Commentaire de C’est Nabum
sur L'école éclatée


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C'est Nabum C’est Nabum 6 septembre 2017 19:48

@marmor
 Vous deux :

Jehanne lui a montré la voie

Le gentil page a raflé les voix


Il convient désormais de croire aux miracles et à l’influence divine en matière Politique. Notre bonne République ne saurait plus se revendiquer d’une laïcité intransigeante quand c’est justement avec l’appui de Dieu et de sa collaboratrice : la petite bergère de Domrémy, qu’a eu lieu le plus grand miracle de la vie politique nationale.


Je sens que je laisse quelques moutons en chemin avec ces propos liminaires quelque peu sibyllins. Il convient donc d’éclairer la lanterne de ceux qui, comme un seul homme, se sont précipités dans les bureaux de vote avec une même idée en tête. Pour moi, ayant eu vent de ce que je vais vous narrer, j’avoue que la marche est trop haute pour glisser mon bulletin aux cieux.


Tout a commencé donc, dans la cité Johannique, celle-là même que les aléas de l’histoire et l’ingratitude des rois n’ont pas couronnée du statut légitime pourtant, de capitale du Royaume de France. Une fois par an, le 8 mai, le élus et les notables, les nobles et leurs vassaux tentent de se donner la belle illusion et se rêvent à nouveau au cœur de la grande Histoire.


Ce 8 mai-là, ils avaient raison. Par leur entremise, portées collectivement par une hystérie collective sans précédent dans l’histoire contemporaine, la coterie et la plèbe, réunies dans un même élan mystique, ont ouvert la voie au petit banquier lisse. Lui déroulant un tapis rouge et lui offrant une haie humaine d’admirateurs enthousiastes,ils ont insufflé la conviction que tout était possible au petit page de la cérémonie.


Emmanuel, car c’est de lui qu’il s’agit, faute de mieux, sans sollicitation sur son agenda d’alors, lui qui venait de quitter le gouvernement et était à la recherche d’un destin national, avait accepté l’invitation orléanaise à Présider les fêtes johanniques de 2016. C’est l’acte fondateur de son triomphe actuel, la pierre angulaire de son édifice politique. Le hasard, le manque de postulant, la recherche du candidat le plus consensuel, un coup de dé ou bien une inspiration diabolique prévalaient à ce choix de la part des organisateurs.


Plus d’un an plus tard, les responsables d’alors doivent s’en mordre les doigts, eux qui ont été chassés de leurs sièges de parlementaires comme de vulgaires anglois par le petit page qu’ils ont élevé au rang de gloire nationale. Ainsi en va l’ingratitude des puissants et le gentil Emmanuel ne tardera pas à montrer qu’il est lui aussi un fauve plus redoutable encore que l’effroyable bête d’Orléans...


Mais revenons à ce chemin de gloire et de sainteté qui poussa l’impétrant d’alors à devenir le maître du monde tricolore. Ce jour-là, la pauvre Jehanne avait été ravalée au rang de subalterne, de figurante de deuxième ordre, devant le fringant et sémillant jeune homme qui fendait la foule comme notre seigneur Jésus Christ marcha jadis sur les eaux du lac de Tibériade. Derrière lui, ceux qui allaient déchanter treize mois plus tard, arboraient alors le sourire béat des benêts qui n’y comprennent jamais rien.


Le défilé traditionnel avait du plomb dans l’aile. Rien ne se déroulait comme prévu. Le retard s’accumulait et la foule en délire devait attendre que les journalistes, plus enthousiastes encore, arrachent une confidence à l’envoyé de Dieu. C’était une cohue inextricable, un bazar sans nom. Le bel ordonnancement du rituel défilé s’écroulait comme un fétu de paille. Emmanuel s’élevait au pinacle de sa destinée à venir.


Déjà dans le peuple, entassé derrière les barrières, des murmures montaient. On devinait des « Macron Président » si prémonitoires que l’on peut légitimement se demander qui a prononcé le premier cette parole prophétique. Brigitte ne se serait-elle pas glissée subrepticement dans la foule des anonymes. On se perd encore en conjectures...


La suite fut alors un chemin parsemé de roses et de hourras. La cité retrouvait sa ferveur de 1429 quand son héroïne boutait l’ennemi de la place. On criait, on se déchirait les vêtements au passage de l’étoile naissante de la bergère. Les porteurs d’écharpes tricolores s’étripaient pour figurer sur la photographie avec l’icône. Les « selfies » - dieu que ça me coûte d’écrire ce mot horrible – pleuvaient comme à Gravelote. Les dignes représentants des pouvoirs municipaux, départementaux, régionaux et même nationaux, se transformaient par la grâce du magnétisme de la divinité en marche en de simples et ridicules admirateurs d’une vedette adulée.


Le défilé fut alors l’occasion de manifestations plus délirantes les unes que les autres. La cité toute entière était en transe. La foule se moquait bien de la parodie médiévale, c’est le héros qu’il convenait d’approcher, d’admirer, de toucher pour les plus chanceux et qui allaient voir toutes leurs mycoses disparaître à jamais. Emmanuel était en marche vers sa gloire et c’est à Orléans que naquit le phénomène.


A la fin de la farce, l’horaire habituel largement dépassé, de la tribune d’honneur, là où se pressent habituellement tout ce qui se fait d’ego et de prétention, de vacuité et d’orgueil, de fiertés déplacées et de suffisances bourgeoises, montait alors de toutes les gorges pâmées le petit slogan qui avait jailli du bon peuple : « Macron Président ! » La folie gagnait ainsi les plus dignes spécimens de l’ordre établi, de la réaction et de la bien-pensance. Le miracle était en marche.


Voilà vous savez tout et il vous sera désormais possible de dater l’avènement du nouveau messie. Je me prépare à subir les foudres des acteurs de cette parodie. Je sais que lors de sa prochaine et inévitable réélection en 2022, j’aurai droit au supplice sur la place du Martroi afin de punir mon impertinence et de célébrer dans le même temps le millième anniversaire du premier bûcher européen pour hérésie. Ainsi va la vie dans la nouvelle capitale du Royaume.


Iconoclastement sien.


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