samedi 17 septembre 2022 - par C’est Nabum

Complice malgré moi

Une arrête dans la gorge

Il arrive souvent que nous contribuions malgré nous à cette folie ambiante qui nous conduit dans l'abîme. Nous ne sommes jamais assez vigilants lorsque nous consommons un produit, ouvrant alors les portes de l’inacceptable. Sans que nous en soyons responsable, cette société folle nous entraîne dans sa ronde délirante, nous poussant à accepter ce que nulle génération avant nous n'aurait toléré.

Je bats ma coulpe, je bois le calice jusqu'à la lie. J'ai renoncé contre mon plein gré à tous mes principes, à ce que je tentais désespérément de me fixer comme ligne de conduite. J'ai poussé le bouchon trop loin tombant à mon insu dans les mailles d'un consumérisme délirant. J'ai mordu à l'hameçon d'une carte avenante, d'une promesse illusoire de poisson de Loire.

Il me semblait que la présence d'une friture de la rivière entraînait dans le même mouvement une garantie de bon aloi, une certitude que toute la marchandise fut du même tonneau. Les yeux fermés, la gueule gourmande, la fierté ligérienne en bandoulière, j'ai commandé un filet de sandre pour assouvir mon appétit et ma volonté de consommer local.

Les végétariens à juste titre m'auraient tancé pour cette prétention scandaleuse. Il n'est pas aisé de se départir d'une culture ancestrale où la table et l'appétit du prédateur suppose de sacrifier des animaux. Je fais pourtant des efforts pour réduire ce terrible penchant, ce déplorable travers qui est un héritage atavique, une trace de l'histoire de l'humanité. Ne me jetez pas la pierre, je suis conscient de ma faute et tente vainement de m'amender…

Mais cette fois, j'ai bu le calice jusqu'à la lie. Ma commande, mon désir, mon caprice ont tourné en queue de poisson, insultant la crise énergétique, faussant les cartes de la nécessaire rigueur énergétique. J'ai contribué bien malgré moi à la gabegie universelle, à la folie du consumérisme galopant.

Poussé par mon désir de faire honneur à ma chère rivière, sans me soucier de m'informer plus avant de la réalité de la chose, après la véritable friture de Loire, je m'hasardais à réclamer un sandre au beurre blanc, une référence tout autant qu'un incontournable de la gastronomie de ce territoire dont j'aime tant chanter les saveurs et les histoires.

Bien mal m'en prit. J'en ai encore une arrête coincée dans la gorge. Je me dois de me confesser dans l'instant, d'avouer ma forfaiture et mon ignominie bien que j'en fusse la victime innocente, le complice bien malgré lui. Je contribuais à mon tour à la valse du carbone, au délire du transport et sans aucun doute au réchauffement climatique.

Je ne sais du reste si mon filet mérite cet entre-filet tant la honte me submerge. Je ne peux digérer ma forfaiture, avaler ma honteuse faiblesse. J'ai mangé un filet d'un sandre qui a traversé l'Atlantique, venant du Canada sans qu'il me soit possible d'avaler que le gentil poisson a fait le chemin tout seul.

On m'a trompé, m'a roulé dans la farine. J'ai cru bien trop naïvement qu'il était de chez nous. Désormais il me faut vivre avec cette extravagance qui me donne en toute logique de l'aérophagie. Mon poisson a pris l'avion pour venir dans mon assiette, j'ai contribué à mon insu à ce délire qui nous mène à notre perte.

Que faire désormais ? Exiger sur la carte des restaurants la provenance des produits ? Renoncer à manger des produits issus du vivant ? Je sais par expérience que même les têtes d'ail sont capables de venir d'Argentine pour venir embaumer nos haleines. Plus rien n'est raisonnable dans ce monde qui court à sa perte.

À contre-filet.



15 réactions


  • juluch juluch 17 septembre 2022 12:55

    C’est de plus en plus ce genre d’avatar !!

    Aux restaurant d’être honnêtes sur la provenance et non de gruger les clients confiants !!

    Comment avez vous su ???


  • Clark Kent Clark Kent 17 septembre 2022 15:03

    Ah, la traçabilité !


    Il faut vraiment être Hercule Poirot pour découvrir que le logo « made in Italy » figurant sur les boites de conserve de pulpe de tomates concerne le contenant mais pas le contenu qui, lui, vient de Chine, que les sachets vendus sous l’appellation "herbes de Provence contiennent des herbes cuillies en Albanie et contiennent plus de foin que de thym, et que la plus grosse partie du jambon de Parme est fabriquée dans le Puy-de-Dôme, se paie un voyage en camion réfrigéré scellé jusqu"ne Italie où il est vendu et racheté avec les facture adéquates pour être revendu à Clermont-Ferrand deux fois plus cher que celui qui n’a jamais voyagé et qui se trouve bêtement en tranches fines dans un rayon de supermarché alors que l’autre est tranché devant vous chez Fauchon !


    J’ai voulu savoir d’où venaient les sachets de poissons ou de viandes diverses que j’achète pour mes chats qui ne sont pas végans eux non plus, mais le conditionnement de carton ne mentionnait qu’un code. Evidemment, j’ai tapé ce code sur internet et je suis tombé sur la raison sociale (en anglais) d’une société située en Normandie, mais sans lien de site internet, site par ailleurs introuvable sur un moteur de recherche. S’agit-il d’un importateur ?


    Moi, je ne suis pas Hercule Poirot, justement. Les seuls produits dont je suis sûr sont ceux qui viennent de mon jardin. Et comme je n’élève ni poules, ni cochons, ni vaches ni poissons, je suis bien obligé, comme vous, de m’en remettre au « marché » en sachant que le produit, c’est moi.


    • Clark Kent Clark Kent 17 septembre 2022 15:26

      @Clark Kent

      Sinon, au restaurant, il faut être un professionnel expert pour authentifier un produit.

      L’autre jour, je suis rentré dans un restaurant qui affichait sur son menu : "véritable poulet de Brasse".

      Un gars était déjà attablé et j’ai cru que c’était un client mais en fait, c’était un contrôleur ou un inspecteur de je sais pas quoi. Il a demandé au serveur de lui amener un poulet non cuit et, quand la bête a été devant lui sur un plateau, il lui a enfoncé un doigt dans le croupion, l’a ressorti, l’a senti, l’a goûté et il a dit : "c’est bien un poulet fermier, mais celui-là, il vient de la Sarthe".

      Alors le maître d’hôtel qui était resté sur la réserve jusque là a poussé le serveur et s’est excusé en invoquant l’incompétence du garçon qui, d’après lui, avait amené un poulet destiné à faire du bouillon pour le couscous.

      Il est revenu avec un autre poulet entier prêt à cuire. Même manège du contrôleur, doigt dans le croupion et tout ça, pour conclure : "c’est bien un poulet fermier, mais il vient du Gers, pas de la Bresse", et le maître d’hôtel est reparti en cuisine avec son poulet.

      Alors, le chef est sorti de sa cuisine, est venu vers le contrôleur, lui a tourné le dos, s’est penché en avant et lui a demandé : "vous ne pourriez pas me dire d’où je viens ? Je suis un enfant de la DDASS !"


    • zygzornifle zygzornifle 17 septembre 2022 16:11

      @Clark Kent

      Le code pays
      C’est le principal code à retenir. Ainsi, vous pourrez connaître l’origine des produits que vous achetez directement en magasin. Mais attention, les trois premiers chiffres de l’EAN indiquent dans quel pays l’entreprise est membre du système. Ils n’indiquent pas toujours le pays de production, il peut s’agir du pays où est situé le siège social de l’entreprise ou l’un de ses sièges sociaux. 
       
      Quelques codes pays : 
      • 000 à 019 / 030 à 039 / 060 à 139 : USA 
      • 300 à 379 : France 
      • 400 à 440 : Allemagne 
      • 450 à 459 et 490 à 499 : Japon 
      • 460 à 469 : Russie 
      • 471 : Taïwan 
      • 500 à 509 : Royaume-Uni
      • 540 à 549 : Belgique – Luxembourg 
      • 690 à 695 : Chine 
      • 700 à 709 : Norvège 
      • 730 à 739 : Suède 
      • 754 à 755 : Canada 
      • 800 à 839 : Italie 
      • 840 à 849 : Espagne
      • 870 à 879 : Pays-Bas
      • 885 : Thaïlande 
      • 890 : Inde
      • 893 : Vietnam
      • 930 à 939 : Australie

    • Lynwec 17 septembre 2022 16:29

      @Clark Kent

      Ne répandez pas des histoires de ce genre, malheureux, va y avoir une ruée de « progressistes » dans les écoles de formation en cuisine ET en inspection de la qualité des produits ( ils savent, eux, que la méthode du doigt est dépassée, ils testent à fond, soyez modernes...) ^^


    • hans-de-lunéville 1 17 septembre 2022 18:19

      @zygzornifle
      Il manque pas mal de pays, une anecdote, j’ai pris des poivrons magnifiques dans une cassette de provenance « Espagne » et sur ces poivrons l’étiquette indiquait : provenance Israel.
      Je mange toujours des poivrons mais je n’en vérifie plus la provenance.


    • C'est Nabum C’est Nabum 18 septembre 2022 11:06

      @Clark Kent

      Hercule Poirot a été nommé monsieur traçabilité dans le comité d’expertise en roublardise commerciale.
      Nous ne sommes pas sortis d’affaire


  • zygzornifle zygzornifle 17 septembre 2022 16:09

    Je mange ce que je peux et non ce que je veux et sans état d’âmes .....


    • Clark Kent Clark Kent 18 septembre 2022 09:53

      @zygzornifle

      Pendant la guerre de 70, les Parisiens ont bien mangé des rats...


    • chat maigre chat maigre 18 septembre 2022 10:19

      @Clark Kent

      quand la situation va dégénérer, ils mangeront encore des rats ils ne produisent rien d’autres les parigots, des rats et des poubelles smiley

      c’est d’ailleurs pour ça que rien n’est fait pour limiter la population de rats en constante augmentation, c’est leur plan B depuis toujours smiley


    • C'est Nabum C’est Nabum 18 septembre 2022 11:06

      @zygzornifle

      L’âme n’a rien à voir avec ça
      Heureux les amples d’esprits


    • Clark Kent Clark Kent 18 septembre 2022 11:08

      @chat maigre

      Six millions d’individus à Paris !

      Deux fois plus que le nombre d’habitants.



    • zygzornifle zygzornifle 20 septembre 2022 09:27

      @Clark Kent
      Pendant la guerre de 70, les Parisiens ont bien mangé des rats...

      Il il en reste un paquet ...


    • zygzornifle zygzornifle 20 septembre 2022 09:29

      @chat maigre

      Si on veut manger du dodus, il y a les 1000 députés et sénateurs plus les ministres bien en chair et nourris bio ....


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