jeudi 10 novembre 2011 - par jlhuss

Jouer à se faire peur

« C’est curieux chez ces marins, le besoin de faire des phrases » proclamait Francis Blanche sur le pont de la péniche dans « Les tontons flingueurs » avant l’une des scènes cultes. L’humour de cette réplique d’Audiard pourrait très bien s’appliquer à Eva Joly et aux leaders de EELV qui sont en train de se faire peur avec Flamanville. Nous n’irons pas jusqu’à plaquer une autre des grandes répliques du célèbre dialoguiste, « les cons ça osent tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît ».

Le dossier des énergies et son corollaire nucléaire n’est évidemment pas une mince affaire. La catastrophe japonaise a fait naître dans l’opinion une vague énorme de craintes et d’interrogations. Cette émotion aurait tendance d’ailleurs à devenir plus raisonnable et l’opinion est sans doute moins radicalisée.

La presse a renvoyé l’écho d’une rupture très passagère entre le PS et les représentants des écologistes à cause de l'EPR de Flamanville. Eva Joly ne voulait plus entendre parler de négociations pour les législatives tant que le candidat François Hollande n’annonçait pas clairement l’abandon du projet.

"Si François Hollande dit non pour arrêter le chantier de Flamanville, il n'y aura pas d'accord" …

C’est bien l'endroit d'insérer la fameuse phrase remaniée : « C’est curieux chez ces écolos, le besoin de faire des phrases. » En effet que valait cette menace de pure forme ? Que pèsent véritablement les écolos dans cette élection présidentielle qui se profile ? En vérité pas grand-chose ; dans un élan de militantisme incontrôlable ils ont désigné Eva Joly plutôt que Nicolas Hulot, se privant d’un score de premier tour significatif en mai prochain et ce jeu de gros bras très éphémère ne trompe personne.

En premier lieu François Hollande sait très bien qu’il aura à répondre sur une dénucléarisation trop poussée et trop rapide. Elle couterait très cher. Le « 50% nucléaire », impliquant l'arrêt de la moitié des réacteurs, signifie un surcoût de 60 milliards d'euros par rapport à l'option (70%). Cette somme est calculée à partir des investissements requis pour compenser la décroissance du nuclé­aire. Les énergies renouvelables figurent au premier chef, mais aussi les installations thermiques, car il faut anticiper les situations où il n'y a ni vent, ni soleil, ni pluie. En revanche, le coût de démantèlement des installations nucléaires ne rentre pas dans ces comptes.

Ensuite, le candidat du PS a l'habitude des rapports de force et connaît la musique. Il n'a que peu de crainte en ce qui concerne le report des voix que pourraient totaliser EELV au premier tour de la présidentielle ; il ne peut que se faire sur lui au second pour plus des 3/4, en tous les cas pas au bénéfice de son adversaire de droite ou de façon très marginale. Pourquoi engager des frais politiques inconsidérés pour une mise qui tombera presque automatiquement dans son escarcelle ?

Enfin, le petit mou, comme certains veulent le dépeindre, se paye à très peu de frais un certificat d’autorité. Pas question d’abandonner l’EPR de Flamanville, indique-t-il d’un mouvement de menton qui lui manquait jusqu’à présent. Pour les circonscriptions législatives, aucune urgence non plus à s'amputer de quelques unes parmi les "bonnes". Pourquoi favoriser l'émergence d'un groupe parlementaire étoffé qui pourrait devenir un empêcheur de tourner en rond en cas de victoire ?

Eva Joly, Cécile Duflot et tous les autres n’ont plus maintenant qu’a mangé le chapeau. ils en ont l’habitude. Mais alors pourquoi « cette manie de faire des phrases » ? Au poker le bluff peut parfois payer, mais il faut de temps en temps avoir quelques cartes quand même. Les choix idéologiques intransigeants et univoques des Verts les rendent complètement "captifs".

Dans une note assez récente sur l'abandon du nucléaire tel que précisé par Martine Aubry lors de la primaire "citoyenne", benjamin concluait ainsi :

"Il n'est question ni de droite, ni de gauche. Tout dirigeant qui s'affranchit de ces précautions oratoires n'est qu'un démagogue. Si le peuple français veut s'affranchir du nucléaire, il en a le droit souverain. Mais sans qu'on l'enfume, qu'on lui fasse miroiter un avenir radieux pour orienter sa décision."

Le "petit jeu" aura d'ailleurs duré très peu de temps, quelques heures : Jean-Vincent Placé, le n°2 d'Europe Ecologie - Les Verts a affirmé hier que François Hollande et Martine Aubry avaient appelé Cécile Duflot dans la journée avec l'objectif de "trouver des solutions" quant aux négociations PS-EELV qui doivent reprendre jeudi : une circonscription sûre pour Duflot et le tour sera joué ! Quelle détermination ! Pourquoi cette manie de faire des phrases ? Pour une circonscription ...

Les questions touchant à l'environnement sont importantes et sérieuses, malheureusement celles et ceux qui les portent en étendard, le sont beaucoup moins ... Sérieux !

Le Blog



18 réactions


  • Gabriel Gabriel 10 novembre 2011 10:14

    La sainte énergie nucléaire petite fée de notre confort, faut voir et demander aux morts, aux mourants et aux irradiés de Tchernobyl et Fukushima. Le pacifique armement nucléaire qui nous permet l’indépendance et la paix, faut voir avec certains pays (Iran pour ne citer que celui-ci) ou lorsque des terroristes se serviront dans les pays de l’ex union soviétique et feront péter une bombinette au cœur d’une cité…  Je sais, je vais me faire traiter d’écolo arriéré qui veux retourner à la bougie ou de bobo qui veut mettre en danger l’indépendance nationale bla bla bla, peu importe, j’assume et j’affirme que cette énergie est un danger pour l’humanité et qu’il faut s’en débarrasser au plus vite en espérant que d’autres catastrophes ne surviendront pas durant ce délai.


  • Croa Croa 10 novembre 2011 10:32

    EELV ne sont pas des « écologistes » crédibles, c’est évident ! Pour autant cela ne signifie nullement que l’écologie n’existe pas, qu’elle ne soit pas dans les têtes d’une partie importante des gens, fussent-ils invisibles à cause de ce manque de représentativité des Verts et de l’invisibilité médiatiques des autres mouvements écologistes.

    Le PS serait avisé de répondre à leurs préoccupations mais qu’il fasse une impasse là-dessus aura au moins l’avantage de la franchise !


    • Gabriel Gabriel 10 novembre 2011 10:38

      Croa, votre intervention est pleine de lucidité. Il est exact que ceux qui représentent l’écologie aujourd’hui ne sont guère crédibles tout comme les socialistes avec le social. Mais, vous avez raison, il faut voter pour des idées et non pour des personnes et l’écologie est une  idée nécessaire, vitale.


  • Robert GIL ROBERT GIL 10 novembre 2011 10:33

    La catastrophe nucléaire du Japon démontre une fois de plus la prétention
    technologique de l’industrie nucléaire qui ne parvient pas plus à maitriser les
    risques d’accidents et à en traiter les conséquences, qu’à trouver des solutions
    durables pour les déchets qu’elle produit. Nous sommes tous les otages de cette
    industrie dont la dangerosité est exacerbée par la course au profit qui régit le
    système capitaliste.....
    http://2ccr.unblog.fr/2011/07/09/on-nous-aurait-menti/


    • JMBerniolles 10 novembre 2011 23:16

      Quel  courage de publier un tel article sur ce site.

      Mais le score n’est pas si mauvais ! Vous n’éviterez pas les insultes ou des commentaires comme celui-là qui efface carrément la vraie catastrophe qui a eu lieu au Japon, celle terrible liée au Tsunami  qui a provoqué plus de 20.000 morts, on ne sait même pas exactement puisqu’il y a encore un nombre très important de disparus (ce qui est terrible pour les japonais qui ont le culte des morts et des ancêtres). Plus quelques dizaines de morts à cause de deux typhons qui se multiplient à cause du dérèglement climatique et de la chaleur et du manque de climatisation par les économies d’énergie.

      Jusqu’à présent Fukushima Daiichi n’a fait aucun mort par irradiation. Il y a déjà eu un retour partiel de populations dans des zones au-delà des 20 kms. D’importantes opérations de décontamination sont en court qui permettront un retour plus important des gens déplacés (un sondage dit que plus de 50% d’entre elles veulent revenir)

      Même dans les zones de forte contamination en Cs 137 et 134, la radioactivité maximum au sol, qui a d’ailleurs décrue parce que le Césium s’est un peu enfoncé dans la terre (dans une couche de 5 cms), et qui était de 6 millions de Becquerels par mètre carré, donnant une dose biologique d’irradiation externe d’environ  6 microsieverts par heure à 1 mètre du sol (c’est la norme considérée) pour une glande comme la Thyroïde. Soit une dose intégrée annuelle qui reste assez nettement en dessous de 100 millisieverts [c’est la limite des faibles doses]

      L’expérience de Tchernobyl montre que le risque de Leucémie (temps de latence d’environ 10 ans pour Tchernobyl pour des liquidateurs et pour des doses d’irradiation au moins égale au Gray) est quasiment nul pour les populations. Le risque réel se situe au niveau des jeunes (dans la tranche 0-20 ans) et concerne les problèmes thyroïdiens, dont des cancers. Le temps de latence est ici de l’ordre de 5 ans pour les très jeunes < 10 ans et plus tard pour les plus âgés pour lesquels le risque dure longtemps. A Tchernobyl près de 7000 cas de cancers de la thyroïde ont été répertoriés et guéris pour la grande majorité d’entre eux.

      En ce qui concerne Fukushima Daiichi, tout montre que les enfants sont suivis médicalement avec la plus grande attention. Des facteurs comme la prise d’iode en pastille, ainsi qu’une alimentation régulièrement assez iodée diminuent fortement les probabilités de cancers.

      Sans négliger les travaux du Pr Youri Bandajevski notamment, qui n’ont cependant pas une base scientifique indiscutable et font état d’effets cardiovasculaires et cancérigènes de très faibles doses de Cs 137 (qui reste peu dans le corps après ingestion), les conséquences les plus probables sont relatives à ce type de cancer pour les jeunes.

      Mais peut-être qu’une des conséquences sanitaires les plus graves réside dans l’aspect psychologique et dans des atteintes sérieuses au psychisme résultant du caractère des menaces qui pèsent.

      Sur ce type de commentaire, je ferai aussi remarquer qu’en France, pays très nucléarisé, les accidents d’origine nucléaire n’ont pas dépassé le niveau 2 INES jusqu’à présent.

      Je voudrais rappeler aussi que l’arrêt de l’EPR et l’abandon d’ASTRID pour le futur, signifierait tout simplement la mort industrielle de la France.

       

      JMB


  • Ruut Ruut 10 novembre 2011 10:33

    Le cout du démantèlement des centrales n’est pas prix en compte dans le cout du nucléaire, c’est tellement plus facile de maquiller les chiffres avec des données pipées.

    Le nucléaire est une erreur et doit cesser au plus vite.
    Ce que je crains c’est que les centrales nucléaires ne sont pas démantelables, c’est pour ça que leur vie est prolongée au détriment de toute logique sécuritaire.


    • Francis, agnotologue JL1 10 novembre 2011 11:37

      et à part ça, kerjean, une idée sur le sujet ?


    • Francis, agnotologue JL1 10 novembre 2011 13:23

      juste dans le post qui suit.

       smiley


  • Francis, agnotologue JL1 10 novembre 2011 11:47

    De fait, « nos » grosses têtes, j’ai nommé les ingénieurs des mines entre autres, ont vendu leur âme au diable en acceptant la privatisation. En effet, comment préserver leur « bébé » dans un monde libéral, sinon en le confiant au secteur privé, puisque l’Etat y est discrédité ?

    Et ce monde libéral, après avoir systématiquement critiqué les initiatives de l’Etat dirigiste, s’emparent aujourd’hui de ses réalisations pour faire du profit, et en perpétuant un discours dont ils se moquent bien, à savoir que ce serait pour garantir notre indépendance énergétique. Si ça se trouve, les actionnaires sont en majorité des étrangers ?

    On ne doit pas laisser le nucléaire aux mains du privé : beaucoup trop dangereux.
    Mais le nucléaire, même dans le giron de l’Etat doit être démantelé au plus vite parce que même là il est encore dangereux ; hélas, on ne sait pas démanteler : tout au plus répandre les déchets, les diluer dans l’environnement !

    Connaissez vous la plus ancienne centrale nucléaire de France... ??? il s’agit de Brennilis, en plein centre Finistère. Une centrale expérimentale construite en 1962, mise en service en 1967, arrêtée en 1985...et depuis le démantélement n’en finit pas de trainer ... déjà 482 millions d’euros dépensés, et la centrale est toujours debout .. à peine le combustible retiré ... mais il reste 40 tonnes de construction contaminée, non encore détruite, car EDF NE SAIT PAS DEMANTELER UNE CENTRALE NUCLEAIRE.. !!! ... pire, aucun site ne peut « accueillir » une telle masse déchets ..


    • Francis, agnotologue JL1 10 novembre 2011 15:39

      Allons kerjean,

      votre lobbyisme nucléocrate vous aveugle, j’ai écrit : « le nucléaire, même dans le giron de l’Etat doit être démantelé au plus vite parce que même là il est encore dangereux »

      ps. J’ai souligné pour vous.

      Bon, ceci étant, les circonstances de l’accident de Tchernobyl sont pour le moins assez louches et n’ont jamais été clairement établies.


    • Francis, agnotologue JL1 10 novembre 2011 18:10

      Cassino,

      vous servez là une VO qui n’explique rien.

      Bof !


    • Francis, agnotologue JL1 10 novembre 2011 18:17

      @ kerjean,

      A la bonne heure ! Mes excuses, tout le monde peut se tromper.


  • colza 10 novembre 2011 14:00

    Après Proglio, voici venir jlhuss pour nous démontrer que le nucléaire c’est bien et que les écologistes sont des cons.

    On se demande qui ose tout...

  • interlibre 10 novembre 2011 14:58

    C’est dingue ça...
    Si un jour on a un Fukushima bis chez nous on trouvera encore des pro-nucléaire.
    Le bourrage de crane et la propagande umps ça marche bien...
    Je préfère payer mon énergie plus cher ou en consommer moins si ça m’assure que je crèverai pas irradié avec ma famille mais bon je suis qu’un extrémiste écolo alors...

    Non l’arrêt du nucléaire ne nous fera pas revenir à la bougie.
    Non le nucléaire est loin d’être rentable.
    Non le nucléaire n’est ni sécurisé, ni « propre » et ne nous rend pas indépendant.
    Non les emplois du nucléaire ne seront pas détruits, il suffit de voir le temps qu’on met pour démanteler une centrale... Sans compter la création d’emplois dans les énergies alternatives qui le remplaceront, la recherche...

    Bref tout les arguments des pro-nucléaire sont des mensonges ou de la désinformation, le pire argument étant : « c’est l’énergie la moins cher » sans tenir compte des coûts des démantèlement ni du stockage des déchets pour des centaines de milliers d’années.

  • olivier cabanel olivier cabanel 10 novembre 2011 20:15

    @ l’auteur,

    votre tentative de décrédibiliser les écolo tombe un peu à plat, et vous semblez oublier qu’il suffit d’un grain de sable pour bloquer une belle machine, et que si le PS ne renonce pas au nucléaire, il risque de perdre tout bêtement son élection en 2012.
    il ne s’agit pas de chantage, seulement de se souvenir qu’une grande majorité de français veulent sortir du nucléaire, et que l’epr est un gachis économique, et une erreur stratégique.

  • joletaxi 10 novembre 2011 20:45

    Cabanel qui rêve, shooté à l’argile.


    Les écolos sur le plan politique c’est peau de zob.
    Descendez de votre nuage, prof Philipulus.

  • SergeL SergeL 10 novembre 2011 20:59

    Ensuite, le candidat du PS a l’habitude des rapports de force et connaît la musique.

    1995

    2002

    2007

    2012 !!!! Les mêmes causes les mêmes effets (Paroles et musique)

     


  • dolecologie 11 novembre 2011 01:05

    Tout ramener à des histoires de fric, quelle insulte, quelle petitesse de vue (voir les post sur les victimes du nucléaire) : si ça déconne on versera des indemnités, toujours du fric, il n’y que ceux qui croient aux discours sur la sécurité absolue qui peuvent défendre le point de vue nucléaire.
    Un avion aussi est conçu avec le max de sécurité possible, mais quand ça tombe, ça tombe (mais il n’y pas besoin d’évacuer une zone de 1000 km2 pour des millénaires.
    Bien au delà de Flamanville, c’est l’amorce d’un changement de société que demande EELV : cesser volontairement cette course au gaspillage énergétique, pas seulement le nucléaire, et trouver des solutions de rechange avant que l’épuisement très proche des énergies fossiles ne l’oblige de façon très brutale, le pic de Hubert est passé, même dans le golfe la production décroît, et l’uranium sera épuisé dans moins de 50 ans.
    Pire encore dans l’aveuglement des pronuques (néologisme de circonstance), des articles ces jours ci affirment que rester dans le nucléaire coutera plus cher qu’en sortir !
    Nous n’aurons plus qu’à léguer à nos enfants le livre de VS (alias BV) « J’irai cracher sur vos tombes ».


Réagir