et des sciences cognitives réalisés depuis. Ils ne sont pas présents dans le débat public, ou le sont seulement à la marge, car ils sont absents des instances gouvernementales et gouvernantes. A leur place, ou trouve des ingénieurs, administrateurs, économistes, hommes d’affaire, et juristes. Le savoir accumulé par les humains est immense, mais il est fragmenté et seulement certains fragments ont droit de cité dans nos institutions gouvernantes. De plus en plus, des sociétés privées définissent le type d’expertise nécessaire en apportant leur propre expertise, et instrumentalisent l’idéologie scientiste pour exclure tout ce qui est incertain et entrave leurs intérêts. Elles ne se contentent pas d’imposer leur idéologie, elles imposent maintenant leur agenda, et leurs experts et employés se retrouvent souvent dans les instances gouvernementales et vice-versa du fait de leur mobilité, ce qui multiplie les risques de liens et conflits d’intérêt.[13] Ainsi on peut compter sur les doigts d’une main les sociologues, anthropologues, ou philosophes dans les instances gouvernementales. On gouverne donc sans la connaissance de la société, sans la connaissance de l’homme, et sans questionnement éthique. La crise COVID-19 aura fait la démonstration que cela ne peut mener qu’à une faillite scientifique, sociale, et morale.

Annexe 1 : Le vrai consensus et la fausse controverse sur l’efficacité du traitement HCQ/AZI pour traiter les patients COVID-19 en médecine ambulatoire

La première étude de l’IHU (Gautret et al. 2020a), citée dans l’introduction de cet article et publiée dans l’urgence, n’est qu’une étape mineure dans une démarche scientifique qui a démarré des mois plus tôt, se poursuit encore aujourd’hui, et n’a jamais débouché sur des résultats contradictoires. Les résultats obtenus sur ces 36 premiers patients s’accordaient avec ce que les données médicales et scientifiques déjà disponibles prévoyaient. Les propriétés antivirales de l’HCQ et la chloroquine, molécule voisine, étaient connues depuis longtemps (Savarino 2003, Vincent et al. 2005) et de nombreux chercheurs se sont mis à étudier les mécanismes physiologiques impliqués (Fantini et al. 2020a and 2020b, Hu et al. 2020, Sinha and Balayla 2020, Wang et al. 2020, Zhou et al. 2020). Des essais conduits en Chine avaient vérifié l’efficacité de l’HCQ et la chloroquine in vitro (Cortegiani et al 2020) et in vivo (Gao et al. 2020). L’efficacité de l’AZI pour traiter les pneumonies était également établie (Mortensen et al. 2014), et ses propriétés antivirales ont été décrites (Damle et al 2020). Il était donc naturel d’espérer une efficacité de ces molécules. L’HCQ et l’AZI sont en outres produites sous forme de médicaments génériques depuis des dizaines d’années et sont parmi les médicaments les plus prescrits dans le monde. On connait donc très bien leurs effets secondaires et ils sont minimes (Hache et al. 2020). Quand ces molécules sont utilisées ensemble, une synergie provoquerait une augmentation de ces effets, ce qui invite à la prudence dans leur utilisation (Lane et al. 2020). Mais l’IHU a continué d’utiliser la combinaison HCQ/AZI sur plusieurs milliers de patients COVID-19, publiant de nouvelles études (Gautret et al. 2020b, Million et al. 2020, Lagier et al 2020) qui, en plus de confirmer les résultats de la première, montrent que les effets secondaires peuvent facilement être gérés. D’autres praticiens ont appliqué ce traitement avec le même succès, aux USA (Scholz et al. 2020), au Brésil (Esper et al. 2020), en Corée du Sud (Kim et al. 2020) et ailleurs en France (Davido et al. 2020, Guerin et al. 2020), pour ne citer que ceux ayant publié ou diffusé leurs résultats. Ils ont amélioré le traitement, variant les posologies et ajoutant le zinc (Carlucci et al. 2020), pratique que l’IHU a également adopté. Enfin, dans de nombreux pays, des médecins et hôpitaux traitant des patients COVID-19 avec la combinaison HCQ/AZI ont confirmé son efficacité en l’appliquant sur leurs malades, partageant leurs résultats grâce à des vidéos diffusées sur internet.[14] Certains se sont contentés de prescrire l’AZI et ont suggéré qu’elle pourrait être la molécule clef dans la combinaison HCQ/AZI, et pourrait être remplacée par d’autres antibiotiques[15].

Etrangement, malgré ces résultats encourageants en faveur de l’utilisation de la combinaison HCQ/AZI pour traiter les patients COVID-19 en médecine ambulatoire, aucun essai randomisé permettant de tester cette approche n’a été conduit. Un seul (NCT04358068) a été lancé, aux USA, mais il a ensuite été annulé[16], et la recherche s’est concentrée sur l’utilisation de l’HCQ en milieu hospitalier. Cette molécule a été testée dans des contextes très variés, seule ou associée à d’autres traitements, avec ou sans AZI, avec ou sans Zinc, pour traiter des malades plus au moins sévères et à différents stades de la maladie, parfois en usage compassionnel. Cette diversité des contextes thérapeutiques conduit à des résultats ambigus ou contradictoires. Certaines études montrent un effet bénéfique de l’HCQ (Arshad et al. 2020, Ayerbe et al. 2020, Bernaola et al. 2020, Catteau et al. 2020, D’Arminio Monforte 2020, Hong et al. 2020, Ladapo et al. 2020, Lammers et al. 2020, Mikami et al 2020, Sulaiman et al. 2020, Yu et al. 2020), tandis que d’autres montrent une absence de bénéfice avec parfois une augmentation du risque de décès[17] (Borba et al. 2020, Cavalcanti et al. 2020, Geleris et al. 2020, Horby et al. 2020, Magagnoli et al. 2020, Mahevas et al. 2020, Pathak et al. 2020, Rosenberg et al. 2020, Sbidian et al. 2020, Siemieniuk et al. 2020). Les quelques études randomisées fournissent également des résultats contradictoires, l’une détectant un effet (Chen et al. 2020), d’autres n’en détectant pas (Abd-Elsalam et al. 2020, Mitja et al. 2020, Tang et al. 2020). En ce qui concerne les tests réalisés hors milieu hospitalier, ils ont généralement pour but de mesurer l’efficacité de l’HCQ en traitement prophylactique, et cette molécule n’est jamais associée à l’AZI. Les résultats sont également contradictoires. Selon certaines études l’HCQ serait bénéfique (Chatterjee et al. 2020, Ferreira et al. 2020, Zhong et al. 2020), tandis que d’autres (Boulware et al. 2020, Skipper et al. 2020) ne détectent pas d’effet, ce qui pourrait toutefois s’expliquer par un nombre trop faible de patients inclus dans ces études (Garcia-Albeniz et al. 2020).

Grace à toutes ces études[18], un consensus médical et scientifique s‘est progressivement établi : les combinaisons HCQ/AZI ou HCQ/AZI/Zn, quand administrées sur des patients COVID-19 dès les premiers symptômes de la maladie et donc avant hospitalisation, réduisent très fortement les taux d’hospitalisation et de décès, permettant un taux de létalité très au-dessous des taux de létalités enregistrés lorsqu’on laisse l’état des patients s’aggraver avant de les traiter, en n’offrant que des traitements symptomatiques comme le paracétamol. Le taux de létalité sous traitement HCQ/AZI serait nul pour les moins de 60 ans, ce qui rendrait le confinement déraisonnable pour cette catégorie de population. Lorsqu’un traitement à base d’HCQ est administré dès admission en milieu hospitalier, le taux de décès pourrait être divisé par deux sur certains types de patients, tandis qu’il n’y aurait pas effet sur d’autres, voire aurait un impact négatif sur certains patients parmi les plus gravement atteints, ce qui conduit à rejeter un usage compassionnel. Pour les patients transférés vers des unités de soins intensifs, d’autre approches thérapeutiques, notamment l’usage de corticostéroïde (Singh et al. 2020) ou d’anti-coagulants (Anonymous 2020) apparaissent préférables. Ce consensus, qui bien entendu n’exclut pas que d’autres approches thérapeutiques soient également possibles, a été résumé dans quelques publications récentes (Anonymous 2020, McCullough et al. 2020, Risch 2020). Il n’est pas reflété par les méta-analyses qui ne considèrent que les essais randomisés (Siemieniuk et. Al 2020), puisqu’aucun essai randomisé n’a été conduit pour tester le traitement HCQ/AZI en ambulatoire. Le fait que la plupart des études, y compris observationnelles, sont conduites en milieu hospitalier (Fiolet et al. 2020) contribue également à le rendre invisible.

Comme toute théorie scientifique, ce consensus n’est bien entendu pas une vérité définitive, mais plutôt le modèle s’accordant le mieux avec les faits connus, et donc donnant le plus de chances aux malades de guérir dans l’état actuel des connaissances. Aux lecteurs qui ne seraient pas d’accord avec ce consensus, je suggère donc non pas de montrer qu’il n’est pas prouvé définitivement et que les études disponibles ont des faiblesses méthodologiques, car là-dessus nous sommes tous d’accord, mais de révéler des faits qui le contredisent, notamment concernant l’effet bénéfique de la combinaison HCQ/AZI ou HCQ/AZI/Zn administrée dès les premiers symptômes COVID-19 en médecine ambulatoire.

Annexe 2 : Le déni de l’efficacité du traitement HCQ/AZI

On peut observer le déni de l’efficacité du traitement HCQ/AZI en ambulatoire au niveau des autorités médicales et des principaux médias. Aux USA, au Canada, en France, au Royaume Uni et dans d’autres pays, les médecins reçoivent l’instruction de ne pas utiliser l’HCQ pour traiter les patients COVID-19[19], dont les effets secondaires sont présentés comme étant dangereux[20] alors que l’expérience a déjà montré qu’ils sont minimes et peuvent être parfaitement gérés (Lagier et al. 2020). Les recommandations nationales en France sont de se faire tester et de s’isoler 7 jours en cas de symptômes COVID-19,[21] et de ne prendre qu’un traitement symptomatique tel le paracétamol[22], sauf en cas d’aggravation des symptômes. Il est également demandé aux pharmacies de ne pas délivrer d’HCQ pour des patients COVID-19.[23] Parfois l’utilisation de l’AZI est également découragée.[24] Tout ceci cause une prolifération de blogs critique sur le sujet[25] et parfois des levées de bouclier dans l’opinion publique[26]. Les médecins peuvent braver ces directives en prescrivant des médicaments en dehors du cadre posé par leur Autorisation de Mise sur le Marché (AMM), mais risquent alors d’être pénalisés par leur ordre professionnel[27]. Et lorsqu’ils diffusent les résultats qu’ils obtiennent sur internet, ils sont souvent censurés par les algorithmes des réseaux sociaux.[28]

Une des forces à l’origine de ce déni est sans doute l’industrie pharmaceutique. Il est en effet très facile, si l’on dispose de grands moyens financiers, d’influencer la recherche en lançant de nombreuses études et ne publiant que celles montrant des résultats positifs.[29] La corruption dans l’industrie pharmaceutique est également bien connue (Rodwin 2013) et les conflits et liens d’intérêts entre chercheurs et laboratoires pharmaceutiques sont indéniables.[30] L’influence de l’industriel GILEAD, producteur de l’antiviral Remdesivir qui pourrait réduire de quelques jours la durée d’hospitalisation des patients COVID-19 mais n’a pas encore montré de bénéfice clinique (Beigel et al. 2020, Wang et al. 2020), est bien documentée (Roussel et Raoult 2020)[31]. Ce médicament est déjà recommandé par l’Organisation Mondiale de la Santé[32] et l’Union Européenne[33] pour traiter les patients COVID-19. Les laboratoires produisant des vaccins n’ont pas intérêt non plus à ce qu’un remède soit trouvé. D’autres acteurs peuvent également bénéficier de la crise engendrée par le COVID et donc alimenter le déni. Les banques, notamment, vont pouvoir créer de la monnaie pour financer la reprise économique, ce qui pourrait plus profiter aux acteurs de la finance qu’à ceux de l’économie réelle.[34]

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[1] Polymerase Chain Reaction, une méthode d’analyse biologique permettant de vérifier si le patient est porteur du virus en détectant son code génétique.

[2] Une fois qu’un petit groupe malveillant produit une fausse « vérité » (du type : « le traitement HCQ/AZI est inefficace en toute circonstance »), il peut discréditer toute affirmation contraire auprès d’une partie de la communauté scientifique en s’appuyant sur le scientisme, c’est-à-dire en refusant ces affirmations contraires dès lors qu’elles ne se basent que sur des preuves partielles, tout en se gardant de tester plus rigoureusement ces affirmations. Si le scientisme est l’idéologie dominante dans la communauté scientifique, il sera facile de convaincre une masse critique de chercheurs de l’absence de preuve solides en faveur des théories concurrentes, et ainsi d’imposer une théorie fausse en se basant sur des preuves tout aussi partielles mais que l’on médiatise à outrance ou que l’on revêt des habits de la science pour faire illusion. Les indécis se trouveront vite en dissonance cognitive s’ils n’acceptent pas la fausse conclusion, et les autorités finiront par adopter ce faux consensus. L’opinion publique suivra, par ignorance puisqu’elle n’a pas la capacité ou le temps d’analyser elle-même les sources primaires d’information (les publications scientifiques et rapports médicaux), et à cause d’une peur inconsciente de se trouver en dissonance cognitive si elle n’accepte pas les messages adoptés par les autorités et relayés par les principaux médias.

[3] “What is at stake as scientism becomes the new orthodoxy is our humanity itself” (Robinson et al 2015 : 8).

[4] On retrouve très souvent les termes « anecdotical » et « unproven », associés à des efforts de discréditation qui suivent toujours une même logique, bien décrite sur ce post de blog (http://covexit.com/the-definitive-guide-to-discrediting-HCQ-based-treatments-to-covid-19-part-1/), sur les sites gouvernementaux et dans les bulletins de presse relatifs à l’utilisation de l’HCQ pour traiter les patients COVID-19, notamment aux USA.

[5] On observe une prolifération des sites de débusquage des « fausses nouvelles » dont les conclusions sont souvent douteuses et certainement pas fiables car ne faisant que s’accorder à l’orthodoxie dominante. Nous conseillons au lecteur de les éviter et de rechercher l’information à la source, dans les publications scientifiques : http://libgen.rs/.

[10] Texte original en anglais : « These findings suggest that these drug regimens should not be used outside of clinical trials and urgent confirmation from randomised clinical trials is needed” (page 9).

[11] Texte original en anglais : “These data do not apply to the use of any treatment regimen used in the ambulatory, out-of-hospital setting” (page 8-9).

[12] Texte original en anglais : “This meta-analysis clearly shows that HCQ alone is not effective for the treatment of COVID-19 patients and that the combination of HCQ and azithromycin increases the risk of mortality.” “Our results suggest that there is no need for further studies evaluating these molecules.”

[14] Ces vidéos sont souvent censurées par google, facebook, twitter et youtube mais certaines peuvent être trouvées néanmoins, notamment en utilisant des moteurs de recherche plus neutres comme duckduckgo.com ou qwant.com. Voir par exemple, pour la France, le collectif COVID-19 - Laissons les médecins prescrire » (https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/coronavirus-collectif-medecins-reclame-retablissement-du-droit-prescrire-HCQ-1831362.html) ; Pour la suisse, sur situation dans les hôpitaux (https://www.qwant.com/?q=HCQ%20COVID%20prescrire%20medecins&t=videos&o=0:d51a2877e0504469718e59c28b596f04) ; pour les USA, Docteur Brian Tyson en Californie (https://www.youtube.com/watch?v=PE3QfTnIazU&feature=emb_logo&fbclid=IwAR31qK44pGkjO6RciY4UWJL63hN0JZgjZp-VzpfsAAfMLn2cD2mB4Y00pQg) et le collectif « America’s Frontline Doctors » (https://newyorkcityguns.com/americas-frontline-covid-19-doctors-summit-full-3-hours/) ; pour le Sénégal, le Dr Moussa Seydi (https://www.france24.com/fr/afrique/20200420-lutte-contre-le-covid-19-le-professeur-moussa-seydi-en-premi%C3%A8re-ligne-au-s%C3%A9n%C3%A9gal). Voir également les nombreux témoignages rassemblés sur les sites covexit.com et https://blog.gerardmaudrux.lequotidiendumedecin.fr/.

[17] Concernant l’augmentation du risque de décès, il pourrait s’expliquer par un biais de sélection introduisant un facteur de causalité inverse, en lien avec l’usage compassionnel de l’HCQ. En effet, s’il existe un décalage entre le moment de récolte des données de base (qui en général se fait dès l’admission) utilisées pour contrôler les facteurs de covariance, et le choix du traitement des malades (qui peut être déterminé par une aggravation quelques jours après admission), alors l’aggravation est la cause de la prise de HCQ (si celle-ci est donnée à titre compassionnel) et non pas le contraire. Plusieurs études montrant un effet négatif de HCQ n’offrent aucune garantie qu’une telle causalité inverse n’intervient pas, car elles n’indiquent pas le temps écoulé entre la récolte des données de base et le démarrage du traitement, et ne contrôlent pas l’effet de ce décalage.

[18] Pour une bibliographie avec liste complète des études réalisées, voir https://hcqmeta.com/ et https://hcqtrial.com/

[30] Voir ce post de blog (https://jdmichel.blog.tdg.ch/archive/2020/04/03/HCQ-le-bal-des-ignares-305545.html) qui donne de nombreuses références sur le sujet.

[31] Comme point de départ pour vous documenter, explorez les sources en ligne suivantes concernant le lobby de GILEAD en France, sans vous arrêter la : https://blogs.mediapart.fr/laurent-mucchielli/blog/080520/comment-le-remdesivir-traverse-l-atlantique-un-efficace-traitement-mediatique et http://www.francesoir.fr/societe-sante/top-13-des-revenus-annuels-recents-verses-par-lindustrie-pharmaceutique ; aux USA : https://www.npr.org/sections/health-shots/2020/05/02/849149873/gilead-lobbying-rose-as-interest-in-covid-19-treatment-climbed ; les supports de GILEAD dans la recherche de traitements COVID-19 : https://www.gilead.com/purpose/advancing-global-health/covid-19/remdesivir-clinical-trials ; les liens entre GILEAD et les auteurs de l’étude Mehra et al (2020) : https://lecourrierdesstrateges.fr/2020/05/24/HCQ-les-auteurs-de-letude-publiee-par-le-lancet-ont-tous-un-conflit-dinteret/ ; les profits que GILEAD peut réaliser si le traitement qu’il propose pour le COVID-19 était adopté : https://www.fiercepharma.com/marketing/gilead-s-covid-19-therapy-remdesivir-worth-4-460-per-course-says-pricing-watchdog ; la corrélation entre le cours des actions de GILEAD et les résultats de recherches sur les traitements COVID-19 : https://markets.businessinsider.com/news/stocks/gilead-stock-price-remdesivir-potential-covid19-coronavirus-treatment-trial-results-2020-4-1029145352# ; plus d’autres sources : https://khn.org/morning-breakout/remdesivir-was-fated-to-join-antiviral-drug-graveyard-but-its-getting-another-shot-at-success/.

[34] Pour entamer une réflexion sur comment la crise COVID-19 pourrait bénéficier la finance mondiale, vous pouvez consulter ce blog : https://brunobertez.com/2020/10/12/editorial-la-politique-mondiale-de-gestion-de-la-crise-se-fait-a-la-corbeille/.




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