Commentaire de Philippe VERGNES
sur Le meurtre de l'âme ou meurtre psychique et la perversion narcissique


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Philippe VERGNES 9 mars 2018 00:34

@ Self con troll,


« Vous m’apprenez le lien entre Korzybski et Laborit. »

Bah... j’en apprends moi-même tous les jours et j’espère bien pouvoir en faire de même encore longtemps.

Sur les échanges entre Mélusine et arthes, je ne vous contredirais pas : j’en ignore totalement les tenants et les aboutissants. J’apprécie leurs interventions sous mes articles dans un style totalement différent l’une de l’autre. C’est ce qui fait la diversité... et parfois le charme d’Internet.

« ...  je suis arrivé après moult circonvolutions à me dire qu’il n’y a pas échange vrai sans une part de manipulation. »

Cet aspect de la communication se discute. Ce que vous exposez là, c’est un point de vue partagé par les systémiciens et l’école de Palo-Alto : « Tout est communication, toute communication est en même temps une manipulation, donc la manipulation est partout. »

G. Bateson qui a fondé cette « école » (qui n’en est pas une) s’est aussi inspiré de d’A. Korzybski. Mais ce dernier est très précis en ce qui concerne la manipulation. Ce qui me fait penser que je devrais vraiment écrire sur la Sémantique générale et sur ce que pensait Korzybski des dictateurs et autres dogmatiques, car c’est en gros ce qu’en j’en dis à chaque fois lorsque je parle des impostures et des imposteurs. Grosso modo, les manipulateurs sont des « malades mentaux » (je respecte les guillemets qu’il met lorsqu’il emploie cette expression).

Sur G. Bateson qui a aussi découvert le double-bind, découverte majeure en science humaine s’il en est dont s’est également inspirée Racamier dans ses théories, il y aurait vraiment beaucoup à en dire. Beaucoup, beaucoup, beaucoup...

Je n’ai pas d’avis tranché sur la question pour la simple et bonne raison que l’essentiel réside toujours dans la possibilité de pouvoir s’accorder sur la définition des mots et des concepts que nous employez et non pas d’imposer les nôtres et nos propres définitions, surtout lorsque l’on se réfère à une théorie bien précise. Modifier le sens des mots et des concepts d’une théorie donnée et les appliquer hors de leur contexte d’énonciation initial, c’est tout simplement de l’escroquerie intellectuelle. C’est ce qu’enseigne en quelque sorte Korzybski : « La carte n’est pas le territoire, la carte n’est pas tout le territoire, la carte est auto-réflexive ». Votre carte n’est pas ma carte et pour m’accorder avec votre carte, cela demande certains ajustements de part et d’autre. Autrement, vous entrez dans des « jeux de pouvoir ».

Ainsi, j’ai des ami(e)s professionnels psys, de formation littéraire en latin, grec et philosophie également qui ne sont pas d’accord avec votre assertion : pour eux, la manipulation a une valence exclusivement « négative » et ils distinguent la manipulation de l’influence. J’en ai d’autres qui acceptent comme vous que nous manipulons tous... mais pas tous pour les mêmes raisons. C’est-à-dire que si nous cherchons à exercer une quelconque influence sur quelqu’un, nous ne le faisons pas avec les mêmes motivations. Il y a donc plusieurs degrés de manipulation qui vont de la manipulation « altruiste » à la manipulation « narcissique et destructrice » en passant par la manipulation « matérielle ». Bref, il y a tout un panel d’opinion sur le sujet parmi les différents auteurs. Une synthèse de toutes ces vues a été l’objet d’un de mes livres. L’important restant de bien savoir quel modèle (le contexte de la théorie) nous appliquons lorsque nous parlons d’un phénomène observé. Sinon, nous sombrons dans le confusionnisme le plus total.

Pour Paul Watzlawick il existe une manipulation éthique et une autre non éthique. Cette dernière étant proscrite. Or, c’est celle que pratique ce que l’on nomme dans le langage courant les manipulateurs (ou manipulateurs pervers).

« D’où la nécessité d’insister sur le « pervers » qui va avec « manipulateur », ou peut-être de nous faire un topo sur le manipulateur non pervers. »

Oui... c’est déjà fait, mais il y a longtemps (2011 pour le livre dont cet extrait est tiré)... et cela a fait partie de mes quelques articles refusés sur agoravox.

En outre, il y aurait aussi une grosse réflexion à mener sur l’usage du mot « pervers » compte tenu des différents sens qu’il prend, de sa connotation négative et de la charge émotionnelle qu’il véhicule.

Bref, j’insiste cependant sur l’impératif d’aborder tous ces problèmes d’un point de vue pluridisciplinaire (tout à fait l’axe Korzybski => Laborit => Morin), tel était en quelque sorte mon propos lors de mon article sur « Se comprendre ou s’entretuer : question de logique ? » pour lequel des suites sur la pensée critique et peut-être la Sémantique générale sont prévues ou envisagée.

A ce sujet il me vient en tête une citation d’Henri Laborit qui résume bien la complexité du monde tel que nous le vivons actuellement et qui, quelque part, entraîne sa part de confusion : « Nous avons assisté en effet à la construction d’une tour de Babel dans laquelle grouillait une population de plus en plus nombreuse de spécialistes qui n’arrivaient plus à échanger une seule information, car leurs langages étaient tous différents. […] Ce sont les concepts et les langages du plus grand nombre possible de disciplines, et non les techniques, qu’il est nécessaire d’acquérir pour ce qu’il est convenu d’appeler l’interdisciplinarité ; nous avons de plus en plus besoin de polyconceptualistes monotechniciens. »

Personnellement, j’applique ce conseil à la lettre depuis des décennies et c’est la raison pour laquelle je fais les liens qu’il y a à faire entre les différentes disciplines des sciences humaines (les autres sciences, j’suis pas doué... chacun son truc).







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