Commentaire de Christophe
sur Les trois piliers de l'antilibéralisme à la française


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Christophe Christophe 28 octobre 2008 21:38

@Péripate,

Un article intéressant par son contenu qui a l’intérêt d’être clair quant aux idées que vous défendez.

Je vais devoir peser mes mots, sachant que je pourrais vous blesser alors que mon intention n’est jamais axée sur l’auteur, mais les idées qu’il avance.

Commençons donc par le début.

Vous faites, à mon sens, comme d’ailleurs Cosmic Dancer dans une de ses interventions, un amalgame entre la pensée libérale des Lumières et la pensée libérale anglo-saxone. Même si je conviens que les anglo-saxons expriment le fait qu’ils défendent autant la liberté économique que la liberté politique, leurs approches nous démontrent le contraire ; ils font le même amalgame que celui que vous faites en laissant croire qu’il n’existe pas de différence entre les deux. Les anglo-saxons donnent une large primauté au facteur économique à tel point que la vie politique n’a pour but que l’action économique, alors que les continentaux, représentés principalement les écoles allemande et française ne rejettent pas la liberté économique, mais l’intègrent dans la liberté politique. Même Marx était libéral, mais un libéral politique qui voulait contraindre le facteur économique à la vie sociale.

Votre vision, bien exposée par votre paragraphe sur Schumpeter, met en évidence que vous pensez d’abord l’aspect économique et ensuite l’aspect politique, sociologique. Par ailleurs, vous opposez la main invisible de Smith et l’intérêt général de Rousseau, alors que, in fine, l’objectif est le même ; seul le moyen diffère. Je reste d’accord avec vous que la vision de Rousseau est utopique, nous ne pouvons subsumer tous les cas particuliers dans une seule règle générale. Mais l’incidence de la main invisible est identique ; ce n’est pas la volonté d’atteindre l’objectif de Rousseau qui est impossible, mais le résultat recherché, comme le souligne fort justement Annah Arendt. Vous nous proposer deux moyens permettant d’atteindre la même utopie ?

Je passerais sur votre propos sur Gramsci et son influence (difficilement mesurable) en France, mais rappelez vous simplement que dans un pays libre comme les USA, il fût une époque où Mac Carthy faisait régner une certaine terreur. Si les choses étaient aussi simple, qu’il serait facile d’arriver à des conclusions rapides.

Par contre, je reste d’accord avec vous sur votre paragraphe concernant l’ENA. C’est sans doute ce qui me fait penser que nous ne sommes plus, depuis plusieurs décennies, en démocratie, mais bien dans une République vue sous l’angle aristotélicien. Oui, l’Etat, en France est un état corrompu dans lequel les intérêts individuels priment sur leur fonction de représentation. Comme je vous l’ai déjà signalé, peut-il en être autrement dans un système où la liberté économique va jusqu’à faciliter la corruption ? Cette corruption n’est que le résultat du comportement intrinsèque à un mode de fonctionnement qui donne la primauté à l’intérêt individuel, qui le place au dessus de tout.

Revenons donc à la liberté dont je suis conscient que vous en défendez les fondements. Comme le signale Tzecoalt, la liberté ne se mesure pas, d’un point de vue pragmatique, aux permissions qui nous sont laissées, mais aussi aux capacités que nous avons de les réaliser. Or votre propos repose principalement sur une opposition entre deux visions que je juge dogmatique ; entre une restrictions des possibles et une ouverture des possibles sans leurs associés les capacités afférentes, est, d’un côté, de l’anti-libéralisme, de l’autre, une hypocrisie libérale.

Vous faites usage d’un mot qui me gêne dans ma lecture de votre article, c’est le mot vérité. Dès lors que nous croyons avoir atteint une vérité, toute remise en cause est impossible. Evitons ce type de propos à forte tendance mannichéenne, dans le monde du tiers exclus, une proposition est vraie ou fausse, mais la nuance n’existe pas, or ce type d’approche est trop complexe pour raisonner en terme de vérité.

Vu la critique que vous portez à l’Etat, et la soif de liberté que vous mettez en exergue, êtes vous d’accord avec le développement sans contrainte de la liberté politique et économique, en retirant donc de fait les devoirs régaliens aux états ?


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