lundi 12 avril 2010 - par Michel Santi

Les leçons du Japon

Les économies dites "intégrées" porteront encore longtemps les stigmates de la récession des années 2008 et 2009. Il est cependant un pays - le Japon - qui, se débattant certes depuis une vingtaine d’années contre une insidieuse spirale déflationniste ayant grippé l’ensemble de sa machine économique, serait susceptible d’émerger en premier pour avoir expérimenté quasiment toutes les recettes afin de se sortir de son marasme.

En fait, le pays qui renouera avec une croissance saine et durable sera aussi celui qui aura lutté avec succès contre ses excédents de production.

Les périodes d’euphorie financière et de formation de bulles étant toujours accompagnées de fièvres dépensières de consommateurs gonflés à bloc par une illusion de richesse, elles sont également marquées par des investissements massifs de la part d’entreprises dont le souci est de répondre à une demande supposée s’accroître. Pourtant, les multiples implosions passées des bulles spéculatives ayant fatalement décimé la consommation se sont naturellement traduites par un décalage criant entre un appareil de production démesuré par rapport à une demande anémique.

Par manque de courage politique ou tout simplement faute de vision à long terme, la quasi totalité des économies modernes ont tenté de résoudre cette problématique en faisant appel à des artifices de politique monétaire combinant certaines mesures fiscales censés stimuler la demande. Pourtant, les manipulations sur le front des taux d’intérêts ne permettent pas de réduire de manière permanente ce décalage entre consommation et production contraignant ainsi à terme les entreprises à agir sur la variable de la masse salariale, c’est-à-dire en procédant à des licenciements de plus ou moins grande amplitude !

En pratique, ces mesures adoptées par des Etats qui cherchent à gagner du temps ou qui se trompent de priorités aggravent d’autant plus la crise que ce gap entre consommation et production est important. La réduction des taux d’intérêts - toute agressive qu’elle puisse être - et la mise en place de déductions fiscales - aussi généreuses soient-elles - ne contribuent pas à l’amélioration qualitative et quantitative de la productivité au sein des entreprises. En fait, l’efficience de la quasi totalité de nos entreprises est bridée par leurs capacités de production démesurées.

La réduction de l’appareil de production japonais de l’ordre de 30% permettrait ainsi une amélioration de quelque 4% du P.I.B. national tout en contribuant à une progression des salaires de la population active sans pour autant pénaliser des entreprises qui gagneraient en efficacité. Un démantèlement de cette ampleur se traduirait immanquablement par une augmentation du chômage japonais de l’ordre de 5% faute de réformes structurelles vitales pour stimuler et maintenir sur le long terme la croissance économique. Le nécessaire sacrifice d’une partie de l’appareil de production industrielle améliorant la compétitivité des entreprises se devant d’être contrebalancé par des investissements privés et publics en faveur de secteurs porteurs d’emplois comme l’éducation, la santé, l’agriculture, etc... 

L’exemple d’un pays comme le Japon ayant utilisé à outrance toute l’artillerie de la politique monétaire sans pour autant renouer avec une croissance saine est aujourd’hui précieux car il est plus que temps que ce pays - et les nôtres - adoptent de vraies mesures. En fait, les manipulations abusives des taux d’intérêts et autres stimuli fiscaux opportunistes empêchent les indispensables réformes.



14 réactions


  • DEEVIN 12 avril 2010 12:23

    Désolé je n’ai rien compris à votre article. L’emploi du conditionnel dans la conclusion me déroute. Le Japon « a » ou « devrait » ? Et les « vraies » mesures que vous préconisez, quelles sont-elles ?


    • DEEVIN 12 avril 2010 12:25

      du subjonctif, pardon


    • Michel Santi Michel Santi 12 avril 2010 14:19

      Cher hengxi
       

      - je vous conseille vivement d’arrêter de m’accuser de plagiat ou de copier « revues ou sites d’actualités ». Pour ma part, j’écris, revendique ce que j’affirme et n’ait pas peur de dévoiler mon identité. Mes textes, originaux, en inspirent d’ailleurs plus d’un.

      - je ne sors pas de « mon bocal » ? Je préfère ne pas vous donner mon emploi du temps ni le compte rendu de mes périples car mon but n’est pas de vous humilier...ni de vous donner des complexes.
      Si je n’interviens que peu, c’est précisément par manque de temps. J’imagine enfin que mes nombreuses analyses remplacent utilement les commentaires que vous semblez appeler de vos voeux...

      - les billets que je signe reflètent forcément mon opinion personnelle et, chacun ayant son style, il va de soi qu’ils représentent ma vérité à l’instant où je les écris.

      - je ne me suis jamais lancé dans la prévision. Je me borne à analyser et à décortiquer des situations, il est vrai sous tous les angles possibles.


      Ceci dit, je vous remercie quand même pour le « personnage incontournable »...






    • L'enfoiré L’enfoiré 18 avril 2010 18:43

      Ah, ces économistes, pourrait-on conclure. Et vous avez raison tous deux.
      Je suis sur le site de Jorion et je viens de le lui dire, avant son départ vers Montréal (si les avions arrivent à voler), parce qu’il est un anthropologue et sociologue de formation et qu’il parle d’économie après, en est la déduction mais pas l’origine.
      Ne dites pas à un économiste qu’il n’utilise pas une science exact, il vous tue.
      Partiellement, il a raison.
      Il a raison parce que les chiffres ne trompent pas.
      Un problème bien posé, avec tous les paramètres pris en compte, pris à la base et non pas en cours de process et on approche de beaucoup plus de vérité.
      Mais il y a ces impondérables, ces choses non prévues.
      Paul a prévu la crise des subprimes, d’autres économistes ont prévu les crises qui suivirent.
      Aucun n’en a prévu l’ampleur.
      Le je de dominos n’est peut-être pas encore terminé.
      Nous ne sommes qu’à la phase « emploi » qui chute.
      Succès d’Av, s’il existe, c’est de vous toucher, vous, Hengxi comme un correspondant de presse qui se trouve sur place.
      De toucher tous les pays de la francophonie, et de ceux qui se sont expatrié.
      Ce n’est qu’une source parmi d’autres.
      Ce n’est pas du journalisme, c’est de l’objectivisme avec la subjectivité que ne permet pas le journal du coin.
      « La vérité, on ne la connait jamais » comme chantait Gabin.  smiley
       


  • Vox Populi 12 avril 2010 15:19

    « d’autant plus la crise que ce gap entre consommation et production »


    Le mot fossé n’existe pas ?

  • Thierry LEITZ 12 avril 2010 16:06

    La croissance a ses limites propres sans doute, et il serait intéressant de se pencher la dessus. Qu’en pensez-vous, Mr Santi ?

     Si la croissance démographique et l’existence de nombreux BESOINS non satisfaits en sont les principaux ressorts naturels, on comprend qu’elle se tarisse en nos pays riches et à faible fécondité.

    Si une voiture plafonne à 170 et que vous roulez à 160, accélerer à fond ne produira pas beaucoup d’effet.

    Il ne s’agit pas d’être pour ou contre, d’être productiviste ou décroissant.

    La question essentielle qu’il devient de plus en plus difficile d’éluder, c’est la répartition OPTIMALE du gateau annuel (la VA) entre TOUS les citoyens-producteurs-consommateurs, chacun remplissant forcément à l’une ou plusieurs de ces fonctions.


  • fredo45 12 avril 2010 18:55

    On lit de ces trucs, quand même....

    "La réduction de l’appareil de production japonais de l’ordre de 30% permettrait ainsi une amélioration de quelque 4% du P.I.B. national...« 

    30%... Et hop la, en avant...

    Et j’adore aussi la suite de la phrase :

     »... tout en contribuant à une progression des salaires de la population active...« 

    Ben voyons... Au fait, c’est la pop. active avant le dégraissage de 30% ou après ?

     »...sans pour autant pénaliser des entreprises qui gagneraient en efficacité."

    Ouf, on respire...


  • DEEVIN 12 avril 2010 18:56

    "En fait, le pays qui renouera avec une croissance saine et durable sera aussi celui qui aura lutté avec succès contre ses excédents de production."

    A la relecture je crois saisir que votre recette pour sortir de la crise consiste en la réduction volontaire par un Pays, en l’occurrence le Japon, de ses capacités de production. C’est méconnaître la nature essentiellement darwiniste du fonctionnement de l’économie et du rapport des nations entre elles. Aucun Etat, à moins d’avoir des tendances suicidaires, n’aura jamais l’idée d’imposer à une partie de son économie de se saborder pour permettre à son concurrent de mieux développer la sienne. Imagine-t-on le gouvernement français intimant à Renault et Peugeot de fermer leurs portes et de licencier tout le monde au motif que les Chinois et les Indiens s’y sont mis et qu’il y a à présent surproduction mondiale ? Non, c’est la lutte à qui fera mieux et qui survivra. On peut le regretter mais c’est ainsi.
    Quant au Japon, je connais suffisamment ce pays pour affirmer que jamais les dirigeants ni le peuple n’envisageront une telle hypothèse. Il faudra vraiment leur proposer autre chose.


  • frédéric lyon 12 avril 2010 19:06

    De notre impayable spécialiste de l’économie :


    « La réduction de l’appareil de production japonais de l’ordre de 30% permettrait ainsi une amélioration de quelque 4% du P.I.B. national tout en contribuant à une progression des salaires de la population active sans pour autant pénaliser des entreprises qui gagneraient en efficacité »

    Sans blague ?

    Vous en êtes sûr ?

    Ave-vous téléphoné à l’ambassade Japonaise pour leur annoncer votre prescription ?

    Et que vous ont-il répondu ?

    Comment ? 

    Ils n’ont pas répondu, ils ont raccroché ?

    Comme on les comprend !



  • Pierre Boisjoli Pierre Boisjoli 12 avril 2010 23:04

    Vous jetez trop facilement la pierre à monsieur Santi. Ce qu’a vécu le Japon est semblable à l’enfer. Les prix baissaient sans qu’on le veuille et tout le monde retardait ses achats. C’est une réaction logique en période de déflation. Il fallait prendre les grands moyens pour rétablir la situation et le gouvernement japonais a fait de son mieux avec une lenteur interminable. Je ne souhaite à personne de vivre ce que les Japonnais ont vécu. L’analyse de monsieur Santi se défend parfaitement. Cela m’aide à comprendre pourquoi les politiques ont été si lentes à faire leur effet.
    Pierre Boisjoli
    le conseiller divin
    le siegneur des seigneurs
    le roi des rois
    le prince de la paix


  • Internaute Internaute 13 avril 2010 09:12

    Quand vous dites que le pays qui renouera avec une croissance saine et durable sera aussi celui qui aura lutté avec succès contre ses excédents de production, j’y vois une contradiction insurmontable.

    Un pays sous-développé peut croître assez rapidement mais on atteint vite une asymptote où les chiffres de croissance sont en fait ceux de l’inflation. Une fois que chacun a son mp3, sa télé, sa bagnole, son moulin à café que voulez-vous faire pour croître encore ? Le réservoir se situe également dans la démographie, laquelle atteint aussi trés vite son asymptote. La baisse des taux de fécondité dans tous les pays développés le prouve.

    Il faut repenser le système et orienter l’économie vers les marchés de remplacement et les usines à temps partiel. Je crois plutôt que la recherche de croissance fait partie du problème.


  • L'enfoiré L’enfoiré 18 avril 2010 17:40

    @Santi,
     Le texte est bon. Comme il a été bon pour d’autres pays que vous décrivez sur ces colonnes.
     Le problème, c’est qu’on ne décèle pas celui qui aurait vos faveurs et qui approcherait de la perfection. Vous les badigeonnez tous.
     La récession du Japon date d’avant la fin du siècle.
     Il s’est attaqué à plus gros que lui..
     Il gênait les Etats-Unis dans la photographie, les voitures, les robots et j’en passe.
     Puis est arrivé la Chine avec ses produits low-cost. Première attaque. La technologie de pointe cela coute cher. L’Inde s’est attaqué à la partie informaticienne avec des travailleurs formés par milliers.
     Dans tous les pays, le problème du vieillissement de la population devient crucial.
     Nous végétons sur des points d’interrogations.
     Le Japon investit dans les robots. Micro ou macro.
     Le but est de combler les trous créés par cette force de travail qui s’en va.
     La grande crise que nous vivons encore, ailleurs, à ce sujet que faisons-nous ?
     Comme ce sont des sujets qui m’intéresse. Voici celui du Japon.


  • Eleusis Bastiat - Le Parisien Libéral eleusis 19 avril 2010 06:01

    c est quoi une economie integrée ? Merci


  • Eleusis Bastiat - Le Parisien Libéral eleusis 20 avril 2010 11:55

    bon ... on aura pas ce qu est une economie integree


Réagir