Commentaire de Alexis Toulet
sur François Fillon, gaulliste et chrétien assumé


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Alexis Toulet Alexis Toulet 5 janvier 2017 02:49

Fillon, même s’il n’est évidemment pas gaulliste autrement qu’en paroles, représente un choix et une option politique claire.

De quoi s’agit-il, au fond, en 2017 ? La question est avant tout la politique économique décidée par les institutions de l’UE, avec le soutien et l’influence prépondérante de l’Allemagne, obligatoire pour tous les États membre, encore plus ceux qui utilisent l’euro, censée mener au redressement des finances publiques, de l’emploi et de l’activité au prix d’une libéralisation et d’une plus grande inégalité dans chaque pays... mais qui a en pratique des effets inverses. Comme on a pu le constater en Espagne, en Italie, au Portugal et à un moindre degré en France, non seulement l’inégalité augmente, mais aussi le chômage et la dette, alors que la désindustrialisation est confirmée et que l’émigration de la jeunesse à la recherche de travail change d’échelle.

Qu’ont fait les gouvernements français jusqu’ici ? En schématisant à outrance certes - mais c’est nécessaire s’il faut être clair - Sarkozy n’a pas beaucoup suivi les préconisations de Bruxelles, et a compensé par la dette, qui a monté en flèche - 600 milliards de plus - et pas seulement à cause de la crise financière de 2008. Hollande quant à lui a été moins nocif pour la dette, mais s’est davantage aligné sur Bruxelles et sur Berlin, en essayant toutefois toujours de « finasser », sa seule vision était d’être suiveur mais un suiveur a minima.

Or, la France va mal, et de plus en plus. Le chemin qu’elle suit est mauvais, les Français le savent, ils veulent et ils ont besoin qu’on leur présente des options claires, pour pouvoir choisir ce printemps.

Il n’y a au fond que deux choix possibles. Se soumettre à Bruxelles et à Berlin, en appliquant leur vision quoi qu’il en coûte, ou bien appliquer un autre projet, donc résister par une épreuve de force aux institutions européennes et à ceux de nos voisins qui approuvent leurs exigences et voudraient notre alignement.

- Fillon n’est pas le seul, mais c’est le plus décidé et le mieux placé de ceux qui proposent la soumission. Pas de finasserie à la Hollande avec lui, pas de « je suis les ordres, mais je renâcle quand même ». Fillon c’est en un sens le super-Hollande, le Hollande survitaminé, le Hollande qui n’a pas peur - faut-il dire : qui n’a aucun reste de bon sens ? - et qui veut y aller à fond. On ira où on nous mène, on se doute bien des conséquences puisqu’on les a vues chez nos voisins, mais au moins on ira à pleine vitesse. La musique de fond devrait être Nowhere Fast, la chanson de Fire Inc. en 1984 « Rien de mal à aller nulle part bébé, mais il faut y aller vite. C’est si bon d’aller nulle part et vite ! » https://www.youtube.com/watch?v=251zlGliwOQ

- Deux candidats défendent un changement de projet, donc une négociation avec Bruxelles et Berlin, une négociation qui serait une épreuve de force. Les projets de Le Pen et de Mélenchon sont fort différents entre eux, mais leur point commun est d’être incompatibles avec le programme obligatoire de l’UE, donc de nécessiter une épreuve de force préalable pour pouvoir être appliqués.

Il y a une autre différence encore. Que ce soit Le Pen ou Mélenchon, aucun ne dissimule que si la négociation devait échouer, alors la France l’emporterait quand même, mais alors en sortant du cadre, en sortant de l’UE (Le Pen) ou en appliquant le « plan B » (Mélenchon). Il y a une description franche des conséquences du choix de résister, pas de dissimulation de la possibilité que la négociation n’aboutisse pas, que la France sorte de l’UE, qui ne tarderait pas alors à s’écrouler. Fillon quant à lui ne dit pas franchement les conséquences de l’alignement, alors qu’il ne les ignore certainement pas, il ne dit pas qu’il propose de sacrifier une bonne partie de la protection sociale et de faire monter en flèche l’inégalité afin de surtout sauver l’UE. S’il faut dire les choses, il ment, au minimum par omission.

Fillon se présente comme « gaulliste et chrétien ».
- Le mensonge est-il donc chrétien ? Rien n’est moins sûr : « Que votre langage soit : « Oui ? oui », »Non ? non » : ce qu’on dit de plus vient du Mauvais. » prêchait Jésus (Matthieu, 5, 37)
- Est-ce alors la soumission qui est gaulliste ? Certes non.

La bonne nouvelle de l’élection de 2017, c’est que les masques tombent. On ne peut plus se contenter d’expédients, finasser ni faire exploser la dette. Une décision est nécessaire. On ne peut plus tout avoir, il va falloir faire la part du feu :
- Soit sacrifier la protection sociale en même temps que l’économie française, mais en sauvegardant l’UE telle qu’elle est
- Soit forcer le destin pour à la fois sauver les protections, combattre l’inégalité et relancer l’économie, mais alors si la France est sûre de l’emporter dans l’épreuve de force, elle ne peut garantir d’y parvenir sans en même temps faire s’écrouler l’UE
Et sans doute Le Pen et Mélenchon ont-ils des idées et des projets bien différents, mais du moins chacun offre une chance d’y parvenir puisque la première condition pour améliorer la situation quand on est sur une pente descendante, et descendant de plus en plus vite... c’est d’essayer autre chose

C’est nous qui choisirons, car c’est cela l’élection présidentielle : sélectionner un projet en même temps que le dirigeant qui le porte.

Nous choisirons, et nous aurons les conséquences.


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