Martin sur AgoraVox Martin sur AgoraVox 16 octobre 2007 21:45

Je suis reconnaissant aux lecteurs qui se donnent la peine de bien vouloir lire mes articles que je propose ici dans le cadre de l’échange démocratique d’opinions. Je me réjouis de tout commentaire qui apporte une contribution constructive à la discussion démocratique et qui nous permet d’avancer vers la vérité, quel que soit le sens de cette contribution : en accord ou en opposition avec mes opinions.

Demande de Yannick Harrel : « m’autoriserez-vous à insérer un court extrait de votre article ? ».

Excusez-moi si je n’ai pas immédiatement répondu. Matériellement je n’ai pas la possibilité de suivre les commentaires en temps réel.

J’écris pour AgoraVox quand je trouve assez d’énergie, de patience et de temps, dans le trop court intervalle entre le temps pris par le travail salarié (dans un domaine sans rapport avec le journalisme ou avec les thèmes de mes articles) et le temps nécessaire au repos, dans l’espace de temps qu’on appelle parfois « le temps des loisirs ». J’écris lentement, parfois plusieurs articles en parallèle, parfois pendant des mois, en cherchant et en vérifiant les sources, en relisant, en corrigeant et complétant les textes.

J’écris en priorité pour partager mes opinions avec ceux qui pensent comme moi. Je ne cherche pas à convaincre ceux qui ont des opinions opposées.

Les lecteurs qui partagent les idées développées dans mes contributions peuvent utiliser les textes de mes articles pour propager ces idées sur d’autres forums, dans d’autres médias ou autour d’eux. Si vous partagez mes opinions alors vous pouvez traduire mes contributions, vous pouvez utiliser mes textes tels quels, vous pouvez les copier entièrement ou en partie, ou vous pouvez les adapter de la manière qui vous convient.

J’estime que ma plus-value sur AgoraVox ne se situe pas dans la formulation d’idées nouvelles. Souvent j’expose simplement des faits. Quand je formule des opinions ou des idées, je n’en ai pas l’exclusivité : ces opinions ou ces idées sont partagées par de nombreuses personnes, elles ne m’appartiennent pas, elles sont du domaine public. Ma plus-value sur ce forum se situe seulement dans la mise en texte d’observations, d’opinions ou d’idées. J’interviens pour écrire comme le ferait un écrivain public, mais à le différence de l’écrivain public, je n’écris pas ce qu’on me demande d’écrire, j’écris en choisissant les observations, les opinions ou les idées selon ma sensibilité et selon mes convictions.

Mes opinions politiques ne se situent ni à droite, ni à gauche, ni à l’extrême droite, ni à l’extrême gauche. Il y a du bon et du mauvais de tous les cotés. Telle est mon opinion.

Quand vous copiez ou adaptez mon texte, vous êtes donc libre d’indiquer la source ou de ne pas l’indiquer. Si j’écris c’est pour que des gens lisent, donc plus il y a de lecteurs meilleur c’est. L’important ici est la propagation des informations et des opinions.

J’écris donc avec l’idée que ces écrits pourraient, d’une façon qui pour l’instant est indéterminée, rapprocher les gens qui partagent les opinions semblables, et les amener à agir politiquement.

Citation de candidat 007 : « Vous critiquez la démocratie représentative sans proposer de remèdes. »

Non. Un début de proposition figure dans l’article ci-dessus, dans la note [1] :

« [...] Il faut préciser que la démocratie véritable, qui est donc dans la pratique basée sur la démocratie directe - avec la possibilité donnée aux citoyens de déclencher les référendums - n’élimine pas les éléments de « démocratie représentative » ni les éléments de « démocratie participative ». La démocratie directe laisse aux uns et aux autres la possibilité de faire des propositions et laisse aux politiques la responsabilité de gérer les affaires de la communauté au quotidien. Mais elle exerce sur les politiques et sur les lobbies (c’est-à-dire sur les groupes de pression) le contrôle permanent du respect de la règle démocratique : « pour toutes les questions qui touchent la communauté c’est la volonté de la majorité des citoyens qui décide ».

Comme exemple à suivre pour mettre en place la démocratie véritable, on peut citer le système politique suisse, qui à tous les niveaux de décision politique (local, régional, fédéral) respecte les règles de la démocratie véritable. [...] »

Je peux apporter des précisions suivantes qui ne figurent pas dans l’article ci-dessus.

De toute façon, par chance, la démocratie directe - qu’il ne faut pas confondre avec la « démocratie participative » - est en place en Suisse. Les Suisses ont depuis plus d’un siècle mis en place, fait évoluer et continuent à faire évoluer le système politique basé sur les référendums. C’est une expérience concrète à partir de laquelle la transposition de la démocratie véritable dans d’autres pays est possible.

Les référendums sur l’initiative des citoyens devraient être garantis par la Constitution française et par la Constitution européenne si elle est mise en place. Il ne faut pas que les politiques et les groupes de pression décident, selon leurs calculs, sur quelles questions particulières les citoyens peuvent exprimer leur volonté par référendum et sur quelles autres questions les citoyens n’ont pas le droit d’imposer leur volonté majoritaire.

La démocratie véritable, la démocratie directe, cela ne signifie pas une société qui est gérée uniquement par référendums. Le droit aux référendums d’initiative populaire est le droit donné aux citoyens d’intervenir lorsqu’ils estiment que la règle fondamentale de la démocratie n’est pas respectée, la règle qui est la suivante : « pour toutes les questions qui touchent la communauté c’est la volonté de la majorité des citoyens qui décide ». Lorsqu’il y a un doute, toute décision politique doit POUVOIR être soumise à la validation. Mais cela NE signifie PAS que toutes les lois sont OBLIGATOIREMENT rédigées d’après les référendums. Il suffit d’observer le système politique suisse pour comprendre les mécanismes de prise de décision : les politiques professionnels (exécutif/législatif, gouvernement/ parlement) et leurs décisions y ont leur place et les référendums d’initiative populaire n’interviennent que lorsque les citoyens veulent vérifier concernant certaines décisions politiques quelle est la volonté démocratique de la majorité des citoyens.

Dans un contexte de la démocratie directe, dont un dispositif important est la garantie de référendums, y compris les référendums d’initiative populaire, les politiques ne s’aventurent pas à prendre des décisions qui sont manifestement contraires à la volonté démocratique de la majorité des citoyens. Les politiques sont ainsi obligés d’agir en respectant la démocratie. Et quand ils ne la respectent pas ils s’exposent au risque d’être rappelés à l’ordre au moyen de référendum d’initiative populaire.

Il y a en France un réel problème quand on parle de la démocratie véritable, c’est-à-dire de la démocratie basée sur la démocratie directe. Je ne parle pas des commentaires suite à mon article, mais des discussions en général à propos la démocratie directe : les gens n’écoutent pas les explications, mais réagissent en argumentant d’après ce qu’ils imaginent qu’est le système politique basé sur la démocratie directe. En somme les citoyens français argumentent volontiers contre l’image de la démocratie véritable telle qu’elle apparaît dans leur imagination. Ces arguments-là ne tiennent pas face aux faits, face à la réalité de ce qu’est la démocratie véritable, laquelle est mise en application, rodée et en permanence améliorée depuis plus de cent ans en Suisse.

Le mot « populisme » fait partie du vocabulaire que les opposants à la généralisation des référendums utilisent lorsqu’ils sont à court d’arguments. C’est avec des intonations péjoratives qu’ils prononcent le terme « populisme » qui signifie que ce système politique repose sur les décisions voulues par le peuple dans sa majorité. Ils sont donc péjoratifs uniquement parce qu’ils estiment que les décisions politiques doivent être réservées à une « élite » - c’est là le véritable argument caché de ceux qui sont contre le « populisme » : ils ne disent pas clairement qu’ils sont opposés à la démocratie. Car si les décisions doivent être réservées à une élite, alors la démocratie n’existe pas. Rappel : en démocratie toutes les décisions doivent être conformes aux désirs de la majorité des citoyens, de tous les citoyens qui souhaitent exprimer leur volonté. Si la règle est que les décisions politiques doivent être seulement conformes aux désirs d’une certaine « élite », alors on ne se situe pas dans un système démocratique.

Le système politique qui fait appel aux référendums de façon généralisée peut être mis en place quelle que soit la taille ou le poids économique ou démographique du pays.

Les États Unis d’Amérique sont un exemple de grand pays qui pour certains types de décisions met en œuvre les référendums.

Là où la véritable démocratie est déjà en place, avec les référendums garantis aux citoyens, comme c’est le cas depuis longtemps en Suisse, existent la stabilité politique et la paix civile. En Suisse existent historiquement deux religions chrétiennes et quatre langues officielles. Les cantons suisses appliquent certaines lois ou règlements locaux, mais la plupart des lois et les orientations de politique générale sont décidées et appliquées au niveau fédéral. Le dispositif politique suisse doit sa stabilité et sa légitimité, et le peuple suisse doit sa bonne entente, à la garantie offerte aux citoyens de disposer de référendums d’initiative populaire au niveau des cantons comme au niveau fédéral. Quel autre État avec plusieurs religions et plusieurs langues se permettrait-il de demander à tous les citoyens conscrits et réservistes de conserver chacun chez soi son arme de guerre avec munitions de combat ? La Suisse se le permet, elle ne craint pas les émeutes, parce que son système politique a depuis longtemps éliminé les tensions sociales par la voie de la démocratie directe, par les référendums.

L’exemple suisse montre que le système basé sur la démocratie véritable apporte la stabilité - interne et externe. D’ailleurs le système suisse basé sur la démocratie directe a été introduit après la dernière guerre civile qui s’est déroulée en Suisse au XIXe siècle. En effet, faut-il le rappeler : en 1847, la Guerre du Sonderbund (c’était une guerre de Sécession) a duré vingt-neuf jours, entre catholiques et radicaux, et les combats ont fait officiellement 98 morts, dont 74 soldats fédéraux, et 493 blessés. La constitution de la Suisse, du 12 septembre 1848, en est issue avec comme résultat la victoire écrasante du système politique de l’État fédéral. Le but de cette constitution de la Suisse, qui a formalisé la démocratie directe, a été justement d’introduire la stabilité ce qui a à l’évidence réussi.

Peu importe le nom que certains utiliseront pour qualifier le système politique suisse. Si dans le vocabulaire de certaines personnes le mot « populisme » s’impose, alors il est certain que ce « populisme » helvétique est le modèle, l’exemple à suivre par tous ceux qui veulent instaurer la démocratie véritable.

Un avantage du système suisse est l’effet éducatif sur le peuple qui devient réaliste plutôt qu’être aveuglé par des idéologies.

Par exemple les Suisses ont voté contre la libéralisation du marché de l’électricité pour protéger leurs sociétés cantonales de production d’électricité et de gaz qui sont publiques et le resteront. L’infrastructure de distribution de l’eau est presque entièrement dans les mains des communes c’est-à-dire est publique. Grâce à la démocratie directe, les citoyens suisses peuvent garder le contrôle sur les infrastructures et tout en étant contre leur privatisation exigent simultanément que les entreprises publiques travaillent de manière efficace.

D’un autre coté, alors qu’ils pourraient le faire puisqu’ils disposent la possibilité de déclencher des référendums sur l’initiative du peuple, les citoyens suisses ne s’opposent pas aux dispositifs de la législation suisse qui sont très favorables aux entreprises.

En Suisse, grâce à la démocratie directe, la polarisation « gauche - droite » ou « public - privé » n’existe pas. Il y a des différences d’opinion mais pas d’antagonisme têtu.

Pour cette raison, les grèves ne font pas partie du comportement suisse. Il n’y a pas par exemple de blocages de routes ou de transport afin obtenir des concessions par ce chantage. S’il y a un désaccord alors le réflexe naturel est de procéder à une votation ou à un référendum.

Je pourrais écrire d’avantage, je pourrais évoquer les arguments habituels contre la démocratie directe, contre le droit garanti aux citoyens de convoquer des référendums. Je pourrais expliquer en quoi ces arguments sont fallacieux.

Je pourrais écrire encore, mais ce commentaire devient déjà un véritable article, alors j’arrête là ... cependant je suis prêt à proposer un texte un peu plus complet sur la démocratie véritable si au moins un lecteur exprime ici le désir de le voir publié sous la forme d’article sur AgoraVox.


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