Commentaire de Brath-z
sur Le PCF prépare son 36ème congrès


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Brath-z Brath-z 17 décembre 2012 11:06

Cet extrait du discours de Montigny-lès-Cormeilles est celui qui a été diffusé en 1981 au JT d’Antenne 2. Il s’agit d’un extrait fort court d’un discours de plus de 45 minutes, qui précisément avait été à l’époque diffusé sciemment pour donner du PCF une image de parti xénophobe. L’Humanité avait répliqué en publiant l’intégralité du discours, l’extrait concerné reprenant alors son sens réel mis dans son contexte.
Et ainsi, on s’aperçoit que quand Georges Marchais parle de « côte d’alerte franchie », il ne fait pas du tout mention de la proportion d’immigrés dans le pays mais, au contraire, du manque d’infrastructures d’accueil en France pour permettre aux immigrés présents et arrivants d’avoir une vie digne.
Le diagnostic alors effectué par le PCF est que la France ne dispose pas des infrastructures pour accueillir de nouveaux immigrés. Ce diagnostic s’est révélé faussé par le fait que 80% des immigrés se trouvaient réunis sur les communes communistes, du fait notamment d’une politique systématique du patronat : le CNPF finançait en effet à l’époque la construction de foyers de travailleurs immigrés... et comme par hasard, ces constructions avaient systématiquement lieu dans des communes communistes.
La manipulation du discours de Georges Marchais faisait suite à une précédente manipulation médiatique, qui avait eu lieu quelques mois auparavant, en 1980 : l’affaire dite « du bulldozer de Vitry ».

Le maire de Vitry sur Seine, Paul Merceia, avait fait raser un foyer d’accueil pour des travailleurs maliens, qui remplaçait un foyer de Saint Maur, une commune de droite voisine. Le foyer financé par le CNPF ne respectant pas les clauses d’hygiène et de sécurité de l’urbanisme, le conseil municipal de Vitry avait prit l’initiative de procéder à son démolissage, tandis que la section locale du PCF en profitait pour interpeller la presse quant aux pratiques des élus locaux de la droite, dont la politique consistait à systématiquement envoyer les immigrés dans les communes de gauche. Cet événement avait été présenté dans la presse et à la télévision comme le refus de l’accueil d’immigrés sur la commune (alors qu’il y avait déjà trois foyers de travailleurs immigrés à Vitry, contre aucun à Saint Maur).
Le PCF s’est montré solidaire de Merceia et publia un communiqué officiel dans lequel il dénonçait la constitution de « getthos » dans les quartiers les plus pauvres de la banlieue parisienne
Le discours de Montigny-lès-Cormeils avait lieu début 1981 dans la ville même où un second événement avait donné lieu à manipulation médiatique. Robert Hue, maire de la ville, avait lancé une opération de lutte contre le trafic de drogue. Le conseil municipal avait notamment incriminé une famille d’immigrés marocains d’être un grand pourvoyeur de drogue dans son quartier. Immédiatement, la presse et la télévision montèrent en épingle l’événement, accusant de racisme l’élu et par extension le Parti Communiste.
Le PCF fut une fois encore solidaire de son élu et publia une fois encore un communiqué dans lequel il dénonçait la constitution d’une économie parallèle dans les quartiers pauvres reposant sur le trafic de drogue.

Le discours de Georges Marchais (consultable aux archives de L’Humanité) s’inscrivait dans cette même perspective, dénonçant les conditions indignes dans lesquelles les familles d’immigrés vivaient.
Le diagnostic alors effectué par le PCF d’une « côte d’alerte » atteinte, d’une incapacité de la France d’accueillir plus d’immigrés et donc d’une nécessité de stopper l’immigration « légale comme illégale » le temps de permettre à ceux déjà présents d’avoir des conditions de vie et de travail dignes n’avait donc absolument rien à voir avec la dénonciation de « l’immigration-invasion » par le FN, encore moins avec les propos tenus aujourd’hui encore par des cadres du FN sur le caractère supposément « inassimilables » des immigrés originaires d’Afrique.

Lorsque la gauche arriva au pouvoir, elle mena une politique de la ville, certes critiquable mais qui enregistra des succès indéniable au point d’avoir fait disparaître les bidonvilles en 1993 (près de 3 millions de personnes, surtout des immigrés, vivaient dans des bidonvilles géants, comme à Sarcelles par exemple, en 1980... en 1993, le plus gros bidonville encore existant faisait moins d’un kilomètre carré et moins de 100 000 personnes vivaient dans des bidonvilles en France... bon, bien sûr, depuis aujourd’hui une petite décennie, les bidonvilles se multiplient, mais cela n’a rien à voir avec la situation qui était celle des années 1960 et 1970).
En conséquence de cette politique qui démontrait par l’exemple que non, la « côte d’alerte » n’était pas atteinte, que la France pouvait tout à fait donner une vie digne aux immigrés présents tout en accueillant d’autres (sachant que depuis le milieu des années 1970, le solde migratoire en France est quasi nul, c’est-à-dire qu’il y a autant de gens qui partent - dont 90% d’immigrés qui vont ailleurs - que de gens qui viennent sans compter le tourisme) et que c’était surtout parce que la droite faisait retomber exclusivement sur les communes les plus pauvres (souvent communistes) la responsabilité des immigrés que l’impression d’impuissance à faire face à la situation avait surgit, le PCF a alors révisé sa position sur la politique à appliquer en matière migratoire.

Entretemps, le FN avait lui émergé, tenant sur l’immigration un discours diamétralement opposé, reposant sur l’idée que l’immigration est intrinsèquement un mal pour la France, pour des raisons raciales ou culturelles (immigrés supposés « inassimilables »), ou encore en établissant des liens entre immigration d’une part et chômage et délinquance d’autre part (alors même que le solde migratoire de la France est nul depuis le milieu des années 1970 et que c’est depuis le milieu des années 1970 que le chômage et la délinquance ont commencé à exploser).


Voir ce commentaire dans son contexte