jeudi 28 septembre 2006 - par L’équipe AgoraVox

Déprogrammation d’un opéra par peur de l’extrémisme religieux

 

 Le Deutsche Oper de Berlin devait présenter au public en novembre l’opéra de Mozart, Idoménée, mis en scène par Hans Neuenfels. Ce metteur en scène est coutumier de l’introduction audacieuse dans une œuvre d’éléments anachroniques qu’il juge éclairants ; ici, ce sont les têtes coupées de Bouddha, Jésus, Mahomet et Poséidon qui arrivent sur un plateau, en pleine scène antique entre Troyens et Crétois. En 2003, le public avait diversement apprécié.

La scène berlinoise a décidé aujourd’hui spontanément de déprogrammer les représentations. Principe de précaution : la représentation aurait généré « un risque incalculable relatif à la sécurité du public et des collaborateurs de l’opéra ». La directrice, Kirsten Harms, dit avoir été informée de ces risques par la police régionale. La chancelière Angela Merkel a vivement réagi : « Nous devons faire attention à ne pas reculer toujours davantage face à la peur créée par des islamistes radicaux prêts à commettre des violences [...] L’autocensure par peur n’est pas tolérable. Elle est admissible seulement de manière responsable, dans le cadre d’un véritable dialogue des cultures totalement exempt de violence » Le ministre de l’Intérieur Wolfgang Schaüble a qualifié la décision de « folle » et d’« inacceptable ». Le ministre de la Culture Bernd Neumann, a commenté : « Si la peur de protestations éventuelles mène déjà à l’autocensure, la culture démocratique de la liberté d’expression est en danger ». Le maire social-démocrate de Berlin Klaus Wowereit a réaffirmé : « Il faut vivre pleinement les idées que nous nous faisons de l’ouverture, de la tolérance et de la liberté ».

Le Conseil de l’islam, l’une des principales associations représentatives des trois millions de musulmans d’Allemagne, et qui n’avait rien demandé, s’est félicité de la déprogrammation. Son représentant s’est exprimé : « Je pense que nous devrions faire plus attention les uns aux autres, en respectant les sensibilités et en ne blessant pas une grande communauté religieuse ». Sur le site de chrétienté.info, on peut lire : « Les catholiques qui devaient intervenir peuvent baisser la tête : c’est la peur, moteur de l’islam, qui a obtenu cette annulation, au nom du respect d’un homme, le prophète Mahomet. Mais malheureusement ce n’est pas la foi en Jésus, Dieu fait homme, des catholiques concernés, sans doute englués aussi dans la peur, dans un certain relativisme et dans une conception erronée de la liberté d’expression. Dieu ne sera pas bafoué cette fois-ci. A qui le doit-on ? L’initiative de cette annulation aurait certainement dû revenir aux catholiques. »

Deux opéras sont prévus en remplacement : La Traviata, et Le mariage de Figaro.




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