lundi 4 février 2013 - par Prometheus

Théorie économique pour un homme irrationnel

L'économie de demain peut-elle encore avoir une base mathématique et rationnelle ou faut-il comprendre que l'homme est un paradoxe et bâtir un système qui correspond à sa nature ?

"Le chemin des paradoxes est le chemin du vrai.
Pour éprouver la Réalité, il faut la voir sur la corde raide.
C'est lorsque les Vérités deviennent des funambules que l'on peut les juger.
"

- Oscar Wilde

Être et ne pas être ?

Lors de mes études d'économie, mes premiers cours n'ont pas porté sur l'explication des mécanismes macroéconomiques ou sur les calculs financiers. Non la première chose dont on m'a parlé ça a été de philosophie. Surprenant mais pas tant que ça car il fallait d'abord définir la nature de l'homme pour ensuite pouvoir comprendre ses réactions dans une économie. Ses réactions allaient ensuite pouvoir être définies par un ensemble de théories et d'équations financières.

La pensée rationnelle est le pilier de toute les sciences économiques. Elle dit qu' un objet A est ce qu'il est. Il ne peut pas être ce qu'il n'est pas. Il n'existe pas d'état intermédiaire où A se trouverait entre ce qu'il est et ce qu'il n'est pas. Et enfin une cause produit toujours le même effet A sera toujours suivi de B. Par conséquent l'homme est un objet d'étude dont les actes sont prévisibles si on découvre ses mécanismes. Par exemple pour la théorie de la rationalité limitée, l'homme prend la meilleure décision en fonction des informations qu'il a, plus cette information est bonne plus la décision sera rentable pour lui. Bien que des contradicteurs puissent déclarer que l'homme peut se comporter de manière irrationnelle, les sciences économiques disent que même lorsque l'homme fait des choix liés à des valeurs émotionnelles ou morales, ces réactions peuvent être prévisibles. Et ils font alors intervenir des facteurs d'irrationalité dans leurs équations ou font appel aux sciences humaines pour étudier les comportements et compilent les données en statistique.

Cette base philosophique m'a toujours dérangé. Elle me semblait fausse. Ce qui induisait nécessairement que tout l'ensemble des sciences économiques qu'on allait m'enseigner par la suite était également fausse. Cette pensée d'apprendre quelque chose comportant une erreur et appliquée par des milliards de personnes fonctionnant depuis des années pour ne pas dire des siècles vous fait dire qu'il vaut mieux vous taire.

Pourtant la recherche des mots et des idées est inévitable.

L'être perceptuel contre l'être intellectuel

Après la crise de 2008, la reine Elizabeth II posa une question simple aux économistes de la London school :

"Why did nobody notice it ?"

Pourquoi personne n'avait vu venir la crise ? On peut parler pendant des heures des raisons x ou y de la crise des subprimes puis de la crise de la dette. Néanmoins la question demeure si l'homme est si prévisible. Pourquoi n'avons-nous rien vu venir ?

La réponse se retrouve dans la pensée rationnelle. Descartes pensait que la raison seule lui permettrait d'atteindre la vérité. Néanmoins nous ne pouvons dire avec certitude que ce que nous pensons selon les règles de la raison soit a priori conforme à la réalité en soi. La raison est limitée par ses lois et ses observations du réel. Les sciences économiques le sont tout autant.

Ainsi la réalité a rattrapé la rationalité. Cette limite peut sembler n'être qu'une maladresse, un oubli, un passage obligé de l'expérimentation et de l'observation. Il est pourtant l'essence même de la pensée rationelle qui tente en vain de décrire un univers bouillonnant et contradictoire. La réalité ne serait se limiter à ses lois et encore moins lorsqu'il s'agit de décrire un de ses acteurs : l'homme.

L'être humain perceptuel et non intellectuel tel devrait être la définition de l'homme. Nous ne sommes pas des cerveaux sur patte. Nous exagérons la valeur et l’importance de la raison pure dans la vie humaine. Notre intelligence est pourtant inutile quand nous sommes sous l’emprise de nos émotions.

Un exemple simple tiré cette fois de mes études de communication. La règle des 7% 38% 55%. Cette règle dit que les mots qui sortent de notre bouche ceux qui sont intelligibles ne représentent que 7% de l'information perçue par nos interlocuteurs. L'intonation représente 38% et le langage corporel 55%. Un être rationnel devrait se focaliser sur l'information pure mais ce que constate cette règle c'est que c'est la communication non dite qui va définir notre message. Nos émotions sont plus fortes que les mots que nous prononcons.

Une économie d'homo irrationalis

Cette remise en cause de l'économie n'est pas de mon fait ni une découverte révolutionnaire de ma personne. Non elle est la pointe de l'innovation économique. Elle est pensée et étudiée par des sociologues, psychologues et économistes américains d'Harvard et autres. La recherche des comportements humains afin de les rendre prévisibles débouche sur ce fait. L'homme ne l'est pas !

Nous pouvons ainsi concevoir de nouveaux modèles économiques qui ne prennent plus en compte l'augmentation de la richesse comme indicateur mais par exemple la satisfaction de l'être humain.

De plus cette nouvelle vision nous pousse à nous tourner vers notre nature profonde. La clé de la compréhension passe par la connaissance de nos émotions. Le bonheur, l'amour, la peur, la haine sont des clés pour comprendre nos interactions. L'homme du XXIème siècle se devra de se tourner vers cette "autre réalité" s'il veut continuer son ascension vers la modernité.

« Les sentiments sont à la base de l’existence. Le jour où le dévouement, la pitié, l’amour et les illusions qui nous mènent, seraient remplacés par la froide raison, tous les ressorts de l’activité se trouveraient brisés. »

- Gustave Le bon

 



4 réactions


  • Robert GIL ROBERT GIL 4 février 2013 14:45

    Contrairement aux idées reçues de l’économie-spectacle, certains faits vérifiables peuvent permettre de remettre en question tout le système. Les dépenses de l’État français ont baissé depuis vingt ans, cependant deux fois moins que la baisse des recettes. Les cadeaux fiscaux effectués par l’État depuis l’an 2000 représentent un manque à gagner de plus de 100 milliards d’euros par an. Plus de 600 milliards d’avoirs, bien planqués dans des paradis fiscaux, manquent à l’État français. Si la banque centrale européenne (BCE) avait accepté de prêter directement aux pays de la zone euro comme elle le fait pour les banques, c’est-à-dire au taux de 1 %, comme cela se passe aux États-Unis, il n’y aurait plus de dette de l’État français aujourd’hui. Et s’il n’y avait plus de cadeaux fiscaux, plus de paradis fiscaux, si l’on fonctionnait comme dans les années 60, l’État pourrait plus que doubler ses dépenses, sans aucune dette… Si l’on discerne comment on a pu en arriver là, on peut alors comprendre ce qui se passe aujour’hui.....

    voir : L’ECONOMIE EST UNE ESCROQUERIE


  • Gabriel Gabriel 4 février 2013 17:39

    Bel article d’un banquier qui vient nous expliquer que nous sommes trop humain donc trop con pour comprendre la pseudo science économique qui les enrichit en faisant crever le reste de la planète. gonflé le type !


  • Francis, agnotologue JL 5 février 2013 09:55

    Bonjour Jeremy971,

    Vous dites : « La réalité ne serait se limiter à ses lois »

    Je suppose qu’il faut lire : « La réalité ne saurait se limiter à ses lois » ?

    Sur la règle des 7% 38% 55% :

    Il y a un proverbe (machiste) qui dit : « quand tu as raison, raisonne comme un homme. Quand tu as tort, pense comme une femme. »

    Sans être machiste, et pour paraphraser, je dirai : « quand tu as raison, raisonne avec des mots. Quand tu as tort, exprime toi avec des sentiments. »

    Mais il y a une autre catégorie d’individus qui, quand ils ont tort, emploient des mots : ce sont les sophistes dont on sait que pour eux, rien n’est vrai.


  • ecolittoral ecolittoral 5 février 2013 15:13
     « Théorie économique pour un homme irrationnel » Non !
        « Théorie économique par un homme irrationnel ».

    Espérons qu’il descendra de son nuage et qu’il ira voir ce qu’est la vraie vie économique générée par un peuple plutôt rationnel.



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