Commentaire de Cass
sur La question des hautes rémunérations (7) : Niveau
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On arrive ici au point capital de votre analyse : l’ensemble des discussions autour de la rémunération des dirigeants n’aurait pas lieu si le niveau de ces rémunérations paraissait plus en phase avec la réalité des autres salaires. Le niveau des rémunérations est finalement le vrai sujet du débat. A ce titre votre argumentation me paraît peu convaincante, car finalement vous semblez dire « la rémunération de ces dirigeants est par définition injuste, le marché est là, il faut s’en accomoder ».
Plusieurs remarques :
- au sein même des très grandes entreprises les disparités sont fortes. Entre un Thierry Breton, Président de France Telecom, et un Lindsay Owen Jones à la tête de l’Oréal le rapport est de 1 à 10, voire plus. Sauf à considérer que M. Breton n’est pas un bon manager, on voit bien que l’argument consistant à dire qu’il faut toujours payer plus pour attirer les meilleurs n’est pas valable. En théorie des jeux on pourrait d’ailleurs considérer que les grandes entreprises auraient intérêt à modérer ENSEMBLE les rémunérations offertes à leurs très hauts dirigeants (THD). Elles en seraient les premières bénéficiaires,
- cette inflation des rémunérations est récente. Car si des salaires élevés pouvaient être offerts dans le passé aux THD, les nouveaux instruments de rémunération notamment liés aux actions (options, BSA...) ont fait exploser les dites rémunérations. Le THD a désormais le beurre, l’argent du beurre et la crémière.
- un des autres arguments avancés est souvent celui du marché international de l’emploi des THD. En gros si nous ne payons pas bien nos managers ils iront ailleurs. Mais quels sont les français dirigeants de grandes entreprises étrangères ? Ils se comptent sur les doigts d’une main, et le réseaux nationaux (Corps, Grandes Ecoles) restent fondamentaux dans le recrutement. Vous parlez de vivier étroit pour les THD ; ce n’est pas la compétence qui est seule en jeu mais un ensemble de facteurs qui n’y sont pas fortement liés. Une approche plus ouverte sur l’origine des THD, pour le coup à l’anglo-saxonne, aurait à ce titre des effets très bénéfiques.
Au final une approche réaliste consiste bien entendu à admettre la nécessité de rémunérer de façon importante les THD et ce pour l’ensemble des raisons que vous avez bien décrites (compétences, responsabilités...). En même temps on ne peut pas, à mon sens, faire l’impasse sur la question du niveau de ces rémunérations en se remettant au seul marché, sauf a entériner les effets délétères de ces questions sur le lien social et la confiance dans les entreprises et leurs dirigeants - sasn parler des effets sur les N-1 ou N-2 de ces THD. A ce sujet une question me paraît utile : est-il sain qu’un dirigeant, qui n’est pas un entrepreneur ou un actionnaire important de son entreprise, puisse devenir en quelques années, et ce quel que soit le scénario d’évolution de son entreprise un rentier ?
En somme aux entreprises de faire jouer un minimum de bon sens, et il sera alors inutile de légiférer.