Commentaire de easy
sur Carnet de route. Thaïlande1. Départ et dépendances


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easy easy 23 février 2011 21:08

 Allez, une dernière couche, pour la route.


«  »«  Vous ne pouvez savoir à quel point elle me touche parce que vous avez su voir ce qui est, sans que je le sache, une part de mon attitude dans la vie..
  »«  »

Voilà le genre de phrase qu’un homme ne dira pas ; jamais en piublic en tous cas. 

Vous avez la féminité très chevillée au corps car vous avez appris l’art de la maîtrise en passant votre agrégation. Selon cette formation, vous auriez dû nous la jouer savante de toute chose et rouler des yeux à chacune de nos fautes d’orthographe.
Mais non, vous rigolez de vos palmes, de l’académisme et vous vous contentez de nous faire profiter de vos sensualités.


Et puis il y a le Hihihihi !
Vous nous offrez régulièrement ce petit rire.

Le garçon, parce qu’il doit jouer au docteur, parce qu’il doit tout savoir par injection divine (il sait tout mais n’avoue jamais d’où il tient son savoir afin de donner à penser qu’il lui est consubstantiel) ne peut pas avouer sa faiblesse. Il est tenu de faire le coq (même Francis Huster, quand il reproche à d’autres hommes de tenir des propos machistes, le fait en levant le menton et en poussant des Pfff de mépris)

Alors le garçon, le maître, quand il rit, il donne dans le Ha ha ha ha ! Il cherche et parvient à tuer ses rivaux en ricanant de leur infériorité. Au maître, il est indispensable de savoir rire sur un registre gras, caverneux et à gorge déployée. Il doit s’esclaffer en levant le menton et en installant son regard au-dessus de l’assemblée.

La fille, celle qui a pigé les deux jeux de rôle et qui ne se laisse pas impressionner par les postures des coqs, celle qui ne ressent aucune envie d’imiter les docteurs, quand elle rit, c’est par le Hihihihi aigu, en mettant la main devant la bouche, en repliant le menton dans la gorge et en baissant les yeux.


A force, il est vraiment difficile de distinguer où, dans chacune de ces manières de rire, commence et où finit le surjeu. Car si l’on peut admettre une part de naturel liée au sexe de chacun, on ne peut écarter l’idée que chacun en vienne aussi à forcer le trait propre à son sexe.


Il y a surjeu et surjeu.

Je ne sais pas si les anciens pères surjouaient leur rire de stentor ni dans quelles conditions. Mais de nos jours, c’est certain, bien des pères surjouent, de manière volontairement exagérée, ce rire là face à leur enfant, face à leur fille bien aimée en particulier. Cela, rien que pour ressortir parfaitement grotesque ou ridicule (mais seulement face à leurs enfants, pas face à la concierge).
Je ne doute pas que Roberto Benigni fasse tout le temps cela, même face à sa concierge.
Il y a donc le surjeu très bien joué qui sert à briser le moral d’un adversaire et il y a le surjeu poussé volontairement à la caricature pour, au contraire, rassurer notre interlocuteur.

Ca c’est chez les garçons où il est indispensable voire vital de savoir distinguer entre lard et cochon, entre la fausse et la vraie agressivité de Jupiter.

Chez les filles, il est moins capital de faire le distinguo entre vrai et faux Hihihihi, entre vraie et fausse pudeur ou humilité. Du coup, il me semble que les filles n’ont pas un registre mimique aussi large avec leur Hihihi que celui des garçons avec leur Ha ha ha.


Enfin, il y a ce ridicule que la femme vraiment féminine accepte alors que l’homme, le vrai, le dur, ne l’accepte jamais, pas même devant ses enfants (Roberto Benigni et Woody Allen étant des exceptions)

La fille est donc bien plus disposée que le garçon à ne pas calculer son ridicule, même pour défendre la cause d’autrui, (Cf la reine Philippa de Hainau qui se met en pleurs pour obtenir d’Edouard III qu’il épargne les Bourgeois de Calais ou la légende d’Esther de Perse qui a supplié l’énormissime roi de Perse pour qu’il épargne les Juifs). Et puis il suffit de regarder qui se rend aux parloirs des prisons pour saisir cette différence d’appréciation du ridicule selon les sexes.

En 1966, ma mère, Picarde, avait couru après un douanier à l’aéroport de Saïgon avec une de ses chaussures à talon aiguille brandie au-dessus de sa tête « Je vais vous tuer, je vais vous tuer ». Le malchanceux avait repéré que nos visas de sortie étaient des faux et il nous avait fait redescendre de l’avion juste avant son envol vers la France. Paniqué, le poulet courait dans tous les sens, d’un pilier du hall à un autre, comme un coq déjà sans tête.
Mon père, Vietnamien, fonctionnaire de l’aviation, était stupéfait par l’échec de l’exfiltration, par la perspective des sanctions à venir et par le grand spectacle qu’offrait sa blanche épouse. Il n’avait donc pas bougé, comme sidéré, comme dépassé par la suractivité de ma mère. Mais de toutes manières, épouse s’esseyant au percement de crâne ou pas, il serait resté digne, au sens que les garçons accordent à la dignité.

Le flic s’en est tiré avec une simple frayeur et il a accepté de ne pas porter plainte. Sinon je ne serais pas là à vous écrire en francé.


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