vendredi 10 juin 2005 - par Moustic33.

Paradoxe du bio : aimer sans consommer

En ces temps où la mode est au commerce équitable et à toutes autres formes de consommation « alternative », le bio semble être, en France, le grand oublié de cette nouvelle vague. En effet, s’il est très répandu dans des pays comme l’Angleterre du nord de l’Europe, il peine à se développer véritablement et durablement chez nous. La campagne « printemps bio » (du 2 au 12 Juin) est donc l’occasion de dresser un état des lieux et les causes de ce phénomène.

D’après Le Monde, 85% des français ont un avis positif sur le bio. Pourquoi, alors, ne joignent-ils pas les actes aux opinions ? Selon l’Institut TNS Media Intelligence, « 57% des ménagères françaises ont acheté au moins un produit bio en 2003 contre 80% en Grande Bretagne ». (Étude réalisée en 2004). A cela s’ajoute la fait que la croissance des ventes du bio due aux multiples crises alimentaires ces dernières années (vache folle, poulet à la dioxine, fièvre aphteuse etc.) commence déjà à s’essouffler.

Il faut donc tordre le cou aux idées reçues : le bio souffre avant tout d’un problème d’image. En effet, il n’a aucune vertu médicale particulière ni aucun « plus santé » si ce n’est celui d’être sur de n’ingérer que peu voire pas de pesticides. En terme gustatif, il n’est pas meilleur qu’un produit traditionnel non plus. Acheter bio c’est juste assurer un respect de l’environnement, une bonne qualité de vie des animaux, une non utilisation de pesticides...

Mais il est évident que les prix (surcoût allant de 40 à 60% selon les produits vendus en grandes et moyennes surfaces) ainsi que la distribution (l’enseigne Carrefour ne propose que 3OO références de produits bio alors que son homologue anglais en propose plus de 1200) sont aussi des freins au développement de ce type de produits.

Le nouveau consommateur bio n’est pourtant plus uniquement un écolo de la première heure mais plutôt une femme active, urbaine et diplômées de 35 à 64 ans. (Information Le Monde). Mais mis à part cette évolution, reste un paradoxe : alors que de plus en plus de français sont demandeurs de produits issus de l’agriculture biologique, il semble que bon nombre d’entre eux ne souhaite pas payer plus cher pour obtenir cette qualité. Quel peut donc être l’avenir du bio en France, à l’heure où de plus en plus de consommateurs vont faire leurs courses dans les hard discounts, preuve de leur volonté de payer leurs produits le moins cher possible ?

(Etudes citées : « Agence Bio » (groupement d’intérêt public) et « 60 millions de consommateurs »)



4 réactions


  • grellety grellety 12 juin 2005 11:21

    « En ces temps où la mode est au commerce équitable »

    Est-ce une « mode », donc un phénomène passager, ou plutôt une alternative économique, pour les consommateurs, qui préfèrent acheter à et « aider » des petits producteurs plutôt que des grands propriétaires terriens ou des multinationales ?

    « et à toutes autres formes de consommation « alternative », le bio semble être, en France, le grand oublié de cette nouvelle vague. »

    C’est curieux, parce que je, mais est-ce un tropisme, j’en entends parler partout ; les hypermarchés proposent des « produits bio » - qui n’en sont pas tous. Sans compter que le « bio » est simplement un produit agricole naturel, à savoir un paradoxe ambulant. Car un « produit » n’est pas une chose naturelle ; mais tout le monde l’a compris, c’est un produit naturel, parce qu’il n’est pas traité par des produits chimiques, donc des poisons. Manger sans s’empoisonner, est-ce une « mode » ?

    « En effet, s’il est très répandu dans des pays comme l’Angleterre du nord de l’Europe, il peine à se développer véritablement et durablement chez nous. La campagne « printemps bio » (du 2 au 12 Juin) est donc l’occasion de dresser un état des lieux et les causes de ce phénomène. D’après Le Monde, 85% des français ont un avis positif sur le bio. »

    C’est vous dire - un score à faire rêver le grand Jacques, lui qui a connu çà une fois dans sa vie, en 2002...

    "Pourquoi, alors, ne joignent-ils pas les actes aux opinions ? Selon l’Institut TNS Media Intelligence, « 57% des ménagères françaises ont acheté au moins un produit bio en 2003 contre 80% en Grande Bretagne ». (Étude réalisée en 2004).

    Si les seuls consommateurs comptabilisés sont « les ménagères », c’est-à-dire vous mesdames, alors nous n’en sommes qu’à 57% - mais c’est aussi, et surtout un phénomène d’achat, masculin. Je connais bien des couples où monsieur se soucie de ce qu’il mange et de ce que mange les enfants. Pendant ce temps, madame fume sa clope (c’est une caricature pour faire rire, enfin, j’espère...)

    « A cela s’ajoute la fait que la croissance des ventes du bio due aux multiples crises alimentaires ces dernières années (vache folle, poulet à la dioxine, fièvre aphteuse etc.) commence déjà à s’essouffler. » Ah bon ? Vous êtes sûre ?

    « Il faut donc tordre le cou aux idées reçues »

    Aïe !

    «  : le bio souffre avant tout d’un problème d’image. »

    Mais vous avez dit que 85% des Français...

    « En effet, il n’a aucune vertu médicale particulière ni aucun « plus santé » si ce n’est celui d’être sur de n’ingérer que peu voire pas de pesticides. En terme gustatif, il n’est pas meilleur qu’un produit traditionnel non plus. »

    Pour des consommateurs qui mangent industriel à tous les repas, il est possible qu’ils aient tellement perdu le goût qu’ils ne sachent pas faire la différence. Mais pour ceux et celles qui n’en sont pas là, ou qui sont aussi végétariens, je peux certifier, comme d’autres, que les « produits bio », c’est-à-dire ceux qui, comme vous l’avez dit, n’ont pas été traités par..., ont plus de goût - y compris le vin.

    « Acheter bio c’est juste assurer un respect de l’environnement, une bonne qualité de vie des animaux, une non utilisation de pesticides... »

    Quel amour de la nature ! Non, je vous assure, les consommateurs « bio » sont aussi très « égoïstes » !

    « Mais il est évident que les prix (surcoût allant de 40 à 60% selon les produits vendus en grandes et moyennes surfaces) ainsi que la distribution (l’enseigne Carrefour ne propose que 3OO références de produits bio alors que son homologue anglais en propose plus de 1200) sont aussi des freins au développement de ce type de produits. »

    Ce surcoût n’est pas évident. Sur un marché de campagne, les consommateurs ont constaté que les fruits et légumes ont vu leur prix augmenter, avec l’euro, dans des proportions importantes. Fruit et légumes non bio. Sans compter que vous trouvez des producteurs bio qui font des efforts importants pour proposer des produits bio à des coûts « normaux », comparables aux produits non bio. Sur Bordeaux, vous trouvez chaque semaine une vente au cinéma l’Utopia, dans cet état d’esprit - et ces chiffres...


  • Virginie E. 12 juin 2005 17:25

    Oui, bien sur que le bio se developpe actuellement, mais c’est indéniable : les ventes de ce type de produits ne progressent pas en France. Et quand je dis que c’est à cause d’un problème d’image, ce n’est pas dans le sens où on ne le connait pas assez, mais dans le sens ou on a une fausse image de ce que c’est. J’ajouterais aussi que, évidemment, les femmes actives etc ne sont pas les seules a consommer bio et que, bien sur, elles ne le font pas toutes par amour des animaux. C’est justement pour cela que le bio aurait besoin d’une bonne campagne de communication pour mettre les idées recues en face des vérités...


  • L'équipe AgoraVox Carlo Revelli 12 juin 2005 18:03

    Si le bio ne se développe pas en France, il y a une raison : le « scandale des prix ». Je connais assez bien ce secteur, j’ai utilisé des peintures bio, du médium bio, des lessives, des aliments, etc.. C’est vrai qu’on trouve des petits détaillants honnêtes et compétents qui arrivent à s’aligner sur les prix des produits non bio. Ils sont rarissimes. En règle générale, le surcoût est en effet énorme dépassant souvent les 50% pour des produits qui sont certes sains et sans danger mais qui à ce jour ne sont techniquement pas supérieurs aux produits traditionnels (je pense aux peintures par exemple). Mais peu importe, je suis prêt à accepter un rendu légèrement inférieur et au moins respirer de l’air sain sans formaldéhyde chez moi... En revanche, je trouve scandaleux les marges que font sur le bio certaines chaînes « spécialisés » qui sévissent notamment dans la capitale et qui confinent donc ces produits uniquement à la niche des « CSP+ branchés » ou des bobos. Sans compter qu’en général dans ces « magasins à la chaînes du bio », les vendeurs ne connaissent absolument pas les produits qu’ils vendent. Mis à part le prix naturellement.


  • Franz (---.---.211.5) 15 juin 2005 16:42

    Merci pour cette synthèse efficace.

    Qui incite à se demander si une des voies possibles à la négociation actuelles du budget de l’Union européenne (pour mémoire 2 blocages médiatisés : le rabais des Anglais et la PAC pour les français)...

    Revons un peu : Les Anglais acceptent de réduire leur rabais négocié il y a 20 ans, et les Français acceptent d’orienter la PAC en une subvention à l’agriculture biologique...

    Certes, c’est simplet, mais pourquoi pas ?

    Franz


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