Commentaire de Alexis Toulet
sur Extinction de l'humanité - Une rencontre avec Paul Jorion


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Alexis Toulet Alexis Toulet 24 mai 2016 11:51

@L’enfoiré

Je suis d’accord avec vous que quoique refuser un commentaire sur un blog soit le droit absolu de l’auteur du blog - qui en est l’auteur et peut bien sélectionner les interventions suivant ses opinions si tel est son choix - il est préférable d’expliquer pourquoi, par politesse. Cela dit, il me semble que c’est un détail. Dans mon cas, c’était il y a un an à peu près, et il est passé de l’eau sous les ponts depuis. smiley


- Concernant « Cassandre », vous n’ignorez pas que son drame est qu’elle avait raison... mais que personne ne l’écoutait !

Je ne sais pas si Paul Jorion croit à un risque d’extinction littéral en ce siècle (population humaine = 0) ou s’il force consciemment le trait afin d’attirer l’attention. Ce risque est inexistant de mon point de vue, parce que les deux seules causes possibles d’un tel événement, un réchauffement climatique « explosif » avec des conséquences similaires à l’extinction permienne - voir le blog de Guy McPherson qui défend cette thèse - et l’avènement d’une I.A. forte et hostile - le scénario « Skynet » ou « Omnius » - me semblent pratiquement exclus. En ce qui concerne le deuxième scénario, je suis Roger Penrose qui a fourni des arguments scientifiques forts - par opposition aux « arguments » de type sentimental - pour démontrer que l’esprit humain n’est pas le résultat d’un calcul et ne saurait donc par principe être reproduit par un ordinateur.

Mais même si « extinction » au sens littéral est une exagération, ce qui ne l’est certainement pas c’est le risque d’une diminution de la population humaine en ce siècle jusqu’à 10 à 20% de la population actuelle. Pas par dénatalité bien entendu, mais par les moyens « usuels », peste, guerre et surtout famine. En somme un effondrement parallèle à celui que connurent les Mayas, mais étendu à l’échelle du Monde.

L’existence de ce risque est largement prouvée par la somme des risques écologiques (réchauffement mais pas seulement), le fait que l’agriculture mondiale est non durable et dépend d’énergie fossile qui s’épuisera en ce siècle, et plus généralement l’ensemble des pénuries résultant de l’épuisement des ressources minérales, énergétiques mais pas seulement. Bref l’effondrement de ce qu’il est convenu d’appeler l’économie moderne, précisément ce qui a permis à l’espèce humaine de se multiplier au-delà de 1 ou 2 milliards de personnes, la nature étant laissée dans un état dégradé qui pourrait rendre difficile de maintenir même ce nombre avec des techniques traditionnelles. Voyez Ugo Bardi, Gail Tverberg, Joseph Tainter, Dmitry Orlov, Jared Diamond. Voyez Meadows. Pour un précurseur, voyez Rickover. Ou encore le livre de Servigne et Stevens « Comment tout peut s’effondrer », dont Jorion, à raison, parle hautement.

Et j’ai bien parlé d’un risque. L’avenir n’est pas écrit d’avance. Parer à ce risque, ou du moins rendre l’humanité résistante à ce qui ne peut plus en être paré - appauvrissement sans doute, mais pas massacre, et encore suivi d’un rebond plus tard - c’est sans doute possible. Mais possible par un effort conscient, généralisé et de longue haleine... et c’est pourquoi les Cassandres - ils sont quand même plusieurs - sont absolument indispensables.

- Concernant le bonheur, l’espoir et l’esprit constructif, ils sont nécessaires à tout homme, et les générations qui vivent et vivront au XXIème siècle ne font pas exception.

Outre que le bonheur privé et le simple plaisir de vivre ne sont nullement exclus même dans un monde qui va - de plus en plus - mal, l’espoir et la fierté de construire peuvent avoir beaucoup de sens... si c’est l’espoir justement de construire un monde qui n’aille plus à la catastrophe, et la fierté de donner à ses enfants et petits-enfants un autre avenir que de s’entre-tuer dans des décombres.

En un mot : cette sorte de bonheur qui vient de ce qu’on travaille à un objectif commun qui a du sens est non seulement possible mais indispensable. Et ce qui a du sens aujourd’hui, c’est bien tout d’abord de regarder la réalité en face - et elle est dure - et ensuite de retrousser ses manches.

Le pire serait de rechercher le bonheur au prix d’un refus de voir. Et j’ai bien noté que ce n’est pas ce que vous souhaitez, mais il me semble que vous en acceptez le risque « même si ce n’est pas par la méthode Coué, cela peut y ressembler ». De mon point de vue, il faut le refuser absolument.

Et ne pas croire que ni les jeunes, ni les autres, seraient nécessairement effondrés et désespérés ! L’être humain est plus résilient que cela smiley

Une expérience personnelle, mon fils, qui a douze ans, est au courant d’une bonne partie de tout ceci - en rapport avec ce qu’il peut déjà comprendre naturellement. Eh bien il n’en est pas le moins du monde attristé. D’une part il s’occupe de bien d’autres choses dans la vie quotidienne. D’autre part il est bien convaincu qu’on trouvera des solutions, d’ailleurs il lui arrive déjà d’en proposer smiley

Bien à vous,


Alexis


P.S. : si le risque d’effondrement écologique et civilisationnel en ce siècle vous intrigue, je ne peux que recommander ce sujet d’un forum d’ailleurs très bien sous tous rapports.


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