mercredi 11 mai 2022 - par Laurent Herblay

Inflation, salaires, pouvoir d’achat : l’horreur oligarchiste

Dans la bulle de certains, le pouvoir d’achat progresserait. Une simple comparaison du revenu moyen et de l’inflation moyenne pourrait peut-être l’indiquer. Mais la moyenne peut être extraordinairement trompeuse. Nous le savions sur les revenus avec l’effarant cas étatsunien, mais, dans une étude de référence, l’OFCE montre que la moyenne est mauvaise conseillère sur l’inflation également. Pas étonnant qu’il y ait un grand écart entre des moyennes trop grossières et le sentiment des Français.

Inflation des salaires en haut, et des prix, en bas

C’est une étude dont il faudra se souvenir. Bien sûr, la période amplifie sans doute les écarts, mais elle n’en est pas moins extraordinairement révélatrice. En février, l’inflation moyenne mesurée par l’INSEE atteignait 3,6%. L’INSEE communique déjà sur un différentiel d’inflation en fonction des revenus, et pointait qu’en février, pour le premier quintile (les 20% qui gagnent le moins), l’inflation était de 3,9%. Mais comme toujours, regarder au quintile manque de précision. Cela est d’autant plus vrai que tous les cinq ans, l’INSEE fait une étude détaillant le budget de 29 000 ménages. C’est en croisant ces données que l’OFCE a pu aller plus loin, en déterminant des taux d’inflation individuels, fonction de la répartition réelle de la consommation. Les chiffres sont extrêmement révélateurs, et frappants, par leurs écarts.

Même au niveau du décile, les écarts sont énormes puisque l’inflation n’est que de 2,3% pour les moins touchés, et monte à 6,3% pour les 10% les plus touchés par l’inflation des prix de l’énergie  ! Pour les 5% les plus touchés, on atteint 7,3%, et même 9,8% pour les 1% les plus touchés ! Bref, l’inflation moyenne n’est qu’un indicateur assez imparfait pour représenter la réalité. Quand le prix de biens ou services qui pèsent nettement plus lourds dans le panier des classes populaires s’envole, l’inflation moyenne est une indication très imparfaite. Mais plus globalement, cela amène à se poser sérieusement la question de la mesure de l’évolution du pouvoir d’achat, car une moyenne imparfaite pour l’évolution des salaires et une moyenne tout aussi imparfaite de l’inflation transforme la moyenne en chiffre purement théorique, qui peut être très éloigné de la réalité de la grande majorité des Français.

On rappelera ici le cas de l’évolution des salaires aux Etats-Unis, sur quatre décennies, ou même trois ans seulement, où la moyenne est bien mauvaise conseillère. Emmanuel Saez avait montré que de 1973 à 2012, si les revenus moyens avaient progressé de 17%, pour 90% de la population, ils avaient baissé de 13%, du fait de l’envolée des revenus des plus riches, les 1% triplant quasiment les leurs  ! Idem de 2009 à 2012, où plus de 90% de la hausse des revenus était allée aux 1% les mieux payés. Le problème est que bien des dirigeants ou des analystes à courte vue, s’arrêtent à ces moyennes imparfaites, faisant comme si une moyenne était un chiffre qui s’appliquait à tous uniformément. Pourtant, si les salaires progressent plus en haut et moins en bas, et que l’inverse est vrai pour l’inflation, alors les statistiques moyennes surévaluent très fortement le pouvoir d’achat des classes populaires.

L’actualité récente nous a justement montré que les salaires du haut de la pyramide sociale n’évoluent pas vraiment à la même vitesse que la moyenne. D’une part, les salaires des patrons du CAC40 se sont envolés, à 8,7 millions d’euros en moyenne en 2021, en hausse de 60% sur deux ans. On peut également rappeler que leur rémunération atteignait 4,2 millions d’euros en 2014, et qu’elle a donc plus que doubler en seulement sept ans… On peut également penser à la polémique sur le salaire du patron de Stellantis, Carlos Tavares, à 19 millions, auquel une majorité d’actionnaires s’est opposée, ce qui n’aura aucune influence puisque ce vote n’est que consultatif… Il fait mieux que Carlos Ghosn et rejoint la moyenne des patrons des grandes entreprises étatsuniennes, même s’il démeure un peu en-dessous de certains de ses homologues. Mais jusqu’où les plus hauts salaires pourraient bien aller  ?

Finalement, ils sont le reflet de cette époque fondamentalement injuste, qui ne cesse d’accroître le fossé entre les hommes. Qu’il est loin le capitalisme des Trente Glorieuses, où un patron ne gagnait pas plus que 30 ou 40 fois le salaire minimum ! Aujourd’hui, c’est plus de 400 fois le salaire minimum en France  ! Et aux Etats-Unis, toujours en pointe pour la montée des inégalités, nous dépassons le cap des 1000 !



6 réactions


  • Olivier Perriet Olivier Perriet 11 mai 2022 16:36

    Eh oui, il est toujours bon de rappeler qu’il vaut mieux être riche et bien portant que pauvre et malade.

    J’avais lu aussi que Stellantis avait offert, en même temps qu’un prime faramineuse à son patron, des primes de plusieurs milliers d’euros à ses salariés.

    Un commentaire ? Une analyse ?


  • I.A. 11 mai 2022 16:38

    Proverbe du jour :

    Lorsque, par tradition simplifiée autant que simpliste, le salaire se voit corrélé à des adjectifs tels que « qualité », « génie » ou « talent », alors vous pouvez être sûr que tous les idiots de la terre voudront non seulement gagner beaucoup plus que les autres, mais encore gagner toujours plus...



  • zygzornifle zygzornifle 12 mai 2022 07:38

    Macron est bien content de cette situation, le mougeon ne vas plus bramer dans le rue .....


  • Spartacus Lequidam Spartacus Lequidam 12 mai 2022 11:25

    «  Nous le savions sur les revenus avec l’effarant cas étatsunien,  »

    La niaiserie des chiffres de l’inégalité et des sources des gauchistes et de l’endoctrinement en France est affligeant.

    En 2022 l’auteur, comme tous les gauchistes et une majorité de Français croient que l’inégalité se compare d’un pays a un autre.

    Que c’est con !

    Le pays le plus inégalitaire au monde, c’est Monaco. 4800€ le seul de pauvreté du revenu médian.

    Quelle horreur, 52% des monégasques sont pauvres selon les gauchistes et souverainistes.  smiley

    Si on faisait un pays avec les 70 millions d’habitants avec les 20% des plus pauvres Américains, les revenus des habitants de ce pays seraient 30% plus importants que la moyenne des habitants Français.

    Mais va expliquer ça à des gauchistes et souverainistes....

    Apprendre comment on mesure la pauvreté pour les nuls :

    https://www.justfacts.com/income_wealth_poverty


  • Emohtaryp Emohtaryp 12 mai 2022 14:23

    S’il vous plait monsieur Herblay, enlevez le portrait de Chevénement sur votre avatar, en soutenant Macroth, il révèle être un véritable traître abject au pays....


  • tashrin 12 mai 2022 15:47

    Sans compter que le logement, principal poste budgetaire, n’est que partiellement intégré dans les calculs de l’inflation alors même que les prix ont été multipliés lors des 20 dernieres années. Et que ca impacte plus les faibles revenus que les gros


Réagir