vendredi 5 novembre 2010 - par Rcoutouly

Quelle régulation fiscale pour le photovoltaïque ?

La décision du gouvernement d’augmenter la CSPE (Contribution au Service Public d’Electricité) de 3% est à l’origine d’une polémique autour de l’énergie photovoltaïque : le tarif particulièrement avantageux de rachat (6 fois le tarif normal) explique-t-il cette augmentation ? Cette polémique est sans doute l’occasion de se s’interroger sur l’efficacité de cette mesure.

 D’un côté, EDF se plaint du coût croissant du photovoltaïque et le rend responsable en grande partie du déficit de 1,6 milliard d’euros de la CSPE. Certains responsables critiquent cette politique de rachat observant que cela sert surtout à subventionner l’industrie chinoise, leader pour la fabrication des panneaux solaires.

De l’autre, les professionnels du secteur affirment que la CSPE ne sert pas uniquement à financer les énergies renouvelables mais aussi toutes les missions de service public liés à la distribution d’électricité. Par exemple, le surcoût lié à la production électrique sur les îles ou le paiement de l’électricité pour les plus démunis, celle-ci étant devenu "bien de première nécessité" depuis 2006. les énergies renouvelables représentent seulement le quart de l’usage de cette contribution.

En réalité, les problèmes sont à venir. L’augmentation rapide et prévisible des installations photovoltaïques, liée à ce tarif avantageux, à des facilités fiscales et à la baisse des coûts d’installation va poser d’énormes problèmes à terme.

Pour comprendre, il faut revenir en arrière : la CSPE et les tarifs d’achat particulièrement avantageux ont été inventé à la fin des années 90 et mis en place au début des années 2000 (2003 exactement pour la CSPE). A cette époque, le contexte politique et économique était très différent de ce que nous connaissons aujourd’hui. Créer des déficits paraissaient une vertu économique et prétendre que cela allait créer un poids supplémentaire pour nos descendants était considérée comme une idée farfelue.

Or, le tarif de rachat de l’électricité photovoltaïque garanti pour 20 ans s’apparente à un déficit pour la Nation puisqu’on investit dans ce secteur en le finançant grâce aux dépenses futurs des consommateurs français d’électricité. Inodore au début, ce coût va devenir progressivement douloureux. Dans le contexte de crise actuelle, devant les difficultés financières des pays européens, cette nouvelle dette peut devenir un véritable problème supplémentaire à résoudre.

Aussi, il faut envisager la CSPE pour ce qu’elle est en réalité : une fiscalité environnementale de première génération. Elle est construite sur un principe contributif, participant aux investissements nécessaires, ce qui est une bonne chose.

Mais elle a des défauts qu’il faut repérer pour éviter qu’ils soient reproduits. Tout d’abord, le report sur l’avenir dont nous venons de parler. Ensuite, il s’agit d’une taxe généraliste qui a, comme nous l’avons vu plus haut, plusieurs usages. Il est donc difficile de s’y retrouver, de la rendre lisible. Enfin, cette polyfonctionnalité interdit toute régulation de ses dépenses et de ses recettes. 

On l’a bien compris : il nous faut inventer des outils fiscaux environnementaux plus perfectionnés, plus précis, possédant leur propre logique permettant des régulations de meilleure qualité. C’est pourquoi, je défend la mise en place de contributions incitatives, hautement spécialisées, équipées de procédures de régulations précises.

Que pourrait-on faire pour l’électricité ? D’abord, il sera nécessaire de supprimer le tarif de rachat préférentiel sur 20 ans car il nous causera des soucis de financement à terme, comme nous l’avons vu. Bien entendu, les investisseurs engagés conserveront leur tarif préférentiel.

Comment faire alors pour maintenir le dynamisme de la filière ? En créant une contribution incitative sur la production d’électricité d’origine non renouvelable (gaz, et surtout nucléaire puisque l’uranium est un minerai aux ressources limités). Le tarif plus élevé de cette électricité servira à investir dans les énergies renouvelables (les éoliennes d’abord qui reviennent moins cher au kilowatt produit, mais aussi bien entendu le solaire, l’hydraulique en investissant dans le pompage turbinage). Appliquée à l’ensemble de la production électrique, majoritairement d’origine nucléaire en France, les sommes récoltées seront considérables. Même si, au début, la contribution demandée sera faible du kilowatt. Elle s’appliquera à l’ensemble des acteurs (entreprises, services publics, ménages).

Comment sera-t-elle redistribuée ? Une petite partie servira pour des investissements dans la recherche ou dans l’industrie éolien ou solaire, la grande majorité sera redistribuée pour financer l’achat d’éolienne et de panneaux solaires. La répartition de cette manne obéira à plusieurs principes :

-la redistribution se fera catégorie par catégorie : les entreprises, comme les ménages retrouveront la proportion exacte de ce qu’ils auront contribué. 

- la redistribution se fera l’année suivante après l’année où la contribution aura été prélevé.

-la contribution sera fixé au pourcentage de la consommation électrique et augmentera d’années en années

-par contre, la redistribution se fera selon des barêmes qui évolueront en fonction du nombre de demande d’installation et des revenus des investisseurs.

On le voit, il s’agit d’une fiscalité environnementale de seconde génération, beaucoup plus perfectionnée que la CSPE.



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