La double présidence de l’Union européenne et du G8, hasard
de calendrier, place l’Allemagne en première ligne pour les initiatives et la
coordination des politiques européennes et plus largement occidentales. L’Europe
vient de s’élargir, et l’intégration de la Bulgarie et de la Roumanie est déjà un défi :
les deux pays sont les plus pauvres de l’Union, avec 33 et 34% de la moyenne
européenne du PIB par habitant en parité de pouvoir d’achat, selon les données
d’Eurostat (office européen de statistiques). La Lettonie, ancienne
lanterne rouge, est à 48%. En outre le poids important de la corruption - la Roumanie est en plus
mauvaise position que la
Mauritanie, que le Sénégal - impose la mise en place d’une
surveillance dans le domaine judiciaire, dans la sécurité alimentaire, dans la
gestion des fonds européens aussi, avec système de sanctions éventuelles à l’appui.
Plus largement, l’Allemagne est confrontée au problème de l’harmonisation
politique. Depuis les référendums français et néerlandais de 2005, le
fonctionnement institutionnel est quelque peu gelé ; l’objectif naturel
est de trouver une entente avant les futures élections de 2009. Les dix-huit
pays qui ont ratifié le Traité constitutionnel se réuniront fin janvier à
Madrid, le 8 mars 2007, la commission Femmes du Parlement européen organisera
un séminaire : « 1957-2007 : l’UE et les femmes, les femmes
construisant le futur de l’Europe », les 24 et 25 mars les chefs d’Etat et
de gouvernement fêteront le cinquantième anniversaire du Traité de Rome,
Mais ce n’est pas simple : d’un côté, la transition présidentielle
française se déroule dans une atmosphère d’incertitude, aucun des candidats ne
se risquant à outrepasser la décision populaire de rejet du traité ; de l’autre,
l’arrivée aux responsabilités de Gordon Brown, considéré comme eurosceptique,
en Grande-Bretagne ne facilite pas les négociations. Et puis l’Allemagne elle-même
ne s’est pas toujours montrée unitaire, par exemple quand elle a remonté son
taux de TVA de trois points sans concertation ou quand a été décidée la
construction du gazoduc sous la Mer Baltique,
en coopération avec la Russie,
sans implication de la Pologne,
dans un contexte où la Russie
se plaît à fomenter des divisions entre pays de l’Union.
D’autres dossiers sont tout aussi urgents : la
définition d’une politique de gestion du changement climatique applicable après
2012 (après Kyoto), de coordination des approvisionnements et de la consommation
énergétiques (améliorer l’efficacité énergétique européenne de 20% d’ici à 2020
et accroître l’utilisation des énergies renouvelables de 25% sont deux
objectifs déjà formulés), des politiques fiscales, sociales... et une
restauration des relations internationales, notamment transatlantiques, qu’Angela Merkel a déclaré au Financial Times placer au rang de ses
priorités.
La chancelière aborde la période sans naïveté : dans
ses vœux, elle a déclaré que « l’Europe ne pourra rester forte que si ses concitoyens sentent qu’ils
ont un avenir. Nombreux sont ceux qui se demandent si l’Europe leur apporte
sécurité et prospérité et s’il n’y a pas trop de bureaucratie ». Elle
sait qu’elle devra combattre l’euroscepticisme qui gagne du terrain en Allemagne
en « rapprochant l’Europe des citoyens ». Depuis le 1er janvier,
l’Ode à la joie de Beethoven est diffusée chaque jour sur les ondes de
Deutschandfunk, radio publique allemande. 60% des Allemands ignoraient fin 2006
que leur pays allait accéder à la présidence de l’Union européenne...