mardi 18 octobre 2011 - par Pingouin094

Crise de la dette en Europe : Crise du modèle libéral de l’Union Européenne ?

Comment les politiques de rigueur imposées par l'UE et le FMI mènent la Grèce et mèneront le reste de l'Europe à la ruine

La crise de la dette hante l’Union Européenne et la Zone Euro depuis plus d’un an. Et elle ne semble pas prête de se terminer. Pourtant, l’Union Européenne n’a pas ménagée ses efforts avec deux plans d’aides à la Grèce, la création du Fonds Européen de Stabilité Financière et même le rachat d’obligations par la BCE en violation des traités européens. Mais rien n’y fait. La Grèce est toujours au bord du gouffre. De nombreux analystes doutent de la capacité de la Grèce à pouvoir un jour payer ses dettes en l’état, d’autres pays sont menacés et pas des moindres comme l’Italie ou l’Espagne. La France elle-même s’inquiète pour sa note ‘AAA’ auprès des agences de notations.

Pour toutes réponses, les gouvernements n’ont qu’un dogme libéral : toujours moins d’Etat, toujours plus d’austérité et de rigueur. Ainsi, les états de l’UE se sont volontairement dessaisis d’un certain nombre de pouvoirs régaliens indispensables pour la gestion économique d’un pays. Cela se traduit principalement par l’indépendance et les règles qui entourent la Banque Centrale Européenne et la Zone Euro :

  • La BCE ne prête pas aux Etats, mais seulement aux banques privées !
  • Seule la BCE a le pouvoir de dévaluer l’Euro,
  • La BCE et les banques privées ont un pouvoir de création monétaire, mais pas les Etats.

Ainsi, la Grèce se retrouve tout à la fois incapable de :

  • dévaluer sa monnaie,
  • Emprunter directement à la Banque Centrale à un taux acceptable,
  • Créer de la monnaie,
  • Annuler unilatéralement sa dette

En restant dans le cadre d’une politique capitaliste ultralibérale, il ne reste à la Grèce qu’une solution : l’austérité. Et le plan de rigueur a été extrêmement sévère : réduction du déficit de l’Etat de 6% du PIB, réduction moyenne des salaires de 9%, des retraites de 10%, réduction des importations de 29%, hausse de la TVA de 2%, augmentation de l’âge de départ à la retraite de 5 ans, pour ne prendre que ces exemples.

Pourtant, cela n’a pas fonctionné. Les marchés financiers continuent d’imposer des taux d’intérêts à la Grèce extrêmement élevés, 14.8% quand l’Allemagne emprunte à 2.9%. Et surtout, le montant de la dette n’a fait qu’augmenter : il était de 125% du PIB en 2009, il est de 158 % du PIB après un an d’austérité, soit 350 milliards d’Euros !

La Grèce n’a donc aucune chance de pouvoir payer un jour sa dette en suivant cette voie. Les analystes estiment qu’il faudrait à la Grèce un excédent budgétaire de 6% du PIB par an pour y parvenir. Un tel niveau d’excédent n’a historiquement jamais été obtenu par aucun pays, autrement que par la rente pétrolière. Et la Grèce part de très bas, puisqu’elle avait un déficit de 14% du PIB avant l’austérité. Après l’ensemble des mesures extrêmement sévère énoncées ci-dessus, elle reste toujours à 6% du PIB de déficit. Réduire encore le déficit de 12% du PIB est donc impossible.

Et ceci d’autant plus que l’ensemble de la zone euro est dans une croissance molle, les mesures d’austérités enfoncent la Grèce dans la récession (-4% en 2010, -2.5% en 2011) tandis que le chômage explose a 12% et atteindra vraisemblablement 15% en 2012

On le voit avec la Grèce, les mesures d’austérités mènent à l’impasse. Comme elles ont menés à l’impasse les pays d’Amérique Latine dans les années 70-80, comme elles mèneront la France et le reste de l’UE si elles sont là encore appliquées.

De plus, si la Grèce est réellement étranglée par sa dette, tel n’est pas le cas de la France. Les intérêts annuels que doit payer la Grèce sont d’un niveau tel qu’ils ne laissent plus aucune marge de manœuvre. En France, nous n’en sommes pas encore là. Mais la crainte d’un sort « à la grecque » sert d’épouvantail pour faire passer dans l’opinion des réformes de droite qui susciteraient une levée de bouclier autrement. La réforme des retraites étaient déjà justifiée par la nécessité de garder la confiance des agences de notations. Combien suivront ?

Pour sortir de cette crise, il faut d’autres solutions. Il faut que les Etats cessent d’avoir pour unique baromètre la « confiance des marchés » et pour unique horizon le « triple A » des agences de notations.

D’autres solutions sont possibles. En 2001, l’Argentine a annulé unilatéralement sa dette, a rompu avec les logiques libérales de privatisations. Et cela n’a pas été la « fin du monde ». Deux ans plus tard, le pays négociait un accord avec le FMI et retournait sur les marchés, sa santé financière retrouvée.

D’autres solutions existent. Le Front de Gauche en propose, et je les détaillerais dans un prochain billet.

Cet article est d'autre a été originellement publié sur mon blog : pensées politiques & communistes.



12 réactions


  • Robert GIL ROBERT GIL 18 octobre 2011 08:33

    voici simplement expliqué le probleme de la dette, voir ce PPS :

    http://2ccr.unblog.fr/2011/09/18/pps-comprendre-la-dette/


  • Alois Frankenberger Alois Frankenberger 18 octobre 2011 11:51

    On devrait OBLIGER la BCE à fournir à chaque pays de l’Eurozône l’équivalent du montant de la TVA perçue et ce, chaque année.

    Vu la masse de l’Europe, les pays non européens seraient obligés de subir le contre coup de cette pratique s’ils veulent conserver des investissements chez nous. Dans le cas contraire, ils iront placer leurs fonds souverains ou de pensions sous d’autres cieux et ne s’imisceront plus dans notre économie.

    Bref, on y gagne à tous les coups.

    Mesdames et messieurs les politiciens, faites votre boulot à notre service !


  • Francis, agnotologue JL1 18 octobre 2011 15:35

    Kazan,

    Effectivement, vous le dites : « les politiques de rigueur imposées par l’UE et le FMI mènent la Grèce et mèneront le reste de l’Europe à la ruine ».

    De deux choses l’une : ceux qui mènent ces politiques savent très bien où ils vont , et ce sont nos ennemis ; ou bien ils ne savent pas ce qu’ils font : et ce sont nos ennemis.

    Il n’y a qu’une seule façon d’agir : nous désolidariser d’eux. Et pour cela , une seule solution légale : refuser nos bulletins de vote à l’UMPS. Nous verrons bien qui, de la vraie gauche ou de l’extrême droite l’emportera !


  • victor latent 18 octobre 2011 15:43

    Vous avez raison sur le constat :

    - La BCE ne prête pas aux Etats, mais seulement aux banques privées !
    - Seule la BCE a le pouvoir de dévaluer l’Euro,
    - La BCE et les banques privées ont un pouvoir de création monétaire, mais pas les Etats.

    On peut ajouter :
    - les Etats doivent renflouer, recapitaliser les banques privées...

    On va recommencer le raisonnement :

    -Seules les banques privées ont le droit de créer de l’argent.
    -Les Etats doivent emprunter à taux ruineux auprés des banques privées pour fonctionner. C’est l’article 123 du TFUE, merci l’UE.
    -Malgrés leur pouvoir de création monétaire, les banques privées réalisent l’exploit de manquer d’argent.
    -Quand celles-ci manquent d’argent, les Etats qui n’ont pas le droit de création monétaire, doivent rouflouer, recapitaliser les banques privées qui manquent d’argent en ayant le pourvoir de créer de l’argent.....

    J’ai bien compris ?

    Cette situation ubuesque est le résultat d’un malheureux article de constitution cité plus haut.

    Heureusement que M. Mélenchon est là pour proposer sa solution :
    Désobéir aux traités (TUE et TFUE) afin de faire pression sur le conseil européen.

    Il était pour Maastricht, contre le référendum de 2005 et maintenant qu’il est eurodéputé, il propose de désobeir aux traités européens ! M. Mélenchon ressemble à une histoire de création monétaire.

    Sur ce blog, on peut aussi lire une phrase extraordinaire, belle comme une monnaie unique :
    « Une stratégie alternative : sortir du traité de Lisbonne en restant dans l’Union européenne. »

    La solution la plus simple est de commencer par sortir de l’UE et la zone euro en utilisant l’article 50 du TUE.


    • Pingouin094 Kazan 24 octobre 2011 20:36

      Sortir du traîté de Lisbonne sans sortir de l’UE est possible. Pourquoi j’en parle ?


      Parceque l’UE a été construite sur un mensonge : on nous a vendu qu’elle devait favoriser la paix et l’amitié entre les peuples, alors qu’elle a été réalisée pour favoriser leur asservissement face aux puissances financières.

      Le problème, c’est que les gens y ont cru à ce mensonge de l’Europe de paix. C’est pourquoi Mélenchon avait voté « Oui » à Maastricht, même s’il le regrette aujourd’hui (Lire « Qu’il s’en aille tous ! ») et chacun peut faire des erreurs.

      Et les gens y croient encore à une Europe de paix et « qui protège ». Et quand une masse considérable croit en une idée, ça devient une force.

      Devons nous dire « il faut renoncer à l’Europe qui protège et revenir aux nationalismes ? » Ou devons nous dire « vous voulez une Europe de paix et protectrice : virons les technocrates de Bruxelles et construisons l’Europe des peuples qu’on vous promet depuis tant d’année ».

      C’est ça, ce que ça veut dire, rompre avec le traité de Lisbonne sans sortir de l’UE.

      Par ailleurs, les anglais désobéissent régulièrement aux traités européens. Ca s’appelle « l’opt out » et le « consensus de Lisbonne ». C’est dans les textes, ça peut s’appliquer aussi à la France, avec un effet boule de neig,e peut on espérer.

  • Lorelei Lorelei 18 octobre 2011 23:23

    Le probleme est que dans le fond on a des hommes aux pouvoirs qui n’ont aucun honneur et pense que l’homme et la femme sont des marchandises comme une autre


  • Eddie 19 octobre 2011 07:43

    Mon résumé de la dette des Etats européens :
    L’oligarchie financière mondiale, possédant de l’argent et tous les médias qui comptent, a placé Pompidou, un des leur, PDG de Rothschild France, comme président en France. Il a pu ainsi très facilement faire voter par les députés carriéristes sa loi de 1973. Cette loi a été reprise dans le traité de Maastricht, puis actuellement dans le traité de Lisbonne, toujours encore avec la complicité totale des politiciens archi corrompus et carriéristes.
    Donc les peuples européens n’ont rien à voir avec leurs dettes, ce n’est absolument pas de leur faute. Ce sont des dettes gigantesque, impossibles à rembourser, fabriquées de toute pièce par l’oligarchie financière mondiale via les politiciens qui leur sont complètement inféodés. Le but ultime, qui se dessine tangiblement, est l’achat par l’oligarchie financière mondiale de tout le patrimoine des pays, via les privatisations faites par nos dirigeants inféodés, serviles, obéissants, corrompus...Bien évidemment la gauche et la droite sont 100% complices (hors des caméras). Et voter ne sert strictement à rien ! Tous les candidats appartiennent à l’oligarchie. L’unique salut résiderait dans des révolutions populaires abouties.


    • Pingouin094 Kazan 24 octobre 2011 20:39

      Voter, ça sert. C’est par des bulletins de vote que les boliviens ont renversé l’oligarchie et mis en place le premier président indien d’amérique latine. C’est par des bulletins de votes que le Front Populaire a mis en place d’ambitieuses réformes dont les congés payés.


      Mais oui, ni dans le cas de Moralès, ni dans le cas du Front Populaire, les bulletins de vote ont suffit. Il y a fallut, avant ou après, des fortes mobilisations sociales.

      Si l’année 2012 est une année de révolte, si les mouvements des indignés prennent place en Europe et en France, alors voter en mai 2012 pour des partis de la gauche anticapitaliste peut être le débouché et la concrétisation de tels mouvements.
      C’est dans ce cadre seulement que le vote front de gauche aura un véritable sens de lutte et de transformation sociale.

  • chazeau chazeau 22 octobre 2011 12:11

    Bonjour,
    Entièrement en accord avec l’article, dénoncé par quelques politiciens et économistes déjà depuis pas mal de temps. Croire que le Partis de Gauche serait la solution est à mon avis un LEURRE. La seule volonté des politiciens que nous écoutons aujourd’hui dans les médias est de prendre le pouvoir, ils font tous partis du même milieu. Les propos de Mélenchon, pour ne pas le nommer, ne font que profiter de la colère du peuple et cache un sournois désir de pouvoir. En ce sens la, on pourrait le comparer à JM Lepen. Ne nous laissons pas abuser par tous ces politiciens et descendons dans la rue pour manifester notre colère pour que change se système Politico-Financier qui mets à mal les peuples.


    • Pingouin094 Kazan 24 octobre 2011 20:43

      Pour changer le système, il faudra bien à un moment un vote et un gouvernement. Comme ça c’est passé en Bolivie, comme c’est un train de se passer en Tunisie. Il y’a d’abord une forte séquence de lutte sociale dans la rue, mais ensuite, ça se termine dans un bureau de vote.


      Ou alors, on rejoue la prise du palais d’hivers par l’armée rouge, mais je ne crois pas que ça ait laissé un bon souvenir dans l’histoire, tout militant du parti communiste que je soit.

      Et aujourd’hui, qui sont les forces politiques qui proposent de mener ce changement ? Le Parti Communiste et le Front de Gauche. Alors oui, Mélenchon est un ancien socialiste. C’est aussi un ancien troskyste. Mais c’est aussi lui qui le premier se réclamment des révolutions bolivariennes « qu’ils s’en aillent tous » et « dégage ! » ce sont des mots que le Front de Gauche reprend.

  • kiouty 24 octobre 2011 08:54

    Deux ans plus tard, le pays négociait un accord avec le FMI et retournait sur les marchés, sa santé financière retrouvée.

    Ca c’était peut-être pas l’idée la plus géniale, en même temps...


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