Commentaire de Christophe
sur Faut-il moraliser le capitalisme ?


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Christophe Christophe 22 octobre 2008 09:55

@Péripate,

Je vois maintenant sur quoi nous achoppons. C’est que l’état, comme la société, n’est pas une entité qui existe en soi. C’est une hypostase que je ne fais pas. L’état, c’est bien les hommes de l’état, et il n’y a nulle confusion dans mon esprit à ce propos. Mais pour vous, il existe quelque chose comme l’Etat, comme la Société...
Un sociologue comme Luc Boltanski a bien éclairci ces concepts dans la sociologie de l’acteur-réseau. La métaphore appropriée (à prendre avec précaution comme toute métaphore), c’est le Téléphone. S’il existe bien un réseau de cuivre qui relie physiquement des maisons entre elles, rien ne dit si le courant passe, et, surtout rien ne dit qui est en communication et avec qui. Le réseau a besoin d’être "actualisé" pour exister. Il n’existe que dans ces actualisations. C’est le cas de la société, et de l’état. C’est pourquoi je ne réifie pas ce terme.


Deux choses me semblent nécessaire quant aux travaux de Boltanski, une générale, l’autre relative au raisonnement métaphorique que vous metttez en exergue.

Tout d’abord, même si je respecte les travaux qu’il mène pour extraire la spécificité de chaque partie dans un tout (ce qui est d’ailleurs un point que j’ai moi-même étudié), il n’en reste pas moins qu’il a tendance à passer d’un extrême (la catégorisation) à un autre (la non catégorisation) sous prétexte qu’une catégorie est constituée d’éléments lui appartenant, ce qui remettrait en cause l’approche catégorielle. Disons qu’une catégorie est avant tout abstraite et que les individus ne sont pas figés dans une catégorie dans l’espace et le temps. Il pose le postulat erroné, à mon sens, que les catégories sont séparées par des frontières franches alors que ce n’est pas toujours le cas, tout dépend de la méthodologie que nous utilisons pour catégoriser. Mais c’est un sujet délicat et loin d’être simple.

Seconde remarque. Si je suis d’accord avec la première assertion de Boltanski dans sa métaphore ; que le système a besoin d’être actualiser  ; je réfute la seconde ; ce n’est pas parce qu’un système est soumis à une contrainte qu’il n’existe qu’au regard de cette contrainte. Nous entrons là dans un raisonnement très simple où il manque une assertion : que le système n’est soumis et n’est construit qu’au regard de cette contrainte. Or pour des concepts comme une société ou un état, si ils sont tout deux soumis à des évolutions, ils ne sont, ni l’un ni l’autre, construits exclusivement sur ce besoin d’évolution. Comme nous pourrions rappeler qu’une société n’est pas exclusivement la somme des individus qui la composent.

Sauf que c’est une évidente facilité de langage.

Tout dépend en fait du mode de catégorisation. Certaines considèrent que les catégories regroupent des individus ayant des traits communs, d’autres considèrent que ce sont les spécifités de chaque individu qui permetent de déterminer un contour catégoriel. L’un a des frontières franches entre catégories, l’autre n’a pas de réelles frontières, c’est plus flou.

Reste qu’il est évident que selon le mode catégoriel auquel nous nous référons en tant que locuteur, si notre interlocuteur possède un mode de classification différent, le discours sera distordu. Ce n’est pas tant le langage et sa facilité qui, à mon sens, pose problème, mais le sens du discours et l’interprétation qui peut en être fait.

Partant de là, il est évident que nul homme d’état est un surhomme, et que ses erreurs, ou simplement les manifestations de ses intérêts, parce qu’il a le pouvoir de les imposer à tous, sont, et de loin, ce qu’il y a de plus immoral.

Là nous sommes d’accord que nul n’est prophète en son pays smiley et qu’aucun homme d’état n’est un surhomme. Quant à la manifestation de ses propres intérêts, comment voulez-vous qu’il en soit autrement ? Nous vivons dans des sociétés occidentales régient principalement par des règles ne prônant que l’intérêt individuel. Vous faites référence à la sociologie, mais il y a bien longtemps que l’anthropologie a montré que les règles qui régissent les vies communes ont une influence sur les comportements des hommes qui la composent.

Voyez vous, j’ai pu argumenter avec vous, sans avoir le besoin de vous traiter d’inepte. Ca serait assez agréable que vous puissiez en faire autant.

Désolé si mon propos a pu paraître blessant, mais il n’était pas adressé à la personne que vous êtes, mais aux propos qui étaient tenus. Je n’ai pas pour habitude de juger préemptoirement les intervenants mais à tenter de discuter sur les idées.


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