vendredi 24 novembre 2017 - par Nicole Cheverney

Volet N°3 - Big Pharma, l’emprise de l’industrie pharmaceutique sur la santé publique et les institutions

« Les trente mafieuses » !

« On peut dire qu'un gouvernement est parvenu à son dernier degré de corruption quand il n'a plus d'autre nerf que l'argent ». Jean-Jacques Rousseau

I / Les médicaments observent des fluctuations importantes, dues à l'organisation du système de distribution des produits.

1/ 1996 : 2 lois – Loi Galland et Loi Raffarin – sur la concurrence et la liberté des prix, favorisent la position des laboratoires, face aux pharmaciens soumis à la concurrence.

2/ Loi du 4 Août 2008 dite de « modernisation de l’économie ».

Rapporteur : Emmanuel Macron, de la Commission Attali : « supprime les notions de refus de vente abusif, abus de position dominante et conditions de vente discriminatoire  ».

Cette nouvelle loi ne fait que renforcer la «  dérive libérale » des firmes pharmaceutiques qui, par son puissant lobby, contrôlent désormais toute la distribution à rebours de tous les autres secteurs économiques.

3/ Juin 2009 – Un décret institue les « centrales d'achat de pharmaciens ». Ce qui pourrait aller dans le bon sens, n'est pas suivi d'effet. Le lobby pharmaceutique « refuse d'accorder [aux centrales d'achats - ndlr-], les conditions commerciales quantitatives des ventes directes.

Depuis 20 ans, tous les gouvernement successifs font la sourde oreille, « préférant protéger les intérêts de multinationales  ». Les laboratoires continuent donc de distribuer leurs médicaments selon 2 canaux principaux :

a/ les grossistes-répartiteurs- prix catalogue – moins 14,75 % de marge brute : « quel que soit le volume commandé ».

Les grossistes revendent les produits aux pharmaciens à prix catalogue.

«  Ils sont 3 grossistes en France, à ne pas oser vouloir remettre en cause le système, par peur de représailles de Big Pharma. »

b/ Les représentants des Laboratoires démarchent les pharmaciens. Les pharmaciens sont classés par les laboratoires en catégories : « gold », « silver »...

C'est une « logique de business pure et dure, et non dans un esprit de service public, de proximité à la population ».

De plus, elle va à l'encontre de prix établis sur des bases raisonnables. Car ils varient, du simple au double, suivant le canal d'approvisionnement ! Toutes ces méthodes managériales portent un grave préjudice aux populations et en particulier aux personnes âgées. Les petites pharmacies de proximité ne peuvent soutenir le rythme concurrentiel imposé par les laboratoires pharmaceutiques.

C'est le Jack-pot !

Car : depuis 1985, c'est l'envol des prix, jusqu'à nos jours. C'est une inflation médicamenteuse où les firmes, comme des poissons dans l'eau, font des profits scandaleux. 1985 marque l'entrée en bourse des Big Pharma en France et ailleurs !

Les actionnaires, derrière la locomotive boursière, récoltent tous les avantages financiers. Ce sont des profits extravagants et maximum en un « minimum de temps ». Big Pharma est pressé, il veut tout et tout de suite ! Et l’État s'incline devant lui. Il abandonne toutes ses prérogatives : la Recherche, un domaine pourtant primordial pour de « nouvelles molécules ». Car au niveau de la recherche, les grands laboratoires stagnent. Le privé ne favorise absolument pas la recherche, trop empressé à empocher des profits dans le temps court.A fortiori en cette fin d'année, où la loi sur les 11 vaccins obligatoires aux enfants nés à partir du 1er janvier 2018, a été votée au moins de novembre.

Donc, après avoir convaincu l’État d'abandonner la Recherche médicamenteuse, les « marchands » prétendent qu'il « faut beaucoup d'argent pour trouver une molécule ».

L'on peut constater aussi que la baisse des marges aux intermédiaires, aux grossistes et aux pharmaciens est nécessaire pour Big Pharma. Cela lui permet de voir ses bénéfices grimper de 58 % à 73 % du prix HT du médicament, et de multiplier la facture « nationale » par 7 en 30 ans.

Le Big Pharma est riche, puissant et à ce titre, il a pénétré respectivement à peu près toutes les instances liées à la santé nationale, européenne et mondiale.

1/ L'OMS

2/ Les agences Nationales de Santé,

3/ Les Instituts

4/ les Comités,

5/ Les Conseils,

6/ Les établissements, etc...

Ce qui lui permet évidemment, de placer des « scientifiques médicaux » dont il a auparavant « financé la carrière ». Mais pas que...

« Les Conseils d'Administration sont présidés par des politiciens à eux ».

En résumé : cette marge bénéficiaire réservée à l'innovation biotechnologique, c'est le Big Pharma qui en bénéficie et les actionnaires, au terme d'un système de « marketing outrancier ».

Pour cela, il faut des relais – très zélés au service des Grands Laboratoires Pharmaceutiques – et ils sont nombreux.

1/ La presse d'abord. C'est une presse médicale spécialisée, souvent gratuite – cela peut permettre de toucher plus de monde – Elle est sous contrôle des Big Pharma.

2/ Un réseau de 18 000 visiteurs-représentants avec des stages de formation, de sessions d'informations, des séminaires, des symposium, toujours dans des hôtels prestigieux, aux quatre coins du monde. Ces séminaires – formation, sont animés par des « conférenciers leader d'opinion ». Ces derniers doivent bien entendu leur carrière médicale au financement de Big Pharma.

2007 – La Loi Bertrand cherche à donner un cadre législatif à ces pratiques. Mais rien n'y fait, elles sont toujours en vigueur.

2007 toujours – Rapport de l'IGAS : les dépenses de visite médicale représentent 25 000 Euros à raison de 90 000 généralistes, les principaux prescripteurs de médicaments.1

Mais ces frais sont inclus dans les prix des médicaments. Il ne faut donc pas s'étonner de la montée en puissance des prix des médicaments.

La pression s'exerce d'abord et en priorité des directions des services hospitaliers – les gros services

Mais :

Les médicaments qui sont déremboursés et dont la liste est communiquée par le ministère, sont ceux qui sont les « moins chers », peu coûteux.

A la place, on a lancé les « me-too », qui eux, ont fait flamber immédiatement les prix, stratégie de marketing qui permet aux Grands Laboratoires Pharmaceutiques d'engranger encore plus de profits2

Pour accélérer les bénéfices, Big Pharma dépose des « dossiers insuffisamment étoffés ou biaisés, avec des essais cliniques incomplets où les effets secondaires néfastes des produits sont volontairement oubliés  ». Ces dossiers sont acceptés et même confortés par des agences où se pratiquent parfois des pots-de-vin, comme l'a révélé Médiapart3, au niveau de la commission délivrant les autorisations de mise sur le marché et de la Commission de la transparence de la Haute Autorité de santé, qui fixe le niveau des services médicaux rendus (SMR) et des améliorations du service médical rendu (ASMR) pour appliquer le taux de remboursement adéquat. Enfin, l'opacité règne lors de la fixation des prix... »

II / Vous supposez les Commissions de mise sur le marché des médicaments indépendantes ?

Nous en sommes loin.

En mars 2015, dans son article : « Les gendarmes du médicament faisaient affaires avec les labos », Médiapart après plusieurs mois d'enquête révèle que des « membres importants de ces commissions ont conseillé secrètement, contre rémunération, les laboratoires pharmaceutiques ». Parmi ces personnes, certaines occupent des postes de très haut-niveau dans lesdites commissions – de 2003 à 2014.

Quel est le rôle précis de la Commission de transparence ?

Selon Médiapart, elle joue un rôle « déterminant au sein de la – HAS - Haute Autorité de Santé. Elle apprécie le service médical rendu ainsi que l'amélioration qu'il est susceptible d'apporter par rapport aux traitements déjà disponibles sur le marché. Elle donne un avis (suivi systématiquement par le ministre de la santé)... »

« Son avis a un impact sur le futur prix du médicament »... « L'avis de la commission peut peser jusqu'à plusieurs centaines de millions d'Euros : sans remboursement, un médicament ne fera pas carrière ».

Amis bien placés, conflits d'intérêts, sont au cœur de cette machine bien rodée. Et Médiapart de poser la question :

« Comment peut-on à la fois diriger une commission décisive et se faire gratifier par les laboratoires pour les aider à présenter un dossier plus convaincant  ? ».

« Sur les 40 membres de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), 31 ont des contrats de « consultance » avec l'industrie pharmaceutique »4 5

« 75 % des experts de l'Agence française du médicament sont sous contrat avec l'industrie pharmaceutique, avec souvent des dizaines de contrats simultanés avec les firmes  ».

Tout aussi grave :

« Sur les 30 membres de la Commission d'autorisation de mise sur le marché des médicaments, 26 ont des contrats personnels avec les laboratoires ».

Après les conditions de mise sur le marché des médicaments, les mêmes questions se posent, concernant les vaccins ! A fortiori en cette fin d'année 2017, où la loi sur les 11 vaccins obligatoires aux enfants nés à partir du 1er janvier 2018, a été votée au mois de novembre. Les conflits d'intérêts se multiplient et perdurent, ils sont éventés par la presse, mais rien ne change fondamentalement, les pratiques mafieuses continuent dans l'impunité et l'opacité entretenue grâce aux nombreuses passerelles entre Big Pharma et les institutionnels.

« Un pédiatre... président du Comité technique de vaccination, participe à des travaux scientifiques réguliers et rémunérés, avec Sanofi et BioMérieux, GSK, Abbott et Wyeth en vue de mettre sur le marché de nouveaux vaccins  ». 6 7

Tous ces faits de corruption sont passibles de la loi et devraient selon toute logique être pénalement condamnés, comme le prévoit le Code pénal en France : « prise illégale d'intérêt – article 432 – alinéa 12 ».

Définition de la prise illégale d'intérêt selon le Code pénal :

« Le fait par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, de recevoir ou conserver, diA fortiori en cette fin d'année, où la loi sur les 11 vaccins obligatoires aux enfants nés à partir du 1er janvier 2018, a été votée au moins de novembre. rectement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l'acte, ou tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement ».

A suivre...

1Voir Prescrire – n° 299 – Septembre 2008 – Page 704.

2Voir l'ouvrage collectif « La Vérité sur nos médicaments » - Éditions Odile Jacob – 2015.

3« Les gendarmes du médicament faisaient affaire avec les labos » - Médiapart – 24 mars 2015.

4 Voir à ce sujet Philippe Even : « Les leçons à tirer du scandale du Médiator ».

5Stéphane Horel – journaliste et documentariste. 2010 -

6Le nom du praticien est mentionné dans l'ouvrage.

7Les auteurs de l'ouvrage s'appuient sur un article de Bastamag du 11 juin 2015 : « Comment les conflits d'intérêts et l'intransigeance des labos minent la réputation des vaccins ».



10 réactions


  • rogal 24 novembre 2017 09:05

    La ploutocratie dans toute sa splendeur.
    Dans le numéro 4, des pistes pour des solutions effectives ? Une autre politique ? Une autre société ? Émigrer dans le Pacifique ou sur Mars (penser à devenir milliardaire d’abord) ?


  • Nicole Cheverney Nicole Cheverney 24 novembre 2017 10:01

    Bonjour,

    Effectivement, dans le volet n° 4 j’aborde la question des solutions proposées par les auteurs de l’ouvrage. Mais il faut penser que cet ouvrage - capital je pense - pour la compréhension du phénomène, a été écrit et publié en 2015. Comment imaginer il y a tout juste deux ans que nous aurions en 2017, à la tête de l’Etat un « sponsor » des multinationales aussi engagé, zélé dans le processus de désintégration du peuple, de l’Etat ?
    Comment imaginer qu’à la tête de l’Etat, nous aurions une personne et son équipe toutes dévouées à mettre en place un plan sociétal aussi mortifère ? La question des vaccins obligatoires est très grave. Elle engage l’avenir, de nos enfants, leur santé, leur équilibre.

    Et si des instances judiciaires existent - internationales - nous devons, en tant que citoyens sérieusement y réfléchir pour mettre un coup d’arrêt à ces incessants scandales. Aujourd’hui, en modération, il y a un article de Mme N. Delépine qui aborde également ce sujet. Je conseille à tous d’aller le voter positivement. En toute modestie, il est important.


  • Thierry SALADIN Thierry SALADIN 25 novembre 2017 16:26

    @ Nicole Cheverney,


    Je viens d’appuyer votre demande concernant la raison de la suppression de l’article de Doctorix.
    Pour info, à 16H20 le résultat est + 9 et - 5 = +4

    Cordialement.

    Thierry Saladin

    • Nicole Cheverney Nicole Cheverney 25 novembre 2017 16:58

      @Thierry SALADIN

      Bonjour et merci de votre appui et de vos informations.


    • doctorix, complotiste doctorix 26 novembre 2017 11:09

      @Nicole Cheverney
      Votre article, dont je vous remercie, est à +13 et -9.

      Il aura donc le même sort que les autres.
      Le +4 global est la signature de la direction d’Agora.
      Les votes sont ici comme ailleurs : un leurre. Une apparence de démocratie pour masque la réalité d’une dictature.

    • Shaw-Shaw Shawford 26 novembre 2017 11:34

      @doctorix

      Ceux qui se montrent les plus virulents à votre encontre sous tous vos articles disent exactement la même chose, certains depuis 12 ans. Nicole Cheverney sait parfaitement de qui je parle.

      Vous devriez donc aller vous inscrire chez Disons.fr pour participer à leur équipe d’infiltrés dans la modération d’Agoravox, je suis sûr que vous y serez très bien reçu ! ^^ smiley smiley smiley smiley smiley


    • Nicole Cheverney Nicole Cheverney 26 novembre 2017 11:38

      @Shawford

      Bonjour,

      C’est exactement ce que je pense, et la tonalité de certains commentaires devraient plutôt éclairer @ Doctorix. Selon l’adage : inutile de chercher bien loin ce que l’on a aux alentours immédiats !
      Comprenne qui veut.


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