Commentaire de Robin Guilloux
sur Le modèle cybernétique dans la théorie mimétique de René Girard


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Robin Guilloux Robin Guilloux 25 février 2018 10:33

@Luc-Laurent Salvador


Vous avez de la chance d’avoir connu René Girard pour lequel j’ai une immense admiration. Je me souviens de la lecture dans les années 80 de Vérité romanesque et mensonge romantique comme d’un moment de pure joie intellectuelle (pour parler comme Spinoza !). 
Le distinguo entre mimésis d’appropriation et mimesis de rivalité, est purement méthodologique. En fait, il me semblait avoir bien compris (et je suis content que René Girard vous l’ai lui-même confirmé) que c’était la même mimésis.. 
Il faut en revenir à l’exemple simple des enfants qui se partagent un jouet : Si on met des jouets à la disposition d’un groupe d’enfants de trois ans, on constate que les enfants ne vont pas prendre chacun un jouet (se répartir les jouets), mais que l’un des enfants va tendre la main vers un des jouets pour s’en emparer et qu’aussitôt les autres vont vouloir s’emparer du même jouet. Si les adultes n’interviennent pas, les enfants se mettent invariablement à s’arracher le jouet, puis à se battre.

Cette tendance existe bien entendu aussi chez les adultes, mais nous avons appris par l’éducation à refréner ce genre de comportement.

Chez les animaux, la mimesis d’appropriation est régulée par un mécanisme instinctuel qui empêche en général la rivalité de dégénérer en combats mortels (sauf accidents).

Ce mécanisme n’existe pas (plus) chez l’homme, pas plus qu’il n’existe de mécanisme de régulation de la sexualité. La sexualité n’est pas régulé par l’instinct comme chez les autres animaux, elle est permanente dans l’espèce humaine et fait l’objet de tabous spécifiques, non en tant que telle, mais parce qu’elle est liée à la violence (cf. La violence et le sacré, « Le sacrifice »).

René Girard estime que l’augmentation exponentielle de la taille du cerveau humain au cours de l’évolution s’est accompagné d’un accroissement des capacités mimétiques (Girard parle de « l’hypermimétisme » humain) et parallèlement des phénomènes de violence, au point de menacer la survie de l’espèce.

Note : la mimesis d’appropriation et la mimesis de rivalité ne sont deux pas deux formes distinctes de mimesis. Il s’agit de la même mimesis. La mimesis d’appropriation engendre diachroniquement (et pour ainsi dire « mécaniquement ») la mimesis de rivalité.


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