jeudi 23 juillet 2015 - par PRCF

« Reprise économique » et réalités de classes… #chômage #désindustrialisation #baisse des salaires

Trop faible pour créer de l’emploi durable et stopper la courbe ascendante du chômage de masse et de longue durée, la « reprise » annoncée de l’économie française (autour d’1 % à 1,6) n’a pas de quoi susciter l’enthousiasme dans les quartiers populaires. Outre qu’elle relève encore davantage de l’effet d’annonce que d’une réalité tangible, ses facteurs économiques seraient avant tout liés :

Réalité de la « reprise »

A la baisse conjoncturelle du prix du pétrole qui, tôt ou tard, remontera… surtout si « reprise » mondiale il y a, donc demande plus forte sur le marché des hydrocarbures ;

A la baisse de l’euro par rapport au dollar. Que cette baisse relative permette de pousser à la reprise valide, soit dit en passant, a posteriori l’analyse du PRCF qui a toujours souligné que le « franc fort », puis l’ « euro fort » nécessaire pour dissoudre le franc français dans l’euro-mark, était un facteur majeur pour plomber les exportations industrielles françaises en creusant le lit du « made in Germany » (en ménageant, dans un premier temps, la suprématie mondiale du dollar (cf Etincelles, juin 2015, article de G. Gastaud intitulé L’euro, monnaie crypto-protectionniste de l’Axe Washington-Berlin) ; cela dit, dans un contexte où l’industrie française a été globalement affaiblie, cette baisse de l’euro qu’a décidée la BCE (qui a décidé de faire tourner la planche à billet, l’industrie allemande elle-même ne parvenant plus à vendre dans les marchés de l’Europe du sud déprimés par l’austérité …) ne peut suffire à relancer sérieusement le produire en France. indice mensuel de la production industrielleEn l’absence d’une reconstitution du secteur public industriel (interdite par Maastricht), d’une relance forte des revenus du travail et d’un plan national de ré-industrialisation équilibrée du territoire national, la baisse de l’euro favorisera les importations… allemandes et, à la rigueur, celles de certains pays du sud ; comment exporterions-nous soudain des meubles, des voitures, des pantalons, que nous ne fabriquons plus chez nous depuis belle lurette ?
Même les prévisions les plus optimistes de l’INSEE qui postule un rebond de 7 points du niveau des investissements dans l’industrie selon sa dernière enquête de conjoncture, ne saurait cacher, que l’investissement industrielle demeurerait ainsi 3 points en deçà de son niveau de 2007, et en recul de 11 points par rapport au niveau d’avant l’euro.investissement industriel insee

A l’arrière-plan de cette reprise ou pseudo-reprise, il y a son énorme coût social : le transfert de milliards d’euros d’argent public des ménages populaires et moyens vers le grand capital (Pacte de responsabilité Valls-MEDEF et démontage de la branche famille de la Sécu, loi Macron, appauvrissement méthodique des services publics et des remboursements-maladie, casse du Code du travail et des Prud’hommes, vente à la découpe d’Alstom, bradage de Gaz de France à Suez, etc.),

Un des facteurs inquiétants du très léger rebond de l’économie française tient à la sur-militarisation de l’économie ; à défaut de fabriquer de la machine-outil industrielle ou des tracteurs, la France capitaliste s’en sort surtout en vendant des Rafales aux pays belligérants du Proche-Orient. LA déstabilisation de l’Ukraine, de l’Afrique, du Proche-Orient par les boutefeux BHL, Sarkozy, Fabius, etc. devient une pièce essentielle de la stratégie économique « nationale » ; c’est tout sauf rassurant sur le moyen et sur le long-terme.

Quant au contenu de cette « reprise », il faut l’examiner en termes de classes. Quelle « croissance », pour qui et pour faire quoi ?

Sur le plan du travail, la seule croissance qui existe c’est celle du chômage et du sous emplois, ainsi que la baisse du niveau des salaires.

chomage insee premier trimestre 2015 enquète emplois

Selon les chiffres de l’INSEE, il y a désormais plus de 2,9 millions de chômeurs au sens du Bureau International du Travail, auquel il faut ajouter 1,5 millions de sans emplois, et 1,7 millions de travailleurs en sous emplois. soit plus de 6 millions de chômeurs. Dans le même temps, le taux d’emplois en CDI recule à moins de 48,8% quand celui de l’emploi en CDD progresse à 7%. Sur les 12 derniers mois, c’est près de 40 000 postes à temps plein qui ont été détruits dans l’industrie. quand le secteur de la construction perdait lui près de 50 000 postes.

taux de création d'emplois

Dans le même temps, les salaires (directs et indirects c’est à dire comprenant les charges) demeurent bloqués, alors que les prix réels continuent d’augmenter.

Indice des salaires insee

Sur le plan écologique, une croissance appuyée par l’Etat sur la base de grands projets inutiles, sur la base de l’extension des autoroutes privatisées (notamment par la privatisation du réseau routier public), de nouveaux aéroports fort discutables, du remplacement de la SNCF (transport ferroviaire public) par des autocars (privés), du déferlement de camions européens sur nos routes et autoroutes, est quelque chose de profondément malsain. La croissance oui – nous ne sommes pas des groupies de la « décroissance » et de la mise en accusation indiscriminée des technologies – mais la vraie question est de savoir si elle servira ou pas à satisfaire les besoins populaires ou, tout au contraire, à faire travailler les gens le dimanche, à flexibiliser encore plus l’emploi, à mettre encore plus de saletés dans nos assiettes, nos boissons, l’air que nous respirons dans le cadre d’une mondialisation néolibérale plus déréglementée, antisociale et anti-écologique que jamais ; nul besoin d’être un écolo vert pomme pour constater l’explosion des cancers, des myopies, etc. alors que des millions de gens sont mal logés, voire sous-alimentés ou malnutris ;

Quelle « croissance » si, la répartition des richesses restant ce qu’elle est, 2% de la population rafle 50% des revenus supplémentaires induits, 10% des couches moyennes supérieures accaparant presque tout le reste avec tout ce que cela comporte d’aberrations dans l’habitat, la répartition des services publics, le cadre de vie des classes populaires et des couches moyennes inférieures ?

 Que faire dans ces conditions ?

D’abord, revendiquons des solutions progressistes de rupture : il faut sortir de l’euro, de l’UE, de l’OTAN pour reconstituer les outils politiques, monétaires, budgétaires et institutionnels d’un développement économique sain, tourné vers la population dans le cadre d’une lutte générale pour le socialisme. Dans le contexte hyper-verrouillé de l’UE néolibérale, croissance et décroissance ne peuvent que jouer au yoyo sur le dos des gens et c’est l’austérité à perpétuité (pour les salariés et les travailleurs indépendants) qui l’emporte dans tous les cas ; en période de récession, on taille à vif dans les prétendues « dépenses sociales » et les salaires ; dans les périodes plus fastes, les salariés ne voient pas la couleur des gains de productivité puisqu’on leur dit qu’il faut en profiter prioritairement pour « régler la dette » « due » aux marchés financiers : lesquels gagnent à tous les coups, comme le patronat…

En pratique, il faut vaincre l’attentisme des directions syndicales euro-formatées qui « attendent » la sortie de la crise et qui croient bon pour cela de « lâcher du lest » sur les acquis sociaux : moyennant quoi, les capitalistes se dégagent rapidement du financement de la Sécu… sans créer le moindre emploi stable. Seul un combat de classe aussi interprofessionnel que possible remettra les travailleurs à l’offensive en faisant rendre gorge aux actionnaires qui raflent d’énormes dividendes pour les gaspiller en revenus somptuaires ou pour les stériliser dans les paradis fiscaux (rappelons qu’on estime à 460 milliards d’euros les sommes placés par les riches dans les paradis fiscaux au détriment de l’économie française et de l’investissement productif).

En résumé, la seule « reprise » qui puisse profiter vraiment à la nation et aux travailleurs, c’est celle du combat de classe « tous ensemble et en même temps ».

Georges Gastaud pour www.initiative-communiste.fr site web du PRCF

A lire également :

source : http://www.initiative-communiste.fr/articles/luttes/reprise-economique-et-realites-de-classes-chomage-desindustrialisation-baisse-des-salaires/



11 réactions


  • Jeff84 23 juillet 2015 18:49

    Tiens, je me demandais justement, dans laquelle de vos « classes » mettez-vous les personnes suivantes :

    - un autoentrepreneur ;
    - un ouvrier ayant acheté 25% de sa propre entreprise ;
    - un gérant d’EURL travaillant seul ;
    - le même, mais qui vient d’embaucher un apprenti.

    Marx n’a pas vraiment clairement défini ces « classes » dans Das Kapital, vous seriez bien aimables de m’éclairer !

    • taktak 23 juillet 2015 21:38

      @Jeff84

      Il est drole de parler de « das kapital ».... vous devriez le lire, vous savez il y a une version française.
      C’est sûr, BFhaine TV n’en fait pas de lecture commentée....

      Vous apprendrez qu’il suffit de savoir si ces gens vendent leur force de travail, où s’il possèdent leurs outils de production.

      En l’occurence, dans nos société, les 4 ont fort peu de chance d’être les propriétaire réels de leurs moyens de production. Ce sera plutot les banques, donc les quelques milliers de grands capitalistes qui détiennent le Monde.

      En toute probabilité c’est donc des travailleurs.

      Je n’enfoncerai pas le clou en remarquant qu’un ouvrier qui possède 25% de l’entreprise dans laquelle il travaille se fera encore voler à minima 75% de la plus value produite par sa force de travail.
      En revanche, oui, il faut parler de SON entreprise. En l’occurence, il ne devrait pas avoir à l’acheter

      ....

      voila voila


    • Jeff84 24 juillet 2015 18:01

      @taktak
      Mais je l’ai lu, il y a à peu près 3 ans. C’est pour cela que je sais que ces définitions n’y sont pas.


      L’entrepreneur est formateur. Quels sont ses « moyens de production » qu’un banquier pourrait posséder ?

      Et celui qui a 25% de sa propre entreprise, est associé avec 3 autres artisans qui travaillent avec lui. Je voudrais bien savoir où est le vol là-dedans. Et bien sûr qu’il est normal qu’il achête ces parts sociales, leurs machines coûtent cher (et elles n’appartiennent pas non plus à un banquier, quelle idée). Vous savez, seul l’Etat peut vol... pardon exproprier. Les gens honnêtes achètent ou échangent.

  • Trelawney 23 juillet 2015 19:49

    Monsieur PCRF,

    J’ai bien lu votre article (2 fois parce que je ne comprends pas tout tout de suite) et on y parle de reprise, de croissance de désindustrialisation, de chômage, d’outil industriel, de vente de rafale, et aussi de l’industrie allemande.

    Je ne vais pas m’étendre sur le concept politique du « marxisme » (chacun ses hobbies), mais il me semble que vous êtes formatés sur un modèle de révolution industrielle et de prolétariat et à l’époque où l’on vient de découvrir une exo-planète au fin fond de la galaxie toute semblable à notre planète, votre idéologie date un peu (elle sent même franchement le moisi).

    Pour être clair dans mon propos :

    Ca fait maintenant 15 ans que la croissance cumulée de la France est à 0 (la tête à toto). Donc la « reprise de la croissance » c’est fini. Faut faire sans et si vous pensez que notre salut pour lutter contre le chômage vient de la croissance, vous avez tout faux.

    Si on met dans l’industrie, l’agro-alimentaire, la métallurgie, les voitures, les avions, l’énergie, la chimie, la pharmacie, la cosmétique, l’industrie du luxe etc. Ca ne représente que 16% de notre PIB et 4 millions de salariés. Autrement dit c’est pinuts. Aussi si vous pensez qu’en réindustrialisant le pays c’est à dire en cherchant à acquérir des compétences qui ont disparu avec la crise, ca ne ferra que passer le chiffre de 16 à 20 au grand max et ca va vous épuiser. donc la réindustrialisation de la France, faut oublier et tant pis si le prolétaire est en voie de disparition.

    Par contre le tourisme représente 8% de notre PIB avec 2 millions de salariés. la France est la première destination touristique au monde et je pense qu’avec un peu d’astuce on peut rendre le pays plus accueillant et augmenter ainsi ce chiffre générateur d’emploi. Et la chose la plus subtile est qu’avec un minimum d’investissement vous allez piquer le fric dans la poche du touriste étranger (et pourquoi pas allemand) et ainsi inverser la balance commerciale. Mais comme Marx ne parlait pas de tourisme dans son bouquin (il en a pourtant fait pas mal en Angleterre), vous restez bloqué sur « croissance et industrie ». C’est quand même balot !


    • 1871-paris 1871-paris 24 juillet 2015 15:10

      @Trelawney

      Vous pensez qu’il ne faut pas « re industrialisé » notre pays !

      c’est clair faut se laisser berner par les pseudo théories style "avantage comparatif" sauce néo ultra libéralisme, qui fait que tout le monde veux des Smartphone fait a 15 000km d’ici des ordis pareil, bientôt des bagnoles etc sous le seul prétexte que eux là-bas boss pour pinuts et pas parce que c’est la fin de ’L’INDUSTRIALISATION" comme vous dites.

       

      désolé de vous dire, mais c’est vous qui avez une vision dépassé, car vous appliquez des raisonnements ayant eu cours au 18-19eme siècle ou la révolution du transport permis l’essor de l’exploitation des colonies et le début d’une délocalisation qui s’accéléra a la fin du 20 siècle.

       

      mais bon faut pas ré industrialisé, pour ne serais que produire proche du lieu de consommation favorisant ainsi la réduction de la pollution par le transport. il ne faut pas non plus re industrialisé pour de nouveau secteur traitant du recyclage et de la production d’énergies propres.

       non faut raisonné style « Poujade » de la bourse, et aller dans le sens de favorisé la constitution de fortune autant inutile qu’elles sont incohérentes avec un système de vie économique en société !


    • Trelawney 24 juillet 2015 15:58

      @1871-paris
      La France a été un très grand pays industriel et je parle bien au passé. Que ce soit dans l’électronique, la métallurgie, l’industrie navale, l’industrie automobile, la chimie, les métaux léger, elle était leader.

      Ca fait depuis Pompidou que l’on détruit peu à peu ce tissu industriel au prétexte que pour la finance c’est trop compliqué à gérer et que, pour les politiques, mieux vaut des gens instruit que des manuels. Pendant le temps du démantèlement, personne n’a rien trouvé à redire. Maintenant que l’on a un nombre record de chômeur, on s’aperçoit que notre industrie à disparu du paysage économique. Et alors que tout le savoir faire a disparu avec les fermeture, il y en a pour dire qu’il faut réindustrialiser la France et produire local alors qu’on ne sait plus faire. Vous vous imaginez quoi, qu’une technicité se retrouve d’un claquement de doigt ?

      J’aurai bien aimé qu’on réindustrialise le pays (à grand coup de redressement productive, histoire de faire dans le comique), mais c’est trop tard. Ce qu’on savait faire on ne sait plus le faire. On n’a plus les centres de formation pour former les gens et on n’a plus l’expérience. mettez vous ça dans le crane : ce qui est perdu ne se retrouve jamais !


    • Jeff84 24 juillet 2015 18:18

      @Trelawney
      Commentaire plein de bon sens, mais je préciserais juste que l’absence de croissance n’est pas une fatalité. Regardez les tableaux de l’INSEE, elle ne s’est vraiment pétée la gueule qu’avec l’arrivée de Mitterrand au pouvoir. Ou alors à l’étranger : tous les pays (ou presque) qui sont moins socialistes que nous s’en sortent mieux, tandis que tous ceux qui le sont plus s’enfoncent (là par contre, c’est 100%).


      D’ailleurs, le Venezuela, après les tickets de rationnement, vient d’opérer des réquisitions pour tenter d’éviter les pénuries alimentaires. Vive le socialisme.

  • zygzornifle zygzornifle 24 juillet 2015 09:52

    Ces courbes sont comme la température au pieds d’un mourant .....


  • 1871-paris 1871-paris 24 juillet 2015 15:18

    attendons les arguments de SpartaCrassus ayant l’allure de vrais faits, mais etant totalement Faux de par ses postulats foireux.


    Un vrais Liblaireaux !

  • JP94 25 juillet 2015 11:03

    Bon , quant à moi , j’ai tout compris tout de suite - d’autant que j’ai évité de me laisser gagner par le décervelage opéré par tout notre appareil d’Etat ( école y compris) , et je trouve cet article excellent , bien argumenté , et utile .

    Bien sûr il y a les grincheux qui semblent croire que le Capital est une valeur sûre qui les ménage ...

    Ils devraient tenter d’intégrer les 200 familles , juste pour voir ... Mais à ce sujet on pourrait lire « le Discours de la Servitude volontaire » de la Boëtie ... Oh bien sûr ça a quelques siècles , mais puisqu’il existe encore tant de personnes soumises , ce texte garde toute son actualité et pourrait en éclairer quelques uns ici !

    On pourrait aussi suggérer la lecture de la Lettre sur les aveugles , qui valut à Diderot la prison ... la crise systémique du Capitalisme est là , et bien là , mais il faut encore du temps à ceux qui en chantaient les louanges il y a peu pour en saisir la nature injuste et non pérenne ;

    Il est à la fois irritant et cocasse de voir s’irriter du texte de GC des personnes qui se voient en capitalistes alors qu’ils n’en ont pris que la part idéologique et non pas matérielle !

    Mais comme le système capitaliste se nourrit bien d’eux et certes , dans un pays où l’explosion des inégalités fait que les revenus de certains grands patrons représentent 1100 années de SMIC ( 150 000 € par mois - mais qu’en font-ils ? ) et qu’ils possèdent des dizaines de milliards d’euros de fortune personnelle tandis que des gens crèvent de faim et qu’on détruit emploi , services de Santé et Education publique - donc aussi aussi la structure familiale , dans ce pays , donc , ceux qui vont gagner 5 ou 10 fois le SMIC en ont plus après ceux qui gagnent le SMIC ou le RMI ( on peut bosser et survivre du RMI si l’on a une entreprise peu rentable et j’en connais ) qu’après ceux qui siphonne les richesses ..
    A propos , le niveau de l’Education et de la Santé est le plus élevé du continent ... donc en partageant , on peut , si on le veut , assurer ces services publics , au lieu de tirer prétexte de la crise pour détruire les « conquis » sociaux ( pour reprendre le mot d’Ambroise Croizat , qui avait déjà anticipé sur les velléités de destruction de la Sécu .....

  • zygzornifle zygzornifle 26 juillet 2015 13:24
    « Reprise économique »..... le gouvernement compte sur la vente des glaces en juillet aout c’est tout ce qu’il lui reste .......

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