Commentaire de Aristoto
sur Ségolène Royal, adepte de la castritude aiguë


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Aristoto Aristoto 10 décembre 2016 20:23

La réalité est précisément ce qui importe le moins à ce ramassis de politiciens, de journalistes et de penseurs aux ordres sans qu’il soit besoin de leur en donner. Le plus soumis d’entre eux et aussi le plus content de lui, Jean-Michel Apathie, aura une réponse toute faite pour expliquer l’affluence record du peuple cubain sur la place de la Révolution à La Havane, la place Antonio Machado à Santiago de Cuba et tout au long du trajet qu’emprunta entre les deux villes le véhicule militaire transportant les cendres de Fidel. « Il était un peu obligé. C’est un pays quadrillé, Cuba. On sait comment ça marche ! » Remarque péremptoire ne laissant à l’interlocuteur, le porte-parole du gouvernement Stéphane Lefoll en l’occurrence, venu à l’antenne de France Info France Intox, en fait — se désolidariser de Ségolène, d’autre choix que d’approuver et de débiter à son tour comme un crétin l’antienne attendue : Cuba « n’est pas une démocratie », et « les problèmes des droits de l’Homme, ils existent ». Et de poursuivre, au cas où les auditeurs n’auraient pas saisi la justesse et l’originalité du jugement : « Cuba n’est pas une démocratie et il y a des problèmes de liberté, et depuis longtemps ».

Que d’autres problèmes, comme ceux de l’éducation, de la santé, de la culture aient trouvé à Cuba des solutions que l’on a renoncé à chercher au profit des classe populaires dans la plupart des autres pays d’Amérique latine, que, si l’on est ouvrier, employé, agriculteur, jeune ou retraité, il vaille mieux vivre sous le « régime » castriste que sous n’importe quel autre régime du cône sud et du « Sud » de la planète en général, voilà ce qui explique peut-être la tristesse et la ferveur non simulées — sauf pour l’idiot Apathie — des masses cubaines à l’annonce de la mort de Fidel, et qui, visiblement, échappe à tous ceux qui, en France, prétendent savoir « comment ça marche » à Cuba. Tout en ignorant ou feignant d’ignorer, par dessus le marché, qu’en ces domaines et quelques autres (poste, transports collectifs), « ça marche » de moins en moins bien dans notre pays, austérité néo-libérale et privatisations aidant. La mortalité infantile par exemple, est moindre à Cuba qu’aux Etats-Unis, au Canada et… en France.

Une poignée de chefs d’État ?

Le mépris avec lequel a été traité dans l’hexagone le peuple cubain rassemblé pour un dernier hommage à son dirigeant, a prévalu également pour les représentants politiques des autres pays qui avaient décidé de s’y associer. Pour les gouvernants de « nos démocraties », il allait de soi, sans même qu’il soit besoin de passer la consigne, que le boycott s’imposait. Et que seule une minorité d’autres « dictateurs » ou assimilés pouvaient avoir l’idée saugrenue d’aller à La Havane participer à la commémoration du héros révolutionnaire disparu.

Pour L’Immonde, ce ne serait qu’une « poignée de chefs d’État » qui se serait rendue à Cuba pour rendre un dernier hommage au « dictateur cubain ». Effectivement, à l’exception Ségolène Royal, à qui ses propos louangeurs à l’égard de ce dernier vaudront le torrent d’invectives que l’on a vu, les dirigeants « occidentaux » brillaient par leur absence, si on laisse de côté le Premier ministre grec Alexis Tsipras qui a eu le culot de faire l’éloge de la capacité de Fidel Castro à « résister à la pression extérieure », pour faire sans doute oublier son déculottage honteux devant les diktats de la « troïka » néo-libérale. Il n’empêche : sauf à considérer la Chine, la Russie, le Brésil, l’Iran, le Vietnam et nombre de pays latino-américains et africains comme quantité négligeable, c’est un pourcentage conséquent des habitants de la planète qui était représenté lors de ces manifestations de deuil.

On objectera sans doute que la présence de présidents ou vice-présidents de certains pays à la cérémonie d’adieu nocturne Place de la révolution à La Havane, contrastait avec l’image pieuse du Fidel Castro libérateur et désintéressé qui ressortait de leurs discours. Sauf à se laisser emporter par l’enthousiasme ou l’émotion que pouvait susciter le spectacle d’une foule immense et recueillie, on avait ainsi du mal à oublier les états de services sanglants d’un Sassou-Nguesso, militaire de carrière devenu carriériste politique qui s’était proclamé président de la République du Congo en 1997 à l’issue d’une guerre civile qui avait fait environ 400 00 morts. La prise de parole d’un émir du Qatar haut placé n’était pas non plus de nature à relever le niveau en matière de « droits de l’homme ». Pas plus que celle du président actuel de l’Afrique du sud à la tête d’un régime répressif et corrompu qui fait oublier les espoirs mis dans la fin de l’apartheid. Sans oublier le fringant président du Mexique, Enrique Peña Nieto. Son inertie frisant la complicité face aux assassinats d’opposants commis par les forces de l’ordre, et la dilapidation des fonds publics par sa dépensière épouse ont fait tomber sa popularité au plus bas parmi ses compatriotes. Peut-être pensait-il la rehausser en glorifiant les faits d’armes et l’intégrité d’un chef d’État révolutionnaire d’un pays avec qui, il est vrai, le Mexique n’a jamais rompu ses relations diplomatiques.


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