Commentaire de Lord Franz of the F. in S.
sur Agora, Libéralisme et Blasphème


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Lord WTF ! Lord Franz of the F. in S. 25 septembre 2012 15:01

Globalement d’accord avec cet article : aucune restriction de la liberté d’expression ne saurait être justifiée par quelque valeur « morale » ou autre. 

Il y a cependant quelque chose qui m’interpelle quant au supposé débat concernant supposément la liberté d’expression est que plutôt que d’en appeler à la levée des x restrictions pesant sur la dite liberté d’expression (que je considère bien plus –en France et plus largement en Europe- comme un droit d’expression conditionné,« amputable » selon les circonstances, amendable, etc… soit une « liberté » toute relative au final) nous avons d’un côté ceux qui usent de ce fameux « MAIS » et de l’autre ceux qui semblent considérer qu’elle est avant tout synonyme de « droit » au « blasphème » (en France, on a là une sorte de « réactualisation » postmoderne du combat historique pour la laïcité, phénomène assez similaire opérant aussi aux Pays-Bas qui eux aussi semblent « réactualiser » ou revivre certains combats historiques).

 

Et lorsque vous évoquez les Etats-Unis où effectivement la liberté d’expression est quasi-totale – que ce soit Free ou Hate speech-, il est intéressant de noter la nette disparité entre les réactions des organisations ou figures principales représentatives de(s) la communauté(s) musulmane(s) US et celles d’organisations ou représentants euromusulmans.

 

Je note que a) aux USA la demande de loi anti-blasphème n’est absolument pas le discours majoritaire, b) que plutôt qu’un « mais » potentiellement liberticide, les réactions ne font que simplement rappeler que la condamnation de ces « provocations » relève elle-même de la liberté d’expression, et enfin c) que ces réactions sont quasi anti-islamiques (certains allant même jusqu’à dire que la véritable insulte à l’islam réside dans les manifestations/émeutes en réaction au trailer posté sur YouTube plutôt que dans ce « film »).

 

Rappelons, histoire de replacer le contexte au Yankistan, a) que la violence du discours islamophobe « public » aux USA est non seulement sans commune mesure avec celui que l’on connaît en Europe (et qu’il est quasi quotidien, encore plus en cette période électorale), sans parler des violences physiques à l’égard des musulmans yankee (ou tout individu correspondant au stéréotype du « musulman » soit donc comme victimes potentielles : des Arabes chrétiens à cause de leur gueule d’arabe, des Sikhs et Hindous à cause de leurs « towel » sur la tête) et b) que les musulmans yankee sont soumis depuis plusieurs années à un quasi régime –légal- d’exception (sorte de néo-maccarthysme) où leurs libertés fondamentales sont régulièrement violées par l’Etat fédéral (écoutes, arrestations « arbitraires », etc…).

 

POURTANT il semble qu’en dépit de cela, le fait d’évoluer dans une société garantissant une liberté d’expression TOTALE influe largement sur la manière (posée, réfléchie voir neutre et non de l’ordre du « réflexe » ou de l’émotionnel) dont ils ré-agissent à ce type de « provocation ».

 

La question étant donc, me semble-t-il, de savoir si : a) le fait d’évoluer dans une société telle que les USA neutralise au final les réactions « violentes » face à de telles « provocations » du fait qu’aucun sentiment de « deux poids, deux mesures » ou de traitement « partial/particulier » n’existe : chaque groupe recevant sa part d’insulte, provocation, contestation, opposition, etc…de la part d’autres groupes : au final, tout se neutralise et se banalise (sans parler du fait, que les positions extrêmes enclenchent généralement un mécanisme « social » de stigmatisation de ceux qui les professent : exemple le cas du négationnisme : autant les positions négationnistes peuvent elles être exprimées publiquement, autant la réponse « sociale » sera généralement la « stigmatisation » de ceux qui les professent : bref un contrôle « social » voir « naturel » et non « légal » permettant de limiter l’influence des idées stigmatisées sans pour autant les censurer)

 

Et donc b) la différence dans les réactions selon le côté de l’Atlantique ne résiderait pas dans le fait que de « notre » côté, certains auraient –à tort ou à raison- le « sentiment » que justement il y aurait « deux poids, deux mesures » et que nos sociétés européennes, elles aussi définissent légalement une forme de « sacré » : que même la liberté d’expression ne saurait violer et donc « fermé » à cette dite liberté, quand bien même, nous serions supposément dans une société « ouverte ». Cela ne se limitant pas bien entendu à l’argument habituel quant aux lois mémorielles, mais à quantité d’autres pensées qui sont interdites d’expression publique.

 

Et donc, s’il devait y avoir une utilité à ce supposé débat sur la dite liberté d’expression, il me semble que ce serait justement de considérer la levée de toute restriction sur celle-ci : que toute pensée puisse être publiquement exprimée qu’elle soit islamophobe, raciste, antisémite, extrémiste, etc…puisque de toute manière, nous sommes encore « technologiquement » loin du moment où l’on pourra « censurer » telle ou telle pensée dans les consciences individuelles : autant les laisser s’exprimer. 


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