Commentaire de bluebeer
sur Bertrand et les socialo-communistes, le bénéfice ne détermine pas l'emploi


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bluebeer bluebeer 20 juillet 2013 02:36

Bonsoir, Spartacus.

Une bien belle histoire, édifiante, qui n’est pas sans rappeler celles que nous racontait l’oncle Paul de notre enfance. Ou comment le brave et intrépide Bertrand, se frayant un chemin au travers du cruel gauntlet dressé sur son chemin par tour à tour la secte de bobos altermondialistes familiaux, les commandos de cégétistes boulet sabotant son entreprise, l’les aléas de la crise des subprimes (probablement fomentée par des crypto bolchevique infiltrés dans Wall Street, mais bon ça, vous ne vous prononcez pas vraiment), le gang des énarques socialistes épris de rage taxatoire, les coups de jarnac d’une caste journalistique vendue à Mélenchon, où Bertrand, donc, va surmonter toutes ces épreuves et faire triompher la scintillante luminescence du libéralisme d’entreprise. Et comme bon sang libéral ne saurait mentir, notre bouillant entrepreneur, avec un petit coup de pouce de quelques avisés banquiers (qui eux comprennent les cycles occultes et mystérieux de l’argent), va finalement réaliser sa quête : créer de l’emploi.

Car c’est cela, et uniquement cela qui motive l’entrepreneur. Donner du boulot aux gens. S’il fait des bénéfices, ce n’est surtout pas pour thésauriser ou réaliser de vieux fantasmes comme s’acheter le PSG pour s’offrir un babyfoot géant, louer eurodisney pour le week-end à l’usage exclusif de son petit neveu et de son chien rooky, ou uriner dans une piscine remplie de misses monde harnachées de latex, non, rien de tout, ça, Bertrand entreprend pour entreprendre. Par amour du sport, par esprit de défi, pour la beauté du geste. Par compassion pour ses frères humains. Inspiré par le tout puissant, drivé par ses gènes. On est entrepreneur ou on ne l’est pas. On est larbin ou on ne l’est pas.

Car dans le monde de l’entreprise, tout est question de professionnalisme. Si Bertrand réussit à fourguer ses rayonnages aux pontes du hard discount, c’est parce que ses rayonnage sont à la fois plus solides, plus pratiques, plus jolis, et osons le dire, plus poétiques que ceux de ses concurrents. Et que les pontes du hard discount, ce qu’ils veulent, c’est la meilleure qualité, de la qualité française, celle que Bertrand, penché sur son bureau aux heures obscures de la nuit profonde, dessine et redessine inlassablement en s’usant les yeux et les doigts (et qu’au même moment les raclures cégétistes cuvent leur vinasse de prisunic en rêvant leurs rêves immondes). Ce sont des patriotes, aussi, les patrons de hard discount. Ils n’iraient certainement pas acheter des rayonnages en Chine où la clique socialo-communiste exploite encore le travailleur et où Bertrand, d’ailleurs, n’aurait rencontré aucune des difficultés sus-mentionnées (pas de bobo, pas de cégétiste, pas d’énarque, pas de journaliste déviant... la dictature, quoi).

D’ailleurs, Bertrand, il commence à en avoir marre de tous ces connards qui veulent l’empêcher de répandre la prospérité et la joie dans sa communauté. En 2017, il va s’acheter la nouvelle rayonneuse 3000, processeur intel et cadrans profilés facebook, la parade ultime à la mérule cégétiste. Du solide, jamais en panne, jamais en grève, Bertrand va enfin avoir les moyens de ses ambitions : rayonner tout ce qui ne l’est pas encore, le métro, les transports publics, les trottoirs, les champs, les possibilités sont infinies, il suffit de créer la demande. Sa créativité va enfin pouvoir s’exprimer librement et son investissement va être amorti en un rien de temps. Les banquiers vont venir sonner à sa porte pour lui vendre un peu plus d’argent. Les cégétistes, par contre, on va voir combien de temps ils vont tenir avec le revenu minimal avant de crever de faim et de maladie. Ses bénefs, il va les balancer en offshore, ça fera les pieds aux énarques socialistes, et les journaleux, il va les arroser, ce qui va les assouplir et les aider à choisir leur tropisme. Et sa famille, il va la faire disparaître, un par un, au 4X4, quand il se rendent au boulot (sic) en vélo électrique. Cette engeance d’assistés n’aura que ce qu’elle mérite, en débarrasser la surface de la terre compensera largement les frais de carrosserie. Et son pote, ce n’est pas un apparte qu’il va se payer, c’est un château sur la Loire, un manoir sur la Riviera, une basilique à Rome.

Et finalement, pour Bertrand, pour son génie, pour sa contribution essentielle à la marche du progrès, pour avoir su nous éviter de nous casser le dos en allant driver dans notre hard discount, en un mot, pour son rayonnement, une statue, une geste épique et une fondation à son nom.

Et désormais, nous le savons, non les bénéfices ne sont pas corrélés à l’emploi. Et oui, les banquiers sont des marchands d’argent. Et oui, c’est pour ça qu’ils préfèrent l’usure à tout autre commerce. Et c’est donc pour cela qu’il y a des crises de subprimes, parce que trop d’usure tue l’usure. Et c’est aussi pour cela que le profit n’est pas un moteur d’organisation sociale. Et qu’il va falloir trouver un moyen de faire autrement. Sans chaos, ou avec chaos. C’est selon. Mais gageons qu’en cas de catastrophe majeure, ce sont de types comme Bertrand qui arriveront à tirer leur épingle du jeu. Ces mecs là, ils sont fait pour gagner. La survie est leur métier.


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