Commentaire de Robert Biloute
sur La ruine de la Science Moderne(2). Les sept pêchés capitaux de la Science d'aujourd'hui


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Robert Biloute Robert Biloute 11 août 2014 12:07

Bonjour,

« Faut-il aussi désespérer de ceux qui furent les Savants ? »

Aujourd’hui on parle plutôt de « chercheurs », et ma foi je trouve ça très bien, pour sortir justement de l’attitude fermée du savant-qui-sait et que vous semblez dénoncez. On voit d’ailleurs en filigrane dans vos écrits la contradiction fondamentale chez bcp de gens par rapport à la science : on exige d’elle d’être omnisciente, en même temps on lui reproche de croire l’être..

"un Albert Einstein ou un Max Planck ne seraient jamais publiés dans aucune revue scientifique, parce qu’ils ne sont pas dans le moule : sujet trop original, pas assez de publications antérieures.« 

C’est fort possible. En passant Mr Higgs a également déclaré qu’il n’aurait pas pu faire ses recherches aujourd’hui.

 »On a 53 paramètres libres, c’est un peu trop pour expliquer l’Univers ! On doit pouvoir réduire ce nombre ! « 

Voilà qui illustre l’exigence d’omniscience dont je parlais plus haut : il reste 53 paramètres libres, ben oui, pour l’instant on a rien de mieux.. Et tous les physiciens se disent comme vous »on doit pouvoir réduire ce nombre« . On ne peut pas juste »exiger« que la théorie ultime soit prête, elle se construit par essai-erreur comme toujours.

Je comprendrais peut être mieux votre diatribe sous l’angle des théories spéculatives (vous évoquez notamment les cordes, mais elles ont un statut bien différent du modèle standard, même si certains ne jurent que par elles). Par ex. les extensions supersymétriques (encore non prouvées) du modèle standard annoncent jusqu’à 127 paramètre libres. Le »réflexe« d’ajouter des dimensions peut également être vu comme abusif, sortant de la volonté de simplicité. Mais c’est vraiment une question de point de vue : regardez la relat, en introduisant clairement une 4ème dimension de temps on parvient à résumer des trajectoires complexes par une simple équation d’inertie. Bref, très difficile de juger tout ça, même si je partage l’impression d’une tendance à la complexification. Mais je n’exclue pas une chose qu’on ne devrait jamais exclure : l’univers est peut être bien plus complexe qu’on croit, ne laissons pas notre hubris prendre le dessus, c’est nous les hommes qui voulont à tout prix de l’unité (et encore pas tous les hommes, m’est avis que sans monothéisme, pas de quête d’unité, et vice versa), qui dit que la nature fonctionne suivant nos désirs ?

 »Par exemple, la Relativité Restreinte explique comment il est possible que la vitesse de la lumière soit indépassable« 

C’est étrange car cette formulation contredit votre commentaire en fin d’article : la relat »n’explique pas comment il est possible que..« , elle constate les résultats négatifs des expériences type michelson-morley, et *pose* une constante de vitesse indépassable. C’est un axiome, issu des expériences, mais au sens strict non prouvé (on peut prouver que c’est faux, pas que c’est vrai)

 »Mais la difficulté est que toutes les théories proposées, y compris celle du Boson de Higgs, ne résolvent aucun de ces problèmes de la Physique d’aujourd’hui.« 

Là encore question de point de vue : pour un physicien théorique, le Higgs résout bien un problème, celui de l’origine de la masse des particules, car le mécanisme de Higgs a été élaboré dans ce but. D’un point de vue extérieur ça peut paraitre négligeable en pratique, il n’empêche que c’est un saut conceptuel. Encore une fois, personne n’a dit que la physique était facile : la pente est rude, et la route n’est même pas droite !

 »Pourquoi la masse du proton vaut 1836,152... fois celle de l’électron ? D’où sort ce 1836 !?« 

là aussi, vous reprochez à la sicience de ne pas tout savoir.. Des pourquoi comme ça on peut en trouver à foison, si la science est discréditée par le simple fait qu’elle ne sait pas tout, comprenez que ça pose un gros problème.. Pour ça il y a la religion !

 »Pourquoi les particules (proton compris) ont une durée de vie limitée ? « 

Il y a contre sens je pense, d’ailleurs le lien que vous proposez le dit bien : jusqu’ici on n’a pas détecté la désintégration du proton, dans les limites expérimentales actuelles il est donc stable. en fait ça arrangerait pas mal de monde qu’il ne le soit pas, justement.

 » c’est à dire de rejeter les théories comme celle de la Gravité qui ne tiennent plus de debout puisqu’elle suppose que 96% de la matière composant l’Univers est inconnue« 

Vous allez trop vite en besogne : remettre en cause la gravité, c’est seulement une des manières de traiter le problème. Rien ne dit que c’est la bonne.

Dans le cas de la »matière noire« par ex :
Qu’observe-t-on ? des différences entre masse estimées via des rapports masse/luminosité, et masses estimées via des critères cinématiques (d’où utilisation de la gravitation)

Quelles sont donc les connaissances à mettre en doute ? notre compréhension de la gravité (ex : théorie MOND) ET/OU notre compréhension des relations masse/luminosité (ex : hypothèse d’un type de matière non rayonnant)

Pour l’instant rien ne permet de trancher entre ces deux aspects (quoique pour certains les analyses dite du »bullet cluster« favorisent clairement l’hypothèse »masse manquante faiblement interagissante« )

Là où je peux vous rejoindre sur l’histoire, c’est qu’on n’enseigne pas assez l’histoire des sciences.

 »La Physique fait des mesures, comme elle l’a toujours fait, c’est normal. Ce qui ne va pas, c’est qu’aujourd’hui, à partir de ces mesures, Elle bricole ses hypothèses ! Ce faisant Elle fait le contraire de ce qu’elle devrait faire : bâtir des théories qui aboutissent à des prédictions que l’expérience confirme si elles sont bonnes.« 

Alors pas du tout, c’est inutilement restrictif comme point de vue, c’est l’auteur du bouquin qui dit ça ?

On a toujours eu la coexistence de :

- rasisonnement inductif : recherche de lois générales à partir d’observations particulières (on a d’ailleurs bien été obligé de commencer comme ça, je pense qu’on peut donc dire que toutes nos connaissances ont une logique inductive comme origine historique)

- raisonnement déductif : déroulement d’une logique pour arriver à une prédiction

Et on a besoin des deux.

De plus, vous vous contredisez je trouve, vous arrivez à la fois à reprocher à des théories comme les cordes leur aspect purement théorique ( »la Physique dérive dans la théorie pure« ), mais aussi à la physique de partir des expériences pour faire des théories ! Donc en gros ya pas de solution..

 »Au contraire, la Relativité prévoyait les dilatations du temps. On les a mesurées.« 

Ben oui mais la realt est basée sur un raisonnement inductif aussi : la vitesse indépassable (cf plus haut). On est parti d’un fait particulier »la vitesse de la lumière semble constante« à une hypothèse générale »il existe une vitesse indépassable« 

 »Par exemple, le LHC ne met pas en ligne les résultats de ses expériences.« 

Si, et il fait même mieux que ça : il rend public les données elle même. difficile de faire mieux.. Il y a en général un consensus du genre »pendant 6 mois les données sont réservées à ceux qui ont contribué à la mise en place du bouzin, ensuite on les libère". Cela dit, il faut être vigilant sur ce point, les tendances aux grosses manips très chères et à la compétition ont toutes 2 tendance à atténuer cette habitude de données libres.

Sinon les résultats eux mêmes sont la plupart du temps sur le site arxiv.org, où les chercheurs déposent leur article an accès libre avant de le proposer à une revue. (la pratique dépend du domaine, en biologie c’est peu utilisé par ex car gros intérêts dérrière, en physique des particules ça marche bien)


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