jeudi 16 avril 2009 - par Naja

Proposition de loi sur l’inceste : indignation citoyenne à l’égard de ses députés

Lundi 13 avril au soir, nous apprenions dans un article publié dans Le Monde, puis un autre sur Rue89, que J-F Copé proposait de modifier le calendrier parlementaire afin de faire revoter en urgence la loi HADOPI le 28 avril en place d’une proposition de loi sur l’inceste. Au cours de la réunion des Présidents tenue ce mercredi 15 avril, l’UMP est visiblement revenue sur cette lumineuse idée en programmant le second vote d’HADOPI pour le 29. Probablement que l’indignation qu’a suscitée l’annonce de M. Copé y est pour quelque chose : outre les réactions exprimées dans la presse, de nombreuses victimes d’inceste se sont mobilisées pour écrire leur consternation aux parlementaires et dirigeants. Il n’en reste pas moins que c’est sans aucune gêne qu’il l’avait formulée lundi. Peut-être n’avait-il pris conscience de l’insulte ainsi adressée aux victimes d’incestes ?
Pour ma part, j’attends des excuses de l’UMP, en tant que personne ayant subi l’inceste, et en tant que citoyenne qui aimerait bien ne pas voir les petits caprices du Prince et de son égo passer avant toute chose. Mais pour l’heure, je laisse le lecteur méditer sur la signification de cet événement. Car si l’on ne peut qu’être affligé par ce sens aigu des priorités au gouvernement, ne soyons pas naïfs, la question des violences incestueuses n’intéresse pas beaucoup plus l’opposition. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à voir ce que les députés PS ont fait – en première lecture – de la proposition de loi initiale sur l’inceste.


Fin 2008, la députée UMP Marie-Louise Fort était chargée d’une mission parlementaire d’information sur l’inceste. A partir des conclusions de son rapport, elle a soumis le 18 mars 2009 une proposition de loi visant à identifier, prévenir, détecter et lutter contre l’inceste sur les mineurs et à améliorer l’accompagnement médical et social des victimes. Le gouvernement a engagé la procédure accélérée sur cette proposition le 1 avril 2009.
Le 8 avril, la commission des lois constitutionnelles examinait le texte. Au sortir de cette première lecture, il a été vidé d’une bonne partie de son contenu (voir le compte rendu officiel).
En réponse aux substantielles modifications qui ont été opérées et aux propos tenus par certains députés lors de cette réunion, un groupe de citoyens (dont je suis) se sentant concernés par le sujet adressent les lettres qui suivent aux parlementaires.
Le premier texte vise l’ensemble des membres de la commission des lois, le second répond plus spécifiquement aux députés dont les objections ont été consignées dans le rapport.



Indignation citoyenne à l’égard de ses députés ; à l’adresse de tous les membres de la commission des lois constitutionnelles
 
(Texte repris avec l’autorisation de l’auteure, Laurence Guicharnaud)

Mesdames, Messieurs,

Nous suivons avec un vif intérêt les travaux relatifs à l’examen de la proposition de pénalisation de l’inceste initiée par Madame Marie-Louise Fort.
Le compte-rendu numéro 39 de la séance du 8 avril à 9H30 nous laisse perplexes. Le bon sens disparaît-il irrémédiablement de notre société ?
Vous amusez-vous souvent à redécouvrir l’eau chaude, à ignorer les études présentes et antérieures, à vous étonner des manques sans jamais les combler ? Allez-vous persister dans vos guerres intestines au détriment de l’intérêt de vos concitoyens qui vous ont fait pourtant l’honneur de vous élire députés de la République Française ?

Le 3 janvier 2005, Monsieur Le Ministre Jean-Pierre Raffarin mandatait Mr Estrosi pour une mission de réflexion et de proposition autour du thème de la création d’une infraction spécifique d’inceste. Il nous paraît important d’en rappeler les termes au vu des remarques surprenantes de quelques députés.
Selon ledit rapport Estrosi qui avait le mérite, dès son introduction, de re-situer le tabou de l’inceste dans ses multiples champs, " La mission préconise donc que soient insérées dans le code pénal des dispositions consacrant la spécificité de l’inceste, par la définition des auteurs des actes incestueux." Nous étions alors en 2005. Tout est resté lettre morte. En 2009, Madame Fort qui vient de produire un nouveau rapport sur la lutte contre l’inceste ne manque d’ailleurs pas de référer à celui-ci.
Que nous faut-il penser des douloureux regrets de certains députés mis en face d’un dossier dont ils n’auraient aucune connaissance ?

Ainsi, Mme Pau-Langevin :" Je regrette en revanche qu’un tel sujet soit abordé sans que nous ayons eu le temps de prendre connaissance des travaux préparatoires que vous avez menés. Cela nous aurait permis de mieux comprendre certaines de vos propositions."
De concert, Mr Blisko déplore : " Bien que j’admire votre détermination à lutter contre l’inceste, je regrette que nous n’ayons pas pu travailler de façon plus approfondie sur ce texte."
Quant à Mr Gosselin, il se félicite de compter parmi les méritants parlementaires : " Je trouve remarquable qu’un tel texte ait été déposé par un parlementaire."
Et que devons-nous penser, de cette fausse candeur qui ne semble s’afficher que pour justifier le rejet d’un principe que tous approuvent haut et fort mais rejettent de fait ?
Ainsi, Mme Pau-Langevin ne manque pas d’assurer : " Vous avez raison de souhaiter un travail spécifique sur la question de l’inceste, laquelle doit effectivement faire l’objet de dispositions particulières au sein du code pénal. Vous avez également souligné à juste titre le caractère exceptionnellement grave de ces abus commis par ceux qui auraient dû protéger l’enfant, le former et veiller à sa sécurité."
Mr Guy Geoffroy entonne un refrain similaire : " J’espère qu’un grand nombre de nos collègues se prononceront en faveur cette proposition de loi, car elle présente un grand intérêt par la définition de l’inceste et la stratégie de lutte qu’elle nous propose d’adopter."
Mr Blisko nuance : " Je voudrais tout d’abord remercier notre collègue,Marie-Louise Fort, d’avoir déposé cette proposition de loi. Compte tenu du nombre des victimes potentielles – près de 3% de la population –, il est sans doute utile que la loi aborde ce sujet, mais on peut émettre quelques réserves : j’aimerais notamment savoir pourquoi le code pénal ne définit pas l’inceste en tant que tel, alors qu’il s’agit d’un interdit fondamental dans toutes les civilisations."
Nous sommes heureux de nous interroger avec lui : POURQUOI LE CODE PENAL NE DEFINIT PAS L’INCESTE EN TANT QUE TEL ?".
Mesdames et Messieurs les Membres de la Commission des lois, nous aimerions une réponse simple à cette interrogation simple ! Et une rédaction claire dans notre code pénal. La création d’une infraction spécifique est-elle si dérangeante ?
D’autant plus que Madame Filippetti n’hésite pas à affirmer : " Nous sommes tous d’accord sur l’objectif de cette proposition de loi,(...)"
A lire vos tergiversations, nous ne sommes pas convaincus sur ce prétendu accord unanime ! Entre le rapport initial de Madame Fort et le compte-rendu dont il est ici question, vous vous êtes acharnés à vider la loi de son contenu. Avec un certain brio, il nous faut le reconnaître.

Entre le rapport initial et la proposition de loi n°1538, puis entre la proposition n° 1538 et la n°1601, l’ambitieux projet s’est réduit comme peau de chagrin. Sans vouloir entrer dans les détails, nous souhaitons pointer la mauvaise foi évidente d’un argument inacceptable à nos yeux.
Ainsi, dans la partie examen des articles de la proposition n°1601, nous pouvons lire qu’il n’était pas souhaitable d’ériger en infraction spécifique les agressions sexuelles et les viols de nature incestueuse. Le motif invoqué est le suivant : " Cette rédaction aurait eu pour conséquence de créer une nouvelle infraction, laquelle n’aurait pu être constatée que pour des faits commis postérieurement à l’entrée en vigueur de la présente proposition de loi. En effet, l’article 112-1 du code pénal précise que seuls les faits constitutifs d’une infraction à la date à laquelle ils ont été commis sont punissables."
Nous pensions que le principe de la non-rétroactivité d’une loi nouvelle gouvernait notre droit depuis bien longtemps ! Est-ce à dire que ce principe démocratique entrave le fait même de légiférer ? Pensez-vous que les magistrats de France sont incapables de jongler avec des lois successives ? Qu’ils ne l’ont jamais fait et ne le feront jamais ? Cette remarque est quasiment insultante tant pour la magistrature que pour les citoyens victimes. Autant proclamer clairement que jamais l’inceste ne sera considéré comme une infraction particulière malgré toutes les affirmations contraires qui émaillent vos débats.

Nous en finirons en évoquant certaines réticences que nous nous permettons de considérer comme inappropriées : nous pensions notre système démocratique toujours fondé sur la séparation des pouvoirs. Le législatif, l’exécutif, le judiciaire.
Or, Mr Dominique Raimbourg dont le rôle est de légiférer pour le bien commun s’inquiète du judiciaire. Il y bien longtemps que nos magistrats voient croître leur charge de travail sans que cela inquiète toujours. De nouveaux délits apparaissent régulièrement. La question de l’illégalité du téléchargement sur Internet en est un exemple récent. Les juges n’ont-ils pas assez de dossiers à traiter quel que soit le type de juridiction ? On n’a pas à évoquer l’encombrement des tribunaux pour créer, améliorer une loi ou justifier sa frilosité face à un sujet qui semble épineux pour beaucoup.

Mesdames et Messieurs les Membres de la commission des lois, pourriez-vous acter enfin vos discours en inscrivant l’inceste comme infraction spécifique ?

Pour la liste actualisée des signataires, voir :

 
 
A Mme Pau-Langevin, M. Blisko, Mme Filippetti et M. Raimbourg, députés siégeant à la commission des lois le 8 avril 2009
 
 
(Texte repris avec l’autorisation de l’auteure, Jeanne Colin.)
 
Nous sommes un groupe de personnes ayant été victimes de l’inceste, proches de victimes et citoyens se sentant concernés par ce fléau.
Nous avons suivi avec attention les travaux parlementaires récents émanant de la mission dont la députée Mme Marie-Louise Fort a été chargée fin 2008 et soutenons la proposition de loi qu’elle a soumise au parlement(1). A la lecture du rapport N°1601(2) rendant compte de son examen par la commission des lois, nous constatons que la proposition initiale a été vidée d’une partie substantielle de son contenu :

- Il n’est plus question de qualifier l’inceste en tant que tel dans le code pénal mais d’ajouter l’existence d’une contrainte morale pouvant s’exercer « notamment en cas d’inceste ».

- Les atteintes sexuelles incestueuses ne sont plus nécessairement qualifiées en agressions ou viols comme cela était proposé. Le PV de la commission des lois nous expliquant qu’il « convient » qu’il en soit ainsi sans autre forme d’explication, ce qui, de fait, vide le caractère systématique de prise en compte de la contrainte morale exercée en cas d’inceste.

- Les dispositions relatives à la formation des personnels de police, gendarmerie et magistrat ont été déclarées irrecevables.

- La proposition de création dans chaque département d’au moins un centre de référence pour les traumatismes psychiques, qui assure l’accueil et la prise en charge des victimes de violences a aussi été jugée irrecevable.

- L’article 8 s’intéressant à pourvoir l’argent nécessaire aux actions de prévention et d’accompagnement des victimes a été supprimé.

Nous sommes très surpris par la teneur des objections et raisons motivant tous ces refus : le manque flagrant d’argumentation solide et cohérente et l’absence de propositions alternatives aux solutions que la commission a rejetées sans toutefois nier les carences qu’elles visaient à remédier. 

La présente lettre ouverte constitue une réponse détaillée aux propos que chacun d’entre vous a tenu lors de la discussion générale à l’assemblée le 8 avril dernier et qui ont été nominalement consignés dans le compte rendu de la session.
Par ailleurs, nous avons décidé de nous adresser, dans un autre courrier, à l’ensemble des membres de la commission des lois pour leur faire part de notre indignation face à cet immobilisme patent.


A Mme Pau-Langevin

Votre principale principale objection est de ne pas avoir eu le temps de se pencher sur le texte et le problème. Vous dites :
« Ce texte me paraît intéressant à bien des égards, mais il est dommage que nous n’ayons pas eu davantage de temps pour travailler ensemble sur cet important sujet, et ainsi aboutir à un consensus [...] Pour ces différentes raisons, le texte ne nous semble pas tout à fait au point. Nous ne pourrons donc que nous abstenir. »
Le rapport de Mme Fort a été publié début janvier, il contient les propositions sur lesquelles vous préférez vous abstenir, faute de temps.
N’êtes-vous pas déléguée à la protection de l’enfance ? Compte tenu de votre attribution, il est étonnant que vous n’ayez pas cherché à travailler sur cet important sujet avant, alors que d’après les statistiques internationales, c’est entre 3 et 15% (voir le rapport de M-L Fort) des enfants qui sont concernés par l’inceste. Le rapport Estrosi vous aurait-il totalement échappé ?

Vous ajoutez par ailleurs : 
« D’autre part, vous avez raison de demander que les enfants soient mieux informés du respect qui est dû à leur corps, et plus généralement du respect que leur doivent les adultes. Cela étant, faut-il dispenser une information générale, ou bien aborder spécifiquement la question de l’inceste ? Nous devrions prendre le temps d’y réfléchir.  »
Doutez-vous sérieusement que pour informer, il soit nécessaire de caractériser ce dont on parle ? 
Il n’y a aucune incompatibilité à dispenser une information générale sur les violences sexuelles aux enfants et à entrer dans le détail de sa forme la plus courante. Sauf à être mû par une volonté de ne pas voir les choses en face.
L’inceste a ceci de particulier que les enfants concernés étant violentés par un ou des membres de leur famille, ce n’est certainement pas auprès d’eux qu’ils prendront conscience du respect dû à leur corps. Si ils n’entendent jamais clairement que leurs parents - au sens large - n’ont pas à les agresser, où voulez-vous qu’ils trouvent la ressource de les dénoncer ?

Dans la même veine, vous vous demandez « s’il faut prévoir un traitement spécifique pour les victimes d’inceste », redoutant qu’il puisse « en résulter une stigmatisation regrettable. »
Au delà des mots, de quoi parlez-vous ? Quelle serait donc cette stigmatisation ? Résulterait-elle du fait que les difficultés consécutives et spécifiques à l’inceste soient mieux comprises et prises en charge ? Avez-vous déjà craint que l’existence de cellules de soutien psychologiques pour les victimes d’attentats ou de catastrophes naturelles conduisent à une stigmatisation de ces dernières ? 
A vous lire, on croirait presque que Mme Fort propose de parquer les victimes d’incestes dans des zoos, alors qu’il est seulement question d’oeuvrer à une meilleure prise en compte de leurs symptômes.
Le fait est qu’à ce jour, rares sont les lieux d’écoute pour ces personnes. La plupart des psychologues s’avèrent incompétents voire même nocifs pour elles, faute de connaissance sur les conséquences de ce traumatisme et de mise en place de thérapies adaptées.

Enfin, vous regrettez que la proposition de loi ne vise que les victimes mineures. Le fait qu’elle ne prétende pas résoudre l’intégralité de ce vaste problème suffit donc selon vous à l’invalider ?


A M. Blisko


Paradoxalement, votre première réserve face à cette proposition de loi est qu’elle vise à rectifier ce que vous aussi concevez comme une aberration : « il est sans doute utile que la loi aborde ce sujet, mais on peut émettre quelques réserves : j’aimerais notamment savoir pourquoi le code pénal ne définit pas l’inceste en tant que tel, alors qu’il s’agit d’un interdit fondamental dans toutes les civilisations. »
Mais au lieu de vous interroger sur les implications et les conséquences de la disparition de cet interdit fondamental du code pénal, vous semblez partir du principe que cette dernière ne peut être que fondée et que dès lors, il serait dangereux d’y remédier. Position qui n’est soutenue que par la vacuité de la phrase toute faite à laquelle vous avez recours : « le mieux est l’ennemi du bien et je crains que l’on aboutisse à des cas insolubles. »

Vous arguez que le code pénal actuel n’empêche pas la répression des agressions et viols incestueux. En effet. La formulation actuelle constitue seulement :
1. Une entrave supplémentaire à la réalisation d’études permettant de chiffrer l’ampleur du phénomène. A partir des fichiers de police et du ministère de la justice, il est impossible de déterminer combien d’affaires d’inceste sont traitées chaque année, puisqu’elles sont classées parmi les autres types de violences sexuelles.
2. Un déni la réalité de l’inceste et de la contrainte morale inhérente à ces situations. A ce jour, le code pénal ne qualifie de viols ou agressions que les actes commis par contrainte, violence, menace ou surprise. Il revient donc à chaque magistrat de faire entrer ou non la contrainte morale de l’inceste sous le terme flou de "surprise" selon sa compréhension personnelle de cette dynamique et son propre niveau de déni.
3. Une perpétuation du tabou de l’inceste dans le refus de nommer le crime, et par suite, un entretien des préjugés à son sujet, sur fond de désinformation.

Après quoi, vous niez qu’il y ait encore de gros effort à réaliser sur le plan de l’accueil des victimes dans les services de police. Pour appuyer votre position, vous expliquez :
« Je dois également rappeler de grands progrès ont déjà été réalisés sur le terrain, notamment grâce aux travailleurs sociaux et aux officiers de police judiciaire déployés dans les commissariats : les victimes étant davantage mises en confiance, leurs plaintes sont recueillies dans de meilleures conditions.  »
Si il y a effectivement eu une amélioration ces dernières années, elle n’empêche pas que les conditions d’accueil des victimes soient encore bien souvent déplorables, faute de moyens et de formation élémentaire des agents de police en la matière.
Les témoignages de dépôts de plainte ahurissants sont innombrables. Il suffit de s’intéresser à la question pour en prendre conscience. C’est notamment ce dont M-L Fort a pris connaissance à la lecture des 400 témoignages qui lui ont été adressés lors de sa mission parlementaire.


A Mme Filippetti

Vos objections reposent essentiellement sur ce que vous pensez être le ressenti des victimes et votre analyse rapide du tabou social. Rien de tangible et de concret là dedans, il ne s’agit que de vos propres croyances. Il est regrettable qu’en tant que député, vos réticences face à un projet de loi ne trouvent pas d’autres fondements.

Commentant l’analyse de Mme Fort, vous avancez : 
« Vous écrivez également, dans l’exposé des motifs, que l’inceste est un « déterminant majeur » des tentatives de suicide, de l’anorexie, des addictions aux stupéfiants et à l’alcool et de l’échec scolaire. Ce faisant, vous allez culpabiliser les victimes. Elles souffrent toutes, mais sans être nécessairement affligées par tous ces maux : comme l’a montré Boris Cyrulnik, il existe des phénomènes de "résilience". »
Alors parce que certaines victimes "arrivent" à faire en sorte que leurs souffrance soient plus discrètes, c’est à dire moins embarrassantes et moins coûteuses pour la société, il faudrait éviter de considérer les maux des autres ? Vous estimez que le fait de dire et prendre en compte la réalité (effectivement l’inceste est un déterminant majeur des symptômes cités) risque de culpabiliser les victimes que vous classez résilientes. Qu’en savez-vous ? Avez-vous seulement conscience que vous ne faites là que ressortir une des nombreuses injonctions au silence qui, au choix, enferment des milliers de victimes dans la censure de leurs souffrances, ou les incitent à courir après une "résilience" qui ne sera jamais qu’un déni de leur douleur alimenté par les attentes d’une société qui ne veut rien en savoir ?

Vous poursuivez :
« Vous écrivez par ailleurs que "le tabou sur l’inceste (interdit du dire) s’est insidieusement substitué au tabou de l’inceste (interdit du faire)". Or, on ne peut pas parler de substitution, car l’" interdit du faire" existe toujours : il demeure au fondement de nos sociétés.  »
Si cet interdit demeure toujours au fondement de nos sociétés, comment expliquez-vous que l’idée de l’inscrire tel quel dans nos textes de lois soulève de telles résistances ? Comment se fait-il que cet interdit fondamental soit si souvent transgressé, dans le silence aveugle d’une société qui se dit civilisée ?


A M. Raimbourg


Contrairement aux autres députés ayant émis des réserves sur cette proposition de loi, vos objections ont le mérite d’être concrètes.

Vous commencez par relever une prétendue incohérence dans la définition de l’âge de minorité :
« Je m’interroge en revanche sur le critère de minorité que vous retenez : vous considérez comme mineure une personne de moins de 18 ans, alors que la majorité sexuelle a été fixée à 15 ans. Il faudrait veiller à trouver une articulation entre ces différents critères. »
En tant que juriste, vous ne pouvez ignorer que le législateur estime déjà que pour les cas d’incestes, il est pertinent d’étendre la minorité sexuelle jusqu’à 18 ans.
En effet, le délit d’atteinte sexuelle défini par l’article 227-25 repose sur le critère de minorité sexuelle, puisque c’est l’âge du mineur qui est constitutif de l’infraction. Et le législateur élargit ce délit au cas des mineurs de moins dix huit ans, lorsque l’auteur est un "ascendant ou ayant autorité" (qualification derrière laquelle est à ce jour caché la réalité de l’inceste) (art 227-27) .
C’est d’ailleurs à ce délit que vous vous référez en affirmant que : « D’autre part, je rappelle qu’il existe - sauf erreur de ma part - une disposition pénale tendant à réprimer les relations sexuelles entre ascendants et descendants âgés de 15 à 18 ans, quand bien même ces relations seraient librement consenties.  »

Ce faisant, vous parlez d’incestes qui pourraient être librement consentis entre un mineur de moins de 18 ans et un de ses ascendants. 
Comme vous l’exprimez sans détours, les articles 227-25/27 ont beau se fonder sur une notion de majorité sexuelle qui prétend exclure un consentement libre et éclairé en deçà d’un certain âge, ils qualifient des actes qui auraient été commis sans aucune forme contrainte, ce qui postule la possibilité d’une forme de consentement de la part du mineur.
Sur le fond, c’est un des objets de la proposition de loi de Mme Fort que de mettre en terme à cette absurdité qui consiste à laisser inscrit dans le code pénal qu’un mineur puisse être tripoté par son parent, censé le protéger et l’éduquer et non en faire son jouet sexuel, sans que ce dernier exerce la moindre contrainte sur celui dont il profite. Ce point fut largement argumenté par Mme Fort, tant dans son rapport, que dans la proposition de lois et en introduction à la discussion à laquelle vous avez participé.
Vous trouvez normal que la loi dénie le fait qu’un parent incestueux agresse nécessairement le mineur dont il abuse ? A l’évidence oui, puisque qu’à vous lire, il semblerait que cela ne relève pas pour vous d’une aberration mais renvoie bien à une réalité...

A moins que vos réserves ne portent finalement que sur des considérations purement financières, puisque vous ajoutez ensuite :
« J’en viens à l’alinéa 11 de l’article 1er : « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, est un viol ». Votre intention est certainement de faire systématiquement juger les cas d’inceste par une cour d’assises. [...] Cet alinéa se justifie sans doute si l’on se place d’un point de vue politique et juridique, mais il est techniquement impossible : il n’y a que 3 000 décisions rendues chaque année par les cours d’assises, contre 10 000 affaires de viols recensées par la police. »
Remarquons en premier lieu que dans la proposition de loi initiale, il n’est pas question de faire systématiquement juger les cas d’inceste par une cour d’assises. L’article propose de considérer toute atteinte sexuelle incestueuse comme une agression et tout acte de pénétration incestueux comme un viol. Or les agressions sexuelles sont jugées en correctionnelle et non aux assises. Ici, votre argument est donc captieux puisqu’il se base sur une omission visant à déformer ce que vous cherchez à invalider.
Cela étant, il est vrai que beaucoup de viols incestueux ne sont pas jugés aux assises, étant soit considérés comme des atteintes sexuelles, soit déqualifiés en agressions sexuelles. Nul doute que le fait d’inscrire dans le code pénal que toute atteinte sexuelle incestueuse ne peut être qu’une agression ou un viol, - comme c’est effectivement le cas dans la réalité - aurait favorisé la prise de conscience de cette forme de violence, conduisant ainsi à davantage de jugements aux assises. 
C’est donc à cette levée de la dénégation des violences incestueuses que vous vous opposez ? Pour quelle raison ? Parce qu’elles sont si répandues que si l’on cesse d’étouffer cette réalité, «  on ne va pas s’en sortir » ?
Si c’est le montant des dépenses publiques qui vous effraie, la lecture du premier volet du rapport de Mme Fort sur le coût social actuel de l’inceste devrait vous amener à réfléchir deux fois à la question. L’inceste coûte déjà un bras à la société. Simplement, comme il n’est pas nommé, il est plus aisé de se voiler la face sur cet état de fait. 
Comment peut-on penser que c’est en continuant d’ignorer un problème que les dépenses qu’il occasionne seront réduites ?

***

Face à des argumentations si creuses, ineptes ou fallacieuses, il est difficile de ne pas se demander si vous ne vous êtes pas contenté de formuler des objections de principe eu égard à votre appartenance politique et à celle de M-L Fort.
Sans doute est-ce cela qu’il faut comprendre en lisant Mme Pau-Langevin se féliciter comme suit : « J’ai cru comprendre que vous vous engagiez dans la seconde direction, ce qui me réjouit, car cela signifie que l’UMP reconnaît enfin le concubinage et le PACS.  »
Face à un tel fléau, on aurait pu s’attendre à un peu plus de discernement, plutôt qu’à un regrettable réflexe politique consistant à s’opposer a priori à tout ce qui émane du parti adverse.
 

 


Nos députés vont donc devoir plancher dur maintenant ! Le vote de la proposition de loi modifiée n’étant pas remis à plus tard, ils n’ont plus que jusqu’à la fin du mois pour se documenter et réfléchir plus avant sur ce sujet si nouveau pour eux. Faute de quoi, certains risqueraient de devoir encore s’abstenir – à regret – en se déclarant inaptes à juger de la pertinence d’une proposition de loi... dont ils viennent de vider la substance (sans savoir ?).



17 réactions


  • Naja Naja 16 avril 2009 14:38

    ERRATUM
    Le lien vers le second texte ne pointe pas à la bonne adresse.
    L’url correcte est : http://www.enfancedanger.com/index.php?type=special&area=1&p=articles&id=53

    @ Gorio,
    Je prendrai plus tard le temps de répondre en détail à votre commentaire. Je ne vous trouve pas à côté de la plaque, vous faites bien de donner votre avis. Merci.


  • jacques jacques 16 avril 2009 15:41

    Je ne comprend pas le pourquoi de cette loi,une relation sexuelle sous contrainte physique ou psychologique par un ascendant ayant autorité est déjà un viol,qu’amènerait une nouvelle qualification d’inceste ?L’enfant ce qu’il a subit c’est viol  !


    • mouton-garou mouton-garou 16 avril 2009 16:10

      Tout d’abord très bon article avec une argumentation tellement solide que cela en est rare. Bravo continuez le combat et tenez nous au courant des réponses que les députés vous feront.

      @ jacques :
      Je comprends votre raisonnement. Oui l’inceste est un viol, mais c’est un viol plus grave que les autres, à mon avis, car les victimes sont des enfants. De plus, comme en général le violeur est un proche ayant autorité il se peut que les enfants ne considèrent pas celà comme une atteinte à leur personne.

      A la lecture de cet article je suis quand même étonné que nul part dans le code pénal, on ait qualifié ce type de « viol particulier » comme un « viol à caractère incestueux ».


    • aude guignard 16 avril 2009 16:20

      un viol sur un enfant est plus grave que sur un adulte, car l’enfant est en train de construire sa personnalité, il va donc se construire vrillé par ce traumatisme. je pense que nous tous deux d’accord là dessus. la spécificité du viol incestueux, que vous n’avez certainement pas subi, vu votre message, est qu’il est subi de la part des personnes qui sont censées protéger l’enfant, et que donc l’enfant est détruit de l’intérieur par sa propre famille. voyez bien que si un enfant se fait violer par un vendeur de pizza (pardon pour les vendeurs de pizza, c’est juste un exemple), toute sa famille va plaindre l’ enfant , l’entourer, et se retourner vers la justice pour faire punir le violeur. mais si c’est un viol incestueux, par le père ou le beau père par exemple, qui va plaindre l’enfant, l’entourer, le soigner, et se retourner contre la justice pour faire punir le violeur ? (deux tiers des mères ne font rien si elles apprennent que leur conjoint a violé leur enfant, c’est un fait reconnu) : vous voyez maintenant la différence ! il faut ajouter à cela qu’avec beaucoup de régularité, dans le cas d’un viol incestueux, c’est toute la famille qui se retourne CONTRE LA VICTIME et non contre l’agresseur, qui se trouve activement protégé par la majorité des membres de la famille. en effet c’est tout le système familial qui est dysfonctionnel. Oui vous avez bien lu, c’est la victime qui se fait rejeter et non l’agresseur, dans la plupart des cas d’inceste. voilà encore une autre raison pourquoi une qualification d’inceste est indispensable : c’est que cette notion recouvre l’impossibilité pour l’enfant de donner son consentement éclairé à avoir des relations sexuelles avec son parent. en ce moment ce n’est ps le cas dans le code pénal actuel qui exige que le non consentement de l’enfant soit prouvé pour que les faits soient qualifiés de viol. Or comment un enfant peut il trouver les forces de résister devant l’adulte, qui souvent est d’ailleurs séducteur et profite du fait que l’enfant ne conçoit tout simplement pas ce que l’adulte veut lui faire , ni pourquoi. dans ces familles dysfonctionnelles, l’enfant est conditionné à tout souffrir, souvent les coups avant les viols d’ailleurs.ce sont des systèmes maltraitants et terrifiants qui paralysent l’enfant. il faut aussi savoir que 45% des agressions sexuelles sur mineurs ont lieu avant l’âge de 9 ans. rappelez vous ce que vous étiez avant 9 ans ! les viols incestueux sont parfois amenés très insidieusement et l’enfant ne s’oppose pas forcément.il faut cependant que le code pénal accepte de reconnaitre ce fait : pour l’instant il ne le reconnait puisqu’il n’y a viol que s’il y a contrainte, surprise, violence. donc les viols sont correctionnalisés en atteinte sexuelle, ou agression sexuelles, ce qui est totalement illégal mais pratiqué à tour de bras par les tribunaux surchargés et cherchant à punir quand me^me un peu le coupable, qui ne peut être reconnu coupable de viol sinon. il faut donc inscrire l’inceste dans el code pénal avec bien entendu la mention, que la nature des liens familiaux fait qu’il n’y a pas à prouver le non consentement de l’enfant pour pouvoir qualifier les faits de viols. je vous rappelle que les peines pour les coupables sont bien plus légères en correctionnelle qu’aux assises, donc la majorité des violeurs s’en tirent à bon compte, puisque le viol est déqualifié en agression ou atteinte sexuelle.


    • aude guignard 16 avril 2009 16:44

      1/ Dans les cas de viols extra familiaux, l’enfant victime est plaint, soigné, entouré, toute la famille se retourne contre le violeur, va en justice. en cas d’inceste, les personnes censées protéger l’enfant sont les agresseurs : l’enfant n’est ni secouru ni plaint, et ce n’est pas l’agresseur qui va aller en justice pour poser plainte. en fait dans les cas d’inceste c’est la victime qui est rejetée et pas l’agresseur, et la famille fait taire l’enfant dans la plupart des cas. Dans les cas d’inceste, c’est le plus souvent toute la famille qui est déficiente, dysfonctionnelle. toutes ces raisons font qu’un viol incestueux est encore plus difficile à gérer pour la victime qu’un viol commis par une personne extérieure à la famille. 2/ au niveau pénal, le viol se définit comme une agression sexuelle avec pénétration commise par violence, contrainte, menace ou surprise. Or quand c’est un parent , il n’y a le plus souvent ni violence, ni contrainte, ni menace ni surprise : les incestes durent des années contrairement aux viols extra familiaux, donc pas de surprise, les enfants ne peuvent s’opposer à leur parent agresseur en raison du lien familial, donc souvent aucune violence menace ni contrainte apparentes. Les juges ne peuvent donc qualifier les faits en viols ! la nouvelle qualification de viol incestueux impliquerait que les juges n’ont pas à prouver le non consentement de l’enfant il faut donc spécifiquement inscrire l’inceste dans le code pénal, pour que les viols incestueux cessent d’être déqualifiés en agression ou atteinte sexuelle, ce qui est une pratique complètement illégale mais très fréquente actuellement. cette pratique permet en plus aux agresseurs de s’en tirer à très bon compte, car les peines sont plus légères en correctionnelle.

      voici quelques unes des spécificités des viols incestueux par rapport au viol non incestueux, qui font que l’insertion de l’inceste dans le code pénal sera une bénédiction pour les victimes.


    • Laurence 16 avril 2009 17:55

      Bonjour Jacques,
      Je vais être aussi brève dans ma réponse que vous ne l’êtes dans votre interrogation.
      On ne parle pas ici d’amener une nouvelle qualification de l’inceste, on parle de qualifier l’inceste qui, pour le moment, est totalement absent du code pénal.
      Etonnant non ?

      Si ma réponse vous laisse insatisfait, je vous répondrai plus longuement.

      Laurence auteur de l’indignation citoyenne


    • Dan 16 avril 2009 18:06

      Jacques

      Je vais illustrer tres simplement ma reponse : Etre sodomisé par son pere tous les soirs et etre sodomisé de maniere « ponctuelle » par un individu ayant autorite (prof ; cure, ect. educateur ) ne sont pas exactement la meme chose.

      Aussi grave l’un que l’autre ces crimes doivent etre désignés différemment afin de ne pas les assimiler .


    • Naja Naja 16 avril 2009 19:39

      @ Jacques,

      Pour le moment, je n’ai presque rien à ajouter à ce qui a été dit. Si ce n’est vous inviter à vous reporter aux trois points développés dans la réponse à M. Blisko. Ainsi qu’aux arguments développés dans un précédent débat sur le sujet, par moi-même et par d’autres : http://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/le-crime-d-inceste-desormais-au-50776

      Pour la notion de « surprise » et la prise en compte aléatoire de la contrainte dans l’inceste , voir aussi les précisions apportées dans le rapport de la commission dans la partie « exposé des motifs » par Mme Fort.
      http://www.assemblee-nationale.fr/13/rapports/r1601.asp#P157_20188
      (Je vois que j’ai aussi fait une erreur pour ce lien dans le texte de l’article, désolée).

      @ Mouton-garou,

      Compliments transmis aux auteurs !
      Pour ce qui est du suivi, sauf mention contraire de la part des députés, nous tâcherons de publier les éventuelles réponses reçues sur le site http://www.enfancedanger.com


    • Mycroft 23 avril 2009 18:16

      Je croyais que de toutes façon, la pédophilie était un crime, le détournement de mineur un délie, donc, même s’il n’y a pas légalement viol, il y a quand même crime et donc sanction lourde, non ?

      De plus, si l’enfant subit un traumatisme, c’est à priori qu’il n’est pas acceptant, donc qu’il y a contrainte, du coup, comme un inceste reconnues peut il être qualifié autrement qu’en viol ? Des test psychologique sont effectués de toutes façon, dans ces cas là, non ?

      De plus, le plus gros problème de ce crime, c’est qu’il est dur à détecter, ce n’est pas via une loi qu’un tel problème va se résoudre, même si le symbole peut réconforter les victimes (ce qui n’est pas normalement le but d’une loi cependant).


    • Naja Naja 24 avril 2009 13:43

      Les commentaires émis ici répondent largement à vos interrogations. Je vous invite à les lire...


  • Fergus fergus 16 avril 2009 16:07

    Au delà de la définition juridique précise de l’inceste et des conditions dans lesquelles cet acte doit être réprimé se pose (à moins que cela m’ait échappé) une question incidente : le placement des enfants victimes dans les familles d’accueil gérées par la Ddass. Il faut savoir à cet égard que le pourcentage des enfants placés pour ce motif est très important (je ne le connais toutefois pas). Suffisamment pour que ce problème ait été déjà porté à la connaissance des élus par le biais des textes législatifs concernant la famille et l’éducation. Je m’étonne donc que nos élus soient à ce point ignares sur le sujet, fût-il tencore abou pour beaucoup de monde. Il est vrai qu’ils semblent l’être sur beaucoup de sujets !
    Merci Naja pour cet article (peut-être un peu trop long).


    • Laurence 16 avril 2009 18:03

      Bonjour Fergus,
      Ne vous étonnez pas que nos élus soient ignares car ils ne le sont point, contrairement aux apparences.
      En 2005, Mr Raffarin demandait à Mr Estrosi d’établir un rapport visant à la pénalisation de l’inceste (je reprends les termes actuels). Ce rapport était remarquable sur bien des plans. Malheureusement, il n’a été qu’enterré.
      La plupart de nos élus étaient déjà en fonction ! L’affaire ne peut être nouvelle. Mais vaut-il mieux passer pour un ignare que pour un non-convaincu ou qu’un dilettante (je vous laisse trouver les termes qui vous sembleront appropriés). La question reste ouverte.


  • Fergus fergus 16 avril 2009 16:09

    Lire « encore tabou » et non « tencore abou ». Promis-juré, je n’avais pourtant pas ouvert la bouteille de chouchen !


    • Nicole 17 avril 2009 01:08

      Il y a l’inceste, et il y a les séquelles qu’il laisse qui peuvent être terribles. En ce sens, si la pénalisation ne mène pas directement à une réduction immédiate, elle peut être infiniment utile quant à la façon pour la victime de réussir à se structurer ensuite. Là, on est dans un déni dans lequel se complaisent d’ailleurs quantité d’élus, ce qui fait que les victimes en difficulté sociale se trouvent face à un dilemne : je dis pour qu’il comprenne pourquoi je m’en sors pas et m’aide à trouver l’aide adéquate ou je me tais ? De ce que je sais, dire ne sert à rien. Ce serait plutôt limite humiliant parce que non entendu au niveau de ces séquelles et elles sont nombreuses. Bien des victimes d’incestes ont des parcours chaotiques à tous les points de vue, et le vécu social de cette réalité peut être difficile.

      Par ailleurs quand il y a besoin de soins, les trouver n’est pas si simple. Je peux vous dire pour avoir été stagiaire psy en hôpital psy que la compassion n’est pas la qualité la plus répandue, et la tendance à labelliser très protectrice.

      L’inceste a un coût énorme à tous les niveaux (psychique, affectif, social, professionnel, de santé publique...) et parfois je me demande si on pose les bonnes questions. N’importe qui a fait partie d’un réseau de soutien sait que tous les milieux sont touchés. Par ailleurs, il y a le témoignage des plus intéressants « Fils de Juge » des enfants Roche.

      L’élu qui légifère sur l’inceste, s’il est concerné par lui, ce qui ne peut s’exclure par principe, se met en situation d’être jugé.

      Parfois j’en arrive à la conclusion qu’il faudrait avoir les moyens de faire pression sur nos élus quand ils ne font pas leur boulot, eux qui ont tout fait pour avoir nos voix.


    • Dan 17 avril 2009 09:59

      Une chose est certaine dans tous les cas, c’  est que plus nous parlerons  de l’  inceste, plus celui-ci sera  reconnu en tant que tel. Et c’est précisément ce que nous réclamons aujourd’hui car il est important pour la reconstruction des victimes et leur prise en charge  que ce type de  crime soit nommé spécifiquement. La prise en charge de la société ne nous appartient pas , nous avons assez à faire avec nous mêmes.


    • Laurence 18 avril 2009 20:47

      Bonsoir chanteclerc,

      J’aimerais retourner votre argumentation.
      Si l’inceste perdure, n’est-ce pas également parce que le terme est tabou et ne figure nullement dans le code pénal ?
      Pour réprimer, il convient de définir précisément au préalable.
      Sans définition précise, bien des infractions échappent au droit.


  • Lisa SION 2 Lisa SION 2 19 avril 2009 10:55

    @ Naja,

    votre article n’aura pas le retentissement voulu parce qu’il est trop long. Vous auriez du ajouter les alinéas et développements dans les commentaires du fil. C’est dommage parce qu’il est essentiel.

    Je me suis permis de le relayer dans le dernier lien de mon article paru le lendemain : http://www.agoravox.fr/culture-loisirs/le-coin-secret-d-agoravox/article/un-tapis-rouge-pour-la-mafia-du-54674 , paru dans une rubrique confidentielle, mais largement relayé sur google.

    La protection de nos enfants passe avant la libération du sexe légalisé. merci à vous. L.S.


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