Ce qui distingue ces salauds des tueurs en série, c’est le fait qu’ils n’agissent pas seuls et s’appuient toujours sur un système qu’ils ne font que développer. L’imagerie d’Epinal est incapable de représenter un système, elle est par là même incapable de dénoncer un système. Cette escroquerie est-elle volontaire ? Je le pense. Pourtant, ce qui est de plus en plus prégnant, ce n’est pas l’individu, positif ou négatif, mais le système qui procure à l’individu, qu’il soit génie ou monstre, la sécurité et l’absolution (voir le cas Eichmann).
Un autre effet pervers de cette logique de dissimulation d’un système derrière des individus, c’est que ceux qui entrent en lutte contre lui deviennent par leur conditionnement victimes de la même illusion d’optique, qui leur fait ressentir le besoin d’un leader. Outre que ce leader n’est que le même piège iconique malgré les valeurs positives qu’on lui attribue, le point de basculement entre l’image vertueuse et l’image monstrueuse n’est jamais bien précis, et dans l’histoire on a souvent glissé imperceptiblement de l’une vers l’autre. Ce que nous dit le culte de la personnalité qu’on voit souvent sur AV, c’est que nous referons encore les mêmes erreurs.