Commentaire de Roland Verhille
sur PIB : un objet comptable non identifié (suite)


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Roland Verhille Roland Verhille 14 février 2008 22:35

À ronchonaire,

Je comprends parfaitement votre perplexité, et je vous suis très reconnaissant d’avoir lu attentivement mon texte qui n’est pas du tout facile, et de fournir votre commentaire. D’expérience, je constate qu’il est extrêmement difficile de convaincre quelqu’un, même bien disposé, de ces erreurs au moyen d’un texte de type « littéraire ». C’est parce qu’en lisant mes phrases, il faut en même temps conserver à l’esprit le déroulement de la mécanique des chiffres qui vont des revenus primaires aux revenus disponibles et à leur emploi, ce que vous désignez par circuit économique (ce n’est pas de mon invention, c’est le constat de la réalité des choses). La preuve catégorique plus facile de ces doubles emplois est fournie en une série de 25 égalités arithmétiques que j’ai publiées, mais preuve impossible à incorporer ici au moyen du logiciel d’AgoraVox.

1°. Prenons le premier élément de votre réplique ; où est le problème etc. Le voici.

Première étape de l’analyse : Les dépenses des ménages (des euros n’est-ce pas ?) sont financées par leurs revenus, également des euros. Ces revenus ont leur origine directe ou indirecte dans les revenus primaires. Ces revenus primaires sont la rémunération de leur contribution à la production des biens et services marchands. Ces biens et services qui ont coûté des euros à produire (les revenus primaires) sont acquis par les ménages en échange de leurs euros, ce qui reconstitue les euros dépensés par les producteurs qui peuvent ainsi continuer à produire. C’est le circuit classiquement décrit.

Deuxième étape de l’analyse. Les dépenses des administrations publiques sont aussi des revenus directement ou indirectement versés en contrepartie de la participation de leurs bénéficiaires à la production des services publics.  Mais ces dépenses publiques (les euros versés) sont financées par les prélèvements obligatoires (les euros prélevés). Et ces prélèvements sont opérés directement ou indirectement sur les revenus primaires.

Troisième étape de l’analyse : Ces revenus primaires du secteur marchand qui sont la source des euros dépensés par les administrations publiques constituent le PIB. Ce PIB contient donc déjà les euros de la partie des revenus primaires prélevés par les administrations publiques pour financer leurs dépenses. Les ajouter aux revenus primaires fait donc bien double emploi.

Dans tout cela, il ne faut pas perdre de vue que tous les euros qui ne sortent pas de la planche à billets ont leur source dans les revenus primaires du secteur marchand, et que les phénomènes économiques ne sont, effectivement, que les circuits de tous ces euros. C’est cela que la comptabilité nationale a mission d’enregistrer.

2°. Sur les impôts sur la production et sur les produits : Mais si, ils ont la même origine, les unités de production. Ce qui vous trompe, c’est que les impôts sur les produits sont, en comptabilité nationale, hélas, compris dans la production brute et dans les consommations intermédiaires, alors que les impôts sur les produits n’y sont pas. C’est pourquoi seuls les impôts sur les produits sont ajoutés à la valeur ajoutée pour former le PIB.

3°. Sur la distinction du premier paragraphe entre compter les choses et compter la monnaie. Je vous accorde que c’est difficile à expliquer, « olé-olé » me dites vous. Comme vous me semblez pas mal connaître la comptabilité nationale, je peux formuler autrement ce que j’ai écrit. Vous connaissez le tableau des Entrées-sorties qui est la base des comptabilités nationales en France. C’est clairement un tableau qui, au niveau de son détail, piste les produits et services qui sont là mieux identifiables et saisissable puisque recensés aux niveaux les plus détaillés de l’économie. On pourrait presque dire que là, ce n’est qu’accessoirement que ces produits sont enregistrés en euros. Vous savez que son origine, c’est la planification de l’économie de guerre et d’après guerre où il s’agissait de maîtriser l’équilibre entre la production et les consommations non pas en monnaie, mais en biens physiques. Et bien, ce que j’ai voulu écrire, c’est que les statisticiens qui tiennent à jour la comptabilité nationale ont conservé cet état d’esprit. Ils comptent d’abord de biens physiques qu’ils convertissent en euros, au lieu de ne compter que des euros.

4°. Sur votre dernière remarque (activités dépourvues de transaction monétaire) c’est un autre vaste débat qui n’est pas hors du sujet de mon article.

Encore merci.


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