mardi 9 avril 2013 - par Denis Thomas

ANI : La mobilisation rappelle la Gauche à sa majorité parlementaire. Reportage

Les syndicats non signataires de l’accord ANI (CGT, FO, FSU et Solidaires) ont tenté mardi un baroud d’honneur pluvieux qui s’est traduit par une manifestation se terminant devant l’Assemblée nationale qui devait examiner la loi dite de "Sécurisation de l'emploi". Histoire de rappeler aux députés que c’est bien une majorité de gauche qui a été élue en juin dernier.

Il n’y a pas plus grand sourd que celui qui ne veut entendre. Malgré les 5.625 amendements déposés, les députés ont à peine touché à l’Accord national interprofessionnel (ANI). La loi est donc sur les rails malgré une forte mobilisation.

Cette dernière réforme strictement une partie importante du code du Travail. Vous savez ce texte qui, selon le mot de Laurence Parisot (Medef pour quelques mois encore….), « là où il commence, s’arrête la liberté de penser ».

Cette « liberté » se traduit donc par la possibilité pour l’employeur de baisser les salaires, augmenter le temps de travail et de déplacer ses effectifs en cas de repli de l’activité. D'assouplir les procédures de licenciements, affirment les manifestants. Une porte ouverte à tout. Ou presque.

« Le désaveu populaire est considérable » , constate Pierre Laurent secrétaire national du Parti communiste français, présent au début du cortège.

« Si le débat à lieu au Sénat (NDA : "navette" après son passage à l’Assemblée nationale) c’est bien parce que la droite et la ‘gauche’ auront voté « l’ANI, poursuit-il. CQFD.

Les banderoles parisiennes demandaient : "Mesdames Messieurs les parlementaires, ne votez pas la mort du code du Travail" ou encore soulignaient que "Le Travail est un droit pas un marchandage".

Sur le papier, les initiateurs de l’accord - dont la liste est confuse - équipe gouvernementale, Medef, et les syndicats signataires (CFDT, CFTC et CFE-CGC) ont, évidemment, mis en avant une avancée sociale.

Notamment, l’article 13 de la loi examinée ce mardi est censé « encadrer les licenciements collectifs ». En effet, ces derniers devraient faire désormais l’objet, ou bien d’un accord collectif majoritaire, ou bien d’un plan unilatéral de l’employeur qui devra alors recevoir l’accord de la direction du Travail.

Le hic est que l’inspecteur du Travail (et ses chefs….) devra rendre un avis ultra rapide. En cas d’accord négocié, le délai – en plein accord avec le syndicat patronal – avait été fixé initialement à … huit jours. Dans le cas où le plan de licenciements est imposé par l’employeur, le délai d’examen par l’administration demeure à 21 jours. Infiniment trop court, jugent de très nombreux inspecteurs du Travail.

D’autant qu’avec la RGPP (Révision générale des politiques publiques) qui prévoyait sous Sarko (et visiblement également sous administration socialiste, soucieuse de tenir ses engagement en matière de déficits publics) le non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, nos inspecteurs du Travail sont débordés.

Il suffit également de considérer le nombre croissant de plans sociaux pour se rendre compte que le ministère du Travail sera vite dépassé par les évènements et laissera passer des catastrophes sociales.

Globalement, les aménagements consentis par les députés par rapport au texte arrêté le 11 janvier dernier l’ont été a minima. En cas de licenciement pour « refus de mobilité » celui-ci sera reconnu comme « économique » et ouvre droit à l’indemnisation et aux mesures de reclassement.

Par ailleurs, les accords dits de « maintien de l’emploi » conclus dans le cadre de l’ANI pourront bien s’étendre sur deux ans (pendant lesquels l’employeur pourra baisser salaires et muter ses salariés), l’amendement Front de Gauche visant à réduire cette période à un an seulement a été rejeté.

Toutefois un amendement PS doit assurer que « les dirigeants salariés, les mandataires sociaux et les actionnaires de l’entreprise poursuivent des efforts proportionnés à ceux demandés aux salariés ».

Mais qui donc décidera du niveau du curseur des peines demandées aux uns et aux autres ?



14 réactions


  • Xtf17 Xtf17 9 avril 2013 19:08

    Dites-vous aussi que toute la base à la CFDT n’est pas forcément en accord avec la signature de la Confédération. Ce qui est régulièrement générateur de grandes tensions internes, et de départs massifs réguliers. A suivre : la position prochaine de la CFDT sur la politique familiale... Ce sera déterminant dans la « balance ».


    • Le421... Refuznik !! Le421 9 avril 2013 19:22

      Quand l’esclavage sera rétabli, la CFDT négociera le poids des chaînes...
      Ce n’est pas de moi.


    • Xtf17 Xtf17 9 avril 2013 20:20

      Merci, je ne connaissais pas cette citation. Je ne souhaite pas qu’elle soit juste, mais hélas je crains de le craindre...


    • mario mario 9 avril 2013 23:33

      @Quand l’esclavage sera rétabli, la CFDT négociera le poids des chaînes...

      le paon tend la main a la cfdt, non il n’y a pas de rupture....il faut l’unité syndicale...( au nom de quoi ? la position commune ? du CES ? )

      et bientôt un débat a nantes entre le paon et berger....

      il faut arrêter les conneries, parce que débattre avec un encu... qui fait distribuer des tracts pendant la manif d’opposition a l’ani , sur lequel il écrit noir sur blanc en forme de questionnaire les bienfaits de cette future loi ...

      la meilleure chose que le paon peut faire a berger des le début , un crachat a la gueule !

      bon ok, je vais me faire insulter, je m"en tape.

       

       

       


    • kemilein 10 avril 2013 06:07

      après le travail gratuit, le travail forcé

      vous en faites pas on va y arriver, et estimez vous heureux d’en avoir encore (du travail), après tout on pourrait vous condamner a l’oisiveté éternelle et aux loisirs perpétuels.
      bah ça m’écoeur, tant de temps libre pour s’adonner a vivre une vie qu’on a pas choisie, en profiter, en jouir. Non il faut travailler, peiner, souffrir, mourir, car comme le disaient ces bon allemands Arbeit Macht Frei (ou : le Travail rend Libre, joli sur le fronton des Camps non ?).

      mouton mon bon mouton, laisse toi donc tondre, tu as tant besoin du pâtre car sans lui tu serais bien incapable de paître. (Dixit : Voltaire après sa mort)
      ah le cynisme...


    • Hermes Hermes 10 avril 2013 09:55

      Travail gratuit, puis travail forcé.... les mêmes orientations qu’avant la deuxième guerre mondiale en Allemagne.

      Si on pouvait appuyer sur le bouton « Reset » en faisant l’économie d’une guerre ! Mais les tensions globales et la peur-possession environnante montent inexorablement.

      La peur maintient le sommeil qui empêche de prendre conscience de ce mécanisme. Elle est diffuse peu conscience et se colle sur les épouvantails qu’agitent les pouvoirs pour se maintenir en place.

      Le bonheur n’attend pas.


  • Le421... Refuznik !! Le421 9 avril 2013 19:21

    C’est un petit peu plus important que le mariage homo (qui est devenu, entre parenthèses, le mariage « gay ») et pourtant, pas de Frigide Barjot pour manifester.
    C’est tellement scélérat comme accord, cela remets en question des droits du travail jusque là inaliénables, que c’est une horreur de passer cela sous un gouvernement socialiste.
    Même les députés de droite on dénoncé une remise en question du statut des CDI jusque là inédite. Certains ont refusé de voter la loi.
    Honte à ces pseudo politiques de gauche que sont les socialistes de 2013 !!


    • kemilein 10 avril 2013 06:10

      le travail est a tuer son droit avec.
      La Grande Releve


    • heliogabale heliogabale 11 avril 2013 14:55

      Parmi ceux qui manifestent contre le mariage homosexuel et qui invoquent le respect de la « famille traditionnelle », il n’y a personne (ou presque) pour s’offusquer de ce texte de loi qui permet aux employeurs de contraindre les salariés à changer de région sous peine de licenciement personnel... cette loi est de nature à fragiliser les familles et là, on n’entend plus personne !


  • leypanou 9 avril 2013 19:32

    " « les dirigeants salariés, les mandataires sociaux et les actionnaires de l’entreprise poursuivent des efforts proportionnés à ceux demandés aux salariés » " : quand il s’agit d’enfumer, le PS et ses acolytes n’ont vraiment pas leur pareil.

    Il est vrai aussi que la langue de bois et les phrases qui ne veulent pas dire grand-chose ne sont le monopole de personne dans le monde politique.

    Le monde tel que Pierre Lévy le décrit dans son roman (le fabuleux destin de l’Europe en l’an est 2022) en train de se mettre en place, doucement et sûrement. Bolkestein n’a été qu’un précurseur en fait : il a été en avance sur son temps.


  • COLLIN 9 avril 2013 23:16

    J’ai entendu dire,de-ci,de-là,que le CDI du gouvernement « socialiste » pourrait être remis en cause....

    Quelqu’un en aurait il la confirmation ?


  • Jean-Louis CHARPAL 10 avril 2013 00:50

    Dame Thatcher doit rigoler dans sa tombe.

    Je n’ose dire pour la première fois de sa vie ...


  • thepouet 10 avril 2013 03:03

    Pourquoi interrompre un si beau calendrier ?
    Après avoir verrouillé toutes les cadenas au niveau financier ( TSCG, fausse séparation bancaire avec Moscovici, régle d’or), avancé dans leur agenda d’un grand marché transatlantique, que le saccage continue ! Après tout.
    Sur un bon vieux fond de chômage massif, easy le chantage !
    Si encore leur paradigme guidant leur stratégie économique était « l’amélioration, au prix de VOS concessions à vous, du bien commun, d’un mieux être social ou de n’importe quoi dans cet esprit. »
    Non, leur paradigme - apparent - c’est pognon pognon, et point barre !
    règne du court terme etc etc
    vision : zéro !
    Paradigme apparent, car la réalité est peut être pire :
    Sous couvert de mondialisation, on passe 20 à 30 ans à démanteler, détruire un appareil industriel, aux USA et en Europe, et ... ben on obtient ce qu’on cherchait : des gens, des nations, des entreprises privés d’une façon ou d’une autre d’une souveraineté, d’une autonomie, d’une capacité d’agir. Un assujetissement insidieux à quelque chose qui refuse de dire son nom, cet ennemi sans visage mais qui gouverne ( aaaaaah bon ?, pov con ! ) et, effectivement, dans ce contexte, je crains que bien des batailles, même si elles s’en défendent, se résument à négocier le poids des chaines.

    Et donc, oui, quelque part, y compris aussi en bataillant pour refuser l’ ANI ( ce qui évidemment ne signifie aucunement qu’il faut l’accepter )
    Non, ce que je veux suggérer, c’est que ce qui est véritablement scandaleux, c’est de nous être laissé hypothéqué notre avenir à cause de gigantesques enfumages, de fausses batailles, de mascarades politiques, de frauduleuses conceptions économiques monétaristes qui n’ont, certes, pas trouvé très malin en face d’eux, mais qui ont réussit à pénétrer si loin dans les cerveau qu’un « uninstall monetarism » est devenu inconcevable. C’est d’avoir laissé un monde, bientôt 70 ans après le CNR, où il n’est pas indécent de se voir proposer à l’assemblée un ANI, et tant d’autres choses, mais qui ne peuvent arriver que parce qu’on ne s’est jamais intéressé, avec les bons yeux-paradigmes, à ce qui favorise un terreau si merdique.

    Une solution Rooseveltienne à la crise, mais c’est juste un détail, rendrait grotesque l’ANI et autres tentatives d’ « avancées » en tout genre.
    Par exemple, le chantage dans la guéguerre sur les « si tu veux me virer tu dois respecter tel protocole » serait de fait désamorcé dans un monde de plein emploi. Non ?
    La chaine autour du cou, même dodue, s’avérerait avoir la solidité d’une plume de pissenlit

    En effet, Glass steagall ( Cf Roosevelt 1933 ) et crédit productif, changent toutes les données :
    D’abord la restauration d’un état d’esprit, d’un paradigme physico-économique donnant la priorité à l’humain avant la puissance du pognon, - pognon de faux monnayeurs, qui plus est ! - par une authentique séparation bancaire
    Puis, sur ce terrain assaini un projet commun soutenu par le crédit productif ( la réappropriation de la monnaie au service d’un vouloir vivre ensemble, d’un mieux être pour la génération suivante )
    ben, vous voyez une autre issue ?
    Car alors, un tas de problèmes, et pas seulement l’ ANI, un tas de chantages, d’arguments pessimistes, malthusiens, de fraudes financières se tariraient d’eux même, nous amenant alors à oser envisager avec autant de sérénité que d’intensité et de sérieux la question - grisante - de qu’est-ce qui nous permettra, ou cessera d’empêcher, de construire un monde meilleur« .

    J’admets : ce n’est pas très »syndicaliste de base« , la façon dont je pose le truc !
    Et alors ?

    Là, maintenant, et sur plusieurs plans, la bête progresse.
    Bien des chaines ont été verrouillées.
    On le voit ou non : elles n’ont pas vraiment encore servi, et leur aspect inextensible ne s’est pas encore manifesté. 
     »Ils« sont prêts ...
    Brrrr
    Comment il disait je ne sait plus qui ?
     » Là où croît le péril, croît ce qui sauve ! "
    Tout ce truc là, il va falloir le prendre d’en haut non ?


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