vendredi 1er juin 2012 - par Caleb Irri

Crise de l’Europe : et si la sédition, c’était la solution ?

Sédition : ce mot n’est plus guère utilisé aujourd’hui, car à ce qu’il paraît sa définition a évolué avec le temps, comme nous le fait savoir le dictionnaire en ligne « Larousse ». En effet, le dictionnaire fait la distinction entre « autrefois » et « aujourd’hui », en validant un glissement sémantique assez révélateur :

« -Autrefois, soulèvement concerté et préparé contre l’autorité établie. (Il s’agissait d’un crime contre la sûreté de l’État.)
– Aujourd’hui, attentat, complot, mouvement insurrectionnel. »

De la même manière qu’on considérait pendant la guerre les résistants comme des terroristes, le fait de se soulever contre l’ordre établi est désormais considéré (par cet ordre établi) comme un acte terroriste.

Mais que faire lorsque l’autorité établie l’est injustement ?

C’est à cette question que doivent aujourd’hui répondre les citoyens européens. Car avec la crise la véritable nature de cette autorité a été révélée : les marchés financiers sont les véritables dirigeants de l’Europe. Et pour lutter contre ce pouvoir illégitime puisque non-élu les peuples européens n’ont d’autre choix que de se rassembler en « un » peuple européen, d’organiser et de préparer, de manière concertée, un soulèvement capable de renverser une autorité qui nous oppresse ; autrement dit de recourir à la sédition.

Car en réalité c’est bien cela que craignent les marchés, et qui explique le « coup de poker » qu’ils tentent en ce moment : la contestation de leur pouvoir s’organise et les peuples d’Europe sont aujourd’hui en mesure de reprendre la main sur le pouvoir financier, à travers l’émergence d’une nouvelle force politique, qu’on pourrait regrouper sous le terme « indignés ». N’étant pas en mesure d’expulser un Etat de l’Europe sans son consentement et ne pouvant contraindre le peuple à payer que par la menace de cette expulsion, les marchés espèrent donc faire élire les partis soumis à l’autorité qu’ils détiennent encore et empêcher par tous les moyens l’arrivée au pouvoir d’un parti qui participerait de cette sédition.

Pour faire perdre leur pari aux marchés, il suffirait donc que les peuples prennent simplement conscience du fait que la Grèce ne sortira pas de l’Europe, pour la simple et bonne raison que personne n’y a intérêt : ni les marchés (on vient de le voir avec l’Espagne) qui d’un point de vue capitaliste désirent une Europe à gouvernance économique unique débarrassée de la démocratie, ni les peuples qui par l’éclatement de l’Europe se verraient perdre le peu de pouvoir qu’ils ne détiennent que collectivement.

Car si la Grèce sortait demain, c’est après-demain l’Espagne qui suivrait, et ainsi de suite. Fin de l’Europe. Fin de l’histoire.
Si maintenant la Grèce ne sort pas mais que les dirigeants font payer le peuple, alors tout les autres paieront aussi… et l’on se débrouillera bien ensuite pour faire tomber la liberté et la démocratie, si dangereuses pour ceux qui veulent imposer leurs volontés de domination.
Mais si la Grèce ne sort ni ne paye, alors aucun autre pays ne sortira ni ne paiera.

Que se passera-t-il alors ?
Cela, nul ne le sait et personne ne semble pour le moment vouloir réfléchir à cette hypothèse. Elle est pourtant la plus sensée. Faire payer les riches, supprimer les privilèges, et surtout organiser la suite. Car l’ennemi de la Grèce est le même que celui de l’Espagne ou de la France, et ce n’est pas en renversant un pion à l’ennemi qu’il reculera ses autres pièces. Ce qu’il faut c’est rendre, sous l’impulsion des peuples, au pouvoir politique l’ascendant sur le pouvoir financier .

C’est bien cette « troisième voie » qui se trouve être l’enjeu principal de ce pari. En faisant comme si elle n’existait pas, les marchés prouvent à quel point elle bluffe dans la bataille qui oppose les peuples à la finance, et qu’il nous suffit de ne pas nous y laisser prendre pour qu’ils se retirent.

Car qui donc a réfléchi à cette question autrement qu’en disant que si la Grèce ne paye pas et ne sort pas, c’est le chaos ?
Et qui fait, et comment sont faits les calculs qui disent que la sortie de la Grèce couterait 500 à 1 000 milliards d’euros ? Quelle est la part qui reviendrait au privé et au public, aux riches banquiers et aux pauvres du peuple ? L’audit citoyen de la dette serait déjà un bon point de départ pour se faire une idée. Mais c’est dans tous les Etats d’Europe qu’il faudrait regarder de plus près.

Car en définitive il semblerait bien que dans ce cas de figure, rien ni personne ne pourrait s’opposer à la volonté de peuples unis et conscients de leurs droits.

On nous dit que si on taxe trop les riches ils vont partir. Mais ne l’ont-ils pas déjà fait ? Les plus grosses fortunes, les plus grosses entreprises ne paient-elles pas déjà leurs impôts (quand elles en payent) ailleurs dans les paradis fiscaux ? Quand on pense qu’environ 600 milliards manquent déjà à la France, qu’en est-il ailleurs ?

On nous dit que les licenciements et les délocalisations vont faire s’effondrer toute l’Europe. Mais n’est-elle pas déjà en train de se désagréger ? Et les grandes entreprises ne délocalisent-elles pas déjà depuis des décennies ? Faudrait-il devenir moins exigeants que les Chinois pour espérer voir nos entreprises revenir s’installer chez nous ?

Peut-être d’un point de vue capitaliste vaut-il mieux accepter la puissance des forces de la finance et se résigner à voir nos salaires et nos droits diminuer à concurrence de ceux des pays les plus pauvres et les plus autoritaires pour redevenir compétitifs, mais est-cela que nous voulons vraiment ?

Peut-être pourrions-nous plutôt tenter autre chose, cette « troisième voie » qui ouvrirait d’autres perspectives que celles qu’on veut nous imposer !

1- rassembler les forces contestataires pour qu’elles fassent front commun.
2- refuser de payer et de sortir de l’Europe, par les urnes si possible, tout en montrant notre attachement à l’Europe.
3- organiser un audit de la dette par pays d’abord, dans toute l’Europe ensuite.
4- faire payer qui doit, et faire tomber les paradis fiscaux.
5- interdire la spéculation sur les matières premières.
6- mettre en place des Assemblées Constituantes permettant aux peuples de se doter de nouvelles institutions.
7- réfléchir ensemble à de nouvelles règles régissant les échanges et favorisant le partage tout en protégeant notre planète.
8- faire valider tout cela par des référendums.
9- mettre dehors à la fois les financiers et leurs complices dans les gouvernements.
10- instaurer pour l’Europe une nouvelle démocratie.

Et si la sédition, c’était la solution ?

Caleb Irri
http://calebirri.unblog.fr



6 réactions


  • Robert GIL ROBERT GIL 1er juin 2012 10:44

    La contradiction fondamentale de l’euro et de l’Union européenne est une monnaie unique sans État, un espace de «  concurrence libre et non faussée  » sans politique économique commune, c’est-à-dire des constructions largement artificielles qui n’aboutissent qu’à consacrer la loi du plus fort, tout en développant des déséquilibres qui à terme menacent la stabilité de l’ensemble. Or, pour essayer maintenant de sortir de ce piège, les capitalistes et les gouvernements de la zone euro et de l’UE ne proposent qu’une fuite en avant, aggravant leurs caractéristiques antisociales et antidémocratiques..........
    http://2ccr.unblog.fr/2012/01/04/sortir-de-l%E2%80%99euro-ou-du-capitalisme%E2%80%89/


  • Jean-Pierre Llabrés Jean-Pierre Llabrés 1er juin 2012 11:02

    À l’auteur :
    « Quand on pense qu’environ 600 milliards manquent déjà à la France, qu’en est-il ailleurs ? »
    « Ces sommes, qui auraient dues être taxées en France et investies sur le territoire, représentent en gros selon l’auteur quelques 600 milliards d’euros, ou de 30 à 40 milliards d’euros par an. »

    Faut-il comprendre 600/30 = 20 ans, 600/40 = 15 ans ?
    Dans l’affirmative, pourquoi choisir des périodes de 15, 20 ans ? Pourquoi pas plus ?


  • Jonathan Moadab Jonathan Moadab 1er juin 2012 11:35

    Cher Caleb,

    Votre usage des mots démontre certaines limites conceptuelles de votre raisonnement. 

    Vous appelez « Europe », l« Union Européenne. 

    En plus d’être insupportable, cet amalgame fait beaucoup de tort à ceux qui cherchent justement à faire la distinction entre une aire géographique, et des institutions tyranniques. 

    La France doit sortir de l’Union Européenne, en usant de l’article 50. Il n’y a pas lieu de faire une quelconque réponse concertée... Imaginez si le 13 juillet 1789, les français avaient dû se mettre d’accord avec leurs voisins avant de prendre la Bastille ! Un Roi règnerait encore. 

    Il n’y a pas non plus de besoin de montrer notre »attachement à l’Europe". La place de la France se situe à l’échelle de planète entière, et non de ce petit espace géographique dans lequel vous semblez vouloir rester. 

    De l’audace, de l’audace, encore de l’audace disait Danton ! 

    Au plaisir de vous lire,


  • bert bert 1er juin 2012 20:25

    je suis d’accord 

    mais je crois pas trop au « peuple »......
    le peuple aime johnny halliday

Réagir