jeudi 23 mars 2006 - par Michel Monette

Femmes et alimentation : que faudra-t-il pour que ça change ?

Le Programme alimentaire mondial a décerné sa récompense annuelle de la Journée internationale de la femme au bureau de la Zambie du PAM qui a mis en œuvre, dans deux camps de réfugiés congolais, des projets de mouture de grains où le partenariat hommes-femmes a joué un rôle déterminant. Le PAM mise sur une approche de partenariat pour changer les mentalités et ainsi pouvoir atteindre les objectifs de sa politique alimentaire. Fait-il le bon choix ?

Elles ont bien besoin de changer, les fameuses mentalités.

Dans la section « Genre et développement » de son site Web SDDimensions, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) rappelle que « les femmes sont les principaux acteurs de la petite production alimentaire. »

« Principales actrices » aurait été plus approprié, mais les mentalités ont une telle force que même cette évidence grammaticale ne peut leur résister.

Les mentalités sont les plaques tectoniques de la condition humaine.

Depuis que la Conférence de Beijing

a lancé, en 1995, une plate-forme internationale pour la fin des discriminations, en vue d’une réelle amélioration des conditions de vie des femmes, les pays peinent à transformer leurs engagements en actions.

Le cas des femmes des milieux ruraux est particulièrement révélateur de cet immobilisme.

Encore en 2002, la FAO devait rappeler cette évidence :

« sustainable agriculture and rural development and food security cannot be achieved by efforts that exclude more than half of the rural population. »

FAO. Gender and land compendium of country studies.

En clair : les milliards de dollars mis dans l’aide au développement du monde rural ne produiront jamais de résultats allant dans la bonne direction, aussi longtemps que les femmes seront maintenues dans des conditions d’infériorité.

Le PAM et la FAO nous présentent une version onusienne du fameux dilemne de l’oeuf ou la poule. Faut-il d’abord changer les mentalités (comme le préconise le Programme alimentaire mondial) ou bien d’abord changer les conditions d’accès des femmes à la propriété de la terre (ce que met en avant la FAO) ?

L’un s’attaque aux résistances mentales des hommes, l’autre aux mécanismes institutionnels qui perpétuent l’inégalité d’accès à la terre dont sont victimes les femmes.

Ce ne sont pas les actions en vue de changer les mentalités, mais les législations forçant le changement qui ont le plus d’impacts positifs. Le cas de l’équité salariale hommes/femmes en est un bel exemple.

Après tout, un partenariat entre inégaux ne sera toujours qu’une mascarade de partenariat.



3 réactions


  • cbestern (---.---.12.203) 23 mars 2006 13:14

    les mentalités changent mais sur plusieurs générations. en france rurale, les femmes qui travail ne sont pas toujours considéré comme l’égal des hommes, mais y’as 20 ans c’était pire. Vouloir faire changer un monde trop vite n’est jamais bon, toutes les téntatives ce soldent par un retour de baton violent.


    • (---.---.183.41) 23 mars 2006 13:29

      Il faut tout de même les bousculer, les mentalités. La FAO a selon moi raison quand elle prétend qu’il faut changer les conditions légales d’accès à la terre pour que les femmes puissent devenir des productrices agricoles à part entière. Même chose du côté du droit à la syndicalisation qui permet à des travailleuses et travailleurs exploités d’obtenir de meilleures conditions de travail. Encore faut-il avoir le droit de les réclamer collectivement.


  • ifelhim (---.---.246.192) 27 mars 2006 15:09

    Dans certains pays, la priorité serait plutot de scolariser les filles afin qu’elles puissent ne pas reproduire les schémas « éducatifs » acquis par la culture... (voir par exemple les mutilations génitales féminines... Les grands mères l’on subit alors elles le répètent sur leurs filles le font à leur tour sur leurs propres filles parce que c’est « la tradition »).

    D’un autre coté, faire particper les hommes dans les tâches habituellement « reservées » aux femmes permet d’éviter que les hommes aient l’impression que leur « autorité » est court-circuitée.


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