Commentaire de Marsupilami
sur Misère intellectuelle de la biologie contemporaine et avenir de la philosophie du vivant
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Ouaf !
Texte extrait de Matière à penser de Jean-Pierre Changeux & Alain Connes, Éd. Odile-Jacob
"Trois niveaux dans l’activité mathématique...
Le premier niveau : des mécanismes préétablis permettent de donner une réponse précise à un type de problème donné, en général de nature calculatoire... Seul compte le fait qu’accomplir ces opérations n’a pas de conséquences pratiques sur la manière dont elles sont accomplies... On ne change pas de méthode, on l’applique sans comprendre pourquoi... Ce ne sont que des recettes qu’on applique.
Le deuxième niveau commence lorsqu’il y a interaction entre les calculs effectués et une problématique personnelle. Supposons par exemple qu’on ait deux méthodes pour faire un calcul et qu’on obtienne deux résultats différents. On se trouve alors au deuxième niveau, parce qu’on est obligé de se poser une question, soit sur la validité de la méthode, soit sur des erreurs possibles faites pendant le calcul, soit sur la signification des calculs qu’on effectue. On doit alors tester la méthode, et donc comprendre son but et son mécanisme. Lorsque le calcul ne marche pas, ou que l’on trouve deux résultats différents, au lieu de simplement appliquer la recette et de vérifier si l’on s’est trompé, on change de stratégie pour s’adapter. Imaginons quelqu’un qui, à force de faire des multiplications, trouverait une méthode plus simple pour obtenir le résultat... Cette difficulté m’invite à regarder avec sympathie ce qui, dans le cerveau, lui permet d’avoir des sentiments. Ces derniers jouent un rôle essentiel pour passer au deuxième niveau. C’est analogue à la capacité de construire des hiérarchies de valeurs, de las utiliser et de les modifier... Il faut donc avoir formalisé les opérations utilisées, les avoir hiérarchisées en fonction du but auquel adapter la stratégie choisie, et pour ce faire, adhérer vraiment à ce qu’on fait.
Troisième niveau, niveau de la découverte. A ce niveau, on n’est pas seulement capable de résoudre un problème posé. Mais on peut aussi découvrir - je ne dis pas inventer, parce que ce ne serait pas conforme à la philosophie que j’ai de la préexistence du monde des mathématiques à l’intervention de l’individu - une partie des mathématiques à laquelle les connaissances acquises ne donnent pas un accès direct. On parvient à poser des problèmes nouveaux, à ouvrir des voies inaccessibles auparavant, à découvrir une partie encore inexplorée de la géographie des mathématiques... On peut définir le troisième niveau de la manière suivante : l’“esprit” ou la “pensée” est occupé de manière différente tandis que, de manière interne, subconsciente pourrait-on dire, le problème est en train de se résoudre.
La caractéristique fondamentale de ce niveau, dans l’illumination, c’est, au-delà du plaisir ressenti, l’impression tout à coup qu’un brouillard de lève brutalement. La fraction consciente de la pensée accède alors directement à un monde dépourvu pour elle de toute étrangeté. Nulle vérification laborieuse n’est plus nécessaire... On n’a plus besoin d’un mécanisme d’évaluation en fonction d’un but déterminé, mais d’une mesure immédiate de cette compatibilité, avant même que la pensé réfléchie n’entre en jeu. un mécanisme, malaisé à comprendre, permet, sans recours à la pensée raisonnée, de ressentir la résonance entre le nouvel objet de pensée et ceux qu’on est habitué depuis longtemps à manipuler...
Au troisième (niveau), celui de la créativité véritable, le but lui-même n’est pas connu. Le propre de la créativité réside dans l’absence de but préalable... Souvent, lorsque l’on cherche à atteindre un but, il arrive qu’on découvre autre chose. L’essentiel est alors de reconnaître la nouveauté et l’harmonie propres à ce qu’on rencontre. Il ne s’agit plus alors de réflexion, mais presque de la création d’un nouveau but”.
C’est bien entendu un point de vue plutôt platonicien...
Autre citation d’Alain Connes :
"... existe-t-il une harmonie préétablie, à laquelle l’homme est sensible parce qu’il vit dans ce monde harmonieux, ou bien crée-t-il lui-même l’harmonie ? Découvrons-nous la réalité harmonieuse... ou bien créons-nous l’harmonie de la réalité ?
Houba houba !