jeudi 3 septembre 2009 - par ÇaDérange

Russie : crise économique et vente de gaz tous azimuts

Pami les pays du BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) qui se remettent plutôt bien de la crise financière au point qu’ils sont devenus les leaders de l’économie mondiale , il y en a un, la Russie, qui au contraire continue à s’enfoncer dans la crise.Canablog286_025 Son PIB est en baisse de 9.8pct au premier trimestre 2009 et, pire encore, de 10.9 pct au second. Les emprunts bancaire aux particuliers semblent sous contrôle par contre ceux aux entreprises sont sujets à de grandes craintes de défaillance (25pct !) pour le dernier trimestre 2009.

Par contre le budget russe, qui avait pour particularité surprenante pour nous, français, d’être excédentaire depuis 10 ans, est passé pour cause de plan de relance dans le rouge foncé. Son déficit est estimé atteindre 9.4 pct du PIB cette année à la suite du quadruplement sur quatre ans de la dépense publique fédérale. Le tout pour un plan de relance qui n’a pas vraiment marché et dont le meilleur résultat est d’avoir réussi à limiter la baisse de la consommation aux alentours de 6.5pct.

Or les entreprises russes doivent rembourser 137 milliards de dollars au second semestre pour lesquelles elles auront beaucoup de mal à trouver un refinancement. Par ailleurs le rouble déjà fortement déprécié au dernier trimestre 2008 est toujours sous pression et les 160 milliards de dollars qui sont sortis du pays depuis le dernier trimestre 2008, ne sont pas prêt d’y revenir. Ce qu’il manque, paraît-il, par rapport aux autres membres du BRIC, ce sont des capitaux étrangers pour y investir. Or Vladimir Poutine, dans un domaine, l’énergie, pour lequel il serait possible d’attirer de tels investissements vient au contraire de dénoncer publiquement la "Charte de l’Energie" qui assurait une certaine sécurité aux investisseurs dans le domaine des hydrocarbures. Même si les évènements pétroliers de ces dernières années ont montré le peu de cas que faisait Poutine des contrats existants, c’est une inquiétude de plus qui ne peut que repousser l’arrivée de nouveaux investisseurs. C’est désormais acquis que le pétrole et le gaz russes sont réservés aux compagnies russes.

Que faire pour rééquilibrer les comptes et l’activité économique dans un pays dépendant des hydrocarbures pour un bon tiers de ses rentrées fiscales ? Espérer dans une hausse qui se redessine du prix des hydrocarbures et pousser les ventes de gaz et de pétrole.

Au nord et à l’ouest, tout va bien. Le Gazoduc Nordstream qui alimentera l’Allemagne et d’autres pays d’Europe de l’Ouest dont désormais la France, suite à l’entrée de GDFSuez à son capital, poursuit sa route sous la Baltique.Canablog286_026 Au sud, on assiste à une concurrence frontale entre le gazoduc dit South Stream qui est prévu pour alimenter les balkans, l’Europe centrale et jusqu’à l’Italie, puisqu’il s’agit d’une coproduction Gazprom-ENI, et son concurrent Nabucco poussé par l’Union Européenne pour diversifier ses sources d’approvisionnement en gaz. Vladimir Poutine vient de marquer un point important en allant signer à Ankara un protocole d’accord avec la Turquie pour permettre à Southstream de passer au fond de la mer Noire dans les eaux territoriales turques. Et ce quelques semaines après la signature en grande pompe par la Turquie de l’accord de consortium européen pour le lancement de Nabucco ! Et en plus en présence de Silvio Berlusconi.

Un double jeu qui s’explique par le fait que la Turquie est aussi le troisième importateur de gaz russe après l’Allemagne et l’Italie et que cette source d’énergie lui est indispensable. Sans compter que les droits de passage de ces deux gazoducs seront un appoint non négligeable pour le budget turc. Reste que cet accord renforce la prééminence de l’approvisionnement en gaz de l’Europe par ou via la Russie et Southstream au détriment de Nabucco dont on ne sait pas bien comment et avec quel producteur on pourra l’alimenter. Ukraine, Biélorussie ou Géorgie, notez bien que l’Union Européenne est dans les griffes russes pour une bonne part de son approvisionnement énergétique !Canablog286_027

A l’est, après le gazoduc en construction pour alimenter le Japon, la Russie a signé ( enfin) un contrat de fourniture de 30milliards de m3 de gaz à partir de 2011 pour la Chine et vient de donner le premier coup de pioche en présence de Vladimir Poutine d’un autre gazoduc de 1350 km pour amener le gaz des gisements gaziers de l’ile de Sakhaline à l’extrême est de la Russie vers le sud c’est-à-dire Kahbarovsk d’où doit partir une branche à vocation d’approvisionnement interne de l’extrême orient russe et vers le port de Vladivostok d’où il sera exporté vers d’autres marchés. Corée du sud, Japon voire même les Etats Unis puisque l’opérateur de Sakhaline est le groupe ExxonMobil   

Dans un autre domaine, celui de la distribution, Gazprom a trouvé un accord avec la compagnie nationale autrichienne OMV pour accroître considérablement le dépôt gazier de Baumgarten au sud de vienne qui appartenait à OMV pour en faire un énorme dépôt de stockage appelé Plateforme gazière de Transit Centreeuropéenne, CEGH, qui servira de référence pour la fixation des prix du gaz dans la zone.

Même topo en Hongrie ou Gazprom négocie avec la compagnie nationale MOL la construction d’un très gros dépot gazier. Tout ceci pour assurer certes la stabilité de l’approvisionnement gazier de l’Europe centrale mais au prix d’une dépendance considérable de l’Europe vis-à-vis de la Russie. Que se passera-t-il le jour où la Russie décidera, unilatéralement de doubler le prix de son gaz ?

 



5 réactions


  • wesson wesson 3 septembre 2009 10:56

    Bonjour l’auteur,
    en fait votre article ne fait état que de votre frustration que la Russie entends avoir la maitrise de son Gaz. A mon sens, il s’agit juste d’un passage obligé pour qu’un état puisse se faire respecter internationalement.

    Puis, vous semblez définir comme une mauvaise chose l’arrivée du déficit budgétaire Russe et le quadruplement de la dépense fédérale. Les idiots comme moi ont tendance à considérer qu’il s’agit là aussi du quadruplement des fonds que l’état consacre à son peuple - et effectivement ça change un peu et il y a de quoi à assombrir la joie quotidienne des néo-libéraux acharnés.

    Et pour finir, vous citez les énormes dettes des entreprises Russes, ce qui est exact, mais ces dettes tiennent plus à l’apurement des conneries faites pendant la période Ieltsine - qui au passage a ruiné quasi totalement son peuple. Après les privatisations à vil prix décidés les soirs de cuites (c’est à dire tous les soir), il ne restait plus à Poutine que peu de possibilité pour que l’état reprenne le contrôle de sa richesse nationale : Soit il y avait des nationalisations-expropriations et c’était reparti pour un ère de guerre froide, soit il y avait une partie plus fine faite d’une reprise de contrôle progressive, beaucoup plus lente et couteuse, mais qui n’aurait pas le défaut d’agir comme un chiffon rouge agité devant les ultralibéraux et néoconservateurs.

    Le paris Russe tient amha plutôt à l’effondrement du dollars. Dès lors que celui-ci en viendrait à s’effondrer, alors la dette contractée en dollars de chaque pays, tout le monde s’en foutra royalement.

    Concernant la dépendance gazière de l’Europe, certes, elle est de fait totale par rapport aux quelques pays producteurs. Et sur la durée, c’est la Russie qui en aura encore quand les autres n’en auront plus. Alors cette dépendance est un mal nécéssaire mais difficilement évitable. Et, croyez-moi, si un jour un pipeline venait à traverser l’atlantique pour que l’Amérique nous envoie de son gaz, j’ai bien peur que son prix à la sortie du tuyaux ne soit pas des meilleur marché, etpas qu’un peu !


  • monbula 3 septembre 2009 12:08

    @ L’auteur

    Que se passera-t-il le jour où la Russie décidera, unilatéralement de doubler le prix de son gaz ?

    Est-ce de la propagande de votre part ou de la malice  ?

    La Russie est une garantie pour des prix justes.

    Les russes assommeraient leurs consommateurs... N’importe quoi ?

    Comme dit Wesson , du pétrole à la moulinette Wall Street......

    Merci quand même de nous rappeler que la Russie existe et fasse tampon aux ricains.




  • monbula 3 septembre 2009 13:10

    @ L’auteur

    prééminence de l’approvisionnement en gaz de l’Europe par ou via la Russie et Southstream au détriment de Nabucco dont on ne sait pas bien comment et avec quel producteur.

    En amont pour Nabucco , le les producteurs : Asie centrale ou et la Russie ( tiens la Russie, la revoilà ).
    Les pays d’Asie centrale vendent du gaz aux russes... Ils faut bien qu’ils vivent ces pays en attendant que les ricains trouvent la solution.
    Bordel américain..... Afghanistan, Pakistan, Iran, Tchétchénie, ETC.../
    Et puis aux russes, on a plein d’idées, plein de bonnes choses à leur vendre.... Nous les français. Les allemands ont compris depuis longtemps...


  • monbula 3 septembre 2009 13:15

    @ L’auteur

    Excellent article et merci pour la carte gazoduc Japon, je la cherchais partout.


  • Hieronymus Hieronymus 4 septembre 2009 01:28

    Que se passera-t-il le jour où la Russie décidera, unilatéralement de doubler le prix de son gaz ?
    Certes la Russie 1er producteur et exportateur mondial dispose d’une puissance de fait mais vous ne devez pas savoir que le prix du gaz est quasi aligne sur celui du petrole car le gaz est en fait un produit de substitution (le principal) par rapport au petrole ?
    Sinon d’accord avec les objections formulees par Wesson, compte tenu de l’immensite du pays, normal que le gouvernement investisse ds les infrastructures, ca cree des dettes sur le coup mais devrait generer de la richesse assez vite et surtout c’est un investissement indispensable sur l’avenir, oui aux travaux publics !


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